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"D’un trait de plumes" est un recueil de nouvelles qui explore les multiples facettes de l’expérience humaine durant la pandémie de COVID-19. Le lecteur y découvrira l’histoire d’une fleuriste qui, en pleine crise, trouve l’amitié, celle d’une croisière transformée en aventure confinée, ou encore des rencontres imprévues malgré les restrictions, sans oublier l’effet surprenant des visioconférences sur le quotidien des salariés. Chaque récit dévoile une perspective à la fois personnelle et universelle, capturant les épreuves et les élans de solidarité qui ont marqué cette période.
À PROPOS DE L'AUTRICE
Félix d’Arulines, fervente d’écriture depuis l’âge de 9 ans, a gardé ses œuvres confidentielles pendant de nombreuses années. Désormais prête à dévoiler son univers littéraire, elle a écrit "D’un trait de plumes" pour illustrer un quotidien fictif durant la pandémie déclenchée en 2020.
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Seitenzahl: 83
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Félix d’Arulines
D’un trait de plumes
Nouvelles
© Lys Bleu Éditions – Félix d’Arulines
ISBN : 979-10-422-4915-1
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
D’un trait de plumes est un recueil de nouvelles. J’ai voulu y enfermer, comme dans une bouteille, ce que nous avons vécu ou que nous aurions pu vivre depuis le début de cette pandémie de coronavirus. J’ai voulu y enfermer les espoirs et les bas instincts de l’Homme (même si, ne nous le cachons pas, les héroïnes de ces pages sont féminines). Chaque histoire a été écrite d’une traite. Elles furent inspirées par notre quotidien, nos déchirements. Elles sont le miroir d’une époque où les nations ont fait voler en éclats leurs valeurs profondes. Ici, Liberté, Égalité, Fraternité se sont éclipsées pour le bien de tous. Elles rejailliront peut-être plus fortes de cette crise majeure que nous traversons tous. La tempête hurle. Nous hurlons avec elle en nous raccrochant à des radeaux, ballottés au gré des actualités. Nous pensons faire de notre mieux, mais des plaies béantes font déjà leur apparition. Souhaitons tous ensemble que l’amour nous réunisse et que grâce à lui, nous ne soyons pas rongés par les flots sur une plage déserte.
Le bateau
Fier comme un monstre marin
Il me tendit la main
Je vis alors le soleil
S’éveillant de son long sommeil
Il fit briller les joyaux
De cet antique bateau
On y rencontre des gens
Ils sont tous lents
Et vous regardent sans vous voir
Préoccupés de leurs espoirs
Ils oublient votre existence
Qui est de minime importance
Ils se crèvent les yeux
Et l’on peut apercevoir le vide de leur âme
Ils sont tous hideux
Et eux comme moi seront emportés par une lame
Qui remontera du fond des mers
Pour prendre livraison de ces passagers amers
L’étrange bateau sans gouvernail
Plongera alors vers d’autres océans
Qui s’ouvriront comme une faille
Recrachant encore et encore des êtres vivants
Cela fait dix ans maintenant que j’exerce le métier. J’en ai vu des familles entières pour lesquelles, j’ai récuré le plancher et fait briller les chiottes ! Ma devise : briller comme une Rolls ! La Rolls, c’est classe ! Je n’en ai jamais vu en vrai, mais j’ai longtemps bavé devant les pages glacées des magazines. C’est pour ça que je fais ce métier. Je me rapproche des gens de la haute. Je ne suis pas comme eux. Non, loin de là ! Mais je m’engouffre dans leurs petits secrets. Le portable qui traîne sur la table et… qui vibre doucement… arrachant un petit sourire à Monsieur… Madame qui s’enferme dans la bibliothèque sous prétexte de tranquillité, mais qui chuchote. Moi, je suis IN-VI-SI-BLE. La transparente de service. Ils m’oublient, tellement ils ne me voient plus.
Nous avons nos codes. J’ai les miens. Des codes secrets. Personne ne sait que je porte régulièrement les robes de Madame. Je mets quelques gouttes de parfum. Je me vois, virevoltant doucement lors d’une fête sur un beau bateau blanc. J’imagine les rencontres et les conversations raffinées auxquelles je prends part. Les plats gastronomiques se relaient en un ballet gracieux. La musique est douce, la chaleur apaisante. Le parfum de Madame possède des senteurs exotiques. Il me fait voyager à travers l’Orient. Je n’ai jamais pris le train. Alors l’avion, pensez-vous… L’Orient, c’est si loin et si près à la fois…
Ce virus s’est engouffré insidieusement dans mon quotidien. Ceux-qui-ne-sont-pas-comme-moi ont pris peur. Madame m’a demandé de porter un masque. Je suis redevenue visible. Madame me vo-y-ait. Je la sentais très soucieuse. Ses sourcils se rejoignaient comme un accent circonflexe quand je m’approchais. Il fallait garder plus d’un mètre de distance ou aller dans une autre pièce. Pas question de voyager. Mes envies d’exotisme devaient se faire la malle. Je m’assurais cent fois que les douches n’étaient pas la cachette providentielle de ce petit monstre velu : le Corona (même si, soit dit en passant, j’avais découvert une douzaine de Corona cachées dans la bibliothèque…). Je devais le traquer avec mes chiffons baveux de liquide alcoolique. Les vapeurs s’introduisaient dans mes sinus et me maintenaient sous une forme de torpeur.
— Est-ce que les poignées de porte sont bien nettoyées ? hurlait Madame.
Je sursautais et je m’empressais de rassurer cette inconnue masquée. Elle s’était transformée en harpie au fil des semaines. C’est Monsieur qui se cachait maintenant dans la bibliothèque (peut-être un lien avec les bières Corona ?). Je voyais bien qu’il évitait cette créature qui se prétendait son épouse. La peur. Elle sentait la peur. C’est une odeur que je reconnaissais facilement. Elle et moi avions été amies pendant assez longtemps. Son parfum avait remplacé celui de Madame. Moi, si je ne voyageais plus, Madame avait pris le train vers des contrées très obscures. Elle s’agitait. C’étaient des coups de théâtre permanents.
C’est intéressant comment un minuscule organisme, comme ce virus pouvait modifier les comportements. Moi, je prenais le RER. Madame, elle, restait chez elle, confrontée à la Peur. Moi, la Peur, il y a longtemps que je ne la regardais plus dans les yeux. Ce n’est pas qu’elle ne me fascinait plus. C’est que je n’avais plus le temps de lui dire bonjour. J’étais trop occupé à faire briller les chiottes comme des Rolls.
Un jour, j’ai tout quitté : le béton, la pollution, les embouteillages et le stress. Je suis partie dans un petit patelin. Nous n’étions que trois voisins sur trente kilomètres. Une petite route séparait nos propriétés. Cela faisait cinq ans que j’avais ouvert cette maison d’hôtes. J’avais retapé une vielle ferme. Le jeune agriculteur qui me l’avait vendue, l’avait un peu fait sous la contrainte. Il ne pouvait plus payer ses dettes. Il n’était pas le seul d’ailleurs. Un suicide par semaine. C’était le chiffre alarmant que j’entendais depuis le début du confinement. Un suicide par semaine dans ma région. C’était comme si, les paysans se précipitaient pour aller dire bonjour au Bon Dieu. Trop de dettes. Trop de solitude. Pourtant, j’étais bien, moi. Au calme. Je bravais le couvre-feu de dix heures pour aller chez mon voisin. Il avait des veaux. Et moi j’aime bien les bêtes. Personne ne passait par notre petite route. Pas vu, pas pris, c’est ce que je me disais tous les jours. Je guettais la lueur des phares à l’horizon. Il n’était pas commode, mon voisin ! Pourtant, je prenais le risque chaque jour. Il fallait quand même que je voie du monde. De rares touristes se pointaient à la ferme. Le couvre-feu, le confinement, avaient réduit considérablement la fréquentation de ma petite affaire. Il fallait bien que je fasse la causette. Là, je me rendais chez mon voisin, car j’avais reçu un coup de téléphone de son grand nigaud de fils. Il n’avait pas l’habitude d’appeler. D’habitude, on discutait par textos interposés.
J’en tremblais rétrospectivement. Le vieux Marcel était penché sur le capot de sa vieille camionnette blanche.
Le vieux s’était redressé. Il m’avait regardé d’un œil mauvais.
Quand on arriva sur place, Bertrand se tenait la tête entre les mains. Il n’avait pas appelé la police.
Je n’avais pas eu le choix. Bertrand avait emmené le cadavre à quelques kilomètres de là, chez les Pourvades, nos autres voisins. On avait creusé. Et hop, plus de motard ! Il avait disparu sous le monticule de terre. Si jamais, le pauvre gars refaisait surface, le père Pourvades serait accusé. Il n’était pas tout blanc non plus dans cette affaire. Il frappait quand même sa femme, le Joseph ! Elle me l’avait murmuré, un soir entre deux verres… Je savais qu’elle en bavait. Toujours discrète comme une petite souris la Simone. Mais, elle était mauvaise comme une teigne. Jamais un mot gentil. Une vraie langue de vipère sous ses airs de-ne-pas-y-toucher. Allez, entre voisins, on pouvait bien se rendre service va ! Surtout en période de confinement… Et puis moi j’aime les bêtes alors… ça vaut bien un petit sacrifice…