Erhalten Sie Zugang zu diesem und mehr als 300000 Büchern ab EUR 5,99 monatlich.
À travers les souvenirs d’un jeune homme, ce roman plonge dans l’intimité de ses premières émotions et de ses questionnements. Loin des conventions sociales et des attentes familiales, il explore les désirs naissants, les relations complexes et les choix personnels. Entre rêves et désillusions, le narrateur se confronte à une réalité qui ne correspond pas à ses idéaux, tout en cherchant sa place dans un monde où les blessures du passé marquent le présent. Un récit sur la quête de soi et l’éveil de la conscience.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Hugues Charles est l’auteur de six ouvrages, mêlant fiction et essais. À près de 70 ans, il s’attache à partager les réflexions et compréhensions qu’il a accumulées au fil des années. À travers son écriture, il cherche à éviter le dogmatisme, privilégiant la liberté du romanesque pour exprimer ses idées et interroger les complexités de l’existence.
Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:
Seitenzahl: 163
Veröffentlichungsjahr: 2025
Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:
Hugues Charles
Catherine Raimbaud
Ou le syndrome grec
Roman
© Lys Bleu Éditions – Hugues Charles
ISBN : 979-10-422-7777-2
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Je ne m’attarderai pas sur mon identité. Je tiens à une intention de départ, qui est de rester un témoin qui n’a pas de nom. Ce n’est pas une coquetterie, acceptez-le ; c’est un choix philosophique, si je peux m’exprimer ainsi. Je suis un garçon qui n’a pas fait d’études. J’ai quitté l’école dès l’âge de seize ans pour entrer en apprentissage. Dès le début de ma vie, j’ai fui le plan de l’intellect, qui me déplaît et dont je me méfie. De ce fait et pour rester fidèle à mon modèle de comportement, j’éviterai d’utiliser les grands mots dans le cadre de ce récit.
Je n’aurai pas de nom. Un prénom, un patronyme, qu’est-ce que c’est ? Catherine a un nom et je suis son témoin. Mon nom pourrait être Catherine. Celle-ci a été pour moi, au début, la silhouette d’une fillette gracile, le hiéroglyphe (sic) de la féminité mystérieuse. Elle fut mon premier béguin. C’est elle que j’ai aimée avant même de savoir ce que cela veut dire. Vous savez, les rapports physiques qui unissent les sexes concrètement au sein des plumards. J’avais dix ans et je ne savais pas ce que signifie le sexe. Elle devait en avoir onze, plus ou moins, car elle était dans une classe au-dessus de la mienne dans le parcours scolaire. La première fois, je l’ai approchée sur un cours de tennis. Un de mes papas de substitution m’y avait emmené pour m’initier à ce sport immodeste. Je ne l’ai pas pratiqué suffisamment pour en dominer les principes, car il faut dire que cet homme, dont j’ai oublié le nom, a disparu rapidement de mon environnement. Je ne posais aucune question à maman. La vie intime de ma mère faisait partie des récits qui ne regardent pas un enfant.
Catherine était là, fillette juchée sur des jambes démesurées, attendant d’engager une partie avec une copine. Je la connaissais de vue, je l’avais croisée dans la cour de récréation ou de loin sur les boulevards de la ville. Là, elle était proche de moi. Elle ne prêtait aucune attention à ma personne, c’est sans doute pourquoi je me suis permis d’étudier sa silhouette offerte au regard. Les femmes s’offrent à notre regard avant toute autre disposition. Elle était belle à tomber par terre. Si j’osais un anachronisme, je dirais qu’elle avait l’air d’être nue. La fille portait un petit chemisier qui n’avait rien à cacher. On n’a pas de poitrine à onze ans. De toute façon, je n’avais pas d’idée préconçue au sujet des seins féminins ; j’en avais relevé l’existence sans que cela m’inspire de point de vue particulier. C’était ainsi, au milieu de beaucoup d’autres attraits moins impératifs. À vrai dire, ce qui a retenu mon attention dans l’instant, sur le cours de tennis, à l’endroit où j’étais posté, plus que le reste de sa personne, c’est le bas de son corps. Elle portait un short ajusté. Elle le remplissait complètement. C’est pourquoi je dis qu’elle avait l’air d’être nue. Le tissu moulait son ventre et en laissait deviner quelque chose. Vous dire quoi. Je n’avais pas de mot pour désigner quoi que ce fût de ce genre.
Je voudrais insister sur ce point, à propos d’un dossier qui passe pour entendu. Bien sûr, ce qui m’a saisi là, le trouble qui m’a investi, on doit appeler cela une sensation sexuelle. À tout le moins une approche de type sensuel. Je voudrais pouvoir taxer le moment autrement. Je voudrais vous persuader que ce fut autre chose dans le réel tel qu’il est. À cette minute de mon existence, tel que je suis sous le ciel encombré de nuages, j’étais scotché devant une des expressions de la beauté ; de la beauté pure devant laquelle on reste béat. J’étais fasciné par la grâce inouïe d’une petite gazelle dont j’aurais voulu m’instituer immédiatement le protecteur. C’était un miracle de la nature dont il est exclu qu’on soit jamais le propriétaire tant cela nous inflige de souffrance.
Elle a attaqué sa partie de tennis. Elle s’est mise à courir. Moi je restai de l’autre côté du grillage, droit comme un i. Je ne crois pas qu’il a jamais existé quelque chose de plus mignon que le fessier de Catherine. Elle courait dans tous les sens en remuant les jambes. Je me régalai de cet assemblage invraisemblable qui ne me disait rien, qui me disait tout. Pendant longtemps Catherine resterait pour moi cette silhouette qui fait de la gymnastique sous mes yeux. Juste cela. Une corporalité idéale dont on pense qu’on ne percera jamais le mystère. Dont on espère ne jamais avoir à déflorer l’énigme. Il y a sur cette terre des singularités dont il faudrait approcher en mettant des chaussons.
J’ai un ami qui cultive les paradoxes. À partir de l’ingestion de la deuxième canette de bière, le postérieur collé au sofa, il se met à vaticiner. Un de ses arguments préférés est de prétendre que la beauté de la nature constitue une preuve de l’existence de Dieu. D’après lui, tout cela est trop fascinant au regard, et au reste, pour être l’effet du hasard. La divinité s’impose aux meilleures pages du dossier. Je ne partage pas cet avis. La divinité est un personnage trop abstrait. Quel rapport l’Esprit (supposé tel) peut-il entretenir avec le monde ahurissant de nos sensations ? Les personnages de la mythologie ancienne et actuelle. Wotan et Jupiter, puissants et organiques. Ou bien le père Noël ? Sa barbe, son embonpoint, sa hotte de jouets, papy ridicule, substitut folklorique des dieux de l’antiquité, ça ne colle pas non plus avec ce que je ressens. Il y a un problème d’incarnation. Ce sont les corps, eux seuls, qui constituent l’empire du réel, notre présence au monde. Et cependant je crois aussi en quelque chose de mystique. Pour moi cela réside dans le régime des sensations quand elles sont portées à leurs limites, quand on est saturé de quelque chose et que l’au-delà inexistant s’entrouvre pendant quelques secondes dans un cadre devenu indistinct. Je déteste aller aux cabinets et je vénère les moments d’angélisme qui me font croire au meilleur de nous-mêmes. Catherine était devenue ma divinité dans un corps de simple humanité.
Puis nous nous sommes perdus de vue. Pour elle, ça n’a pas fait une grande différence, elle ne m’avait pas remarqué. Nous nous sommes transportés dans le collège et lycée de la ville. Une bâtisse imposante sur une artère principale, un gros de bâtiments aux fenêtres alignées sur des façades austères où la jeunesse du canton se donne rendez-vous par la grâce de l’obligation scolaire. Je croisais Catherine dans les vestibules, dans les cours, je n’y prêtais pas attention. Elle-même ne me connaissait pas et n’avait pas de raison de jeter un regard dans ma direction. De ce fait et par réaction de dignité froissée, j’adoptai un point de vue indifférent à son égard. C’était une affaire classée. Je dirais qu’il n’y avait plus de sensation éveillée à son sujet. Pas de ressenti et donc pas d’existence. Je voudrais pouvoir dire cela en latin ou en grec.
Nous prenions de l’âge. Catherine se transformait et ne ressemblait plus guère à la fillette entrevue. Elle devenait un beau brin de fille. Entre garçons nous échangions à son égard et à l’égard d’autres condisciples féminins des propos manquant certainement de délicatesse. La beauté effarante de ces gamines nous sidérait au point de nous laisser bras ballants. Nous dépassions cette impression déprimante en affichant des poses cyniques. Cela n’avait pas d’importance pour moi. Cela ou autre chose. Cet ordre d’idées relativiste, en plus de quantité d’autres aspects, m’a décidé à quitter le lycée dès que je le pourrais. Dès seize ans. Je ne vivais là rien d’essentiel. Ni sur le plan relationnel ni sur le plan de l’acquisition des connaissances. C’était insatisfaisant. Les filles se muraient dans un certain quant-à-soi qui se justifiait ou pas. La compagnie des camarades ne me déplaisait pas, mais était viciée par le contexte. Nous étions là, dans les salles de cours, entre des murailles d’un autre âge, sans savoir pourquoi, à quelles fins, on ne nous en informait pas, à étudier des matières indigestes dont la complexité aurait pu retenir l’attention. Dans un contexte qu’il aurait fallu améliorer. Ce ne serait pas le cas pour moi. Je faisais le choix de laisser les études et d’aller me plonger dans le vrai monde. Il me semblait que la vie commençait dès qu’on franchissait le portail de l’école, dans le sens de la sortie. On traversait les terrains vagues, on batifolait à plus soif et on grimpait aux arbres, c’était un bonheur plein. On courait la ville et ses quartiers distincts. On sinuait vers les endroits infréquentables en manquant de conviction. Toute une faune y sévissait contre laquelle les adultes nous mettaient en garde. La brutalité de la rue ne nous attirait pas plus que ça. C’était des embarras sur des enjeux primaires. Il s’agissait de vérifier si on en avait dans la culotte ou pas. À vrai dire cela resterait à déterminer. A contrario, il y avait le quartier résidentiel : de grandes villas, de grands parcs. On devinait les façades derrière les frondaisons, des ormes, des hêtres, des chênes grimpant jusqu’aux nuages, des pelouses, des plates-bandes de fleurs, un perron dont on voyait dans une sorte de malaise qu’il était frappé d’élégance, un univers qui n’était pas le nôtre. Je savais que Catherine habitait ce coin de paradis et y vivait sa vie sans se soucier de moi. Ni moi d’elle.
Je voulais quitter l’école dès que la loi le permettrait. Je voulais partir travailler dans l’un des commerces du centre-ville, un peu (beaucoup) de tâches physiques, des apprentissages, du bonheur relationnel, croiser des gens, de vraies gens, pas des professeurs entrant à reculons dans une salle de classe encombrée d’élèves grognons, d’adolescents réticents. Ce n’est pas la vraie vie cela ; je voulais rencontrer des êtres éveillés, souriants, communicatifs. Dans le centre-ville il y avait le grand commerce généraliste qui occupait les étages d’un bâtiment très mouluré. Si je parvenais à m’y faufiler, si je parvenais à imposer mon profil de rien du tout dans ses couloirs et ses bureaux, dans ses ateliers, j’y apprendrais un certain nombre de choses qui valent d’être connues, en matière de commerce, de comptabilité, tout ça ; j’y rencontrerais des gens de ma prédilection. À cette époque-là, j’ignorais que le monde de l’étude, après vous avoir astreint dans un registre semi-disciplinaire, dans un deuxième temps vous ouvre nombre de portes, une fois franchie la première qui est passablement blindée. Je l’ignorais alors et je veux continuer à ne pas l’accepter du fait de mon existence telle qu’elle est devenue. Je n’en suis nullement affligé, car le sort de chacun se justifie par ce qu’il est.
Ma mère a essayé de me persuader d’aller jusqu’au baccalauréat. Nous vivions chichement. Ses petits boulots nous permettaient de surnager au fil de l’eau sans embellie financière autre que les aides incidentes de mes oncles, les pères de substitution qui ont passé dans notre logement en nombre raisonnable entre ma petite enfance et mon adolescence. Ensuite, lorsque je suis devenu conscient des choses de la vie, maman s’est abstenue.
Nous avions une bonne vie tous les deux. Nous nous entendions bien, maman et moi. Il n’y a jamais eu un nuage sur notre relation du fait qu’elle ne me tenait pas pour responsable de ses déconvenues. C’était sa vie et non la mienne. Mon père biologique avait pris le large dès qu’il eut constaté qu’un ventre fécondé a tendance à s’arrondir. Je sais que ma mère n’a jamais envisagé de me faire passer. Elle n’était pas catholique, pas trop, et ne servait pas non plus la religion de l’embryon. Simplement, il était inenvisageable de recourir à l’expédient qu’autorise la loi. Elle était enceinte, d’un mec qui avait choisi de quitter la place en catastrophe, elle laisserait le processus aller à son terme. Elle ne vénérait pas non plus l’enfance ; je n’ai jamais été un objet d’adoration compensatoire. Maman était une femme spontanée, d’une sérénité bien assumée ; elle m’a accepté, elle m’a mis au monde, elle s’est occupée de moi, affectueusement, elle était le sein contre lequel on se blottit, d’où je tins probablement mon incapacité originelle à fantasmer sur la poitrine des dames. Cela m’aurait ramené à elle et je n’avais pas de parcours œdipien, comme aiment à répéter les gens savants qui trichent à propos de bien des choses. Elle voulait le meilleur pour moi, cela allait de soi, mais elle comprit mes réticences argumentées concernant la stérilité du milieu scolaire, et comme j’évoquai avec assiduité le complément de revenu dont avait besoin notre petit foyer, elle admit de me placer en apprentissage.
Est-ce que cela veut dire que j’étais une truffe en matière d’études ? Pas du tout. Cela ne m’intéressait pas, mais j’avais des facilités. J’ingurgitais les leçons sans difficulté, j’avais une mémoire agile, je casais tout ça dans mon cerveau afin de le restituer par écrit ou oralement dans la salle de classe en attendant de m’en débarrasser comme on vire en poubelle un jouet qui ne sert plus. Je me permettais même quelques excentricités. Dans le lycée il y avait un cours de grec qui n’était pas très fréquenté. Je m’y inscris. Et c’est ainsi que je retrouvai Catherine.
Le grec, ancien ou moderne, était le cadet de mes soucis. Alors, pourquoi choisir d’y consacrer mes heures de loisir et d’étude ? Un professeur lambda nous avait emmenés en séjour scolaire dans le sud de l’Italie. Il devait avoir des attaches familiales par-là, car il se nommait Filipino, je me souviens de son nom si le reste m’échappe. Nous avons fait un tour dans les Pouilles et en Calabre. Puis on est passés en Sicile, de Charybde en Scylla dans le détroit de Messine, comme n’a pas manqué de faire remarquer Filipino qui connaissait son Homère sur le bout des doigts. Enfin, nous nous sommes arrêtés dans un coin de campagne où il y avait un temple grec. C’était invraisemblable. Pas une ruine, un bâtiment pratiquement intact, inchangé depuis les Grecs et les Romains. Comme de bien entendu le prof nous a bassinés avec des détails fastidieux. Je ne l’écoutais que d’une oreille ; l’objet que j’avais devant moi, juché à flanc de colline depuis une éternité, me fascinait ; un peu de beauté pure si l’on veut, pour y revenir encore. Les Grecs étaient friands de ces architectures qui comblent la sensation de l’esprit. Ce qui me donnait à penser, c’était la survivance de cette chose idéale à travers deux millénaires ; j’étais bien près d’un sentiment mystique, je restai à moitié dolent comme un idolâtre devant l’autel qui s’offre au culte de sa déraison, et pourquoi voulez-vous que la théologie s’en mêle ?
Voilà pourquoi je décidai, dès le retour au pays, de m’inscrire en cours de grec. J’avais quatorze ans, un poil follet au menton. Je fis mine de m’intéresser à cette spécialité. Je suis entré là-dedans comme on entre en religion quand on n’en a pas. Je n’avais pas l’intention d’aller au séminaire, plus personne n’y va. Je m’étais adonné à la guitare l’année précédente, sans guère de résultat ; je veux dire par là que je cherchais à mettre un peu d’art dans ma vie à moins que ce ne soit une dose de sacré. Un supplément de quelque chose qui se révélerait mystérieusement utile ; un de ces compléments alimentaires que maman me mettait dans le bec, directement, un truc de ce genre.
En cours de grec je retrouvai donc Catherine (Cathy) ; nous n’aurions pas pu nous rater, nous n’étions qu’une demi-douzaine à fréquenter le cours tous niveaux confondus ; elle me déplut dès l’abord. Je l’avais oubliée et je m’intéressais à autre chose. Les enfants ont des passions sélectives. À vrai dire, nous n’étions pas obligés de nous lier. J’ai essayé d’oublier sa présence et de me consacrer à mon art. Dieu sait comment, j’ai fait des progrès fulgurants qui ont étonné le professeur. Maman m’invitait à la rejoindre devant la télé et moi je potassais mon cours ; cela rentrait mieux dans ma caboche que le solfège (lors de mes tentatives sur la guitare) ; c’était une combinatoire délectable dans l’abstraction de ses modulations. Je jouissais, je ne sais de quoi ; vu les résultats mirobolants que j’obtins en avalant goulûment les leçons du bouquin, mon instructeur me conseilla le professorat. Tant il était flatté de l’intérêt que je portais à sa discipline et surpris du talent que j’y manifestais ; comment lui expliquer que la beauté de l’entreprise résidait dans son manque de finalité ? Cela ne devait avoir aucune conséquence. Je ne croyais pas en Dieu, mais je traquais son fantôme dans l’élaboration d’une gymnastique mentale qui me réussissait, surtout aux yeux des autres, les autres mômes du cours, nettement largués et déficients. Je gagnai le premier prix dans un concours à la noix portant sur Hérodote, et Catherine reçut le second prix.
Cela engendra notre rencontre. Désormais elle vint me rejoindre lors des pauses. Elle était une classe au-dessus et nos horaires étaient distincts. Elle trouva le moyen de se coller à moi sans que j’aie rien demandé. Je crois même que cela m’a importuné au début. Mais mes camarades me regardaient avec envie. Je passais du temps avec l’une des plus belles filles du lycée ; et c’est alors que je m’en aperçus. Jusqu’ici j’avais mis un point d’honneur à nier son existence concrète. À faire l’impasse sur l’anatomie de la jeune fille. Elle ne m’avait pas remarqué et moi je m’étais entêté à ne plus la considérer. Et maintenant son corps était fiché à côté du mien, sur le petit banc qui jouxte la salle d’études, à l’extérieur, où nous prenions le pli de nous retrouver quand les cours le permettaient et qu’un rayon de soleil nous invitait à y demeurer, rapprochant nos corps par moment par réflexe. Je reçus le choc de Catherine pour la seconde fois ; je vécus là ensemble un cauchemar et un miracle. L’animalité de la jeune fille m’affola. J’avais désormais des opinions quant aux caractéristiques de l’entrejambe dont disposent les personnes de l’autre sexe. D’y penser m’intimidait trop. Ce qui me fascinait, c’était son petit cul. Elle avait un fessier inimaginablement mignon. Une chose menue et toujours bien traitée par le style de vêture qu’elle affectionnait. Le plus clair de son temps elle déambulait en culottes longues. Il était devenu rare que les filles viennent en jupe à l’école. Elles avaient adopté le port du pantalon selon les indications de la modernité.