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"Dent-de-Lion" est un témoignage émouvant et inspirant qui nous plonge dans la vie de Luiza qui, à l’annonce de sa maladie, s’engage sur le chemin de la découverte de soi, de l’amour et de la renaissance personnelle. Ce livre est un carrousel d’émotions : on suit le parcours de la narratrice qui partage tous les bouleversements qu’elle a vécus et décrit les différents états physiques et psychiques ressentis lors de son traitement durant lequel elle n’a perdu ni sa joie de vivre ni sa confiance. Outre l’aspect médical, l’auteure insiste surtout sur la façon dont la vie s’enrichit face à une épreuve aussi difficile qu’un cancer durant la grossesse. C’est le récit d’une transformation, d’un changement de vision du monde qui nous embarque dans un tourbillon de sentiments, de la douleur à la gaieté en passant par la colère et la sérénité.
"Dent-de-Lion" explore les thèmes universels de la recherche d’identité et de la poursuite du bonheur pour permettre au lecteur de découvrir ses propres forces.
À PROPOS DE L'AUTRICE
Luiza Bruchez aime les défis. Sa façon de vivre le démontre: déménagements internationaux, une carrière professionnelle bien remplie, une maman épanouie, un combat réussi contre la maladie. La nature fut une alliée décisive face aux épreuves et pour lui permettre de se ressourcer et de se redécouvrir à chaque étape de vie. Découvrez ce parcours dans son premier livre intitulé "Dent-de-Lion".
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Seitenzahl: 162
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Luiza Bruchez
Dent-de-lion
Quand la vie s’épanouit à l’ombre du cancer
Ce livre a été écrit avec le soutien de Sibel Ceylan, biographe et créatrice de l’atelier « L’écriture et la vie ».
La couverture a été réalisée avec le soutien de Romulus Boicu, graphiste.
ISBN : 978-2-38625-288-4
Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit, est illicite et constitue une contrefaçon, aux termes des articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Nombreux sont ceux qui m’ont soutenue avec bienveillance pendant cette période difficile, qui m’ont aimée et ont pris soin de moi. Je leur adresse ma plus profonde gratitude.
Ce livre ne constitue pas un avis médical. Il ne remplace pas un avis médical professionnel, un diagnostic ou un traitement. Demandez toujours l’avis de votre médecin ou d’un autre professionnel de santé qualifié pour toutes les questions que vous pourriez avoir concernant un problème de santé ou un traitement. Les informations fournies peuvent ne pas être à jour ou applicables à votre état de santé spécifique.
Écrire ce récit m’a aidée à extérioriser toute ma vie intérieure, tout ce qui bouillonnait en moi et que je n’arrivais pas à exprimer à l’instant où je vivais les événements. J’ai voulu retranscrire avec des mots tous les feux qui ont brûlé en moi, mais aussi l’énergie que m’a apportée le pouvoir apaisant de l’eau. C’est un livre dans lequel je parle de mon phare pendant la tempête, de mes ressources, des lieux et des petites choses qui m’ont transmis à la fois de la sérénité, mais aussi la volonté de recommencer chaque jour à vivre avec joie.
En 2020, enceinte de mon deuxième enfant, j’apprends que je suis atteinte d’un cancer du sein. Trois ans plus tard, je ressens l’envie de raconter l’histoire de cette épreuve qui m’a fait grandir en repoussant les limites de mon corps qui portait à la fois la vie et la maladie. Je veux partager avec vous cette volonté intérieure qui existe en chacun de nous et dont nous n’avons pas toujours conscience sur le moment. Cet élan vital m’a aidée à rassembler mes forces pour avancer petit à petit sur le chemin de la vie.
Je ne me suis jamais arrêtée de vivre des moments de bonheur, même avec un cancer. Malgré la douleur, la peur, les traitements, j’ai continué à essayer de vivre normalement et c’est ce message que je voudrais faire passer. Un message d’espoir pour toutes les personnes et leurs proches qui ont vécu, vivent ou vivront une épreuve de la vie dans laquelle il faut reconnaître et rassembler toutes ses forces pour la surmonter.
La dent-de-lion fait partie de ces choses qui m’ont apporté de la quiétude et de l’énergie en me ramenant à celles de mon enfance. Cette fleur, également connue sous le nom de pissenlit, me rappelle une photo de moi vers l’âge de deux ou trois ans où l’on me voit cueillir des dents-de-lion dans un champ. Je suis complètement immergée dans le monde calme et insouciant de mon enfance, ne pensant à rien d’autre que ramasser ces fleurs, que je trouve mystérieuses, et souffler dessus. Pendant cette épreuve, la dent-de-lion m’a ramenée à cette pure joie de l’enfance, lorsque je soufflais sur les aigrettes pour les voir s’envoler. Aujourd’hui, la dent-de-lion me rappelle la fragilité de la vie, mais aussi le pouvoir du renouveau.
Ce livre raconte la victoire après chaque séance de chimiothérapie, le triomphe et la joie de la naissance de mon bébé, la volonté de faire une course à pied avec mon premier garçon après l’accouchement. Ce n’est pas seulement mon histoire, c’est aussi celle de toutes les personnes qui m’aiment et m’entourent : mes fils, mon mari, mes parents, ma sœur, mes beaux-parents, tous mes proches et tous mes amis.
On me dit souvent que je suis forte, que j’ai réussi à m’en remettre. Pourtant, je ne me sens pas plus forte qu’une autre. Ce serait presque arrogant, je me sens juste heureuse. Et c’est tout.
Ce matin de la mi-août 2021, je passe quelques jours de vacances sur une île grecque magnifique, au milieu de la mer Égée. La splendeur du paysage m’apaise même si le vent souffle fort ce jour-là. Je suis assise sur le sable, mon bébé de six mois dans les bras et je le serre très fort contre moi. Je voudrais le faire rentrer en moi à nouveau, retrouver notre unicité, notre lien intime et ne faire qu’un seul et même corps, encore une fois. Je voudrais pouvoir revivre cette grossesse autrement, sans avoir cette peur et cette colère en moi tous les jours, mais je sais que les regrets ne servent à rien et qu’on ne peut pas changer le passé. Le soleil me réchauffe légèrement la peau, le vent chaud me sort de mes pensées trop envahissantes et la mer agitée me rappelle que la vie n’est qu’une succession de vagues qu’il faut apprendre à surpasser, que même lorsque l’on croit être submergé, on nage, on retient son souffle et on refait surface. Je me dis que cette météo est exactement à l’image de mon état d’esprit du moment, calme et agité en même temps. Au loin, tout est tranquille, la mer est comme un miroir dans lequel les quelques nuages se reflètent pour venir colorer l’ensemble du tableau. Je regarde la ligne d’horizon qui se confond avec le ciel et le bleu de la mer. J’ai devant moi un des plus beaux paysages qui existe sur cette Terre, je me sens chanceuse d’être ici, en vie. J’avais besoin de retourner à la plage, de voir l’étendue d’eau infinie, d’entendre le ressac des vagues, de sentir l’air chaud sur ma peau. Depuis que j’ai vécu cette épreuve, la nature, et notamment l’eau, tient une place très importante dans ma vie. Je ne saurais pas expliquer comment ni pourquoi, mais je sais que c’est un des quatre éléments qui m’a aidée à tenir en m’insufflant sa puissance. Revenir aux sensations corporelles me fait du bien, je m’aperçois que mon corps n’est pas juste une enveloppe physique grâce à laquelle je me déplace, mais que c’est ma force et ma priorité, qu’il a donné la vie deux fois et que je dois en prendre grand soin.
Soudain, une vague vient me frapper fermement les pieds et m’oblige à lever les yeux et à observer la mer. Je regarde au loin, puis je regarde mon bébé dormir paisiblement dans mes bras. Mes yeux vont de l’un à l’autre. Des mots surgissent dans ma tête, je ressens le besoin de dire : « Pardonne-moi ! ».
Je ne sais pas si je me le dis à moi-même ou à mon enfant, mais une autre vague s’écrase à nouveau sur mes pieds et m’oblige à dire une deuxième fois et encore plus fort dans ma tête : « Pardonne-moi ! Pardonne-moi ! ». La troisième vague arrive sur mes pieds et je comprends que, cette fois, je dois me le dire à haute voix : « Pardonne-moi, Luiza ! ».
Une immense joie m’envahit alors. Je ressens un bonheur intense d’être là, à ce moment précis, avec mon bébé de six mois qui dort tranquillement dans mes bras. Je le revois me sourire pour la première fois, six mois auparavant. La première fois que je l’ai tenu dans mes bras, j’ai su qu’il était courageux, et même bien avant sa naissance ! Mon tigre.
Les vagues ont éteint le feu qui brûlait en moi et qui alimentait continuellement cette même question :
« Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi est-ce que cela m’est arrivé ? ».
Tout à coup, je ne ressens plus cet incendie omniprésent qui s’embrasait en moi en permanence. Ces questions ne martèlent plus ma tête à longueur de journée, en me donnant parfois l’impression de devenir folle, de manquer d’air pour respirer. Pour arrêter ce feu, cette colère, le pouvoir de l’eau m’a souvent sauvée.
Je réalise alors que je suis plus apaisée, que je peux m’aimer, même si je sais que d’autres traitements m’attendent encore. Je profite pleinement de cette promenade sur la plage et je ressens la joie des moments simples de la vie. Je n’ai plus besoin de prouver quoi que ce soit, ni à moi ni à personne. À ce moment-là, je réussis à créer un lien très fort avec mon bébé, ce lien que je n’étais pas parvenue à ressentir avant. Depuis ce jour, notre connexion est de plus en plus grande. Je sens sa chaleur contre moi, il n’y a plus de séparation entre nos corps, nous ne faisons plus qu’un, à nouveau. C’est la première fois que je prends conscience qu’il va bien, que nous avons traversé cette épreuve ensemble.
Un an plus tôt, je profite d’une belle journée ensoleillée sur une autre plage de Grèce avec mon mari, mon grand garçon et mon bébé dans mon ventre. C’est une journée sans vent, au cœur du mois d’août. La chaleur réchauffe ma peau, je regarde mon mari et mon fils jouer dans les vagues en riant avec une sensation de calme et de bien-être. Tout semble parfait, apaisé et doux, comme les mouvements du bébé. Je pose mes mains sur mon ventre, je ferme les yeux et j’écoute les sons qui m’entourent : la mer et les vagues, les rires de mon fils et des enfants sur la plage, les conversations au loin. Je me laisse bercer par tout cela en me disant que la vie m’offre de grandes joies.
Cela fait quelques mois que j’ai arrêté de travailler, j’ai pris la décision de quitter la Suisse pour la Grèce, car mon mari a été muté dans ce pays. J’ai une solide carrière derrière moi, de la Roumanie à la Suisse, couvrant plusieurs autres pays, avec un métier qui était pour moi une grande passion, mais qui, avec le temps, je pense, m’a beaucoup fatiguée. Alors maintenant, je veux profiter de mon temps libre, c’est la première fois, après de nombreuses années, que je n’ai pas besoin de me précipiter. Je n’ai pas l’habitude de ne pas travailler, de prendre le temps, de ne pas toujours courir et cela me procure une sensation de liberté incroyable.
Le soleil tape déjà fort ce matin-là. Je prends le tube de crème solaire et je commence à m’en appliquer une grande quantité sur les bras, le ventre et la poitrine. Quand ma main passe au niveau du sein gauche, je sens comme une petite boule sur le sternum, dans la partie supérieure gauche. La boule roule un peu sous mes doigts. « Bizarre, me dis-je à ce moment-là, probablement une petite grosseur liée aux changements hormonaux dus à la grossesse. »
La journée continue et je profite de ce moment de joie avec ma famille, à la plage. Les jours passent et j’oublie cette sensation bizarre, car je ne ressens plus cette boule. En septembre, je me rends chez le gynécologue pour mon suivi de grossesse et je n’en parle pas puisque c’est un contrôle de routine. Ma grossesse se passe très bien. J’avais passé une échographie des seins en juillet, il n’y avait rien à signaler. Je rentre chez moi sereine.
Mais, à la mi-septembre, je sens à nouveau cette boule. Je pense que les hormones de la grossesse commencent à se développer. Au début du mois d’octobre, j’entre dans mon cinquième mois. Lors de mon rendez-vous de suivi, je parle au docteur de cette boule que je sens de plus en plus sur mon sternum. Il se veut rassurant. Pour lui, il s’agit sûrement d’un fibroadénome, une petite tumeur bénigne située au niveau des glandes mammaires et qui se développe avec les fluctuations hormonales. À l’échographie, il observe un contour bien délimité et me dit que même s’il faut le faire enlever, pour l’instant ce n’est pas grave.
Le début du mois de novembre arrive et avec lui, un nouveau rendez-vous avec mon gynécologue. Lors du contrôle de la boule, il s’aperçoit que le nodule a grossi. Il me prescrit une biopsie le soir même. Nous sommes mercredi, les résultats arriveront donc seulement le lundi.
Le week-end se passe dans l’inquiétude et l’angoisse de l’attente des résultats, mais je n’ai jamais pensé un seul instant que cela pouvait être un cancer. Jamais cette idée ne m’est venue à l’esprit, c’était tout simplement inconcevable. Nous décidons de rester les deux jours à la plage, car il fait encore beau à cette période de l’année en Grèce. L’été indien se prolonge et le soleil réchauffe mon ventre. Pendant tout l’après-midi du samedi et du dimanche, je reste allongée, silencieuse, dans mes pensées. De temps en temps, je touche mon sein gauche en me demandant ce que j’ai là et en espérant que ce ne soit rien de grave.
Le lundi, en fin de matinée, n’ayant toujours pas de nouvelles du docteur, je décide de lui téléphoner.
— Bonjour, Madame, je suis désolée, on doit attendre encore un peu. Les résultats devraient arriver jeudi.
— Jeudi ? Mais vous aviez dit quatre jours. Comment voulez-vous que j’attende encore jusqu’à jeudi ?
— Je sais, je sais. Je suis désolé. Je vous appelle si j’ai quelque chose avant.
Je raccroche, frustrée, déçue et encore plus inquiète qu’avant l’appel. Le jeudi arrive et ce jour-là, mon mari est en télétravail dans le bureau à l’étage, en raison des restrictions du COVID. J’entends son téléphone sonner. Je l’entends s’agiter. Je ressens que sa voix tremble. Quelques secondes plus tard, il descend les escaliers et s’arrête à la moitié. Il me tend son téléphone et il dit d’une voix faible qui ne lui ressemble pas :
— C’est le docteur. Il veut te parler.
Sur son visage, je perçois qu’il ne sait pas quoi dire d’autre et je sens au plus profond de moi que quelque chose ne va pas, mais je prends le téléphone et j’écoute en espérant qu’il me donnera une bonne nouvelle :
— On a eu les résultats de la biopsie. C’est un cancer.
Je sens mes oreilles bourdonner, comme si je refusais d’entendre. Je ne sais pas quoi répondre, alors je dis seulement avant de lâcher l’appareil :
— Mais non, c’est faux. Ce ne peut pas être un cancer.
Mon mari échange encore quelques mots avec le médecin, puis termine rapidement la conversation :
— On va approfondir ça en Suisse. On s’en va, ajoute-t-il.
Le médecin l’avait appelé pour lui annoncer la nouvelle en premier afin qu’il soit préparé à l’avance pour me soutenir lorsqu’il me le dirait.
Il raccroche tandis que je reste sur le canapé avec les yeux dans le vide, complètement sidérée et dans le déni. Ma première pensée arrive comme un coup de massue : « Non, je ne peux pas annoncer ça à ma mère. Impossible de lui dire que sa fille enceinte vient d’apprendre qu’elle a un cancer. Je n’arriverai jamais à le lui dire. Cela lui ferait trop de mal. »
Je décide d’appeler mon père. Il réagit à la perfection, comme un père protecteur, et il me rassure d’une voix très calme :
— Tu sais, aujourd’hui on soigne très bien les cancers du sein. Et on en guérit très bien aussi. Il faut que tu écoutes les docteurs et que tu fasses tout ce qu’ils te diront, d’accord ?
— Oui, papa, d’accord.
Je ne peux rien dire d’autre. Le choc de la nouvelle me fait perdre mes mots. Je remercie mon père et je raccroche pour appeler ma sœur. Je répète la même phrase, mais sa réaction n’est pas aussi sereine que celle de mon père. Elle s’effondre en larmes, je suis encore moins capable de réagir et les mots me manquent. Elle se reprend et me promet que tout va bien se passer. Je finis par appeler ma mère en vidéo et répète une nouvelle fois les mêmes mots :
— Alors Luiza, tu as eu les résultats de ta biopsie ?
Je vois un sourire d’espoir sur son visage, mais dans ses yeux, je lis aussi la peur.
— Oui, c’est un cancer.
Sur l’écran, je remarque qu’elle retient ses larmes. Elle ne veut pas pleurer devant moi. Je ne la verrai d’ailleurs jamais pleurer. Je ne peux rien dire de plus. Les mots ne sortent plus.
Nous décidons de rappeler le docteur pour lui demander les détails du résultat. Tout cela est trop pour moi. Il faut prendre des décisions très rapidement. Soudain, je commence à pleurer parce que je crois toujours que c’est une erreur.
Le soir même, nous prenons rendez-vous à la clinique pour que le gynécologue nous explique les traitements à suivre, les prochaines étapes, la chimiothérapie, la grossesse. Il nous conseille d’aller en Suisse pour le suivi du traitement. Il parle, je vois ses lèvres bouger, mais je n’entends rien. Mon cerveau ne traite pas les informations qu’il nous donne. Pour moi, c’est impossible. Une fois le rendez-vous terminé, nous sortons de son bureau et je m’écroule. Mon mari me soutient et me relève. Il essaye de me rassurer :
— Ne t’inquiète pas, on va y arriver. On va aller en Suisse et tu vas te faire soigner. Tout va bien se passer.
Mais je ne tiens plus debout et les mots qui étaient restés bloqués dans ma gorge pendant toute la journée se mettent à sortir comme des hurlements de douleur et de peur. Je me mets à crier comme un animal qui appelle à l’aide dans un dernier instinct de survie. Je ne contrôle absolument plus rien. Rien. C’est le choc de la nouvelle qui me submerge et m’envahit avant que la colère ne vienne éclater comme un volcan, quelques jours plus tard.
Le lendemain, nous sommes vendredi, je vais chercher mon grand à l’école maternelle, comme d’habitude. Je le retrouve et je le serre dans mes bras. « Comme il est heureux de me revoir à chaque fois », me dis-je en essayant de retenir mes larmes. Je ne veux pas pleurer devant lui ni devant les adultes de l’école. Rapidement, je lui annonce que nous allons partir dès le lundi pour aller vivre en Suisse pendant plusieurs mois. Nous n’évoquons pas du tout la maladie pendant tout le week-end. Nous allons nous promener tous les trois, comme nous le faisons toujours. Je parais calme en apparence, mais à l’intérieur de moi, je crie. Je ressens un feu qui commence à me brûler et qui ne me laissera plus tranquille pendant les mois à venir.
Nous arrivons en Suisse en pleine crise du COVID, les règles sont très strictes et cela rajoute du stress à l’angoisse. J’arrive dans le cabinet du gynécologue qui prend le relais de mon dossier, avec les résultats de la biopsie réalisée en Grèce. Mon mari m’accompagne, nous sommes tous les deux silencieux.
J’espère toujours que le gynécologue jettera le papier à la poubelle et me dira que c’est une erreur. Il nous invite à nous asseoir en face de lui et nous accueille avec un air grave et rassurant à la fois :
— Qu’est-ce que je peux faire pour vous ?
Comme si la situation était normale. Son air décontracté me donne presque envie de rire, mais je ne peux pas, j’ai quand même un cancer, c’est absurde. Il est tellement calme que je suis déstabilisée. J’étais prête à pleurer, mais son attitude me rassure profondément. Il n’en fait pas une tragédie, je sens que je suis entre de bonnes mains avec lui.