À la mer - Paul Margueritte - E-Book

À la mer E-Book

Paul Margueritte

0,0
3,99 €

-100%
Sammeln Sie Punkte in unserem Gutscheinprogramm und kaufen Sie E-Books und Hörbücher mit bis zu 100% Rabatt.
Mehr erfahren.
Beschreibung

RÉSUMÉ : "À la mer" de Paul Margueritte est une oeuvre littéraire qui explore les profondeurs de l'âme humaine face à l'immensité de la mer. En se focalisant sur les interactions humaines et les réflexions intérieures, Margueritte nous plonge dans un récit où la mer devient un miroir des émotions et des pensées des personnages. Le livre nous invite à suivre un groupe d'individus qui, chacun à sa manière, cherche à se reconnecter avec soi-même et à trouver un sens à leur existence. Les vagues, le sable et l'horizon sans fin servent de toile de fond à des histoires personnelles de quête, de rédemption et de découverte. À travers une écriture poétique et introspective, Margueritte réussit à capturer la beauté et la complexité de l'âme humaine dans un cadre naturel à la fois apaisant et impitoyable. "À la mer" est une invitation à la réflexion sur notre place dans le monde et notre relation avec la nature, un voyage littéraire qui résonne longtemps après la dernière page tournée. L'AUTEUR : Paul Margueritte, né le 20 février 1860 à Laghouat, en Algérie, est un écrivain français reconnu pour ses contributions à la littérature naturaliste et symboliste. Fils du général Jean Auguste Margueritte, il a été profondément influencé par les événements tragiques de la guerre franco-prussienne, qui ont marqué son enfance. Paul Margueritte a débuté sa carrière littéraire en collaborant avec son frère Victor Margueritte, avec qui il a coécrit plusieurs ouvrages. Ensemble, ils ont exploré des thèmes tels que la condition sociale, les relations humaines et les transformations de la société française de leur époque. Paul Margueritte a également écrit en solo, produisant des oeuvres qui se distinguent par leur style poétique et leur profondeur psychologique. Sa capacité à dépeindre les nuances de l'âme humaine et à intégrer des éléments de la nature dans ses récits est particulièrement remarquable. Bien que moins connu aujourd'hui, son travail a eu un impact significatif sur ses contemporains et continue d'être étudié pour sa richesse thématique et stylistique.

Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:

EPUB
MOBI

Seitenzahl: 50

Veröffentlichungsjahr: 2022

Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Sommaire

Chapitre I

Chapitre II

Chapitre III

Chapitre IV

Chapitre V

Chapitre VI

Chapitre VII

I

Tout le long du trajet, Albert fut maussade. Pourtant, l’idée qu’il allait connaître l’Océan, courir les grèves, oublier pendant deux mois le lycée, le ravissait. Mais, avec la vanité ridicule et l’égoïsme maladif de ses quinze ans, il se sentait mal à l’aise, dans le wagon, s’imaginant que chacun fixait les yeux sur lui. Un vieillard à lunettes lui jetait, de temps à autre, un regard bleu et froid. Albert se persuadait qu’un col trop étroit, qu’on lui avait imposé, attirait ainsi l’attention ; humilié, boudant de ce qu’il lui faudrait user cette douzaine de cols encore neufs, il en voulait à sa mère, et, pour bien lui marquer son mécontentement, il haussait le menton, se démanchait le cou, risquait une grimace douloureuse. Cette tactique n’obtenant aucun succès, et Mme Janville regardant obstinément défiler la campagne, derrière la vitre, avec ce visage ferme et résigné des veuves auxquelles la vie n’est pas toujours facile, et qui n’élèvent pas un fils unique sans tiraillements ni souffrances, Albert se composa une expression d’amertume et de dédain, la bouche à la Bonaparte, le front inspiré, de l’air de quelqu’un qui regarde de haut l’univers et scrute l’avenir. Ah ! comme il porterait des faux cols à son goût, quand il aurait atteint sa majorité.

Vraiment, sa mère ne savait pas le comprendre. Elle le traitait trop en enfant, ne comprenant pas qu’il fallait faire la part du temps, et qu’il était presque un homme, déjà. Elle ne semblait pas se douter qu’elle devait compter avec l’intelligence distinguée, la pénétration, le sens de la vie étonnamment développé, toute l’âme précoce de son fils. S’imaginait-elle qu’il jouât encore aux billes ? Ne savait-elle pas quel mépris il avait pour les camarades brutaux et prosaïques et qu’il passait ses récréations, non à courir, mais à discuter avec un ou deux amis, en des causeries philosophiques, les plus graves questions, telles que l’immortalité de l’âme, ou l’avenir des races latines ? Comme preuve irréfutable de sa supériorité, n’avait-il pas obtenu le second prix de composition française et un accessit d’histoire ? Qui lui aurait dit qu’au lieu de s’avouer satisfaite et, disons le mot, reconnaissante, fière même entre toutes les mères, Mme Janville lui glisserait, entre deux baisers :

– C’est très bien, mais j’attendais mieux de toi, mon enfant !

Injustice, injustice de ceux qui nous aiment le mieux ! Et Albert parut s’enfoncer dans une méditation profonde, un peu triste, mais pleine de dignité et qui signifiait clairement que le mérite a toujours été méconnu, mais qu’il ne faut pas désespérer que sa splendeur éclate, un jour, à tous les yeux. On verrait bien, dans quelques années ! Le nom d’Albert Janville serait peut-être célèbre ; à quel titre ? Grand savant, général fameux, acteur égal à Talma, homme politique, on ne savait encore ; mais ne tenait-il pas, dans sa main, l’œuf de fée prêt à éclore, le magique talisman de la jeunesse apte à tout, vorace d’ambition, ivre de vie ? Pourquoi ne donnerait-il pas un lustre inattendu, prestigieux, au nom de son père, ingénieur de talent, mort obscurément d’une insolation, victime des chantiers de Panama ? Il songeait à ce père, qu’il avait peu connu, dont il ne se rappelait qu’un puissant visage barbu, des yeux sévères, une voix forte. Sa mort avait laissé aux siens des ressources très modestes. Ce souvenir entretenait, dans l’esprit d’Albert, l’oppression confuse de la vie stricte à laquelle il sentait sa mère et lui condamnés, la rancœur qu’il éprouvait à rencontrer des camarades roulant en voiture, habillés de neuf et de clair, la privation des plaisirs qu’il eût aimés, tels que le théâtre, apprendre à monter à cheval, etc. Il souhaitait passionnément une bicyclette, et sa mère, sans la lui refuser positivement, alléguait la dépense, atermoyait.

« Non, pensait Albert, non, ce n’est pas la vie heureuse, le bonheur, l’indépendance, la richesse auxquels j’ai droit ! » Et au lieu de se dire qu’il ne tenait qu’à lui de travailler de toutes ses forces afin de se créer plus tard une situation conforme à ses goûts, il préférait s’en prendre à l’injustice des choses et à la mauvaise volonté des gens, personnifiées l’une et l’autre, à ses yeux, dans la résistance douce et entêtée que sa mère était bien forcée, parfois, d’opposer à ses caprices d’enfant gâté.

Mais il avait beau bouder contre lui-même, le lumineux paysage normand, avec ses gras pâturages, ses lourds bestiaux regardant, immobiles, passer le train, ses plateaux d’épis balayés d’un vent salé, ses bouquets d’arbres enveloppant des fermes, çà et là, la sérénité de la terre et du ciel très vif, d’un bleu pâle, le saisissaient d’un sentiment confus de joie et d’admiration inavouée qui touchait à l’impatience. Quand apercevrait-il, enfin, la mer ? Des voix tout à coup, à l’autre bout du wagon, des gestes la désignèrent. Mme Janville tourna la tête : là-bas, un petit triangle, un fragment de miroir, c’était l’Océan !

– Albert, vois, la mer ! dit la veuve avec un sourire qui faisait les avances et semblait demander trêve à la bouderie.

Il répliqua, sans regarder, comme si c’eût été indigne de lui de marquer une curiosité, et accentuant l’indifférence hostile de sa réponse :

– La mer, parfaitement, ça m’est bien égal !

Elle le toisa d’un œil de reproche étonné et attristé, et, pour la millième fois, se reprocha intérieurement d’être une mère trop faible, qui ne savait pas se faire craindre. Ce qui ne l’empêcha pas, dans sa tendresse charmante et absurde, interprétant l’insolence d’un bâillement qu’Albert comprimait mal comme l’indice d’une faim justifiée par l’heure du goûter, de lui demander, en atteignant un nécessaire d’où elle s’apprêtait à tirer du pain et une tablette de chocolat :

– Veux-tu manger ?