À travers les miroirs de la vérité - Jade Hort - E-Book

À travers les miroirs de la vérité E-Book

Jade Hort

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Beschreibung

La vie de Jodye n’est pas un long fleuve tranquille comme en témoigne la perte déchirante de sa principale source d’amour. Plongée dans la solitude, elle se trouve désormais à un carrefour où se mêlent de nouvelles relations, une douleur profonde et des désirs troubles. Dans cette tourmente, Jodye se retrouve confrontée à un choix crucial : préserver son indépendance coûte que coûte ou risquer de devenir malgré elle un pion dans une quête de pouvoir dont elle ignore encore les tenants et les aboutissants.

À PROPOS DE L'AUTRICE

À treize ans, chez ses grands-parents, Jade Hort eut une révélation : la littérature possède un pouvoir transformateur. Depuis, les mots sont son essence, illuminant son chemin et confirmant sa vocation d’écrivaine.

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Seitenzahl: 427

Veröffentlichungsjahr: 2024

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Jade Hort

À travers les miroirs de la vérité

Roman

© Lys Bleu Éditions – Jade Hort

ISBN : 979-10-422-2430-1

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Prologue

J’admirais la manière dont Jodye descendait les escaliers à une vitesse effrénée, soutenue, avec ce sourire que j’aimais tant. J’avais beaucoup de mal à voir cette petite grandir et devenir une jeune demoiselle.

Je me surprenais souvent à la regarder avec attention et à essayer, malgré ma retenue, de trouver des similitudes avec sa mère. À part ces reflets dorés et roux dans les cheveux, elles n’avaient rien en commun. À mon plus grand désespoir, elle avait beaucoup de similitudes avec son père que je n’avais pas vu depuis dix-neuf longues et merveilleuses.

années. Je devais dire que je bénissais encore le jour où je n’avais plus eu à poser mes yeux sur cet être déraisonnable, possédant une âme aussi noire que le charbon.

J’étais celle qui avait élevé cette petite boule d’énergie et de joie de vivre durant dix-neuf belles années.

Jodye était un trésor inestimable. On pouvait percevoir sa douceur et sa sincérité si pure ; elle pouvait aussi être bornée, orgueilleuse et d’une fierté sans limite.

— Hé, jeune fille, tu ne penses pas avoir oublié quelque chose ?

Elle écarquilla les yeux et jura. Je n’avais pas relevé son langage si peu adapté pour une jeune demoiselle. Elle redescendit l’escalier avec la même allure.

Alors qu’elle s’apprêtait à sortir par la porte d’entrée, aussi vite qu’une flèche voulant rejoindre sa cible, je me tournai vers elle. Son envie pressante de me quitter pour rejoindre son ami, qui fêtait son anniversaire, ne m’étonna pas autant que cela.

— Jodye ?

— Oui, Lizzie.

Elle me regardait avec un sourire sournois.

— Jodye, dois-je te rappeler, ma chère petite fille, que je ne supporte pas que tu m’appelles comme ça ? Je te le répète depuis que tu as appris à parler !

— Désolée, vraiment, mais je trouve que Mamie ne te va pas du tout, ça fait vieillot et tu n’as rien d’une personne âgée. On peut même penser qu’avec ta peau si fine, tu viens à peine de rentrer dans la quarantaine.

— Bien joué, vraiment bien joué ! Tu n’envisageais pas de devenir diplomate ? Je suis sûre que tu serais excellente dans cette profession. Même si je parlais avec tout le sérieux et le calme possible, Jodye comprit le sarcasme et l’ironie qui se cachaient derrière mes propos et se mit à rire.

— Tu sais très bien que je suis trop franche pour être diplomate. Et tu le sais très bien. Même si je pouvais envisager ce métier, je ne pourrais pas rester là sans tout bouger, en écoutant des inepties plus grosses les unes que les autres sans poser mon point de vue dessus. Bon, je vais y aller parce que Léo va débarquer s’il ne me voit pas arriver.

Léo et Jodye étaient deux grands amis depuis aussi loin que je me souvienne. Depuis leur plus tendre enfance, le jeune homme était très protecteur avec elle. J’espérais que cette amitié si forte dure pour toujours car je savais pertinemment que quoi qu’il advienne, le garçon serait auprès de son amie pour l’aider à faire face.

Même s’il était voisin de quartier, je n’aimais pas voir Jodye quitter la maison. Je ne lui avais jamais expliqué pourquoi. Elle le ressentit :

— Ne t’inquiète pas, Manie, je ne dors qu’une nuit chez Léo, pas pour toujours.

Je savais pertinemment que je ne reverrais plus jamais ma petite fleur d’ici peu. Rien que d’y penser, mon cœur se serra douloureusement dans ma poitrine, des larmes commençaient à couler. Peu importe ce qui se passerait ce soir, demain ou dans quelques jours, je devais accepter la dure réalité : ce qui devait arriver arriverait.

— Je t’aime ! me disait-elle dans son élan.

Elle me fit un baiser léger sur la joue et finit par partir en claquant la porte.

Je fis une prière à voix haute pour que n’importe quelle personne capable de l’attendre, force divine ou autre qui peuvent, lui vienne en aide : je vous en prie… Pitié ! Venez-lui en aide !

Je sentis la douleur de cette nouvelle perte me briser en mille morceaux. Je maudissais le ciel car alors que j’aurais souhaité assister à son éveil, il a fallu que le ciel me rappelle qu’après avoir été destinée à perdre ma fille, je devais maintenant abandonner ma petite fille pour lui éviter la souffrance qu’elle ressentira par des dizaines d’occasions après que j’ai tiré ma révérence…

Chapitre I

Avec toute ma sympathie.

Signé L’inconnue

Jodye

J’admirais la mer de Saint-Malo, couleur émeraude, les yeux rivés sur le soleil qui se couchait peu à peu. Fusionnant avec l’eau.

J’étais assise, genoux repliés, sur le sable, après avoir passé la journée la plus dure et la plus éprouvante de mon existence. Je venais d’assister aux funérailles de ma grand-mère, Elizabeth. La seule personne qui avait voulu de moi et que j’avais dorénavant perdue à jamais.

Rien que de mentionner son prénom menaçait de me faire éclater en sanglots. J’avais compris que le plus dur, c’était que je n’avais même pas eu l’opportunité de lui faire mes adieux convenablement.

J’étais partie chez mon meilleur ami Léo, pour la nuit, fêter son dix-neuvième anniversaire. Le lendemain, Sasha, la mère de Léo, m’avait appris la terrible nouvelle et tout s’enchaîna à un rythme affolant : l’enterrement à organiser, les personnes proches à contacter…

Cette perte m’avait arraché une partie du cœur. Je ne peux pas m’empêcher de me laisser aller et de laisser libre cours aux émotions qui étaient restées cloisonnées. Parce que je savais qu’une fois cette journée terminée, je finirais seule et j’avouerais sans l’ombre de honte que j’avais peur.

J’avais la tête dans les bras, les genoux serrés contre ma poitrine lorsque j’entendis des pas derrière moi. La personne s’assit sur le sable chaud et me prit dans ses bras.

— Ma belle, tout le monde est parti, je suis fière de toi. La voix de Sasha apaisait un peu ma peine. Je suis sûre qu’elle le serait aussi si elle était là.

Elle me caressa le bras afin de calmer mes larmes.

— Elle me manque tellement !
— Je sais, mais tu t’en sortiras, je te le promets.

Elle tourna la tête vers moi pour me regarder dans les yeux :

— Tu es solide Jodye Mortels et tu accompliras de grandes choses.

— Sasha, je n’y arriverai pas. Comment veux-tu que je fasse sans elle ? Elle m’aidait à garder la tête en dehors de l’eau.

— Écoute-moi bien, où que soit Elizabeth, elle t’aurait sûrement botté le cul pour cette manière que tu as d’abandonner. Elle t’aimait. Elle refuserait que toi, sa petite-fille chérie, courageuse et toujours à trouver le positif partout et dans chaque situation, abandonne si facilement ! Alors je te le dis moi-même : aujourd’hui a été un jour difficile, mais demain, ton avenir sera devant toi. Tu n’es pas seule, Jodye, on est là pour toi, on te soutiendra quoi qu’il se passe.

Elle resserra son étreinte et nous restions là, à contempler les vagues qui s’écrasaient sur le sable, à quelques mètres de nous.

Sasha avait raison, même si la perte de Manie me brisait, il fallait que je me montre forte. Elle savait toujours comment me redonner confiance. Elle me connaissait depuis ma naissance et, depuis ce jour, faisait partie de ma vie. Je l’avais toujours considérée comme une mère et à mes yeux, elle valait plus que celle qui m’avait mise au monde.

J’entendais derrière nous de nouveaux pas et bientôt une voix grave que je connaissais bien, Léo :

— Dye, ça va aller, dit-il en me souriant avec compassion. On a un mystère à résoudre : tu viens de recevoir une lettre qui t’attendait sur le perron…

Sasha se raidit et écarquilla les yeux furtivement. Léo s’approcha de moi et me tendit la lettre. Je m’étais redressé pour marcher sur le sable et découvrir le contenu…

Chère Jodye,

Je ne désire pas passer par quatre chemins…

Toutes mes condoléances pour la perte de ta grand-mère mais mon rôle revient malheureusement à te mettre en garde afin de te préparer. Elle ne t’a pas tout révélé sur tes origines et sur ton histoire. C’est donc à moi qu’il incombe maintenant de te montrer le chemin de la vérité, TA vérité… Si tu désires comprendre, il va falloir que tu viennes à Christen-Valley. Tu as vécu un rêve éveillé pendant trop longtemps…

Avec toute ma sympathie,

L’inconnue

Je frémis et relus la lettre deux fois avant de comprendre les mots qui étaient écrits sur le papier.

Est-ce une menace ou un avertissement ? Qui oserait accuser Elizabeth de m’avoir menti sur mon histoire ou fait de ma vie « un rêve éveillé » ? Mais qu’est-ce que ça veut dire ?

Sasha, en voyant ma tête, vint me rejoindre. Elle me regarda, interloquée. Je lui tendis la lettre et fis les cent pas sur le sable… Sasha donna ensuite la lettre à Léo.

— Non mais c’est quoi ce bazar ?! Léo, tu as vu la personne qui a déposé la lettre ?!

J’écarquille les yeux remplis de colère et de chagrin.

— Je ne sais pas qui a déposé ça, je n’ai vu personne la poser sur le perron, je te le jure, Jodye, je n’en sais rien.

— Qui pourrait avoir envoyé ça ? C’est complètement dément ! Qui ose bafouer sa mémoire en balançant de telles choses !?

— Écoute, je n’en sais rien mais apparemment cette personne vous connaît, toi et ta grand-mère, répondit Sasha encore sous le choc.
— Maman, Jodye a raison, c’est complètement dingue ! Qui aurait pu faire ça ? Léo s’approcha de moi et me prit dans ses bras. Il nous proposa de rentrer.
— Il faut peut-être que je rentre chez moi. Il faut que je range un peu. Sasha se tourna vers moi, catégorique :
— Non, tu vas venir à la maison, je ne te laisserai pas seule dans la grande maison d’Elisabeth. Je te veux sous mon toit pour te surveiller.

— Maintenant, tu as besoin de repos.

Sasha m’avait toujours considérée comme sa fille. Elle avait perdu son mari juste avant la naissance de Léo. Sans son fils, elle ne se serait jamais remise de la mort de l’homme qu’elle aimait. Elle me l’avait souvent dit, son fils était toute sa vie.

Arrivée dans la chambre, je m’étais installée sur le lit, avais posé mon téléphone sur la table de nuit et ferma les yeux, débordant de larmes et de fatigue. Le sommeil me submergeait déjà, avec l’image de ma grand-mère me souriant.

***

Je suis dans ma maison, près de l’escalier et juste devant moi se tient ma grand-mère. Devant elle, près de la porte d’entrée, une jeune femme, la vingtaine, est en train de prendre une sacoche. Elle doit avoir des cheveux longs, car même attachés, ils lui arrivent au milieu du dos. Des cheveux magnifiques avec une couleur nuancée de roux et de brun. Une peau très pâle. Elle semble en colère.

— Mon Dieu, Laurelle, es-tu devenue folle ? demande ma grand-mère.

— Maman, ne recommence pas ! Tu sais que je n’ai pas le choix !

— Laurelle, ta fille a besoin de toi ! Elle n’a que 3 ans ! Tu n’as pas le droit de partir sans un mot ! C’est ta fille !

Laurelle ? Ce prénom m’était familier, je l’avais déjà entendu quelque part… C’était le prénom de ma mère biologique…

— C’est justement parce que je l’aime plus que tout que je pars. Et tu sais pertinemment ce qui va arriver si je reste !

Elles s’affrontent du regard, Elizabeth secoue la tête de gauche à droite, lasse.

— Laurelle, ma chérie, je comprends ta peur mais si tu pars maintenant, tu briseras tout ! Elle pourrait te haïr pour tes choix.

— J’en prends toute la responsabilité, prends soin d’elle et protège-la. Ne les laisse pas la prendre.

— Je la protégerai au péril de ma vie, je te le jure. Mais nous savons l’une comme l’autre qu’avec ce que tu es sur le point de déclencher, il n’y aura pas de retour en arrière possible. Tu en es consciente, Laurelle ?

Quelque chose dans l’escalier capte mon intention. Discrètement cachée, une petite fille aux cheveux brun-roux et aux yeux magnifiques regarde la scène, les yeux débordant de larmes. Elle a un doudou lapin blanc dans les bras.

Je comprends que dans cette scène, personne ne peut me voir. Je m’approche de la petite fille en espérant me tromper sur mon intuition. Sur le doudou, sur son oreille droite, plus précisément est brodé « Didi ». C’est mon surnom et moi en beaucoup plus jeune…

Mes jambes deviennent lourdes et pesantes, je devais me tenir à la rambarde de l’escalier pour éviter de tomber. Je remets mon attention sur la dispute des deux femmes, en lançant des regards de temps à autre vers la petite fille qui assiste à cette scène et qui sanglote discrètement pour éviter de se faire entendre…

— Je n’ai pas le choix…

— C’est faux, Laurelle ! On a toujours le choix et malheureusement, je crains que tu fasses le mauvais.

— Adieu maman…

Je me réveillai en sursaut, en criant, couverte de sueur froide. Ma porte s’ouvrit subitement et Léo accourut vers moi, me prit dans ses bras et me caressa les cheveux pour m’apaiser.

— Chut… Jodye, tout va bien, je suis là.

— Ne me quitte pas Léo…

— Je resterai toujours près de toi, Jodye. Allez, ma belle, rendors-toi…

Le lendemain, je me réveillai, une main posée sur mes cheveux et un souffle sur la nuque.

Léo dormait à poings fermés. Je me levai, sortis de la chambre et vis Sasha, le regard dans le vide. Elle était soucieuse et inquiète, les yeux cernés qui contrastaient avec sa peau mate.

— M. Thomas, le notaire, est là, il souhaite te lire et clarifier le testament de ta grand-mère. Avant que tu ne poses la question, il a préféré se déplacer directement car il considère que c’est plus convenable pour toi de te retrouver dans un endroit où tu te sens bien. Il t’attend dans la salle à manger.

Je descendis et marchai jusqu’à la salle à manger. Le notaire était assis en bout de table, il me salua poliment :

— Bonjour Mademoiselle Mortels, je présume, je tiens à vous exprimer toutes mes condoléances pour votre perte. Je suis navré de vous déranger en cette période de deuil mais je devais m’entretenir avec vous sur le testament de Madame Elizabeth Mortels.

— C’est bien moi, je vous remercie pour votre sollicitude. Pouvez-vous me dire ce qu’il y est stipulé ?

Je n’étais pas d’humeur à me plonger dans la paperasse mais autant s’en débarrasser pour pouvoir s’atteler à autre chose.

— Mademoiselle Mortels, votre grand-mère a écrit une condition dans son testament, devant être accomplie en cas d’inaptitude ou de décès.

— Pouvez-vous en venir au fait ?

— Il se pourrait que vous ne soyez pas la dernière des Mortels en vie.

Il déglutit bruyamment. Je fus clouée sur place.

— Je ne comprends pas…

— Elizabeth Mortels avait deux filles. Votre mère, n’ayant pas exercé son rôle parental, ne peut être incluse dans cette démarche. Toutefois, il est inscrit que dans le cas où Mademoiselle Jodys Mortels, vous en l’occurrence, serait encore mineure ou régie par un statut scolaire et donc non autonome financièrement, elle serait basculée chez sa tante dont le devoir est de vous faire bénéficier des meilleurs soins.

Je me mis à rire sans pouvoir m’arrêter.

— C’est impossible. Rassurez-moi, Monsieur Thomas, c’est impossible.

— Eh bien, malheureusement non, Mademoiselle Mortels.

— Monsieur Thomas, si j’ai bien compris, je vais être placée sous la tutelle d’une femme que je ne connais absolument pas en étant majeur ?

Pourquoi grand-mère ne m’a-t-elle jamais parlé de cette famille ?

— Oui, Mademoiselle, cette femme se prénomme Coraline Fox. Et votre majorité vous octroie une certaine liberté mais elle ne vous permet pas d’être autonome financièrement à l’heure actuelle donc votre liberté d’agir ne peut être totale.

— Et où vit cette Coraline Fox ?

— Aux États-Unis, en Amérique plus précieusement, dans l’État de l’Idaho.

— Les États-Unis ?! Non mais il ne va quand même pas m’envoyer à l’autre bout du globe !

— Oui, Mademoiselle, je comprends votre réaction mais je me dois de vous donner un peu plus d’informations, le lieu où vous devez vous rendre est une ville nommée…

Je l’interrompis sèchement et dis d’une manière incontrôlée :

— Christen-Valley ! Mais oui, bien sûr, la lettre ! Elle parle de cet endroit !

— Vous connaissez, Mademoiselle ?

— Non… Enfin oui, je l’ai étudié, disais-je en mentant.

— Bien, je voulais aussi vous dire que toutes les richesses de Madame Elizabeth Mortels sont divisées et qu’une part assez conséquente vous appartient mais vous devrez vous arranger avec votre tante à votre arrivée, il n’y a qu’elle qui puisse vous la transmettre selon la demande de votre grand-mère. Rassurez-vous, sans votre signature, votre tante n’a aucun pouvoir sur votre argent, elle possède juste les fonds dans une enveloppe. Elle vous a réservé un vol pour après-demain. Je me suis occupé de tout ce qui concerne l’administratif. En étant majeur, vous êtes en droit de ne pas vous y soustraire mais vous irez à l’encontre du souhait de votre proche.

— Y a-t-il un problème ? dit Sasha, interpellée par mes cris.

— Je viens d’apprendre à Mademoiselle Mortels que, comme il est stipulé dans le testament, l’obligation d’aide aux soins et bien-être de Mademoiselle a été transférée à sa tante, Madame Fox. Elle a préparé son arrivée aux États-Unis pour après-demain. Voici Mademoiselle, vos billets pour les transports et votre Visa.

Le notaire parti, j’éclatai de colère, de tristesse et de peur :

— Ils n’ont pas le droit de faire ça !

— Je crains bien que si, ma puce, ils en ont le droit maintenant. Il faut préparer tes affaires pour les rejoindre. Tu n’as pas le choix, pour ton bien et afin de mener tes études à bien, il le faut.

Sasha se mit à pleurer. Léo nous rejoignit.

Je pris dans mes bagages la boîte à musique qu’elle m’avait offerte pour mes quatre ans. Le départ fut dur à préparer. La séparation avec Sacha et Léo encore pire.

— Ma petite Jodye, surtout tu feras attention à toi ! Nous viendrons te voir pour ton anniversaire si tout se passe bien. Tu as bien tous tes papiers ? Le vol dure entre seize et vingt heures jusqu’à l’État du Montana. Tu arrives à l’aéroport de Bert Mooney et ensuite tu prends le prochain vol jusqu’à l’aéroport de la capitale de l’Idaho, Boise. Un taxi t’y attendra et t’emmènera jusqu’à la gare de Christen-Valley. Tu verras, c’est magnifique ! Plein de montagnes, des cascades éblouissantes, de grands lacs…

— Comment sais-tu tout ça ?

— Je me suis renseignée, répondit-elle gênée. Je vais te chercher une boisson avant que soit l’heure de partir, je reviens tout de suite.

Léo en profita pour m’enlacer et m’embrasser fougueusement sur la bouche. Je me laissai faire quelques instants puis un brin de lucidité me fit reculer.

Pourquoi j’avais fait ça ! Étais-je devenue folle ?!

— Je voulais juste te dire au revoir… répondit-il, gêné. Sasha réapparut au bon moment :

— Allez, ma chérie, va vivre ta vie ! N’oublie jamais que je t’aime. Surtout, prends soin de toi.

— Ne t’inquiète pas, ça va aller ! Moi aussi, je t’aime. Christen-Valley, me voilà.

Chapitre II

Bienvenue à Christen-Valley

Jodye

Boom ! Baam ! Je me réveillai en sursaut, complètement paniqué par le bruit sec d’un objet encombrant se fracassant sur le sol. Un homme que je ne connaissais guère me regarda subitement avec l’air gêné et désolé, et partit à la hâte avec sa valise et me laissa seule.

Je n’étais plus très loin de Christen-Valley dans l’Idaho, le lieu où je devais me rendre. Après les heures de vol interminables avec un bébé qui n’avaitcessé de pleurer pendant tout le trajet et mon autre vol qui venait tout juste de commencer, j’étais exténuée. Après être montée dans l’avion et m’être assise sur le fauteuil en première classe numéro 12, très moelleux, je tentais de nouveau de me laisser aller au sommeil.

Après que les passagers se sont installés à leurs places ; le calme revient dans la première classe du moins et petit à petit mes yeux se refermèrent…

Après m’être assoupi, je supposais, une bonne partie du trajet. Je sentais une main se poser sur mon épaule d’une manière hésitante, me réveillant instantanément malgré moi. Je n’avais visiblement pas assez dormi à mon goût. J’avais encore rêvé de la dispute entre Elizabeth et ma mère et cela avait perturbé le sommeil réparateur dont je ressentais cruellement tant le besoin. Et j’admets volontiers le fait que j’aurais aimé ne jamais en avoir pris connaissance ou plutôt m’en souvenir. Depuis, ce cauchemar hantait mes nuits et mon sommeil.

Je regardai par le hublot et j’avais été surprise de constater que l’avion était en arrêt sur la piste d’atterrissage et les personnes que j’avais aperçues au début du vol étaient déjà presque toutes sorties.

Alors j’étais enfin arrivée ! L’Idaho ! L’Amérique !

— Vous êtes arrivée, Mademoiselle Mortels.

Le steward m’offrait sa main pour m’aider à me relever sur mes deux jambes engourdies après ses heures de trajet pour la plupart inconfortables. J’avais mal partout ! Mais je me penchais tout de même et je regardais une nouvelle fois par le hublot, le soleil qui illuminait et faisait briller la piste en dehors de l’avion. Il devait faire chaud et également humide. J’avais effectué quelques recherches avant mon départ sur l’État de l’Idaho. Les périodes chaudes étaient agréables mais cet État était surtout connu pour être assez humide et pluvieux surtout quand on se trouvait dans les rocheuses. Je me félicitais intérieurement d’avoir changé de tenue pendant le trajet pour porter quelque chose de plus adapté, un jean, une tunique classe et des baskets usées mais décontractées, ils étaient normalement préférables à mes t-shirts énormes et mes jeans troués et sûrement mes DocMartens.

Un peu dépaysé par mon réveil et ce nouvel environnement, je sentais ma fatigue décuplée :

— Euh… merci.

Je lui répondis en anglais. J’étais née en France et j’y vivais jusqu’à aujourd’hui. Mais ma famille était d’origine américaine. Maintenant, je le savais, grâce au document du notaire qui abordait un peu de la famille qui était vraisemblablement la mienne. Mais quand je disais un peu, ce n’était pas un euphémisme, je n’en savais pas plus que je ne savais déjà. À part cela, je n’avais rien appris de plus. Donc l’anglais n’était pas une langue que je connaissais sur le bout des doigts. En cours avec ma professeur et pour réviser mes examens. Voilà à quoi se tenait mon enseignement en la matière. Et ce n’était pas comme si Elizabeth refusait qu’on le pratique à la maison…

Je commençais à paniquer, j’en avais conscience… Me voilà plongeant dans l’inconnue !

Je n’avais pas l’impression d’être sortie de ce cauchemar. Je me voyais toujours dans l’escalier, Elizabeth et ma mère biologique se disputent à propos de moi.

Je n’avais jamais vu ma mère biologique depuis ce jour et ça me perturbait toujours de me souvenir de ça aussi distinctement. J’avais toujours pensé que cette femme était ma mère biologique après tout, il n’avait pas quinze mille femmes portant le prénom Laurelle sur Terre. Je ne savais pas pourquoi mais ça me paraissait logique d’imaginer que cette femme pouvait être ma génitrice.

Je n’étais qu’une enfant en bas âge à cette époque et pourtant à chaque fois que je fermais les yeux, les mots, les phrases, me reviennent de façon claire et précise. Savoir que j’avais pu ou plutôt revivre ce passage de ma petite enfance que j’avais fait en sorte d’enterrer le plus loin possible… a décidé de faire resurgir la souffrance qui avait jadis meurtri mon cœur de manière violente à la surface pour me mettre au supplice. Cela emplissait de nouveau mon visage d’inquiétude et de colère refoulée. Quant à mon père, sur le peu que l’on m’avait dit, il était militaire et partait souvent en mission. Il était mort pendant une de ses missions avant ma naissance si j’en croyais ce que me disait Manie. Alors, on pouvait affirmer que depuis que Manie n’était plus, c’était comme si la lumière avait péri et que plus rien ne valait la peine de lutter et c’était simplement éteint pour laisser transparaître la nuit froide et austère. Il n’y avait que Elizabeth pour me remonter vers la lumière depuis que ma mère m’avait abandonnée, lâchement. J’étais loin d’être sûre de rester dans la lumière sans elle. Mon monde avait été stable grâce à elle jusqu’à aujourd’hui.

Et il fallait dire que la lettre que j’avais reçue, deux jours, plus tôt, ne m’aidait pas à voir les choses de façon claire voyante !

Le steward finit par m’aider à sortir mes affaires et me suivit pour me seconder afin de trouver un taxi. Je devais vraiment avoir l’air complètement perdue pour qu’il prenne du temps pour m’aider.

Arrivée au grand parking de l’aéroport bondé de monde, il appela un taxi, mit mes affaires dans le coffre et donna les instructions que je lui avais données sur l’endroit où je devais me rendre. Je le remercie et le taxi prit la route…

Après quelques heures interminables où le chauffeur me racontait sa vie. Je n’en pouvais plus et je remerciais le ciel de m’avoir fait arriver avant que je fusse obligée de sauter du taxi en marche pour qu’il puisse enfin se taire !

Je suis entourée par la forêt et ce spectacle est magnifique !

Je sortais du taxi afin de prendre mes affaires que me tendait le gars à la calvitie. Je le paie et ensuite, il repartit. Je n’avais pas pris beaucoup d’affaires par manque de place et de moyens mais Sacha avait promis de me les envoyer dès qu’elle serait arrivée.

J’avance jusqu’à la passerelle en béton où se tenait l’avant de la gare « la façade ». D’après ce qu’avait marqué le notaire sur les documents concernant le voyage, c’était cette fameuse Madame Fox qui devait me récupérer elle-même. J’étais crevée donc j’espérais qu’elle ne serait pas en retard parce que je n’avais pas vraiment envie d’appeler de nouveau un taxi. Et puis merde quoi, j’avais pris je ne savais combien de risque aujourd’hui ! Si elle ou quelqu’un d’autre avait oublié que je venais à peine de débarquer sur un continent et un pays étranger, bah, pas moi !

Je n’avais rien contre l’Amérique, au contraire, j’étais fascinée par le nouveau monde qui se dévoilait devant mes yeux. Mais je pensais que c’était compréhensible qu’une fille de 19 ans panique un peu parce qu’elle arrivait dans un endroit qui lui était étranger ! Tout était différent de la France. Et le fait qu’il était de l’autre côté de l’Atlantique était sûrement la première raison de ma réticence. Après l’anglais, c’était autre chose.

Même au bout de quelques heures, j’étais habituée plus ou moins à certaines expressions et je sentais que l’automatisme n’était pas bien loin.

Pendant ma réflexion intérieure, je scrutais les alentours, je remarquai que j’étais entourée par la forêt qui devait être d’une profondeur indéchiffrable à l’œil nue. Je n’étais pas patiente de nature donc au bout de 10 minutes, je m’apprêtais à appeler un autre taxi pour me rendre au centre-ville afin de trouver plus de renseignements, trop lasse pour patienter trois plombes. Mais évidemment, ne sachant comment faire pour appeler un foutu taxi, j’étais déjà mal parti. Il fallait bien dire que la France et les États-Unis d’Amérique n’avaient pas grand-chose en commun. Je le savais, j’exagère pour le coup, mais là je voulais partir. À part quatre voitures sur le parking, il n’y avait personne. Et ça me faisait peur d’être aussi isolée. Quand soudainement, une voiture déboula du chemin terreux juste en face de moi et roulait jusqu’à arriver à ma hauteur. Il s’agissait d’une Mercedes noire avec des vitres teintées. Je me préparais à prendre mes jambes à mon cou dans trois, deux… la vitre passagers se baissa et je voyais apparaître une belle femme en robe cintrée très élégante de couleur blanche légère qui lui arrivait aux genoux et des sandalettes noires à lacets qui lui arrivaient aux genoux également avec une petite veste en jean ajusté. Une peau doré foncé et de longs cheveux châtain, je suppose, environ, dans la trentaine d’années, ou peut-être un peu moins.

— Bonjour Jodye, je suis ravie de te rencontrer, je suis Coraline Fox… Après une petite pause, le temps de reprendre son souffle, elle continua. Je suis ta tante.

Avec un merveilleux sourire au visage qui me paraissait naturel. What the fuck !?

J’avais du mal à voir la ressemblance familiale. OK, c’était flippant ! Et qui me dit qu’elle ne va pas me kidnapper et… Je prends une grande goulée d’air, je suis vraiment parano. Légèrement interloquée, je réponds d’un sourire gêné.

— Oh, bonjour… Je suis contente de faire votre connaissance, Mme Fox. J’étais un peu confuse et très mal à l’aise. Comment avait-elle fait pour savoir que j’étais bien la bonne personne ? Bon en même temps, j’étais la seule personne dans ce foutu parking donc c’était pas difficile à deviner, non ? Enfin… c’était bizarre… Mais bon. Tant bien que mal, je me ressaisis. Elle me présenta de sa main aux ongles manucurés l’endroit où je pouvais m’installer. Je mettais mes affaires sur la banquette arrière et je m’assis sur le siège passager près d’elle et nous nous mettions en route…

Alors nous prenions le chemin dans la forêt, je me demandais ce que je pourrais lui dire mais elle ne me laissait pas le temps.

— Tu peux m’appeler tante Coraline ou Cora si tu veux ! Après tous, je suis ta tante, on est de la même famille. Elle souriait toujours et tournait la tête vers moi pour appuyer sa demande mais ses yeux se montraient rêveurs. J’étais sceptique sur la teneur de ses propos et je jugeais que nous ne serions pas d’accord sur notre définition de la famille. Mais passons.

Coraline me paraît être une personne gentille au premier abord et une chose qui me perturber était le fait que j’avais l’intuition d’avoir un feeling avec cette femme que je ne connaissais pas ! je savais, ça faisait à peine 2 minutes que je l’avais rencontrée mais j’avais déjà l’impression de la connaître comme une sorte de connexion entre nous, invisible. Cela m’avait d’autant plus poussée à rester méfiante. Ça me déstabilise et me rend plus à cran ! Je n’avais vraiment pas l’habitude de donner ma confiance comme ça et pourtant c’était plus fort que moi. Pas au point de lui laisser ma vie entre ses mains mais le reste était déjà bien. C’était déjà mieux que ce que j’offrais d’habitude !

— Merci, Coraline.

Mais je fus surprise honnêtement et surtout que ma voix ne tremblait pas, je me sentais bizarre et je croyais qu’elle avait remarqué car elle me regardait avec un regard compatissant. C’était quoi mon problème, je commençais à délirer. Je ne laissais personne intercepté mes émotions alors, il était hors de question qu’une femme, que ce soit ma pseudo tante ou pas, y arrive en moins de 10 minutes. Je ne le tolérais pas ! J’avais la sensation désagréable d’être un livre ouvert, et de me sentir cerner si facilement était vraiment irritant. Alors pour éviter de croiser à nouveau son regard, je me tournais vers la fenêtre côté passager. Le paysage boisé qui s’offrait à moi était hypnotisant ce qui me permettait de faire divaguer mes pensées sans qu’elle ne puisse les interpréter. Je refusais de me laisser aller comme ça.

— Tu sais, Jodye, je comprends ce que tu ressens. Tu te retrouves dans un pays que tu ne connais pas, avec une femme que tu ne connais pas et tu viens de perdre ta grand-mère…

On dirait qu’elle lit dans ma tête. C’était insupportable !

Elle ne finit pas sa phrase mais je vois la peine en la regardant de nouveau, qu’elle ressent dans ses yeux.

Après tout, moi j’avais perdu la personne que j’aimais le plus au monde, la seule qui avait voulu de moi mais Coraline, elle, elle avait perdu sa mère. Et je pouvais comprendre en quelque sorte ce que ça faisait car la mienne, pour moi, m’avait délaissée. Peu importe pourquoi, elle était partie et j’avais dû faire avec, alors la seule chose que je ressentais pour elle, c’était de la colère et de la peine qui s’était atténuée depuis longtemps. Mais malgré toute la souffrance qui était toujours là, tapie dans l’ombre, me laissant un goût amer dans la bouche à chaque fois que j’y songeais. Je comprenais que c’était parce que j’avais conscience que dans une autre vie, j’aurais pu grandir au côté de ma mère et mon père.

Mais il y avait environ 2 ans, Elizabeth m’avait annoncé qu’elle n’était plus de ce monde et je ne lui avais pas demandé de détails. Cela n’aurait servi à rien. J’avais fait mon deuil aujourd’hui de ma soi-disant mère depuis un bout de temps, mais au final, j’avais pleuré parce que cette fois, il n’y avait plus de chance pour qu’elle revienne pour rattraper les dégâts qu’elle avait causés dans mon cœur en partant.

— Merci Cora… de me prendre chez toi. Pour toute réponse et pour changer de sujet. Je n’étais pas prête à parler de ça avec elle. C’était beaucoup trop personnel et le fait que j’étais plus détendue par « notre connexion » n’y changeait rien.

— Voyons Jodye, c’est tout à fait normal, tu fais partie de la famille.

Elle me sourit une nouvelle fois.

J’avais envie de rire. Une famille ? Elle était ou cette fameuse famille pendant 19 ans avant le décès d’Elizabeth.

D’un autre côté, j’étais assez curieuse et je me posais quinze mille questions.

Pourquoi Elizabeth ne m’avait jamais parlé de cette famille dont je serais apparemment un des membres ? Pourquoi elle n’avait jamais voulu m’apprendre leurs existences ? Mais je préférais ne pas commencer ce genre de sujet qui lui ferait penser qu’elle passait un interrogatoire, pas que je ne le ferai pas un jour mais pas dans l’immédiat. Mais chaque chose en son temps et il faudra attendre encore un peu. Je lui posais donc des questions en évitant d’être indiscrète et espérant ainsi que de son côté, elle ne chercherait pas à savoir des choses qui étaient dans le domaine du privé.

— Cora… Je peine avec ce nouveau surnom. Tu vas trouver très certainement cela idiot mais est-ce que tu as des enfants ? Je me sentais idiote à poser cette question que je devrais déjà connaître depuis un bout de temps.

— Oh oui, c’est vrai. Il faut que je te raconte des choses sur la vie que nous menons ici.

Elle éclata de rire et disait cela sur le ton de l’humour et poursuivit :

— J’ai 2 fils. Zakarian qui a 20 ans et Andrew qui a 8 ans et ma fille Mia qui a 19 ans, ta cousine. Avec un grand sourire, elle continua. Et il a mon mari, Isaac. Ils ont tous hâte de te rencontrer !

Elle s’arrêta quelques secondes et continua :

— Mais dis-moi Jodye… En prenant un air inquiet et pensif. Quel âge as-tu ? Je devrais le savoir mais… disons que c’était compliqué.

Je souriais de cette remarque, elle avait tout à fait raison. C’était très compliqué même. Et je ne m’étais pas à un seul instant qu’elle le savait déjà.

— Je suis née le 31 octobre 2004 donc pour le moment j’ai 19 ans mais Elizabeth considère ou plutôt considérait que j’avais 20 ans. Elle aimait anticiper…

En pensant à elle, mon cœur se serra dans ma poitrine, je n’avais jamais compris pourquoi elle anticipait mon âge. À chaque fois qu’elle me rappelait mon âge, elle citait l’âge que je devais avoir et non celui que j’avais. Cela n’était pas vraiment dérangeant car après tout, il ne restait pas beaucoup de temps avant celui-ci donc cela ne me perturbait pas tant que ça. À part que chaque année, je vieillissais avant l’heure.

Je faisais en sorte de ne pas laisser paraître ma peine et lui adresser un sourire timide et gêné.

On ne pouvait pas dire que j’adorais ma date de naissance mais bon Halloween à part que c’était la fête des morts, c’était sympa.

D’un coup, sans que je comprenne pourquoi. Cora se décompose sur place et pâlit, les yeux écarquillés comme si elle avait vu un fantôme. Mais elle se reprit très vite.

OK… je n’avais pas compris mais il ne valait mieux pas que je me penche sur le sujet maintenant.

Elle me regarda et me lança un sourire un peu désemparé et gêné.

— Pardon, j’avais oublié de faire quelque chose et je viens à peine de m’en souvenir…

Elle parla en butant sur les mots avec un sourire décomposé qui aurait pu passer facilement, mais dommage pour elle, je n’étais pas si dupe. Ça n’avait rien à avoir avec cette chose à faire mais avec ce que je lui avais dit.

Est-ce que c’était le fait que j’étais née le jour d’Halloween ?

Je ne saurais pas le dire mais je savais qu’il y avait quelque chose qui la surprenait mais je ne disais rien. Je ne la connaissais pas assez pour me permettre de lui dire que je savais qu’elle me mentait délibérément et je le savais. On m’avait appris à voir le vrai du faux chez les gens. J’avais eu la meilleure des professeurs pour cela.

Donc je me contentais de sourire et lui dis :

— Pas de problème, d’un ton faussement indifférent.

Après coup, elle me raconta l’histoire de Christen-valley :

— Nous avons un maire George Craven et son conseil. Il y a deux lycées qui font également office de classes préparatoires mais également des cursus universitaires. On m’a dit que tu étudies la littérature ? Nous avons un cursus dans ce domaine, tu auras juste à me transmettre ton dossier pour que nous puissions t’inscrire en deuxième année si je ne me trompe pas ? Tu sais vers quel domaine tu souhaites te diriger par la suite ? disait-elle en souriant.

Comment pouvait-elle en savoir autant ? J’étais déstabilisée par la précision dont elle avait fait preuve pour décrire mon parcours. Mon intuition me disait vrai, elle était trop louche, trop parfaitement renseignée pour faire l’innocente. Elle attendait une réponse, le but n’était pas de me vendre trop vite. C’était probablement ce qu’elle attendait de moi.

— Je te transmettrai mon dossier en temps voulu, pas de problème.

Et pour répondre à ta question, je vais rentrer en deuxième année de littérature pour devenir écrivaine.

Elle me regarda étonnée et pensive.

— Ah oui… ça doit être passionnant mais risqué non ? On n’a pas toujours le succès espéré… Ce n’est pas stable.

Je ricanais mais sans émettre un son, je soupire bruyamment.

— Connais-tu l’expression, celui qui ne tente rien n’a rien ? Et bah, c’est une philosophie de vie à adopter dans chaque chose que tu entreprends. On s’en fout du métier, au fond, dans chacun d’entre eux, tu n’as rien si tu n’essayes pas. Et le risque me convient.

Elle passa très vite à autre chose et le temps qu’elle me fasse une description de la ville et de ce qui s’y trouvait, nous nous retrouvons devant un portail imposant sur une propriété boisée juste immense et magnifique. Plusieurs petites maisons charmantes entre les arbres se trouvaient, dans un style contemporain. Passé celles-ci, Coraline s’arrêta au bout de 5 minutes devant une maison moderne gigantesque avec des côtés anciens qui dominaient toutes les autres maisons, je n’avais jamais vu une chose pareille…

— Nous voilà arrivés, nous vivons à une vingtaine de kilomètres de la gare, le centre-ville est situé à neuf minutes en voiture, de l’autre côté vers le Nord en pointant le doigt vers la direction et nous nous sommes au Sud.

Elle venait me rejoindre de l’autre côté de la voiture et en me prenant les mains pour que l’on se retrouve face à face, les yeux dans les yeux.

— Jodye, je veux que tu saches que je serais toujours là pour toi dorénavant et que surtout tu n’as plus à avoir peur.

Elle avait le regard le plus honnête et le plus compatissant que je n’avais jamais vu.

— Es-tu prête ? On peut y aller ?

J’admettais que je me sentais perdue et que j’étais encore remplie de doute ainsi que de crainte et que j’avais des centaines de questions pour lesquelles je rêvais d’avoir les réponses. Mais pour le moment, il me fallait attendre, de toute manière je ne pouvais plus reculer. Alors je relevai la tête et soutenu son regard.

— Oui, on peut y aller.

Alors nous nous sommes dirigés vers le manoir. Et dire que j’avais appris l’existence de cette famille, il n’y avait même pas 2 jours…

Arrivés à la porte, nous entrions et je perdis le souffle tellement c’était beau. Tout était absolument ravissant. Le hall était très lumineux avec ces couleurs blanc cassé et grise peintes aux murs. Il était aussi constitué d’un grand escalier en chêne avec des barrières en fers forgés. À gauche du hall d’entrée se trouvait une grande ouverture où se situait le salon. Et en jetant un regard du côté droit, je trouvais une salle à manger ou une immense table à la verticale trône au milieu de la pièce et des chaises luxueuses qu’on voyait dans les catalogues de décoration et un magnifique assortiment de roses rouge et blanche trône sur la table acajou.

Je ne voyais pas trop en quoi mon héritage leur servirait à quoi que ce soit s’ils avaient eu l’intention de le garder. En repensant à la parole du notaire au sujet de mon héritage. Je pensais qu’ils se débrouillaient très bien sans !

Alors que nous entrions dans le salon, Coraline prit la parole :

— Après le salon, il y a la cuisine américaine…

Mais Coraline n’avait eu pas le temps de finir sa phrase qu’une petite tête aux cheveux châtain cours en sprint vers moi, en criant :

— Jodye ! Jodye ! Jodye est là !

En se jetant dans mes bras ; alors ma première réaction fut la stupeur. Je pris le petit garçon dans mes bras pour éviter qu’il ne tombe et reste choqué mais pas forcément dans le mauvais sens. Je me tournais vers Coraline qui me faisait un des sourires des plus lumineux et me dit :

— Jodye, je te présente Andrew. Et Andrew, même si je crois que tu as compris, voici Jodye, ta grande cousine qui vient de France. Avec un ton humoristique.

Le petit garçon me lâcha pour mettre le pied au sol et me faire face tout sourire et dit :

— Je suis trop content de te rencontrer, Jodye !

Il avait une petite voix enfantine trop chou. Il était vraiment mignon avec ses grands yeux verts et ses cheveux châtain clair et sa peau bronzée, plus que sa mère, m’étais-je fait la remarque.

— Moi aussi, Andrew, je suis heureuse de te rencontrer.

Son enthousiasme était contagieux, et je me surprenais à lui répondre d’une voix enjouée. Ce petit bonhomme m’avait mis du baume au cœur dès mon arrivée.

D’un coup, une autre personne arriva en courant et me prit dans ses bras et encore une fois je me retrouvais choquée et mes émotions se bousculaient de cette charge de geste d’affection.

Coraline restait toujours à la même place près du canapé d’angle gris clair, me regardait avec une émotion que je n’arrivais pas à interpréter.

— Mia, voici…

Mais Mia ne la laissa pas finir et tourna des yeux ironiquement vers sa mère.

— Jodye, c’est ça ?

Elle tournait vers moi avec un grand sourire plein de sarcasmes et de joie avec un sourcil arqué. Mia était une très jolie fille avec des cheveux bruns et des yeux bleu-vert, avec une peau bronzée comme son petit frère.

— J’avais deviné !

Elle se tourna de nouveau vers moi et me souriait.

— Je suis ravie de faire ta connaissance Jodye, on m’a beaucoup parlé de toi.

Je remarquai que Coraline fronça doucement les sourcils à la fin de la phrase de Mia.

— Moi aussi.

Je lui retournai la gentillesse. Elle avait l’air sympa.

— Eh bien, eh bien… Ma nièce vient d’arriver et tout le monde lui saute dessus.

Un homme dont je n’avais pas remarqué la présence s’exprima d’une voix grave mais harmonieuse à quelques mètres de moi tout sourire dans l’encadré de la porte. Je me doutais évidemment de qui il s’agissait.

Coraline leva les yeux au ciel et déclara en me prenant dans ses bras.

— Tu veux dire ma nièce, n’est-ce pas ?

Je voyais l’air de défi qu’elle lui lançait avec son sourire. J’avouerais que j’étais assez surprise de les voir aussi affectueux avec moi. Après tout, on ne se connaissait pas.

— On verra ça.

Il avait les mêmes expressions de défi dans sa voix rauque. Je n’arrivais pas à le voir sachant que Coraline me tenait dans ses bras.

— Alors je peux voir son visage au moins ?

Elle me lâcha ce qui me permit de reprendre une bouffée d’air et je me tournai vers lui tout sourire de cette tornade d’affection, si on m’avait dit que je serais reçu comme ça ; j’aurais ri au nez de cette personne. Ça faisait du bien d’avoir des marques d’affection, même si je trouvais cela un peu étrange.

Maintenant que je le voyais, je remarquai qu’il était bel homme et de ce que j’avais vu, ses enfants lui ressemblaient. Il était grand, large d’épaules et bronzé, il avait une stature de boxeur. Ses cheveux étaient bruns très foncés et ses yeux étaient marron par rapport à son fils et sa fille qui avaient les yeux de leur mère. Il avait, je suppose, la trentaine comme Coraline. Elle avait du goût pour les hommes !

Lui aussi me regarda et son sourire s’agrandit de plus belle.

— Nous avons une charmante nièce. Il s’avançait vers nous et poursuivit :

— Tu en penses quoi, ma chérie ?

Il parlait toute en la rapprochant de lui et lui tenant la taille pour me faire face, je me sentais un peu petite avec ses deux regards braqués sur moi, même si je ne faisais pas plus d’un mètre 1 m 60, ce qui était petit mais pas énormément pour une jeune femme, du moins, je l’espère. J’essayais de m’en convaincre.

— Hum… laisse-moi réfléchir… Elle feignit de réfléchir avec un regard rempli de malice. Des cheveux souple et volumineux, fin et auburn, une taille fine et des yeux d’un mélange de bleu gris assorti avec du violet et des mains petites et fines. Que dire de plus, une ravissante jeune femme, tout le portrait de sa…

Comment plomber l’ambiance ! Ne parlons pas de Laurelle maintenant. Mais Coraline avait dû lire ma prière silencieuse et disait la tête haute en regardant son mari avec un sourire rempli de fierté sur les lèvres.

— Sa tante, c’est évident !

On éclata tous de rire et pendant une minute, tout le monde reprit son souffle et c’était Isaac qui reprit la parole le premier.

— Et bien si je te montrais ta chambre Jodye ? Tu dois être épuisé. En me faisant signe de le suivre. Nous nous tournions pour nous diriger vers l’escalier quand la voix de Mia nous arrêta de la marche.

— Mais on ne va pas avec eux ? demanda-t-elle avec une voix de pleins regrets.

Son père se retournait mais c’était sa mère qui lui répondit.

— Voyons Mia, on revoit Jodye tout à l’heure pour le dîner mais pour l’instant, il faut la laisser se reposer. Elle a fait une longue route. Elle prend sa fille par l’épaule. Et si on allait cuisiner pour lui souhaiter la bienvenue à la maison, en se tournant vers Andrew et Mia, ça vous va ?

Et sur ses mots, ils se dirigeaient vers la cuisine et nous nous dirigeons vers l’étage, nous restons silencieux en arrivant en haut.

— Tu sais… je pense que tu n’auras pas envie d’en parler mais…

Il s’arrêta au milieu de sa phrase en faisant mourir ses mots et en prenant un regard lointain et désolé.

— De quoi voulez-vous parler ?

J’étais perplexe au vu du ton qu’il prit mais je m’efforçais de lui dresser un léger sourire qui cachait mon angoisse, si je pensais à ce qu’il allait vouloir me dire, si j’avais raison, je n’étais pas prête à en parler en effet et encore plus avec eux. Le fait était que je n’arrivais pas à le tutoyer et à lui parler de mes ressentis encore moins.

Et je croyais qu’il avait remarqué que je n’étais pas vraiment emballé car il me souriait gentiment et affirma pour commencer :

— Tu peux me tutoyer, tu sais.

Je hochai la tête pour une simple réponse. Il paraissait satisfait de mon mouvement car il continua de parler avec aise.

— Attendons d’être dans ta chambre pour en parler, je pense que ce serait moins dur si on en parlait sans que des oreilles baladeuses nous écoutent.

Arrivée au premier étage, nous traversions un couloir qui débouchait par une pièce qui forme un carré. Mais j’étais assez surprise de constater qu’au milieu de cette pièce qui contenait 4 portes à chaque mur se tenait une ouverture ou se tenait autour d’elle, des barrières de verre. On pouvait voir l’entrée principale juste en dessous. Je remarquais, par la suite, un autre escalier en colimaçon sur ma gauche. Cet étage était énorme et il y avait de la place.

— Sur chaque étage, il a 3 chambres avec douche à l’italienne et toilette comprise dans chacune d’elles, m’expliqua Isaac. Ici, au-devant de la maison. Il me désigna une porte en face de nous. C’est notre chambre à Cora et moi. À l’ouest. Il pointa du doigt vers l’autre bout de la pièce.

C’est celle de Zac. D’ailleurs, pardonne-lui s’il te plaît, de ne pas t’avoir accueillie, il est en train de… Enfin, disons qu’il est en pleine activité sur le domaine et qu’il n’est pas disponible avant un moment.

Un sourire se dessinait de nouveau sur son visage. OK, il n’y avait pas de difficulté à comprendre le sous-entendu caché derrière ses mots. Il était en train de faire Dieu sait quoi sur le domaine ou soit son activité est clairement avec une fille… Dieu du Ciel. Je ne devais pas penser à cela, c’était mal placé, il fallait que je me ressaisisse ! C’était un peu petit de dire ce genre de chose sur son cousin qu’il ne connaissait pas et qui était potentiellement en train de s’envoyer en l’air avec je ne savais pas qui !

— Mais il a hâte de te rencontrer.

— Ensuite, il y a la chambre de Mia à l’Est, mon bureau est juste là. En pointant la dernière porte. Celle de Andrew est en haut et la tienne aussi.