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Que se passerait-il si la vie nous poussait soudain à des choix égoïstes, nous incitant à prendre des décisions inattendues pour atteindre un bonheur ultime ? Charlotte, au bord d’un burn-out imminent à l’âge de 38 ans, va connaître ce déclic. Embarquant pour un voyage intense, elle découvrira les bienfaits des rencontres sur son chemin…
À PROPOS DE L'AUTRICE
Férue des langues, de littérature et de cinéma,
Mathilde Allaire a toujours nourri le désir secret de publier son premier roman. Cependant, tout comme le protagoniste de son histoire, ses passions ont très souvent été reléguées au second plan, se laissant submerger par les obligations du quotidien.
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Seitenzahl: 189
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Mathilde Allaire
Dernier report pour l’égoïsme
Roman
© Lys Bleu Éditions – Mathilde Allaire
ISBN : 979-10-422-2720-3
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122 – 5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122 – 4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335 – 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
La vie ce n’est pas d’attendre que les orages passent, c’est d’apprendre à danser sous la pluie.
Sénèque
Rien n’est peut-être plus égoïste que le pardon.
André Chamson
Il fixa son écran d’ordinateur en plissant les yeux.
Charlotte s’exécuta. Elle venait de terminer sa semaine de travail et se réjouissait de bientôt sortir du cabinet médical pour pouvoir enfin savourer sa soirée. Son rituel du vendredi soir était d’être en famille avec son mari et ses trois enfants, tous assis dans le canapé devant la télévision, tomates cerises et olives apéritives sur la table basse du salon.
Charlotte restait assise sur le lit en attendant que le pavillon de l’instrument médical lui glisse un petit frisson sur la peau.
Le Docteur Eric Campion annonçait son verdict, tout en s’asseyant de nouveau à son bureau, les yeux fixant son ordinateur par-dessus ses lunettes en demi-lune, comme on en faisait plus. Charlotte, assise en face de lui, l’observait et se disait au fond d’elle-même qu’il était plutôt sympathique, mais assez vieille école. Elle irait de toute manière faire ce fameux bilan, mais seulement lorsqu’elle en trouverait le temps. Tout ce qu’elle était venue chercher, c’était sa précieuse pilule.
Elle acquiesça, et il renchérit :
Elle enfila son manteau, prit son sac à main et les feuilles que lui tendait le généraliste. Tout en le remerciant pour la consultation d’un hochement de tête (à défaut de ne plus pouvoir serrer les mains des praticiens sous l’ère post-coronavirus), elle franchit le seuil de porte du médecin. Du coin de l’œil, elle vit à l’horloge du cabinet, qu’il était précisément dix-huit heures et trente-sept minutes ; l’heure de déguerpir en week-end le plus rapidement possible.
Arrivée devant chez elle, Charlotte actionna le badge de son portail afin qu’il s’ouvre à distance. Une petite merveille de technologie qui lui évitait de sortir de sa voiture par ce temps de pluie assez désagréable pour une fin de journée qui l’avait littéralement lessivée. Elle appuya également sur la télécommande de son double garage et y stationna sa DS7 gris métallisé. Elle sortit de voiture, à l’abri du froid et des giboulées du mois de mars, pour s’engager dans son cellier et rejoindre sa cuisine où elle prévoyait déjà de s’emparer d’une tomate cerise.
À trente-huit ans, Charlotte faisait attention à ne pas se laisser aller à grignoter n’importe quel gâteau apéritif et elle essayait de réfréner ses fringales du milieu d’après-midi au travail, en préférant boire une tisane pour compenser ses envies. Le vendredi soir, elle avait bien le droit de faire une entorse au reste de la semaine, en s’octroyant un verre de vin avec son conjoint, Thomas. Charlotte s’était pesée la veille et maintenait son poids à 58 kg pour 1,65 m. Plutôt sportive à l’origine, elle avait délaissé la course à pied, le handball et la salle de fitness après la naissance de son troisième enfant, Maël. Elle savait qu’elle reprendrait ses activités lorsque ses bambins auraient davantage grandi. Pour le moment, ils lui demandaient beaucoup d’attention et elle faisait d’eux sa priorité.
Inaya accourait dans la cuisine pour sauter dans les bras de sa mère.
Charlotte sourit à la réflexion un peu trop mature de sa fille de tout juste sept ans.
Charlotte alla frapper à la porte de chambre de son aînée, Sarah. Elle attendit d’être invitée à y entrer pour aller embrasser sa fille.
Charlotte s’avança vers le salon, suivie de Sarah. Elle fit un baiser furtif sur la bouche de Thomas qui releva la tête, par-dessus le canapé. Allongé sur la méridienne, un livre axé sur la politique dans la main gauche, il tentait d’apaiser Maël avec quelques massages machinaux dans le dos de son fils, de la main droite.
Charlotte s’était maintenant assise près de Maël pour lui décrocher un énorme câlin.
Le garçon s’exécuta alors, plutôt ravi de pouvoir bientôt grignoter ses chips préférées.
***
La soirée ne s’était pas déroulée dans le plus grand des conforts, comme Charlotte l’aurait pourtant désiré très fort. Inaya, de nature maladroite, s’était prise d’une dispute avec son petit frère, pour savoir qui allait manger la dernière chips et avait d’un grand geste du bras, renversé le sirop de Sarah. Maël, hargneux, s’était empressé de finir tous les bols de gâteaux apéritifs lorsqu’Inaya s’était éclipsée pour aller chercher de quoi nettoyer ses dégâts. Au passage, elle avait marché dans le sirop qui avait dégouliné par terre et elle en avait mis partout sur son chemin, du salon à la cuisine. Sarah, quant à elle dépitée, s’était levée du canapé pour s’enfuir à nouveau dans sa chambre, en soulignant que les « mioches l’avaient soûlée » et qu’elle préférait dorénavant rester seule plutôt qu’on lui impose ce « ridicule chaos hebdomadaire en famille ». Quant aux parents, l’énervement était arrivé à son paroxysme. Après s’en être pris aux enfants et les avoir punis, Thomas avait reproché à Charlotte d’avoir voulu mettre trop de gâteaux apéritifs, reportant ainsi l’excitation des bambins sur les épaules de sa femme.
Charlotte, excédée par l’accumulation de sa mauvaise semaine de boulot, les débordements de ses enfants, les sempiternelles complaintes de son mari, les recommandations du médecin et son indéniable manque de temps pour elle-même, avait fini par aller se doucher et se coucher plus vite que prévu, sans manger.
Au fond de son lit à 20 h 30 pétantes, frustrée et blottie sous sa couette, elle avait allumé la télévision. Elle s’était dit que pour une fois, son imposant mari gérerait bien lui-même la fin de soirée avec les enfants. Énervée, elle avait prévenu tout le monde de ne pas venir la déranger. Braquée dans sa colère intérieure, elle regardait alors les images qui défilaient à l’écran sans véritablement suivre le journal télévisé qui se déroulait sous ses yeux. Elle pensait à son homme qu’elle avait aimé éperdument depuis leur rencontre, lorsqu’elle avait dix-neuf ans et lui vingt-deux, mais dont l’amour avait quelque peu terni au contact des années et de leur folle vie de famille. Plutôt sur la même longueur d’onde, une bonne partie de leur vie commune, il y avait pourtant quelques ombres au tableau qui renfermaient régulièrement Charlotte dans ses interrogations et ses craintes.
Au fond d’elle-même, elle savait qu’elle se forçait à sourire dans son quotidien pour « garder la face ». Elle savait que faire bonne figure auprès des collègues, auprès de familles, auprès d’inconnus, c’était là le nouveau monde d’aujourd’hui, baigné dans des eaux superficielles. Bien que peu présente sur les réseaux sociaux, Charlotte n’y coupait pas. Il fallait sans cesse prouver aux autres, prouver au monde que l’on peut très bien avoir trois enfants du même mari, une silhouette acceptable – notamment à l’approche de la quarantaine – et un job de rêve avec télétravail à volonté à la clé. Bref, réussir sa vie… sans faille.
Mais des failles, il y en avait bien, à commencer par son mari qui ne l’était pas officiellement, d’ailleurs. Après 19 ans de vie commune et trois enfants, Thomas et Charlotte n’étaient même pas mari et femme. Thomas ne voyant pas la nécessité de mettre « autant » d’argent dans un mariage, avait seulement dénié accepter un PACS discret, en tête à tête, à la mairie de Vendôme où le couple résidait.
Avec le temps, Thomas était resté svelte et la barbe poivre et sel de ses quarante et un ans le rendait plutôt bel homme, mais Charlotte voyait désormais en lui toutes les raideurs d’esprit avec lesquelles il avait évolué au cours de sa vie de carriériste. Cet homme, qui avait été doux, devenait de plus en plus aigri et strict, surtout avec elle, pensait-elle. Les jolis mots des premières années avaient petit à petit laissé place à de subtiles, mais permanents reproches, que Charlotte ne supportait plus.
Elle ne voulait pas quitter son homme. Elle ne voulait pas lui faire ce mal ni rompre la structure et l’équilibre d’un cocon familial pour ses enfants. Elle n’était même pas sûre de pouvoir de nouveau aimer la vie ailleurs, la vie autrement qu’ici et maintenant, pourtant recluse dans le fond de son lit.
Charlotte venait de se garer sur le parking de son travail, situé à Beaugency. Comme chaque lundi matin, la circulation intense l’avait amenée à se demander pourquoi elle allait travailler aussi loin de chez elle. Bien sûr, pour le salaire avant tout. Cela était un point primordial aux yeux de Thomas et Charlotte ne voulait pas le décevoir. Au fond d’elle-même, elle savait que ce rythme de vie ne la rendait pas heureuse. Elle, elle aimait jouer de la guitare en autodidacte, juste pour son plaisir personnel, avant d’être mère de famille. Elle aimait écrire aussi. Elle aimait faire des choses de ses mains. Créer et rêver étaient sa passion. Mais cela ne payait pas les factures, surtout en période de crise où l’inflation était au bord des lèvres de tous les Français. Alors elle franchissait chaque jour le même portique de sécurité avant d’accéder au bâtiment où se trouvait son bureau, depuis maintenant treize ans.
Charlotte venait de croiser sa collègue, télévendeuse. Elle n’avait pas très envie de rentrer dans la routine sociale des discussions banales, mais elle savait qu’elle n’y échapperait pas tout le long du chemin.
Charlotte songea un instant à tout le remue-ménage du vendredi soir et au reste du week-end mené par les lessives, le ménage de la maison, les activités sportives des enfants… Elle n’avait pas pris une seule minute pour elle.
Maud, 32 ans, mère célibataire un peu rondelette, était dotée d’une certaine bonhomie. De son franc parlé, Charlotte savait qu’elles n’échangeraient jamais de grandes conversations philosophiques ensemble. De toute façon, au travail, elle s’en tenait au strict minimum dans les relations. À part bien sûr avec son binôme de travail, Carine, devenue sa meilleure amie dans la vie.
Arrivée à son poste, elle ôta son manteau, alluma son ordinateur et pointa son heure d’entrée à l’écran, avant d’aller saluer chaque collaborateur présent sur l’open space. Ce rituel était devenu moins fastidieux malgré tout aux yeux de Charlotte, depuis l’arrêt des bises et des poignées de mains crasseuses d’hommes tout juste sortis des toilettes sans passage hygiénique par le robinet des commodités…
Après salutation de tous les « costards-cravates » (comme elle aimait les appeler secrètement), Charlotte se dirigea au bureau de son amie Carine, qui embauchait 30 minutes plus tôt qu’elle.
Comme à son habitude, Carine, grande rousse svelte aux formes avantageuses, irradiait la pièce de sa joie de vivre quotidienne.
Charlotte sourit à la proposition spontanée de son amie et acquiesça volontiers sans se faire prier. À la machine à café de la salle de pause, elles se racontèrent toutes les deux leur week-end respectif. Carine, célibataire de 40 ans et sans enfant, s’était inscrite à une randonnée nordique avec ses deux belles-sœurs. Elles avaient vu de superbes paysages ressourçant lors de leur excursion bretonne sur le sentier des douaniers du GR34. Charlotte s’était confiée quant à elle sur son excursion « merdique » au fin fond de son lit le vendredi soir et ses disputes à bâtons rompus, en comparant toujours railleusement son week-end avec celui de son amie. Elles avaient beaucoup ri, malgré tout, de la situation.
Elles rirent de bon cœur toutes les deux, tout en retournant à leur poste de travail : Carine dans son bureau, et Charlotte sur le plateau commercial de l’open-space du service RHD. Toutes les deux Assistantes commerciales, elles avaient des fonctions à la fois similaires et différentes. Elles n’exerçaient pas pour les mêmes responsables, mais il arrivait qu’elles aient besoin de travailler ensemble sur certains projets ou qu’elles se relayent sur leurs temps de congés. Elles avaient ainsi appris à se connaître treize ans auparavant et avaient établi leur amitié au-delà de la frontière du travail.
L’heure de la pause déjeuner sonna assez vite pour ces deux collègues qui, comme chaque midi, grignotaient ensemble. Elles se trouvèrent une table pour deux au self de leur entreprise, sans passer par la salle des plateaux-repas, puisqu’elles amenaient toujours leur propre nourriture.