De glace sont les saints en mai - Claude Vella - E-Book

De glace sont les saints en mai E-Book

Claude Vella

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Beschreibung

De glace sont les saints en mai met tout d’abord en exergue les saints de glace qui font la gloire des météorologues et des médias tous les ans, à la même époque. Ceux-là mêmes que l’on pare de tous les maux pour justifier des froidures hivernales.
Annie Servant et Claude Vella ont voulu les appréhender autrement que comme ceux qui empêchent de profiter pleinement du printemps. Ce livre apporte ensuite quelques lumières empruntées aux textes historiques existants sur les raisons qui ont conduit à leur béatification, cependant il ne s’agit pas d’une biographie exhaustive. Il est également une recette pour déguster un moment de lecture en toute tranquillité et enfin – et surtout – un recueil de textes poétiques et de nouvelles.
Des écrits uniquement, simplement, ouvertement, ostensiblement et tout bonnement issus de l’imaginaire des auteurs pour vous distraire, vous aider à vous évader et oublier, ou non, le présent, un moment. L’ouvrage parlant de cinq saints, voilà cinq raisons de le lire, même si la dernière n’est guère probante…

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Seitenzahl: 152

Veröffentlichungsjahr: 2022

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Annie Servant & Claude Vella

De glace sont les saints en mai

Recueil

© Lys Bleu Éditions – Annie Servant & Claude Vella

ISBN : 979-10-377-6342-6

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Ces histoires sont de pures fictions nées de l’imagination des auteurs. Toute ressemblance avec un événement réel, passé ou présent, ainsi qu’avec une personne vivante ou ayant vécu ne serait que simple coïncidence.

Saints de glace ou Cavaliers du froid :

le risque de gelées

Si l’on en croit nos recherches sur Internet, une certaine confusion règne entre les Grands Chevaliers (ou Cavaliers du froid) et les saints de glace. Du moins, c’est ce que nous en avons déduit.

Selon les sites consultés, les premiers correspondent à la période du 25 avril au 6 mai, alors que les seconds sont fêtés à partir du 11 mai. Certains de ces saints ont disparu du calendrier actuel, mais la tradition populaire les garde toujours en mémoire.

« Méfie-toi des saints de glace ! » chante justement un dicton commun.

Les Anciens les mentionnent régulièrement pour expliquer les aléas climatiques aux générations plus jeunes. Les jardiniers, cultivateurs et autres botanistes les ignorent encore moins.

Et ce, même si les températures ne sont pas toujours aussi contrastées que ne le mentionne cette « sagesse proverbiale ».

Dans les régions françaises plus méridionales, est-il également noté sur ces mêmes sites, les dernières gelées printanières ont lieu en avril. Rabelais – peut-on lire – les appelait les « saints Gresleurs, saints Geleurs et Gasteurs de bourgeons ».

Ces Cavaliers du froid sont : saint Georges (23 avril) ou Jorget, saint Marc (25 avril) ou Marquet, saint Eutrope (30 avril) ou Tropet, saint Philippe ou Philippet ou fête de la sainte Croix (3 mai) et saint Jean Porte Latine (6 mai) ou Joanet.

Il existe un dicton en Pays d’Oc : « Marquet, Georget et Philippet sont trois casseurs de gobelets », ce qui signifie que la grêle, ces jours-là, est néfaste pour la vigne ; et donc aux « gobelets » de vin. À Béziers, Georges et Marc sont les « Saints vendangeurs ». Dans les Landes, Marc, Vital (28 avril) et la Sainte Croix sont « les trois marchands de vin ».

Nombreux sont d’ailleurs les proverbes ou maximes prônés par les vignerons au cours de ces deux mois printaniers.

« Tant que la lune rousse n’est pas passée, le vigneron n’est pas rassuré… Avril frais donne pain et vin ; si mai est froid, il ne reste rien… Les trois associés sont gens sévères et font enrager le vigneron et le jardinier… Les trois hommes sans pluie portent bénédiction pour la vigne. » Pour en citer quelques-uns.

Cette période des « Saints Cavaliers » est aussi celle de la Lune rousse (soit la lunaison après Pâques, généralement du 5 avril au 6 mai), mais les variations locales, le changement de calendrier ou le réchauffement climatique rendent ces dates aléatoires. Elles restent néanmoins un marqueur incontournable dans le monde paysan.

Puis viennent les saints de glace. Les trois premiers et les plus respectés sont saint Mamert, saint Pancrace et saint Servais. Ils sont considérés comme des saints assassins.

Plutôt qu’une phase de réfrigération, ces « meurtriers » soulignent la dernière période de l’année où le refroidissement nocturne est encore suffisamment actif pour générer des gelées en plaine. Il est évident que cette date est postérieure pour les régions montagneuses.

Voici résumés les renseignements obtenus sur la « Toile » concernant cette période.

Ce sont là des considérations climatiques. Des faits impossibles à méconnaître. C’est la réalité. Et une réalité qui aime à se répéter chaque année.

Ces saints ont néanmoins existé ; une biographie très résumée de ces personnages historiques est d’ailleurs précisée en introduction de chaque partie les concernant. Ainsi que des raisons qui ont conduit à leur canonisation.

Quant aux adages, proverbes et autres maximes rappelés dans ce livre, ils sont issus de l’expérience de nos ancêtres. Ce sont des dictons qui se transmettent de génération en génération et que même les météorologues ou les présentateurs météo à l’écran se plaisent parfois à citer de nos jours. Histoire de renforcer leurs assertions. Ou de pimenter leurs propos.

Mais, pas question pour autant, de s’en tenir uniquement à la vie et aux actions des cinq saints que nous avons en quelque sorte « sélectionnés ». Un choix très arbitraire, il convient de le reconnaître. Même si nous avons largement « emprunté » des pans de leurs actions héroïques aux récits trouvés sur Internet.

Des saints reconnus par les historiens et dûment notés dans les livres. Mais cet opuscule n’est pas une biographie.

Nous ne sommes pas des analystes.

Pas question non plus de raconter tout bonnement leurs existences et leurs liens avec des personnages et des événements réels ni de les enjoliver, ce qui serait un non-sens en ce cas. Ce n’est pas un roman historique.

Nous ne sommes pas des chroniqueurs.

Pas question, encore moins, de décliner les mythes qui foisonnent et dont ils sont souvent les héros. Ce n’est pas un recueil de légendes.

Nous ne sommes pas que des raconteurs.

Pas question, enfin (et surtout), d’ignorer toutes ces données. Elles ont inspiré peu ou prou les écrits rassemblés dans cet ouvrage.

Nous nous essayons plutôt à être des faiseurs de rêves. La musique des mots et des sensations que crée la poésie, le monde fabriqué, chimérique que dépeignent des histoires inventées, imaginaires : cela nous sied bien mieux.

De là à dire que la vie de ces saints est uniquement au centre de ces histoires, ce serait mensonge. De là à dire que la vie de ces saints est un prétexte pour ces histoires, ce serait partiellement vérité. Dans les deux cas, il y a un pas que nous ne saurions franchir.

Un grand pas.

Un trop grand pas.

C’est une base de départ ; pas une légitimation de nos intrigues, de nos « affabulations ».

Une sorte de fil rouge.

Alors, il restait à trouver la bonne recette :

– Un infinitésimal zeste de réalité,
– Un minuscule zeste de biographie,
– Un petit zeste de légende,
– Un grand zeste de poésie,
– Et beaucoup, beaucoup, vraiment beaucoup, d’inventivité.

Résultat : ces textes tant poétiques qu’imaginaires et qui sont juste des écrits en vers ou en prose. Nous les avons regroupés dans ce recueil pour vous offrir un moment de lecture… Voire un temps de plaisir…

Il ne vous reste plus qu’à goûter…

À déguster… Et à savourer ?

C’est un souhait sincère de notre part.

C’est même le plus évident.

Annie Servant et Claude Vella

Mai frileux : an langoureux.

Mai fleuri : an réjoui.

Mai venteux : an douteux.

Ah ! Voici que le temps s’y prête !

Ah ! Voici que le temps s’y prête !

Le printemps vient combler mes jours,

Dans l’espace des alentours

Que la douceur, toujours, regrette.

Voilà que cet instant s’arrête

Sur le manque de mes amours.

Ah ! Voici que le temps s’y prête !

Le printemps vient combler mes jours.

À présent mon songe s’apprête

De prendre mon cœur pour toujours.

Dans cette ambiance où s’interprète

Ma vie sur un nouveau parcours.

Ah ! Voici que le temps s’y prête !

Le printemps vient combler mes jours.

Attention, le premier des saints de glace,

souvent tu en gardes la trace.

1

Saint Mamert

(Mort vers 475 et fêté le 11 mai)

Évêque du diocèse de Vienne, en Isère.

Il a institué les jours des Rogations : trois jours de prières de demande liturgique contre les calamités, juste avant la fête de l’Ascension.

Mamert est considéré comme l’évêque de Vienne le plus remarquable, lui qui, entre autres choses admirables, à la suite d’une catastrophe qui se produisit avant l’Ascension du Seigneur, institua des litanies solennelles.

Adon (archevêque de Vienne et saint de l’Église catholique, vers 800-875) – Chronique, VI, col. 97C

À cette époque, le bienheureux Mamert, évêque de Vienne, écarta de la ville de Vienne, par ses larmes et ses prières, un fléau qui la menaçait. Car des incendies fréquents, des tremblements de terre incessants, des grondements nocturnes funèbres menaçaient d’un événement prodigieux et funeste qui ruinerait toute la ville, et là où les hommes se réunissaient en nombre, on pouvait remarquer des bêtes sauvages se comporter comme si elles étaient une espèce domestique : des loups, des ours, et même des cerfs, naturellement craintifs, pénétraient par les portes étroites jusque sur la vaste étendue du forum. […] Cependant, saint Mamert, prêtre invincible, demeura inébranlable devant les autels de la sainte fête, et enflammant la chaleur de sa foi, par un flot de larmes réfréna la puissance laissée aux flammes, et l’incendie se retira.

Adon– Chronique, VI, col. 102C-103A.

Une époque ô combien importante, si l’on en croit toujours cette sagesse populaire : « le premier jour des rogations (40 jours après Pâques) mène le temps des fenaisons, le second celui des moissons, le dernier celui des vendanges ».

Le fléau de Vienne

La dernière bourrasque est dissipée dans l’air.

Plus aucun tremblement et plus aucune flamme,

Les larmes et la prière ont cet appel au calme

Qu’émane un cœur saint sous la courbe d’un éclair.

Plus un nuage noir ne stagne sous le ciel.

La tempête a cessé dans l’obscurité blême,

Laissant surgir l’espoir d’un nouveau jour qui sème

L’apaisement constant d’un souhait officiel.

Il semble s’éloigner de ce destin fatal ;

Le fléau ravageur de la ville de Vienne

Exhale la beauté d’une atmosphère pleine

Et le bonheur sublime à l’éclat idéal.

L’évêque saint Mamert par sa foi a vaincu

Ce temps jadis obscur d’où l’angoisse déferle.

Et par le chatoiement discret de cette perle,

Il se laissa porter d’une force, invaincu.

La vengeance est le plaisir de…

Je n’aurais jamais pensé vous raconter un jour quand ni pourquoi ma vie a basculé dans l’horreur. Ni cru que mon histoire serait aussi difficile à exprimer de vive voix. Encore moins à la coucher par écrit. Non par crainte de réveiller un souvenir douloureux ; il est trop tard pour cela. Mais je devine qu’elle semblera au mieux incroyable à toute personne n’ayant pas assisté aux phénomènes. Au pire, totalement invraisemblable. Il ne peut en être autrement. Pourtant, c’est la réalité. Une réalité bien amère. Une succession de faits étranges pour me mener au jour de mon trente-sixième anniversaire, un 11 mai. Et ses réminiscences m’ont aidé, jusqu’à présent, à surmonter les grandes épreuves de la vie.

Jusqu’à ce jour seulement…

J’avais pourtant le sentiment qu’en vous la révélant, je la rendrais sans intérêt, plus superficielle, moins crédible. Qu’elle serait le reflet d’un épouvantable cauchemar. Un cauchemar pour moi. Un dramatique fait divers pour les autres.

Et que – peut-être – quelqu’un saurait donner une explication logique à cette suite d’incidents. Celle que je m’efforce désespérément de découvrir. Car, moi, je n’en ai malheureusement pas. Et doute de plus en plus d’en trouver une.

Hélas…

Depuis que je suis paraplégique, je ne dors en moyenne que trois heures par nuit. Mes journées sont d’interminables tunnels sombres d’où n’émerge plus la lumière du soleil. Mes somnolences sont rythmées par de terribles sursauts qui me laissent parfaitement réveillé tandis qu’une triste lassitude accompagne ma lenteur journalière.

Car, faisant fi des conseils, des encouragements de ceux qui croient aider, j’ai renoncé à mes amis… À mes amours… À ma vie d’avant… J’ai renoncé à tout.

Volontairement… Égoïstement…

Sauf peut-être à l’écriture… enfin, juste celle de mon histoire.

Vous dévoiler ce qui m’est arrivé m’aidera à suivre le couloir étroit de ma nouvelle existence.

Je l’espère…

Au moins jusqu’à la sortie de ce tunnel…

Mais, revenons à mon récit.

Un jour, j’avais pris la décision de mettre en scène la légende d’Orval. Cette légende dont je m’étais inspiré pour échafauder la trame du scénario d’un film, bien des années auparavant. Une œuvre que j’avais imaginée, écrite, et qui dormait dans un dossier de mon ordinateur depuis lors. En tant que producteur principal, je restais naturellement décideur du choix des acteurs censés participer à ce tournage.

C’est alors que je m’étais souvenu qu’avec mes cinq camarades de promotion de l’école d’art dramatique italienne, nous avions développé un engouement certain pour cette période historique. Au point de se promettre de faire appel au groupe si, par hasard ou par chance, l’un de nous avait la possibilité de réaliser un film d’après mon texte, faisant référence à cette époque et, surtout, à la belle comtesse. Celle que nous avions surnommée la « Jeanne d’Arc transalpine ».

J’avais eu la chance d’intégrer, en effet, cette école à la renommée internationale qui n’acceptait qu’une douzaine d’élèves tous les trois ans. Une superbe élite en quelque sorte. Et c’est bien ainsi que nous nous considérions. Une impression renforcée par des professeurs qui venaient des quatre coins de la planète pour nous enseigner leurs secrets et par les artistes oscarisés qui nous faisaient partager leurs expériences. Nous savions qu’à l’issue de ces années d’apprentissage, et sauf catastrophe, un tapis rouge se déroulerait sous nos pieds.

Parmi les tâches qui nous incombaient, la réalisation de pièces ou de mini films figurait en bonne place. Et réalisation pour nous signifiait assurer toutes les fonctions, depuis l’écriture, jusqu’à la prise de son et d’image, le montage et, évidemment, l’interprétation des personnages imaginés. Seuls la musique, les décors et les costumes échappaient à notre contrôle : on nous demandait de « zapper » en quelque sorte ces aspects réservés à d’autres écoles spécialisées.

Chaque année, dans ce but, on sélectionnait des thèmes, des anecdotes, des situations, des épisodes faisant référence à l’Histoire de nos pays respectifs. Tout était bon à imaginer des saynètes, des scénarios, à les écrire, puis à les mettre en scène et les interpréter. Pour résumer, tout ce qui concourrait à faire de nous des artistes futurs dans le monde du théâtre et du cinéma.

Et Mathilde de Toscane figurait en bonne place dans nos choix de héros. Mathilde, cette noble dame qui a joué un rôle très important pendant la querelle des Investitures au XIe siècle, lorsqu’elle accueillit le pape Grégoire VII, que l’empereur germanique Henri IV menaçait de déposer. Mathilde, également fondatrice de l’abbaye d’Orval, un monastère situé en Belgique, dans la province de Luxembourg, et désormais renommé grâce à la bière qui est fabriquée par les moines y résidant.

Mathilde, qui symbolisait en quelque sorte à la fois la Toscane – lieu de nos études – et le panel international représenté par nos différentes origines.

En outre, c’était aussi – et surtout – le prénom de l’une d’entre nous qui présentait – clin d’œil du destin à notre encontre – des similitudes certaines avec cette héroïne. Mathilda Sforzi nous avait expliqué que – comme la comtesse – elle était née à Mantoue. Comme elle, elle avait perdu son père, sa sœur et son frère alors qu’elle était encore jeune ; dans un accident de voiture néanmoins, ce n’est pas la même époque. Mais tout de même ! La coïncidence était d’autant plus troublante que sa mère s’était remariée avec un veuf « nanti » d’un fils à peine plus vieux que sa propre fille. Les similitudes s’arrêtaient là car le rejeton en question était fiancé à une autre. Selon la réalité historique, Mathilde de Toscane aurait épousé le fils né en premières noces de son beau-père.

Quoique c’était oublier les liens qu’elle avait tissés par la suite avec la Belgique… Ou, plutôt, un Belge…

J’étais amoureux de cette jeune Italienne à l’époque : une attirance à sens unique, hélas pour moi, car les élans de la Belle en question la poussaient à me préférer le plus nordique d’entre nous. Malgré toutes mes tentatives avortées pour la conquérir et tous les stratagèmes plus ou moins douteux utilisés ; d’ailleurs plus douteux que moins. Mon désespoir à la suite de cet échec cuisant (car j’aurais eu honte de le divulguer et réussis à le celer aux regards de mes congénères) et – surtout – cette blessure infligée à mon orgueil de « mâle soi-disant dominant », conscient jusqu’alors de mon pouvoir sur l’autre sexe et n’ayant connu aucun plantage en matière de conquêtes féminines, s’étaient en partie cicatrisés par l’écriture de ce texte. Une histoire dans laquelle je ne prêtais pas forcément que des vertus à l’héroïne. Une petite vengeance certes. Mais je dois avouer que j’en étais particulièrement fier. D’autant que les autres n’avaient pas tari d’éloges à l’égard de mon œuvre manuscrite.

C’est la raison pour laquelle sa véritable existence avait été très romancée par mes soins. Rien à voir avec la réalité, hormis un rappel de la légende expliquant le blason de l’abbaye. Un blason devenu d’ailleurs symbole de la bière d’Orval : une truite avec un anneau dans la bouche. Selon ladite légende, Mathilde plongeant la main dans une source jaillissante, son anneau nuptial lui aurait glissé du doigt. Une truite serait apparue à la surface de l’eau et aurait rendu l’anneau à la comtesse.

Pour schématiser, j’avais pris de grandes libertés avec la réalité historique. Des libertés grandissimes, je l’avoue. J’avais utilisé la légende comme point de départ d’une intrigue beaucoup plus classique entre trois personnages : l’alliance tombant du doigt symbolisant la trahison de Mathilde envers son époux (un mari imposé politiquement, période historique oblige !). Dans mon « délire » littéraire, elle aurait eu un amant en la personne d’un jeune séminariste noble n’ayant pas encore prononcé ses vœux définitifs et qu’elle aurait rencontré lors d’une retraite spirituelle dans des lieux occupés par des nonnes et des moines (toujours cette période historique !). Même si – là, j’ai triché pour le bien de l’intrigue ; je l’avoue volontiers – deux bâtiments en un seul et même