Erhalten Sie Zugang zu diesem und mehr als 300000 Büchern ab EUR 5,99 monatlich.
Comme un esquif sur la mer, l’existence de Victoire Bathu ballotte du sommet à l’abîme. Prise par le démon du jeu, elle se donne des excuses qui vont de l’excès de boisson ou l’usage de stupéfiants à la solitude. Elle est donc prête à tout, compromissions, faiblesses et bassesses, pour vivre son paradis infernal, jusqu’à la rencontre avec sa vague scélérate… Aussi, la déchéance morale ou physique, provoquée par tous les genres d’addiction, ne ressemble-t-elle pas parfois aux maux de vieillesse ?
A PROPOS DE L'AUTEUR
Grâce à la littérature,
Laurent Leymonie fait vivre aux personnages des moments de joie ou de tristesse, des déboires et des bonheurs. Elle est également un moyen puissant de partager des expériences, de témoigner, d’éduquer et aussi de divertir.
Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:
Seitenzahl: 146
Veröffentlichungsjahr: 2022
Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:
Laurent Leymonie
Comme une vague scélérate
Roman
© Lys Bleu Éditions – Laurent Leymonie
ISBN : 979-10-377-5245-1
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.
Dans l’existence, tout fonctionne par cycles, à l’image des vagues sur la mer. Ce sont des périodes plus ou moins longues, plus ou moins rapprochées, mais elles ont la particularité d’être récurrentes, de revenir d’une façon implacable. Le seul paramètre qu’on ne maîtrise pas est leur fréquence, qui peuvent aller de quelques heures ou quelques jours à plusieurs années ou décennies. On ne sait pas et on y peut rien. La plus improbable mais aussi la plus violente est la vague scélérate. Elle ne prévient pas et vous tombe dessus de façon la plus inattendue. Elle est dévastatrice.
Le rythme du temps qui passe est seul maître de l’affaire, lui seul décide quand la variable change de sens.
Une lame de fond est le déferlement d’une ou plusieurs vagues d’une taille considérablement plus grande que les autres, susceptible de provoquer des noyades et des destructions sur le rivage sur lequel elle s’abat. Elle emporte tout sur son passage.
Une cascade sonore dégringolait dans le réceptacle en acier. Les pièces giclaient de la bouche béante et ouverte de la machine. Le bandit manchot vomissait une part de son butin dans ce bruit si caractéristique des pièces qui s’entrechoquent. Victoire contemplait son succès avec un certain bonheur, illuminée par les flashes colorés lancés par la mécanique qui saluait à sa manière le succès de la joueuse. Elle savourait ce bruit, ces couleurs et cette musique factice pour la chance qui lui tombait dessus de façon toujours aussi inattendue, mais toujours si jouissive.
Victoire quêtait les regards autour d’elle, de joueurs satisfaits de la défaite de la machine à sous, mais aussi de la réussite de la joueuse. C’était sans excès, juste un signe de tête ou quelques furtifs sourires d’encouragement. C’était ainsi et c’était suffisant. Les spectateurs appréciaient. Bien sûr, beaucoup auraient aimé être à sa place. Beaucoup de ces admiratifs étaient parvenus au bout de leurs crédits et devraient attendre, pour certains le lendemain, pour d’autres quelques jours avant de pouvoir reprendre leur activité favorite, à l’écoute des mélodies lancinantes des rouleaux qui tournaient ou des combinaisons qui s’affichaient.
Même le son du dégueulando de la défaite leur manquait !
Tout en crachant ses pièces, les lumières de la machine clignotaient de plus en plus vite au rythme d’une musique triomphante, synthétique, de mauvais goût et jouant trop fort. La victoire du joueur, du client, se célébrait dans l’excès et il n’était pas inutile pour le casino de faire savoir à tout le monde qu’on pouvait gagner gros, mais que pour cela, il fallait jouer encore et toujours plus.
Victoire replongea son regard sur ses pièces, ses gains, emplie de bonheur. Pas celui d’avoir obtenu une somme conséquente, mais plutôt celui d’avoir gagné sur ce foutu bandit. Elle jouait sur la même machine depuis plusieurs jours, sans résultat, mais aujourd’hui, sa persévérance payait. Du moins le croyait-elle, comme les autres autour d’elle. Le leurre avait encore fonctionné, car en fait, à chaque nouvel enjeu, nouvelle mise, les statistiques repartaient à chaque fois et toujours à zéro.
Elle estimait ses gains autour de deux mille ou trois mille euros. Elle n’en savait trop rien, pas très à l’aise pour compter de tête, ce dont d’ailleurs elle se moquait bien, comme de beaucoup d’autres choses. D’autres feraient cela mieux qu’elle !
Un homme, la quarantaine, bien mis, s’approcha d’elle et proposa, cérémonieux :
— Si Madame me permet…
Il lui tendait un récipient en plastique, un peu plus grand qu’un seau de plage, dont Victoire s’empara.
— Merci Jean.
Elle se mit aussitôt à le remplir des pièces qui maintenant n’attendaient que ça. La machine à sous était exsangue, elle ne respirait plus, comme mise KO, ce dont Victoire s’enorgueillissait pleinement. Elle aurait bien voulu le crier, mais son éducation ne le lui autorisait pas, elle se contentait de penser très fort : je t’ai eu ma salope. Puis elle soupirait d’aise et s’appliquait alors à ce qu’aucune pièce ne tombe à côté de son seau.
— Je dois faire remarquer à Madame qu’il va falloir nous mettre en route dès que possible.
Victoire ne répondit pas tout de suite. Elle jeta un regard vide vers l’homme puis se contenta d’opiner, sans grande conviction. Elle releva enfin les yeux, un léger sourire aux lèvres :
— Allons changer ces pièces et nous pourrons partir.
— Bien Madame, je vous avance la voiture.
Sans répondre, Victoire partait d’un pas nonchalant vers la caisse centrale, tenant son seau à deux mains, comme un trophée religieux. Pendant ce court trajet, elle savourait l’ambiance du lieu, sa salle des machines comme elle aimait à dire. L’odeur, les bruits, les musiques automatiques, synthétiques, parfois pathétiques ou entêtantes, mais toujours glorieuses. Elle accrochait encore quelques regards dans sa procession, félicitations silencieuses, approbations des connaisseurs, envies des perdants. Elle était satisfaite.
Le caissier lui avait remis 2900 euros en billets neufs. Eu égard à sa fortune, ce n’était pas ce qui changerait sa vie, mais le plaisir procuré à la joueuse allait bien au-delà de ça, et c’était bien l’essentiel : elle avait gagné sur la machine, elle avait vaincu la bête ! C’était un bonheur sans limites, c’est pour cela qu’elle aimait ça. Au moins ici, elle existait pour elle-même.
Installée à l’arrière de sa voiture, elle s’adressait au chauffeur :
— Je n’aurai pas besoin de vous ce soir Jean, j’ai gagné. Une autre fois…
Elle adressa au chauffeur un léger sourire teinté d’une tristesse immanquable.
— Bien madame, répondit Jean d’un ton neutre, à votre service.
Puis il reprit :
— Monsieur m’a chargé de vous faire savoir qu’il souhaitait vous voir dès votre retour. Il doit vous attendre dans la bibliothèque.
Victoire ne répondit rien. L’idée de devoir affronter son mari ne l’enchantait guère. Que pouvait-il bien lui vouloir d’ailleurs ?
Elle ne l’aimait pas et le supportait à peine, et lui était définitivement indifférent à son épouse. Victoire repensait à ce mariage de convenance, organisé par ses parents, par les familles. Ce mari, riche industriel souvent absent, avait pour seul mérite, aux yeux de Victoire, d’être suffisamment aisé pour lui permettre de ne pas travailler et faire à peu près tout ce qu’elle voulait.
Cette pensée la ramenait immanquablement et pour un instant vers son enfance et sa jeunesse.
La famille Bathu, résurgence de la fin du XIXe siècle alors qu’on était à la fin du XXe, était conservatrice au plus profond de l’âme. Il était impératif de sauvegarder les usages et habitudes, même ceux qui n’étaient pas toujours indispensables ou n’avaient aucun fondement. Son père se revendiquait traditionaliste et conservateur : pas de fantaisies ou d’extravagances stériles !
Les parents de Victoire avaient prévu qu’elle apprendrait le piano dès l’âge de six ans avec un professeur particulier. Pas question de se commettre dans une école de musique municipale. Les enseignants n’y sont pas toujours à la hauteur, on est mélangé avec d’autres élèves peu motivés, qui trop souvent accaparent le temps d’apprentissage des meilleurs. On nivelle vers le bas !
La danse classique serait très à propos comme activité pour le corps. Bien plus convenable qu’aller brailler après un ballon dans un gymnase. Si elle montrait des dispositions, le tennis, comme sport de détente, pourrait possiblement convenir à l’adolescence. Victoire avait entendu un soir son père énoncer ces décisions à sa mère qui ne faisait qu’acquiescer. Ça devait être comme cela et pas autrement.
Bien évidemment, quel ne fut pas le tollé dans la maison lorsque le soir de ses quinze ans, devant le gâteau illuminé et après une après-midi de chahut passé avec ses camarades, Victoire évoqua assez fermement, l’idée d’apprendre la guitare folk et de faire du volley-ball.
— La danse, c’est chiant ! avait-elle osé devant ses parents.
Une paire de claques lui avait ôté instantanément l’idée de la guitare, des gros mots et de toute rébellion.
Elle était rentrée dans le rang, soumise, puis avait poursuivi son existence de jeune fille jusqu’à atteindre l’âge du mariage, pile à sa majorité.
Dès lors, il ne fallait pas perdre de temps, c’était la règle !
Issue de la grande bourgeoisie, nantie, où on ne mélange pas torchons et serviettes, on lui avait arrangé un beau mariage en s’alliant à une famille amie bien pourvue. Elle n’avait pas eu voix au chapitre, des fois qu’elle aille s’enticher d’un simple employé de bureau, d’un artisan, ou pourquoi pas d’un artiste pendant qu’on y était ! C’était l’explication de son père vers son entourage, toujours direct et délicat.
À l’époque, Victoire ne trouvait rien à y redire, elle ne pensait pas et s’exécutait. Elle était bien dans les rails.
Le plus difficile pour Victoire n’était pas dans le quotidien, ou plutôt si, mais dans le rituel quotidien du soir. Sa mère lui avait longuement expliqué ce qu’il convenait de faire pour une femme mariée, à savoir se plier au devoir conjugal. Au début du mariage, son mari se mettait à l’ouvrage avec application, constance et sans fantaisie. S’il prenait du plaisir, il ne le montrait pas. Il défendait, hypocritement, l’idée inculquée par le prêtre qui les avait mariés, que l’acte sexuel n’avait que pour but de faire des enfants. Il était de toute façon assez vieille France, coincé psychologiquement avec les histoires de sexe et préférait ne pas en parler. Il agissait, il baisait Madame tous les jours que le bon Dieu faisait. Il en sortirait bien quelque progéniture.
Victoire ne disait rien, soumise et obéissante. Pas question pour elle du moindre plaisir. Elle ignorait à peu près tout de cela, bien qu’en ayant vaguement entendu parler à demi-mots ou de temps en temps de façon plus ou moins crue avec ses amies. Cela n’avait pas grande importance à ses yeux. Elle attendait patiemment que Monsieur ait fini, espérant tomber enceinte au plus vite. Les assauts de son mari l’ennuyaient de plus en plus. Elle ne l’aimait pas et ne le trouvait pas spécialement beau. Elle se soumettait donc au devoir, comme le lui avait expliqué sa mère avec insistance. Ensuite, elle se débrouillerait pour éviter cela. À ce train-là, les enfants ne tardèrent pas et les deux petits Bathu arrivèrent en à peine deux années.
La lassitude de l’un et l’autre prit inévitablement le dessus et les époux ne s’adonnèrent plus aux galipettes à partir de là. Ils n’avaient pas eu à en parler. Monsieur ne semblait plus intéressé par sa femme, il préférait passer son temps au travail, disait-il, très fier de lui.
Victoire s’accommodait très bien de cette situation, bien qu’en épouse toujours soumise, elle n’aurait pas eu le courage de refuser le devoir conjugal. À tout prendre, elle préférait quand même qu’il ne la touche plus. Elle se demandait même si elle n’éprouvait pas une forme de rejet, comme un dégoût, au contact de cet homme.
Les enfants étaient donc arrivés, déroulement inéluctable d’une vie bien rangée, mais si banale et si dénuée de sens quand l’amour n’est pas là.
Ils avaient été correctement élevés, bien nourris. Ils étaient le fruit d’une union sans passion mais belle, très belle même sur le plan matériel. Victoire ne se disait pas malheureuse, elle ne le pensait pas, et d’ailleurs tout cela ne lui était jamais venu à l’esprit.
Elle n’avait aucune raison de penser cela. Elle jouissait de tout le confort possible, faute de jouir avec mon mari, et de toutes les facilités existantes. La vie était belle, lui répétaient sans cesse ses parents, au point qu’elle avait fini par se dire qu’ils avaient peut-être bien raison. C’était l’image qu’on lui avait inculquée du bonheur familial.
À cette époque, Victoire n’avait aucune conscience de ce que voulait vraiment dire « être heureux ».
Elle s’accommodait de beaucoup de situations, considérant que tout changeait à un moment ou à un autre, d’où une certaine inutilité à s’obstiner, et de ce fait, sa vie maritale ne lui avait pas semblé pire ou meilleure qu’autre chose. Elle n’avait manqué de rien, avait pu faire tout ce qu’elle avait voulu, profité des plus beaux voyages dans les meilleures conditions. Elle n’y voyait rien à redire, si ce n’était qu’à supporter son mari ! Ce dernier, dirigeant une grosse entreprise était souvent absent, mais heureusement, quand il était à la maison, ce qui survenait somme toute assez rarement, il se comportait en homme civilisé et à peu près respectueux, mais sans la moindre générosité ou chaleur, et avec sa vision bien à lui du respect. Pas question de contester ce qu’il faisait ou disait.
Victoire ne rencontrait que très rarement des soucis de contingence matérielle. Elle ne subissait pas ou peu de problèmes particuliers du fait de l’aide ou de l’assistance dont elle bénéficiait, et de toute façon, s’il en survenait un, une armée d’employés de maison, d’avocats ou d’assistants divers réglaient la chose. La plupart du temps, Victoire n’entendait plus parler de rien dès que le souci était pris en charge. Après tout, cette armada de personnes était payée pour cela et elle s’en accommodait très bien.
Quant à s’occuper de ses deux garçons, c’était autre chose. Elle n’avait jamais vraiment eu la fibre maternelle, mais elle surveillait quand même leurs fréquentations, organisait leurs réceptions d’anniversaires, approvisionnait leurs garde-robes respectives.
Pour ce qui concernait le travail scolaire et leur éducation, c’était autre chose. Elle disait à qui voulait l’entendre qu’elle ne s’intéressait pas à tout cela, qu’elle n’y connaissait rien et surtout, elle n’avait pas la patience pour l’enseignement quel qu’il soit, et même pour pas grand-chose en réalité. Autant laisser faire ceux qui savaient ! Faute de mère attentive, ses enfants avaient eu des professeurs privés pour surveiller les devoirs, des éducateurs, coach comme on dit maintenant, et même un prêtre venu un temps leur dispenser la bonne parole.
L’ecclésiastique, c’était pour la morale, parce que la religion ne faisait pas partie des occupations ou préoccupations de Victoire et encore moins de son mari pour qui les seuls dieux qui valaient s’appelaient CAC 40, Nasdaq ou Nikkei.
Pourtant, ils avaient été mariés à l’église, comme cela doit se faire dans toute famille bien bourgeoise. Elle avait suivi le catéchisme dans son enfance, et tout ce qu’il faut, mais ça ne l’intéressait déjà pas à l’époque, et toujours pas aujourd’hui d’ailleurs. Elle n’y entendait pas grand-chose donc elle avait mis ça de côté. L’important était que les apparences soient sauves !
Victoire occupait son temps entre musées, salons de thé, expositions en tous genres et magasins.
Le temps avait passé et un beau jour, les enfants avaient naturellement quitté la maison, une fois leurs brillantes études terminées. L’un s’était lancé comme son père dans les affaires et l’autre, le plus jeune s’était engagé dans une carrière militaire. Victoire avait trouvé cela très curieux, mais n’en avait pipé mot. L’armée ? Pourquoi pas ? pensait-elle, sans avoir la moindre idée de ce que cela représentait, mais alors pas pour faire la guerre ! Un reste de sentiment maternel ainsi qu’un léger faible pour le petit dernier devaient être à l’origine de cette discrète objection. Leur père se moquait bien de tout ça. Il ne comprenait pas, lui non plus, qu’on puisse s’intéresser à l’armée : ça ne rapportait rien ! Quel intérêt ?
Cette fadeur avait pris fin le jour où Victoire avait découvert, par hasard, ce qui aujourd’hui était en partie son secret et son bonheur. Son mari ne savait pas avec quelle ardeur Victoire s’adonnait au jeu, seul Jean le chauffeur était au courant de la fréquence et de l’intensité avec laquelle elle pratiquait ce bonheur, mais elle avait trouvé le moyen infaillible de lui faire tenir sa langue, l’obligeant à trahir sa loyauté envers son employeur.
Laissant ses rêveries, elle repensait à son mari, intriguée qu’il demande à la voir étant donné qu’il ne lui portait que très peu d’intérêt, sauf peut-être au moment du « devoir conjugal », qu’il avait remis en service depuis quelque temps, mais quand même réduit à sa plus simple expression.
Georges Henry Bathu, proche de la cinquantaine, dans une tenue impeccable attendait Victoire raide comme un piquet devant la cheminée éteinte de la bibliothèque. Il se composait un air grave.
— Bonsoir Georges Henry, vous vouliez me voir ?
— Je vous prie de me dire d’où vous arrivez ?
— Pardon ? Victoire était offusquée de cette demande abrupte, même si elle avait l’habitude du manque de chaleur de cet homme.
— Répondez-moi, ne m’obligez pas à poser la question à votre chauffeur !
Par habitude, désintérêt, mais aussi par crainte qu’il n’ait découvert son secret avec le chauffeur, Victoire capitula. Plus vite ce serait terminé, plus vite elle pourrait se réfugier dans sa chambre.
— Mais mon ami, j’étais partie jouer au casino, comme je le fais de temps en temps.
— Bon. Je le savais de toute façon. Vous avez bien fait de ne pas me le cacher.
Le visage de Victoire s’empourpra.
— Vous me faites donc épier ?
— Que croyez-vous ! Dans ma position, je dois tout savoir, tout maîtriser, y compris vos activités. Mais c’est aussi pour votre bien. Je préfère prévenir, pour le cas où vous vous mettriez dans une situation difficile.
Victoire ne répondit pas. Elle n’avait jamais imaginé qu’il la ferait surveiller au quotidien, espionner. Immédiatement, elle espéra que cette surveillance s’arrêtait lorsqu’elle rentrait chez eux. Georges Henry reprit la parole, le ton toujours sans chaleur :