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Sur les traces de la seule descendante avérée de Berlioz, Clémentine, la fille de Louis, lui-même fils unique d'Hector. Des années de travail, d'inlassables recherches et d'innombrables consultations d'archives, du nord au sud de la France, permettent de reconstituer petit à petit cette histoire en marge du destin visible du musicien, et de mettre un visage sur toutes ces personnalités oubliées.
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Seitenzahl: 109
Veröffentlichungsjahr: 2018
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PRÉFACE : MOTIF DE CETTE RECHERCHE
CHAPITRE I : RAPPORTS ENTRE LA
CORRESPONDANCE
ET CLÉMENTINE
Louis se rend du Havre à Marseille
Zelia Mallet attend un enfant
Naissance de Clémentine
Zelia et Clémentine rentrent au Havre, et Louis à Paris
Clémentine a trois ans
CHAPITRE II : RECHERCHES SUR CLÉMENTINE ET SA FAMILLE
Clémentine Mallet
Zelia Mallet
Madame Mallet et sa famille
Louis Berlioz
CHAPITRE III : LES FAMILLES
Tableau généalogique de Clémentine Mallet
Tableau de correspondance entre les générations des deux familles
La famille de Zelia, mère de Clémentine Mallet
CHAPITRE IV : HYPOTHÈSES AU SUJET DE CLÉMENTINE ET DE ZELIA
EN GUISE D'ÉPILOGUE
APPENDICES
Marseille dans les années 1860
Historique des compagnies maritimes
Index des correspondants
Bibliographie
Les auteurs de la présente recherche
Remerciements
Documents reproduits
Avant toute chose, nous tenons à dire que notre but n’était pas de faire un énième ouvrage sur Berlioz… Seulement, le hasard a fait que notre attention a été subitement attirée par quelques détails troublants et qu’au fil de nos recherches, les pages et les documents s’accumulant, nous avons entrepris de les réunir en un livre et d’en faire la publication.
Dans les biographies de Berlioz qui mentionnent Clémentine, fille présumée de Louis Berlioz, donc petite-fille d’Hector Berlioz, il est écrit qu’elle était sans doute née au Havre vers 1853/1854. Pourquoi Le Havre ? Tout simplement parce que Louis y a séjourné de fin décembre 1852 à début mai 1853, pour y suivre des cours d’hydrographie, en vue de terminer sa formation de marin mais personne n’a trouvé de preuve au sujet de la naissance de Clémentine.
En 1997, des recherches faites au Havre, par Lucien Chamard-Bois, dans les registres d’état civil des années 1853 à 1865, n’avaient donné aucun résultat et prouvaient que Clémentine n’y était pas née.
Par contre, il avait trouvé l’Almanach du Commerce du Havre de 1865 mentionnant bien Mme Mallet comme repasseuse, au 28 de la rue Louis-Philippe.
Fin novembre 2003, lors d’une relecture de la lettre que Louis adresse à son père le 24 novembre 1861 (dans le cadre d’une autre recherche…) quelques mots ont soudain provoqué un « déclic » dans l’esprit de Josiane Boulard.
En effet, Louis dit avoir « enlevé » une jeune fille avec laquelle il a vécu durant 14 mois. Or, qui dit « enlever », sous-entend « emmener avec soi » et une grossesse dure 9 mois…
Puis il parle d’un « petit être » qu’il va devoir mettre à l’hospice, donc vraisemblablement d’un nouveau-né. Enfin, si l’on regarde d’où est postée cette lettre, on s’aperçoit que Louis est à Marseille.
En rapprochant cette lettre de celle de Mme Mallet, adressée à Louis le 25 avril 1864, parlant de Zelia et de Clémentine, on découvre que Zelia s’est bien absentée de chez ses parents puisqu’ils l’ont « retrouvé » et que « depuis 20 mois » ils se sont « réconciliés ».
La lettre de Louis nous servant de point de départ et en classant toutes les lettres échangées, notamment entre Louis et son père, durant les 14 mois précédents, on constate que Louis est bien à Marseille depuis juillet/août 1860, et sans aucun doute avec Zelia.
Les biographes actuels ne signalent pas que Louis soit retourné au Havre pour y passer de nouveaux examens, de fin mai à mi-juillet 1860, et qu’ensuite il vécut deux années à Marseille, ce que nous n’avons découvert qu’après un examen minutieux de sa correspondance avec son père.
Seul David Cairns mentionne que Louis, entre l’été 1860 et novembre 1862, « envoyait à Berlioz des lettres mécontentes de Marseille1».
Il ne restait donc plus qu’à consulter les registres des naissances de Marseille concernant l’année 1861…
Après avoir trouvé, mi-janvier 2004, à Marseille, l’acte de naissance de Clémentine, nous en avons fait part à Catherine Reboul-Berlioz, descendante directe de Nanci Berlioz, sœur du compositeur.
Comme il n’avait été utilisé que des textes déjà publiés, elle nous a incité à continuer nos recherches, tout en acceptant de ne pas les divulguer tant qu’elles ne seraient pas terminées. De plus, elle nous a fait parvenir les copies des manuscrits des lettres de Louis Berlioz et de Mme Mallet, à l’origine de notre enquête.
Nous nous sommes ensuite mis en quête de l’acte de baptême de Clémentine, toujours à Marseille, les enfants étant baptisés, à cette époque, quelques jours après la naissance.
Encouragés par ces découvertes, nous avons entrepris une relecture méthodique de la Correspondance Générale d’Hector Berlioz. Ensuite nous avons consulté les documents de l’état civil de l’époque pour essayer de trouver ce qu’était devenue Clémentine.
Entre-temps, après avoir retrouvé la biographie de Berlioz écrite par Guy de Pourtalès, nous nous sommes aperçus qu’il donnait des détails explicites sur la situation de Louis :
« […] Le marin avait donc semé une descendance dans quelque port de la Méditerranée et le grand-père tour à tour s’affolait, grondait, pardonnait.2[…]»
Cette affirmation de Guy de Pourtalès apportait en quelque sorte une preuve aux investigations que nous avions entreprises.
Cependant nos recherches ont dû être interrompues pendant quelques années pour des raisons indépendantes de notre volonté et c’est pour cela que nous avons tant tardé à faire part de notre travail.
Lettre de Louis Berlioz à son père
Collection musée Hector Berlioz, fonds C. Reboul-Berlioz
[Marseille] le 24 Novembre 1861
Cher père,
Plus que jamais je suis triste ; découragé. Je t’ai écrit deux lettres cette semaine, deux lettres navrantes que je conserve précieusement comme leçons. L’isolement complet dans lequel je me trouve a été l’auteur des abominations désolantes que je n’ai pu garder pour moi. Seul, (j’ai tenu ma parole) j’ai fait repasser devant mes yeux les différentes fautes que j’ai commises dans ce monde. Je me suis rappelé tes reproches, puis j’ai relu tes conseils. Il y a neuf ans, gamin navigateur, j’ai couru à droite et à gauche comme un polisson ; alors tu m’as dit qu’un garçon de mon âge, de ma figure et de mon intelligence, ne devait pas mener une pareille vie, pouvait ne pas se faire gruger…. etc…. .
Depuis, j’ai parlé de mariage, j’en avais un en vue ; je ne puis te reprocher de l’avoir fait manquer, puisque les parents de l’objet convoité ne t’ont ni vu, ni entendu, ni lu. Désolé de mon peu de succès, dégoûté, grâce aux parents que j’avais alors : Mr Mme Suat, Caffarel, Burdet, Marmion, dont je n’ai plus entendu parler, ranimé par une de tes lettres dans laquelle tu me disais que le mariage était la plus lourde chaîne qu’un homme puisse traîner dans ce monde ; j’ai cru devoir vivre autrement. J’ai donc enlevé une jeune fille à sa famille, j’ai vécu avec elle pendant 14 mois…..
Pour répondre à l’aveu de cette dernière faute, tu as jugé à propos de me torturer ; le cœur, l’amour-propre, tu en as fait des éponges bien sèches.
J’ai immédiatement renvoyé mon compagnon dans sa famille, j’ai pris ses intérêts, j’ai employé tous les moyens convenables pour lui faire rendre sa fortune.
L’homme d’affaires ayant fait Banqueroute, le beau-frère volant les dernières ressources ; la famille ne voulant plus d’un enfant déshonoré et déshonorant, ce pauvre compagnon ne vaudra plus que cent sous.
Son enfant sera à l’hospice le 17 du mois prochain. Ainsi donc, maintenant, je me sens d’un côté une femme dans la boue, un petit être à l’hospice ; et cela parce que je ne sais que commettre fautes sur fautes.
Je dois passer un tiers de mon existence sur la terre, je devrai le passer seul. J’ai sous les yeux : Joseph Lecourt ; il a le même âge que moi, il vit heureux dans sa famille ; Léon Morel, choyé par son excellent oncle et par sa grand-mère ; mes collègues, presque tous mariés, courant à leur arrivée se chauffer se reposer sans soucis près de leurs foyers.
Et moi, seul, paria abandonné de ses parents, de son ami intime (Alexis ne m’écrit plus) je ne peux compter que sur la charité d’une personne étrangère, sur Mme Lawson…..
Elle seule m’écrit, elle seule me porte une sincère affection ; je l’attends en ce moment, comme elle attendra mon retour si je suis en voyage lors de son arrivée
Mais tout cela n’est rien, que me fait l’opinion de mes parents ? Je suis damné pour eux, tout est donc fini.
En relisant tes lettres, j’ai pleuré.
Mes deux paquets de désolation, je les ai remis en portefeuille, et j’ai enfin compris ceci : Tu m’aimes, mais d’une façon étrange. Je suis certain que tu souffriras atrocement si demain on t’annonce ma mort ; mais je suis aussi certain que si tu as à diriger un festival après demain, après demain je serai oublié. Je sens que tes enfants se nomment Roméo et Juliette, Faust…etc… ; je comprends que tes chefs d’œuvre représentant des années de jouissance et devant faire ta gloire plus tard, doivent passer bien avant moi qui ne représente qu’une ou deux secondes d’abandon ou d’oubli, et 27 années de charge.
Tu es un homme de génie ; tu aimes, tu souffres, tu vis comme un homme de génie peut aimer, souffrir et vivre.
Je comprends tout, je ne demande rien, je te raconte seulement mes impressions, mes idées ; pardonne-moi si je te dérange ou t’ennuie.
Tu n’as pas répondu à ma dernière lettre, dans laquelle je crois t’avoir annoncé mon changement de position. En t’apprenant le résultat des services que j’ai rendus, j’espérais te faire plaisir. Tu n’as peut-être pas lu ma lettre, si tu l’as lue, tu ne t’en souviens plus ; elle se trouve sans doute parmi les papiers inutiles, les invitations intéressées, les demandes d’argent en un mot elle n’existe plus.
Si ton regard tombe, dans dix minutes, sur la partition des Troyens ; cette lettre ira rejoindre l’autre.
Tout cela est bien triste, et je ne puis pas me plaindre de crainte d’ennuyer comme une maîtresse abandonnée que l’on n'aime plus, mais que l’on a aimée.
Je viens donc te souhaiter le bonsoir, me coucher et rêver le cœur sec, mais gros. Jusqu’à ce que la fatigue me donne ce sommeil de plomb traînant les cauchemars.
Bonsoir, père, permets moi de t’embrasser, laisse moi t’aimer comme tu aimes tes partitions, aime moi un peu, moi qui comme elles portent ton nom, moi que tu as créé involontairement.
Ton fils
L. Berlioz
1 CAIRNS, 2002, vol. II, p. 726
2 de POUTALÈS, 1939, p. 270
En relisant attentivement la Correspondance Générale d’Hector Berlioz, et plus particulièrement les tomes IV, VI, VII et VIII, nous avons sélectionné tous les extraits de lettres qui nous semblaient avoir un rapport avec la naissance de Clémentine. Nous les avons ensuite classés chronologiquement, de mars 1860 jusqu’à janvier 1865.
Puis nous avons regroupé toutes nos informations en différents chapitres auxquels nous avons donné des titres concordant avec les activités de Louis mais aussi, par déduction, avec les événements ayant trait à la vie de Zelia et de sa fille Clémentine.
Tout au long de cette étude de la Correspondance générale nous faisons également apparaître en parallèle les activités de Berlioz.
Pour faciliter la lecture nous avons décidé de mettre en caractères gras les éléments importants, principalement les indications de lieux et les passages des lettres en rapport avec notre « enquête ».
D’autre part, chaque fois que nous renvoyons à la Correspondance Générale, nous l’indiquons en utilisant seulement les lettres « CG » suivies du numéro du tome.
Le mois de mars 1860 voit la disparition, à 46 ans, d’Adèle, sœur cadette de Berlioz.
Nous apprenons ensuite grâce aux lettres de Berlioz que, de mai à juillet, Louis est au Havre pour terminer ses études. Il a pu y rencontrer Zelia, avant de se rendre à Marseille où l’attend son premier poste.
«[…] Louis est sur le point de subir ses examens de Capitaine au long cours à Dieppe ; il ira ensuite au Havre. […]» (Hector BERLIOZ à Mathilde MASCLET - 8 mai 18603)
« […] Louis est en ce moment au Havre, sur le point de subir son second examen; le premier a été passé avec succès. S’il en est de même du second, Louis sera Capitaine au long cours en quête d’un navire. […] » (Hector BERLIOZ à Auguste MOREL - 17 juin 18604)
« […] Louis vient de subir avec succès ses examens […] Il cherche maintenant un navire qu’il trouvera sans doute à Marseille. […] » (Hector BERLIOZ à Camille PAL - 13 juillet 18605)
Louis est donc maintenant « Capitaine au long cours », mais il devra patienter avant de pouvoir diriger un navire.
Début août, Berlioz est à Luxeuil, pour suivre une cure, avant de se rendre à Bade (Allemagne), le 10 du mois, pour diriger un concert où figurent des extraits de ses œuvres. Pendant son séjour dans la station thermale il sermonne son fils :
« […] Tu te livres encore à ces désespoirs absurdes que je croyais si loin de ton esprit […] Tes idées de mariage sont inconcevables