Diaspora - Alpha D. C. - E-Book

Diaspora E-Book

Alpha D. C.

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Beschreibung

Dans un avenir éloigné, les êtres humains ont abandonné la Terre pour s’installer dans toute la galaxie depuis la « plate-forme centrale », qui orbite désormais autour de la planète. Cependant, en déclinant en influence parmi les empires humains dispersés dans la galaxie, les dirigeants prennent la décision de réexploiter les ressources de la planète Terre, désormais nommée Terra Prima. Mais leur initiative se heurte à une résistance inattendue...

À PROPOS DE L'AUTRICE

Les mangas ont éveillé la passion de lecture d’ Alpha D. C., qui s’est ensuite étoffée avec des classiques et de la science-fiction à l’université, inspirée par des auteurs comme Isaac Asimov et A. E. Van Vogt. C’est alors qu’une idée latente depuis plus de dix ans a commencé à prendre forme.

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Seitenzahl: 582

Veröffentlichungsjahr: 2023

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Alpha D. C.

Diaspora

Les chroniques de Terra Prima

Roman

© Lys Bleu Éditions – Alpha D. C.

ISBN : 979-10-422-0862-2

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

La Plateforme Centrale, satellite artificiel de la planète Terra Prima, berceau de l’humanité, avait un temps représenté la bienfaitrice d’une espèce en danger. Le gouvernement de la Plateforme souhaite avoir la mainmise sur les ressources de la planète, mais devant elle se dressent plusieurs obstacles. Tout d’abord les autochtones de la planète, derniers individus d’une humanité disséminée. Ensuite, les empires galactiques, qui se sont formés à la suite de la grande diaspora, quand les êtres humains en danger quittèrent leur planète pour coloniser leur galaxie.

Première partie

Dans l’immensité de l’espace, un grand vide habite les pilotes de vaisseau qui contemplent les boules de lumière suspendues dans l’obscurité, si proches, mais si éloignées. L’ancien Colonel de la marine Ely se laissait porter par ses souvenirs d’autrefois, en contemplant le vide qui lui faisait face.

Il revenait de mission avec sa famille, aussi particulière qu’elle est, il s’agissait bien d’une famille. Son ami de toujours et anciennement Colonel Joshua, voguait avec lui dans l’espace en compagnie de leurs deux jeunes enfants.

Les deux hommes avaient quitté l’armée à la suite de la Grande Explosion. Cet évènement avait bouleversé la Plateforme Centrale à plusieurs niveaux, mais avait aussi marqué la fin des guerres entre systèmes solaires. Pour beaucoup de ceux qui avaient connu l’enfer des conflits, l’insertion dans la vie civile ou celle d’apparat militaire pour parades était impossible. L’armée n’était plus utile et n’avait pas rempli son contrat à leurs égards.

Cela faisait huit ans qu’avait eu lieu la Grande Explosion. Beaucoup de vies humaines furent marquées et changées à jamais, et c’est à l’appel de l’aventure que les anciens colonels décidèrent de succomber. Peut-être par amour de l’action ou pour pouvoir subvenir aux besoins de leurs enfants. Les deux hommes avaient choisi de devenir des mercenaires de l’espace. La guilde offrait de bons contrats avec des risques mesurés et quantifiés par un système de notation allant de F pour les moins dangereuses à A pour les plus dangereuses. Mais qu’est-ce que le danger pour des hommes qui ont vu au cours de leur vie, plus de mondes que ne verra jamais un citoyen de la Plateforme Centrale ?

Les Colonels Ely et Joshua avaient grandi ensemble, s’étaient engagés au même moment dans l’armée, avaient fait la rencontre de leurs femmes le même jour au cours d’un bal, et s’étaient mariés le même jour avec elles. C’est dans la continuité des évènements que les deux amis les perdirent lors de la Grande Explosion. Leurs enfants, un petit garçon nommé Ray et une petite fille nommée Mili avaient survécu grâce aux sacrifices de leurs mères.

Ray était plutôt d’un caractère tendre, il aimait beaucoup observer son père piloter, passionné par tous ces boutons et la magie du pilotage en lui-même. Il était blond aux yeux bleu pâle comme son père. Il comprenait bien que l’on puisse piloter dans l’espace, car il n’y avait aucune gravité, aucun poids, mais lorsque le vaisseau pénétrait dans une atmosphère, tout était différent et cela le perturbait, mais le passionnait par la même occasion.

Mili, la fille de Joshua, avait un caractère de combattante à l’inverse de son père, qui d’un physique impressionnant était profondément diplomate. Il le disait lui-même, la sagesse vient avec l’âge, pas de doute pour lui qu’un jour sa fille s’assagirait. Il le comprenait bien, lui aussi était le premier à se battre lorsque enfant, les deux hommes vivaient dans les zones basses de la Plateforme Centrale. Elle avait pris le teint ébène de son père, et les yeux bleu foncé très caractéristique du peuple de sa mère.

Les origines de sa mère remontaient à une ancienne tribu qui autrefois peuplait Terra Prima. Le code génétique très rare de ce peuple ancien se transmettait encore de génération en génération.

La famille revenait de mission, et devait assurer le transport d’un artefact provenant d’une exoplanète que des archéologues de la Plateforme Centrale étaient partis étudier.

La Plateforme Centrale restait pour les enfants un lointain souvenir. De mémoire, seules leurs aventures dans l’espace aux côtés de leurs pères rythmaient leur quotidien. Ils ne se rappelaient plus les visages de leurs mères, qui lors de la Grande Explosion avaient fait barrage de leurs propres corps pour les protéger. Seules les transmissions d’informations sur le petit projecteur holographique du vaisseau leur avaient laissé entrevoir cet endroit, prodige du savoir humain, et avaient nourri leurs rêves les plus fous. Huit ans d’aventure dans l’espace, à découvrir des planètes, des civilisations plus différentes les unes que les autres. Pourtant, c’était pour la Plateforme Centrale que tous les deux étaient excités à l’idée de pouvoir enfin la contempler de leurs propres yeux.

Les cris d’enfants emplissaient l’espace du vaisseau, Ely regardait droit devant lui, non plus rêveur, mais d’un regard concentré et perçant quand Joshua s’approcha de lui.

— Inquiet comme d’habitude ?
— Tu sais, quelque chose me tracasse, comment se fait-il qu’une simple mission de transport d’artefact soit si bien payée ?
— Peut-être que le travail devient trop facile pour des vieux comme nous. Les jeunes qui se lancent dans les affaires n’ont connu aucune guerre, ils sont faibles si tu veux mon avis.
— On est d’accord, mais une mission de rang A, puis aucune autre information n’a filtré sur l’artefact que l’on transporte.
— Personne n’a envie de se rendre dans cette partie de la galaxie, il y a bien trop de supernova ! C’est une partie mourante qui fait peur à tout le monde. De toute façon, tu as pris tes précautions pour le chemin de retour n’est-ce pas ? lui demanda Joshua en manipulant le tableau de bord pour voir leur itinéraire de retour.
— Oui, passer par Poros est le chemin le plus sûr, on pensera que nous sommes simplement des touristes de retour de vacances. Mais si notre ennemi est malin, il nous attendra là-bas, à la sortie de la porte inter-systèmes. Je t’avouerais mon pote, que c’est dans les prochaines minutes que nous serons fixés, tiens-toi prêt.
— Oui Chef ! dit la masse ébène non sans moquerie. Mais tu es sûr que ceux que nous croiserons à la sortie de la porte seront nos ennemis ? Il pourrait simplement s’agir d’une surveillance des portes ? Ils ont l’habitude de recruter des mercenaires pour ce genre de mission.
— Oui, des missions de rang F pour la plupart. Ces gens ne pensent seulement qu’à l’argent et s’amuser. Mais je suis sûr à quatre-vingt-dix-neuf pour cent que ce sera notre ennemi que l’on croisera. Comme personne n’est assez fou pour se battre à Poros, j’ai vraiment hâte de voir qui sera là ! Mili, lâche Ray maintenant et attachez-vous !
— Oh ! On est arrivé ? dirent à l’unisson les deux enfants qui jouaient à se battre.
— Pas encore ! Mais il risque d’y avoir du mouvement, dit Ely en pianotant sur son tableau de bord.

Mili avait maîtrisé en une clé de bras Ray. Elle le lâcha aussitôt et rejoignit son siège sagement, presque machinalement. Ray, qui avait l’habitude de se faire battre par cette petite force de la nature, se releva et courut comme si de rien n’était sur le siège placé derrière son père pour mieux l’observer.

Pour le retour de la mission, ils avaient fait le choix d’emprunter un chemin différent, plus long, mais plus sûr, les hommes d’expériences qu’ils étaient s’attendaient à ce qu’il y ait de l’action. Une mission de rang A ne pouvait pas se passer sans qu’un tir de canon énergétique ne soit donné, ils en étaient conscients.

Le vaisseau s’apprêtait à sortir de la porte inter-systèmes qu’ils avaient prise. Ces portes permettaient de rallier plus rapidement des systèmes solaires très éloignés dans la galaxie. Elles avaient été construites au temps de la colonisation spatiale, la grande Diaspora. Les deux hommes regardaient devant eux avec une concentration que l’on ne pouvait acquérir qu’après un certain nombre de combats dans l’espace, chacun à son poste, Ely aux commandes et Joshua aux canons.

Ils savaient qu’en sortant par cette porte, un vaisseau de petite taille, bien commandé, pouvait passer inaperçu sous n’importe quel radar. L’étoile où il se trouvait pouvait être utilisée pour se dissimuler. Seuls les enfants étaient émerveillés par l’apparition de l’astre, car rien n’est plus beau, que l’observation d’un soleil vu de l’intérieur d’un vaisseau. La lumière remplit doucement la face avant de l’engin, le hublot avant s’opacifie pour filtrer les rayons de l’étoile et faire baigner d’un rouge orangé le poste de pilotage. Autant le spectacle était beau pour les enfants, autant il était dangereux pour les adultes.

— Tiens-toi prêt, on sera fixé dans pas longtemps, dit Ely à son ami.

Le cercle et l’hexagone, le symbole ne laissait aucun doute. Il y avait là un vaisseau amiral appartenant à la grande flotte de la Plateforme Centrale.

— Tu penses que la marine nous tomberait dessus ? demanda Joshua via son communicateur intra-auriculaire.
— Ça n’a aucun sens, c’est étrange. Attendons qu’ils rentrent en communication avec nous. Ils nous diront ce qu’ils veulent, dit-il d’une voix légèrement tremblante.

Arrivé à porter de communication, le vaisseau de la marine leur demanda d’indiquer leur matricule.

— Nous sommes de la Guilde des Mercenaires. Nom de code : Black Star. Code mission : MBS0X8.
— Merci, veuillez ne pas bouger pendant la confirmation de vos identités.
— Ça devrait aller, ils nous laisseront passer sans problème, dit Joshua d’un air confiant.

Un soupçon de doute restait néanmoins gravé sur le visage d’Ely et c’est à son grand étonnement qu’il nota : « C’est bien calme derrière ? »

— Oui, après le lever de soleil, Mili s’est endormi, répondit Ray en la bousculant comme pour montrer à son père qu’elle était bel et bien endormie.

La communication entre les deux vaisseaux fut rétablie.

— Vous avez ordre d’amarrer votre vaisseau. Des explications vous seront fournies par nos supérieurs à votre arrivée. Terminé.

Ely réfléchissait, à quoi faire dans une telle situation ? Il n’avait aucunement l’envie de se retrouver à l’intérieur de ce grand vaisseau de la marine. Cette même marine à laquelle ils avaient lui et Joshua appartenus. Les enfants étaient leur seule préoccupation, il ne le savait que trop bien, mais leur vaisseau n’aurait aucune chance face à un tel bâtiment.

Le hangar du vaisseau amiral était énorme, on pouvait compter au moins six vaisseaux de la même taille que celui d’Ely et Joshua, une quinzaine de vaisseaux plus petits remplissaient l’espace restant. La lumière se réfléchissait sur la surface blanchâtre, ce qui amplifiait son effet, c’était calculé, il fallait que les personnes de gardes aient une impression constante de jour ambiant pour rester le plus actives possible. Tenir les soldats éveillés dans cette fourmilière était le seul but de tout l’éclairage qui composait le vaisseau. L’engin se posa à un emplacement défini au sol par des lumières rouges. Joshua donna les dernières recommandations avant de sortir.

— Ray, tu vas rester dans le vaisseau pour surveiller Mili. Quand elle dort comme ça, il est impossible de la réveiller. Prend ce communicateur, tu nous envoies un signal à son réveil.

L’enfant alla se mettre à la place de son père, au poste de pilotage, et regarda les deux hommes s’avancer escortés par quatre soldats portant l’uniforme de la marine. Tandis qu’ils s’avançaient, une porte du hangar s’ouvrit et un homme escorté par deux autres soldats franchit la porte. Par son uniforme blanc, sa veste blanche aux bandes dorée au niveau des poignets, il ne faisait aucun doute qu’il était le plus gradé d’entre tous.

— Bande de pourriture de l’espace ! cria-t-il.

Les deux amis se regardèrent avec un large sourire.

— Général ? dit Joshua.
— Myers ! renchérit Ely.
— Idiots de l’espace ! Les deux inséparables ! Quelle surprise de vous trouver ici !

Le Général Erwin Myers avait été transféré pour officier sur ce grand vaisseau amiral après que la Grande Paix fut déclarée. Il avait le physique d’un guerrier, tout chez lui criait le mot guerre. Sa barbe bien taillée et ses cheveux gris bien peignés étaient conformes au protocole. C’est dans ses pupilles d’un bleu glacial qu’on pouvait lire qu’il s’agissait d’un homme qui avait navigué dans tous les systèmes solaires de la galaxie et participer à mille combats.

— Le petit garçon au poste de pilotage qui nous regarde doit être le vôtre Ely ! Déjà un pilote comme son père ? dit-il en agrippant ses anciens compagnons sous ses deux larges bras.
— En effet, il m’observe tellement que je pense qu’il sera meilleur que moi !
— Vous êtes le meilleur pilote de cette foutue galaxie ! S’il devient meilleur, envoyez-le-moi, je m’occuperais de lui.
— Même pas en rêve Général !
— Et vous Josh ? Vous avez une fille je crois, est-elle à bord aussi ?
— Oui ! Elle dort comme une pierre.
— Je suis sûr que ça doit être une guerrière comme son père !

Joshua qui arborait son sourire habituel lui répondit avec fierté.

— Oh oui ! Je l’entraîne tous les jours ! 
— Vous avez là un parfait équipage messieurs ! Faites-les donc descendre que je les rencontre.

Ely, sur son ton moralisateur habituel, n’hésita pas à refuser la demande du général.

— Ce sont de vrais petits soldats. Mais ils ne feront que nous déranger s’ils viennent avec nous Général. À force d’être dans l’espace, ces enfants sont devenus bien trop curieux. Ils sont bien mieux à nous attendre dans la navette. 
— Ah parfait ! Venez avec moi ! On va boire un verre ou deux pour se rappeler du bon vieux temps, la bataille dans le système solaire d’Aal… J’adore raconter cette histoire aux petits nouveaux, croyez-moi. C’était juste incroyable, votre meilleure performance ! Vous allez aussi m’expliquer votre mission qui nous amène à nous croiser par le plus grand des hasards.

Les quartiers du Général Myers respiraient la modestie qu’un soldat de n’importe quel rang doit posséder. Dénué de tout matériau clinquant comme on en trouve sur les vaisseaux d’hommes fortunés. Le bureau était l’élément principal de la pièce, deux chaises lui faisaient face. Au centre était placé l’espace pour les projections holographiques. Au fond de la pièce, un canapé très large, dans un état qui laissait croire que peu de personnes l’avaient un jour occupé. À ses côtés, une porte fermée qui devait sûrement donner sur la partie privée. Un grand hublot lui permettait de voir en contrebas une large partie du vaisseau. Ils s’étaient toutefois accordé le privilège d’installer un mini bar fait de bois naturel qui détonnait entièrement avec le reste de la pièce. Les retrouvailles furent chaleureuses. Les amis buvaient et rigolaient. Par moment, des silences à la mémoire de camarades tombés au combat ponctuaient leur conversation, puis les rires reprenaient.

Mili avançait dans une forêt tropicale très dense, sa petite main écartait les grandes feuilles qui se dressaient sur son passage. Il faisait nuit, la lune était pleine et devant elle s’accordait à merveille un bal de lucioles qui lui éclairait le chemin.

À mesure qu’elle avançait, elle entendait les clapotis d’une eau calme. Au centre de cette forêt se trouvait un lac, au centre de ce lac se trouvait une petite île. Elle le savait et continuait d’avancer. En face d’elle, sur la petite île, elle put très distinctement apercevoir une femme qui se lavait les pieds au bord de l’eau.

Cette femme était habillée d’un habit léger blanc éclatant qui faisait se réfracter la lumière de la lune. Une longue chevelure blonde ondulée lui descendait jusqu’aux genoux. Dans la contemplation de cette personne, Mili s’aperçut que cette femme était elle aussi de peau ébène.

Elle se jeta dans l’eau et nagea vers elle de toutes ses forces. La jeune femme, voyant l’eau perturbée, se redressa et aperçut la petite fille nager. Elle sauta de joie de la voir, elle plongea à son tour dans l’eau pour aller à sa rencontre.

Lorsqu’elles arrivèrent au moment de se toucher, Mili se réveilla avec la main de Ray lui bouchant la bouche. Il lui fit signe de faire silence. Mili leva les yeux.

Le vaisseau était composé à l’avant d’un poste de pilotage avec six sièges dont deux rabattables. On accédait ensuite à la salle commune qui servait de salon, salle à manger et accessoirement salle de jeux pour les enfants. Une zone avec deux lits superposés de part et d’autre du couloir. Puis, un espace de stockage équipé d’une échelle donnant accès au second niveau situé dans la partie arrière basse. Celui-ci avait la particularité, comme sur toutes les anciennes machines de cette époque, de donner un accès manuel au canon placé sur le ventre du vaisseau.

Naviguant avec des enfants à son bord, Ely et Joshua avaient fait le choix d’une acoustique interne particulière. Savoir où se trouvaient les enfants lorsqu’ils étaient occupés tous les deux à l’avant de la machine leur tenait à cœur. C’est grâce à cette acoustique, que Ray put savoir qu’un intrus s’était infiltré à l’intérieur de leur vaisseau. Il lui chuchota.

— Quelqu’un est dans le vaisseau, ne fait pas de bruit.

Mili avait toujours son sabre de bois proche de son siège, une habitude que son père lui avait inculquée. Elle prit doucement son arme. Avant même que Ray s’en aperçoive, la fillette se tourna et fit un bond d’une droiture incroyable, comme un félin qui se jette sur sa proie. La jeune guerrière arriva pile sur la poitrine de l’intrus, qu’elle agrippa et mit K.O en lui assénant un coup de son manche sur le sommet du crâne. Sa voix ne tremblait pas, elle était calme et remplie d’assurance lorsqu’elle donna l’ordre à son jeune ami.

— Ray, prends-le par les pieds, on va l’attacher.

À son réveil, le jeune intrus avait les poignets et les chevilles attachées. Face à lui, dans toute leur fierté, deux enfants se tenaient debout et le dévisageaient avec défiance.

Le Capitaine Grace était un militaire académicien. Physiquement pas très impressionnant, il arborait encore la coupe de cheveux des nouveaux diplômés. Issu d’une planète paysanne, régie par l’empire Granique, son accent le trahissait par moment. Doué d’une intelligence sans pareille, il avait réussi à obtenir une bourse d’études pour intégrer la grande institution qu’est l’académie militaire de la Plateforme Centrale. Toutefois, son sourire était sa meilleure arme. Il avait le don d’insuffler une confiance absolue à n’importe quel individu qui lui faisait face. Pas étonnant qu’il fut très apprécié par sa hiérarchie.

— Bonjour à vous deux, dit-il en souriant.
— Décline ton identité soldat ! demanda sur un ton sec Mili, tout en pointant son sabre en bois sur le visage du jeune homme.
— Je suis le Capitaine Grace, on m’a envoyé ici pour venir vous chercher.
— Mon père nous a dit de rester dans le vaisseau. Il n’y a que lui ou Josh qui peuvent nous dire de quitter l’appareil, lui répondit Ray.

Le Capitaine Grace comprit rapidement à qui il faisait face. Non pas deux enfants ordinaires venus de la Plateforme, mais bien deux spécimens particuliers, deux enfants de purs soldats.

— Écoutez, on m’a fait envoyer ici pour venir vous chercher. Ce sont mes ordres. Le reste je ne sais pas. Mais croyez-moi, vous n’avez pas besoin de m’attacher. Vous êtes ici sur un vaisseau ami de la marine.

Sur un air de méfiance cette fois-ci, Mili le dévisagea, puis, comme un général de brigade, elle ordonna à Ray de le détacher. Le Capitaine se releva tout en frottant ses poignées.

— Merci, je présume donc que c’est toi la chef, dit-il sur un ton d’amusement.
— Nous sommes deux dans un, il n’y a pas de chef entre nous. Quand il s’agit d’assommer les idiots, c’est mon rôle. Quand il s’agit de piloter, c’est son rôle. Répondit Mili en désignant son ami par le pouce.

Le capitaine qui était pourtant un garçon intelligent fut désemparé par cette réponse.

— J’ai envoyé le signal, Papa et Josh seront bientôt de retour, dit Ray.
— Merci de me prévenir, alors mes très chers amis, voulez-vous qu’on les attende ensemble à l’extérieur ? Je parie que vous n’avez jamais vu l’intérieur d’un aussi grand vaisseau que le nôtre.
— Nos pères nous ont tout appris sur les vaisseaux. Je serais capable de vous décrire votre vaisseau dans son entièreté sans n’y avoir jamais mis les pieds, dit Ray avec fierté. Alors non merci, on maintient l’ordre de rester ici.
— Très bien, alors je vais rester un peu avec vous ici le temps qu’ils arrivent. Si ça ne vous dérange pas ?
— Permission accordée, répondit Mili, mais vous resterez dans la grande salle pour que je puisse vous surveiller.

Le Capitaine les remercia avec son sourire chaleureux qui le rendait si célèbre auprès de ses compagnons. Même les enfants ne purent s’empêcher de ressentir un bien-être intérieur qui les mit un peu mal à l’aise. Une vingtaine de minutes plus tard, les deux pères revinrent près du vaisseau accompagnés par le Général Myers et quatre soldats. D’en bas, on voyait les enfants s’amuser avec le Capitaine Grace au poste de pilotage. La porte latérale du vaisseau s’ouvrit et le Capitaine descendit accompagné par les enfants qui ne voulaient plus le lâcher.

— Au rapport Capitaine, lui dit sur un ton sévère Myers.
— Rien à signaler Général, les enfants ne voulaient pas sortir alors j’ai jugé préférable de rester avec eux le temps que leurs pères soient de retour.
— Très bon jugement jeune homme, lui dit Joshua. Il se tourna vers Myers, merci beaucoup pour l’accueil Général, nous allons partir maintenant, nous avons une mission à terminer.
— Oui, bien sûr, d’ailleurs nous n’avons même pas pu parler de cette mission.
— Il s’agit juste d’un transport de vieilleries que des archéologues ont trouvée. Nous devons les ramener à un musée sur la Plateforme Centrale, lui dit Ely.
— Rien de bien difficile pour vous deux alors. Très bien. Et s’il y a quoi que ce soit, n’hésitez pas ! Nous restons à naviguer dans Poros pour le moment.

Merci Général dirent les deux hommes à l’unisson en se mettant au garde à vous.

Les anciens amis se séparèrent ainsi. Les enfants adressèrent de chaleureux au revoir à leur nouvel ami. Le vaisseau s’envola sous les yeux du Général Myers et de son capitaine.

— Un simple transport de vieilleries ? Qu’avez-vous découvert Capitaine ?
— Je n’ai pas eu le temps de bien voir ce qu’ils transportaient. J’ai toutefois réussi à placer une caméra, nous saurons sous peu de quoi il s’agit.
— Vous me ferez un rapport quotidien. Ils doivent encore traverser Granique avant de se rendre à la Plateforme.
— Granique est un allié de la Plateforme Centrale, nous devrons agir avant qu’ils atteignent cette zone.
— Vous avez tout à fait raison Capitaine, je dois savoir ce qu’ils ont avant de nous engager dans quoi que ce soit contre ces deux-là.

Les déplacements spatiaux avaient fait un bon fulgurant lorsque l’humanité s’était fixée pour objectif de conquérir les systèmes solaires habitables. Les traversées se faisaient à l’aide de grands portails, disséminés dans l’espace, qui se reliaient entre eux. Lorsque l’on prenait l’une de ces portes, n’importe quel vaisseau passait dans l’hyper espace et franchissait des distances incroyables en un temps réduit. À la suite de la Grande Paix, trois portes supplémentaires furent construites. Les technologies ulésiennes, les plus avancées de toutes, furent à leur origine. Celles-ci faisaient se rejoindre le système solaire de la Plateforme Centrale avec l’empire Poros et l’empire Ulésien. Seul l’empire Granique, très conservateur, n’avait pas souhaité utiliser cette technologie.

À l’intérieur de ces portes, la navigation se faisait sur pilote automatique, car aucun homme ne pouvait y naviguer sans risquer de sortir du champ et dériver dans un espace inconnu. La clé de cette navigation était donc la connaissance des coordonnées de chaque porte. Il leur restait encore quelques jours avant d’arriver à la Plateforme Centrale.

Ely, qui était en charge de l’emploi du temps, décida de faire une halte sur une planète balnéaire où les plages sont les plus belles de la galaxie, d’après la publicité. Ces endroits sont en réalité, du moins pour la plupart, des chefs-lieux de rassemblement pour les mercenaires en tout genre. Il était bon pour eux d’y aller pour récupérer des informations, avant de se diriger aux portes inter-systèmes.

Pour pouvoir protéger et conserver la nature de la planète, mais surtout pour un intérêt pécuniaire, les propriétaires avaient installé une station spatiale où on entreposait les vaisseaux. Le flux des arrivants et des sortants était ainsi gardé sous contrôle.

Arrivés sur la plateforme de stationnement, il fallait louer un petit véhicule léger gravitationnel qui ne pouvait que fonctionner sur la planète. Ils atteignaient une vitesse de pointe de huit cents kilomètres par heure.

Il y avait de tout sur cette planète. De l’île privée sans vis-à-vis, à l’hôtel rempli de touristes venus pour quelques jours seulement. Ely et Joshua voulurent faire plaisir aux enfants en louant toute une île avec un grand bungalow de deux étages.

Cette exoplanète, placée, proche de son étoile, bénéficiait d’un climat tropical sur toute sa surface. L’eau bleue translucide, le sable fin blanc, donnaient au paysage une allure de paradis terrestre.

Ely laissait souvent Ray conduire les petits engins. Cela lui permettait d’apprendre la responsabilité d’avoir la vie de ses passagers en main. Mais surtout, l’entraînait par-dessus tout au pilotage gravitationnel. C’est le jeune garçon qui posa la navette sur leur petite île privée.

Une fois installé dans leur bungalow familial, Mili prit Ray par la main et l’entraîna dehors pour aller jouer. Joshua et Ely étaient assis dans la cuisine, un verre de whisky à la main et dévisageaient la boîte contenant le colis archéologique. Ely demanda à son ami.

— Qu’en penses-tu ? 
— Aucune idée, mais les archéologues ont dû mettre la main sur quelque chose de bien rare pour que ça justifie une mission de rang A.

Les deux amis n’avaient aucune intention d’ouvrir le colis, leur honneur de soldat le leur interdisait, l’éthique le leur interdisait. Mais il n’était pas rare que dans la guilde certains se laissent appâter par le gain. Dans ce cas, c’était la radiation immédiate de la guilde qui entraînait ainsi le basculement dans la piraterie. Il faut savoir que les mercenaires venaient de tous les horizons, certains n’avaient pas de formation militaire et se débrouillaient dans d’autres domaines. La prise d’informations ou encore la réparation d’engins mécaniques. La guilde acceptait tout le monde, tant que vous êtes prêt à renoncer au confort moderne et que vous savez quoi faire de vos dix doigts pour être payé par mission.

— Tu m’avais dit que les difficultés allaient arriver sur le chemin du retour, mais pour le moment rien ne s’est passé. On a même croisé un ancien compagnon d’armes. Nous sommes à seulement huit anneaux – soit quatre bons dans l’hyperespace – avant d’arriver à bon port. Qu’en penses-tu ?
— Il s’agit d’une mission de rang A. La partie se joue différemment de ce que nous connaissons. On ne rentre pas dans le tas en esquivant et en tirant sur nos ennemis. Dis-toi que nous sommes observés, depuis le moment où nous avons quitté la station des archéologues avec ce colis. Nous sommes des cibles ambulantes. L’ennemi attend simplement la confirmation et la bonne occasion pour frapper, dit Ely très sérieusement.
— Heureusement que cette planète a l’un des meilleurs systèmes de protection de l’univers, dit Joshua en regardant le ciel.

La planète était en effet protégée dans son entièreté par un champ de force. Si l’on fixait assez longtemps le ciel, une déformation dans les nuages pouvait être perçue.

— Nous sommes à l’abri pour le moment. Sur le chemin du retour, nous avions deux possibilités, tomber sur un ennemi hostile ou tomber sur un ennemi conciliant. 
— Tu veux dire que Myers est notre ennemi ? dit Joshua surpris par l’analyse de son ami.
— Oui. Nous sommes tombés sur le deuxième cas. Mais l’un ne va jamais sans l’autre, malheureusement. Ils ont juste cherché à nous évaluer avant de nous attaquer de front.
— Dans ce cas, l’attaque frontale va avoir lieu quand on quittera ce lieu, dit Joshua triste en regardant le fond de son verre.

Ely vit que son ami, qui était toujours très expressif, venait de subir une baisse de morale conséquente à la suite des conclusions qu’il venait de faire.

— Très bien ! Ce soir on prendra donc la navette et on ira au Grand Hôtel Central voir les autres et prendre quelques infos, dit Ely.

La pêche à l’information était l’activité favorite de Joshua. Sa mine enjôleuse et son caractère doux, était très apprécié par tout le monde. Les femmes lui tombaient dessus et lui parlaient sans aucune retenue. Les hommes, après s’être rendu compte que cette montagne de muscle était très amicale, n’hésitaient pas à se confier.

— Avant d’y aller, on passe un peu de temps avec eux, dit Joshua en faisant un signe en direction des enfants.
— Ouais, pas de problème ! Le mien sera le meilleur pilote de toute la galaxie, je dois bien le former.
— Et la mienne, la plus grande combattante !

Ils déposèrent leur verre et sur un ton autoritaire que seuls ceux qui ont connu l’armée connaissent Joshua appela les enfants : « Mili ! Ray ! ».

Les deux enfants adoraient lorsque Joshua les appelait de cette manière. Ils courraient vers lui en se poussant pour être le premier à parler. Ce fut comme d’habitude Mili qui gagna.

— On a repéré un banc de tortues pas trop loin ! Et…
— Et des dauphins aussi Josh ! Des dauphins ! Des vrais de vrais ! dit Ray en coupant la parole à Mili trop essoufflée.

Ely se mit à rigoler de tout son corps, Joshua les regardait avec tendresse.

C’est dans ces moments-là que les deux anciens soldats se souvenaient qu’ils étaient une famille.

— À part les dauphins, avez-vous remarqué quelque chose de suspect ? demanda Joshua.

Mili très soucieuse, mesura mentalement l’exactitude de ses propos. Elle ferma les yeux, se concentra et comme une récitation commença.

— Peu après notre arrivée sur l’île, deux autres engins gravitationnels se sont posés sur une île un peu plus au Nord. Trois autres engins y ont décollé. D’après la fréquence, il s’agit sûrement du lieu où se trouve le Grand Hôtel Central. 
— Parfait ! Vous avez vu juste ! Allons voir ces tortues et ces dauphins maintenant ! Puis après c’est entraînement pour vous deux cria joyeusement Joshua.

L’après-midi fut ensoleillé. Joshua passa du temps sur la plage à entraîner Mili avec des armes en bois et à main nue. Ely et Ray étaient dans les airs avec le vaisseau gravitationnel.

À la nuit tombée, la chaleur n’avait pas baissé d’un degré. La petite famille embarqua dans la navette que conduisait Ray et se rendit sur la plage du Grand Hôtel Central.

La plupart des mercenaires logeaient dans ce grand bâtiment. Les chambres n’étaient pas très chères pour les courts séjours et beaucoup de promotion était faite pour les groupes de personnes.

Arrivés sur la plage, les enfants partirent jouer de leur côté. Ely et Joshua allèrent au bar de la plage.

— Bonjour messieurs ! Ne dites rien ! Deux whiskys secs n’est-ce pas ?
— Comment avez-vous su ? demanda Ely surpris.
— Vos bottes ! Seuls des anciens soldats portent ce genre de bottes, surtout dans un climat pareil. J’ai moi-même servi dans l’armée. Vous savez, quand on a réussi à sortir de l’enfer. On garde les chaussures qui nous en ont sorti. C’est un peu comme des porte-bonheur. Et on soigne le mal par le mal, c’est le meilleur remède. Les gens qui n’ont pas connu la guerre sont ceux qui prennent des cocktails à nom d’oiseau.

Joshua admiratif devant ce jeune barman cria sans retenue.

— Un frère d’armes ! Tu entends ça Ely ! Magnifique ! C’est bien ça mon ami ! Deux whiskys ! Mon ami et moi étions colonels sous les ordres du Général Myers. Quel est ton grade et ton nom soldat ? 
— Ma carrière militaire n’a pas été très brillante vous savez. Un gamin pauvre, d’une planète pauvre, voilà tout ce que je suis. Nous étions destinés à être de la chair à canon. Mais voilà, après plusieurs morts de gens plus gradés que moi, et beaucoup de chance, j’ai réussi à me hisser au poste de Major. Major Richet ! À vos ordres ! dit-il d’un air nonchalant et avec le sourire aux lèvres en rangeant des bouteilles sous le comptoir.

Joshua l’avait écouté avec beaucoup d’empathie. Il prit une gorgée en levant son verre en direction du jeune homme pour signifier qu’il partageait son point de vue. Il lui fit signe de se rapprocher et chuchota comme s’il commandait quelque chose d’interdit.

— Dis-moi ! Y a-t-il des activités pour les enfants ici ? 
— Oui ! Ne vous en faites pas. Ce soir, c’est le grand barbecue et y aura plein d’activité !
— T’entends ça Ely ?! cria-t-il comme s’il avait trouvé un trésor.

Ely partit à la recherche des enfants sur la plage pour les inscrire aux jeux de la soirée. La réelle intention était surtout de laisser Joshua avec ce barman bien bavard pour récolter quelques informations utiles.

— Y a-t-il beaucoup de mercenaires dans les parages ?
— Oui Colonel ! Le bruit qui court est qu’il y aura du grabuge dans le secteur. Ils préfèrent venir s’abriter ici le temps que ça passe.
— Voyons ! Pas de colonel avec moi mon ami ! Mais dites-moi… Ont-ils parlé de quelle sorte de grabuge ?
— Il semblerait qu’une mission de Rang A ait été prise par des gens de votre guilde. Ils devraient passer par ici, mais les pirates ont aussi eu l’information. Les pirates ne savent pas à qui s’attaquer. Alors, ils sautent sur tous les vaisseaux qui traversent les portes pour y prendre leur marchandise en espérant tomber sur cette perle.
— Bon sang ! Mais ces mercenaires ici… Ce sont des lâches, je me demande de quel niveau ils sont.
— La plupart ici n’ont jamais fait la guerre. Ce sont ceux de la nouvelle génération ! Et vous alors que faites-vous ici ?
— Nous monsieur ?! On a des enfants avec nous c’est pas pareil ! À la vôtre mon ami !

La nuit était sombre et très étoilée. La plage était éclairée par des feux répandus un peu partout, plusieurs groupes de personnes s’étaient formés autour d’eux. Les enfants participaient au concours qui se donnait en guise de divertissement. Mili, très sérieuse dans sa tâche, explosait les records et terminait première à tous les jeux. Les deux amis avaient trouvé des chaises longues et les avaient placées un peu à l’écart de tout le monde pour observer l’eau calme et les étoiles.

— C’est incroyable que l’on puisse voir l’immensité de l’espace sur une si petite planète.
— L’heure est grave Ely.
— Qu’est-ce qu’il a bien pu te dire pour te mettre dans cet état ? demanda Ely
— J’ai appris que des pirates pillent les vaisseaux au hasard sur la route.
— Nos chances d’en croiser sont donc très fortes. Il faut rajouter ce vaisseau amiral de la Plateforme Centrale avec le Général Myers à sa tête, dit Ely d’un calme froid.
— Le combat risque d’être inévitable. J’ai essayé de voir parmi les mercenaires ici, mais ce sont des débutants pour la plupart. Je n’ai croisé que deux équipages prêts à faire le chemin avec nous. Ils doivent se rendre eux aussi sur la Plateforme Centrale sans plus attendre.
— Nos chances de réussir ?
— Je dirais au-dessus de 70 % avec pertes, mais t’es meilleur que moi avec les chiffres.
— Et sans pertes ?

Joshua qui fumait un cigare prit une bonne bouffée avant de l’expulser doucement et répondit à son ami d’une voix laconique : « En dessous de 10 % ».

Mili sauta sur le ventre de son père comme à son habitude et cria très fort avec fierté.

— Regarde papa ! J’ai tout gagné ! 
— Bravo ma fille ! T’es la meilleure !
— Je me suis retenu pour que Ray aussi ait une médaille et il n’a même pas réussi.
— C’est faux Mili ! T’as tout joué à fond ! cria Ray un peu gêné.
— Tu dis que je suis une menteuse ?
— Oui !

Ray avait une peur contrôlée de Mili. Il savait qu’il allait se retrouver dans une position plus au moins humiliante à chaque fois qu’il entrait en conflit avec elle. Mais le jeune garçon n’a jamais eu peur de lui dire la vérité. La petite fille sauta du ventre de son père pour se ruer sur Ray. Les deux enfants se bagarrèrent sous les yeux de leur père heureux de les voir ensemble.

Joshua laissa Ely rentrer en avance avec les deux enfants. Le bavard Richet lui avait indiqué plusieurs personnes à contacter pour leur mission du lendemain. Assis au bord de la plage, un vieil homme regardait avec nostalgie les va et vient de l’eau sur la plage. Il parcourait les systèmes solaires pour proposer aux stations balnéaires des activités. Son équipage était surtout composé de musiciens, de clowns et d’artistes de voltige. Ce sont eux qui avaient organisé les jeux sur la plage. Toutefois, comme beaucoup d’autres vaisseaux, ils étaient équipés de canon, car personne n’est assez fou pour parcourir la galaxie sans armes. C’est avec lui que Joshua décida de commencer son recrutement.

— Bonsoir à vous camarades, dit Joshua en levant la main en geste d’amitié
— Bonsoir Colonel, voulez-vous un verre de whisky ? dit un homme qui avait les cheveux gris et ébouriffés.
— Vous êtes donc déjà avertis.
— Oui, Richet nous a tout dit. C’est un bon garçon celui-là vous savez ? Il est apprécié par tout le monde qui le croise.
— En effet, un homme digne de confiance. Alors comme ça vous avez servi dans l’armée ?
— Oui Colonel, enfin juste moi. Eux ce sont des orphelins de la Plateforme Centrale. Voyez-vous, après la grande explosion, ma femme s’est mise à les recueillir. On leur a appris quelques tours et ce que vous avez devant vous ce sont les jeunes les plus âgés et les plus doués. Nous devons retourner sur la Plateforme. Ma femme a besoin d’argent pour la nourriture et le loyer, puis j’ai ces gamins atteints de la maladie des radiations. Ils attendent leurs médicaments. Ça fait un moment que nous ne sommes pas retournés à la maison. Mais je ne suis pas si sûr de vouloir participer à votre petite fête. Mes gamins c’est tout ce que j’ai et ils n’ont jamais combattu.
— Je comprends parfaitement. Mais si nous parlons en ce moment, c’est que vous devez rentrer au plus vite chez vous n’est-ce pas ?
— Oui, j’ai des gamins qui sont malades vous savez ? Certains médicaments coûtent trop cher sur la Plateforme Centrale. Alors dans nos voyages, on en achète pour les ramener ensuite. Si nous n’arrivons pas à temps pour leur donner leurs médocs, beaucoup mourront.
— Je comprends. Vous aurez un très bon rôle dans notre stratégie ne vous inquiétez pas. Je ferais tout pour que vous n’ayez à pleurer aucun des vôtres, croyez-moi.
— Il est très dur de tenir ce genre de promesse sur un champ de bataille jeune homme. Mais très bien Colonel, nous sommes avec vous. Quel est votre plan ? Nous le suivrons comme il se doit.
— Quel est votre nom d’abord monsieur ?
— Les enfants nous ont surnommés ma femme et moi, Papy et Mamie Irving ! Appelez-moi simplement Papy.

De retour au bungalow, Ely et Joshua installèrent les enfants dans leur lit et leur firent répéter : « nous sommes deux dans un », avant de sortir, Joshua pris le temps de leur dire.

— Ne laissez jamais rien se mettre entre vous deux compris ? Pas même moi, ni même de simples médailles. Vous êtes liés ensemble par un amour qui est le plus fort de tout l’univers.

Une fois les enfants couchés, les deux amis descendirent s’installer dans la cuisine pour discuter sur la suite des évènements.

— J’ai envoyé le message à Myers. Demain nous serons fixés sur le reste de notre destinée, dit Ely.
— Parfait répondu Joshua. Les deux équipages sont prêts pour le départ au matin et j’ai trouvé un troisième équipage, ils sont un peu originaux, mais je les aime bien. Demain on aura enfin de l’action !
— Si le message est bien arrivé, Myers se pointera et les pirates prendront peur. Ils n’oseront pas se pointer dans la zone. De cette manière, nous ferons face à un seul ennemi, mais ça ne simplifie pas pour autant les choses.
— Il vaut mieux affronter un ennemi que nous connaissons qu’un ennemi que nous ne connaissons pas.
— En effet, les pirates sont pas très forts, mais trop imprévisibles. Ils ne feraient qu’une bouchée de nous. Tandis qu’avec un seul vaisseau face à nous, nous pouvons essayer de passer en force, dit Ely avant de vider dans une ultime gorgée le dernier verre qu’il s’était servi.

Mili se trouvait sur une petite île. La nuit était profonde et sombre. La lune resplendissante était pleine, et éclairait d’un halo lumineux tout le ciel. Ce lieu lui rappela un autre rêve qu’elle avait déjà fait, c’était bien la même île qui était au milieu du lac.

Une grande femme blanche, élancée, aux longs cheveux blonds bouclés et aux yeux d’un bleu lumineux, baissa les yeux sur Mili. Son apparence était différente, mais c’était bien la même jeune femme. Mili le ressentait comme tel. Toujours habillée d’un habit blanc éclatant, qui brillait grâce à la lumière de la lune.

La jeune femme lavait les cheveux de l’enfant, à l’aide d’une argile de couleur verte qu’elle ramassait à même le sol.

— Je suis très heureuse que tu sois là, avec moi. Je suis loin de chez moi et pourtant tu parles la même langue que moi. J’ai le profond sentiment qu’un jour, toi et moi allons être réunies, mais ce jour n’est pas encore arrivé. 

Avec la candeur d’une enfant, Mili très sereine lui demanda.

— Où se trouve ton chez-toi ? Quand est-ce que nous pourrons être ensemble ?

C’est sur un air assez sombre et triste que la jeune femme répondit.

— Un jour nous serons ensemble, mais les personnes qui me rejoignent doivent d’abord abandonner celles qu’ils aiment le plus au monde. 
— Mais je n’ai pas envie d’abandonner mon père ! Ni Ely et encore moins ce faible de Ray !
— Un jour pourtant, il le faudra et tu le feras. Ton cœur devra être empli de joie à ce moment, et alors, nous pourrons toi et moi être ensemble. Je serais ta nouvelle famille.
— As-tu une grande famille ?
— Ma famille est immense.
— Nous, nous sommes quatre en un.
— Nous, nous sommes des milliards en un.
— Je voudrais avoir une grande famille un jour.
— Tu en auras une, je n’en doute pas. Pour le moment, je vais te faire un cadeau avant que tu ne rejoignes ta famille. Je suis la gardienne d’un grand pouvoir que je vais maintenant te confier. Tu seras la nouvelle gardienne de ce pouvoir. Il ne pourra te faire aucun mal, tes yeux sont magnifiques.
— Mes yeux viennent de ma maman ! Elle était très belle, comme vous.
— Je n’en doute pas ! Je suis si heureuse d’avoir pu faire ta connaissance. Le pouvoir que je t’ai donné s’accompagne d’un don, qui permettra à toutes mes sœurs, peu importe où tu te trouveras, de te reconnaître. Un jour viendra où tu seras triste de quitter ta famille, mais ce même jour, n’oublie pas d’être heureuse en allant à la rencontre de ta nouvelle famille. Nous nous retrouverons et je te dirais mon nom. Il est temps pour moi de partir maintenant, mon essence vitale me quitte.

Ely et Joshua étaient dans le salon, occupés à ranger leurs affaires. Il était très tôt, le soleil ne s’était pas encore levé.

Mili vit ses deux pères s’affairer et leur demanda.

— Nous partons déjà ?

Joshua s’approcha d’elle, s’abaissa et lui dit calmement.

— Pour le moment, Ray et toi vous resterez ici. J’ai tout payé et il y a une seconde navette au besoin. Avec Ely on va aller sur la Plateforme Centrale pour ramener le colis puis nous reviendrons vous chercher. 
— Mais je voulais tellement aller sur la Plateforme pour une fois et Ray aussi ! C’est pas juste !
— Je suis désolé, mais ça va pas être facile, et je préfère vous savoir en sécurité ici d’accord ?! On ira une autre fois sur la Plateforme ensemble.

La jeune fille retourna dans sa chambre en courant, sans se retourner.

— J’espère qu’elle comprendra un jour.
— T’inquiète pas pour ça. Ce n’est qu’une enfant après tout, lui répondit Ely.
— C’est vrai.
— Les préparatifs sont prêts ?
— Oui. Les autres équipages doivent nous attendre.

Ely et Joshua prirent leur navette gravitationnelle et quittèrent la petite île.

Arrivés au hangar spatial, Joshua fit les présentations à Ely qui n’avait pas encore rencontré les équipages qui les accompagneraient dans cette périlleuse mission.

Le premier était spécialisé dans l’aide au transport. Leur appareil était un ancien vaisseau cargo qui possédait un champ de force très puissant et assez grand. Capable de couvrir plusieurs appareils à la fois, tant que ces derniers restaient dans un certain rayon à ses côtés. Le Capitaine Le Florentin avait dans sa carrière participé à plusieurs combats. Il avait tout bonnement rejoint la guilde pour continuer à ressentir l’adrénaline que procurait l’aventure et les combats. Son équipage était composé d’anciens étudiants ingénieurs venus de la Plateforme Centrale. Leur motivation était de générer le bouclier le plus puissant qui puisse être pour un vaisseau. Ils avaient pour la plupart travaillé pour des entreprises de protection d’exoplanètes comme celle de la station balnéaire.

Le second équipage était formé par d’anciens soldats qui dans un premier temps étaient devenus pirates puis, avaient décidé de se faire de l’argent légalement et laisser derrière eux ce malencontreux passé. Ce genre de repentis étaient courant au sein de la guilde des mercenaires. Pour se racheter une conduite, on leur imposait des frais supplémentaires à chaque fin de mission accomplie. Leur vaisseau était le résultat de l’enchevêtrement d’autres vaisseaux plus petits et occupé par un seul pilote. Ils formaient un équipage de six personnes. Le capitaine du vaisseau avait un nom connu dans la galaxie. On disait qu’il avait réussi à sauver la vie de tout son équipage lors d’une embuscade pendant les grandes guerres inter-systèmes. À la fin de la guerre, quand un semblant de paix fut trouvé entre les différents empires, ses ennemis devenus amis lui attribuèrent une médaille du mérite pour ce haut fait d’armes. Ses cinq pilotes qui l’entouraient devaient être ce qui restait de son ancien équipage. Pour ce qui était du combat d’aujourd’hui, avoir cinq pilotes qui ont connu une guerre valait vingt pilotes qui n’en avaient jamais fait une. Ely prit la parole en premier.

— Bonjour Messieurs, aujourd’hui ce qui nous réunit est notre seul et unique but commun. Tous ici nous devons franchir ce portail pour nous rendre sur la Plateforme Centrale ou ses environs sans délai. Le temps nous est compté. Mais des hommes se dressent devant nous, des hommes qui seront prêts à tout pour nous y empêcher. Des pirates qui une fois auront pris le dessus sur nous, sur nos vies, jouiront du droit de faire ce qu’ils voudront de nos corps et de nos âmes. Si ce ne sont pas les pirates que nous trouvons sur notre route, ce sera alors un ennemi bien plus féroce. Plus féroce, mais prenable. Un vaisseau amiral de la Plateforme Centrale. À l’intérieur, aucun d’entre eux n’a connu de guerre comme nous en avons connu, voilà notre avantage. Si je vous fais le décompte de tous les risques que nous encourons, c’est pour que vous sachiez qu’une défaite totale n’est pas à exclure. Mais cela ne se produira pas. Pas aujourd’hui. Pas avec les hommes que j’ai en face de moi. Ce que je vois quand je vous regarde, ce sont des hommes déterminés à accomplir leur mission. Alors, hommes de la guilde des mercenaires. Aujourd’hui nous allons montrer à ces pirates et ces soldats, ce que nous sommes capables d’accomplir par notre volonté. 

À la fin de ce discours éloquent, Joshua s’approcha de son ami en compagnie d’un homme.

— Ely, je te présente le célèbre Capitaine Forgold ! 
— C’est un honneur et une chance de vous avoir avec nous aujourd’hui Capitaine, lui dit Ely en lui tendant la main.
— L’honneur est pour moi ! Vous deux, mes très chers amis, vous avez inspiré toute une génération vous savez. Pour ceux qui ont fait la guerre, vos noms ne sont pas inconnus.

Au cours de leur échange, Ely remarqua qu’un autre homme s’approchait d’eux. Il avançait avec une assurance certaine et arborait un sourire. Il tendit la main aux trois hommes et se présenta à haute voix.

— Capitaine Le Florentin, j’assurerai que vos replis se fassent sans problème ! Mes petits génies ont concocté une barrière extrêmement puissante qui durera un bon moment face aux assauts de cette vermine. 

Le Capitaine Forgold interrompit les formalités et demanda à Joshua.

— Hey ! Joshua… Tu m’avais pas dit qu’il y aurait aussi un autre équipage avec nous ? 
— Ne t’inquiète pas Forgold, ils feront leur entrée en temps voulu.

J’espère que ces excentriques seront à la hauteur ! dit le capitaine en crachant au sol.

Les vaisseaux décolèrent de la station spatiale.

Le vaisseau cargo du Capitaine Le Florentin fut le premier à décoller. À ses côtés les deux autres engins fermaient la marche et restaient proches de lui.

Dans chacun des vaisseaux, la tension pouvait être palpable. Les ingénieurs du Capitaine Le Florentin s’exécutaient à vérifier que tous les appareils étaient bien calibrés. Ils couraient tous un peu partout dans l’énorme vaisseau. Les hommes du Capitaine Forgold, plus expérimentés au combat, faisaient chacun dans leur coin leur petit rituel d’avant-guerre. Joshua et Ely, quant à eux, ne plaçaient leur destinée ni dans les amulettes porte-bonheur ou dans une science quelconque. Les deux amis étaient chacun à leur poste. Joshua en mode manuel était en dessous du poste de pilotage. Ce mode de combat était fait pour les personnes aguerries, l’assistance à la visée déconnectée. Il fallait être doté d’une capacité de forte concentration et de réflexe hors norme pour assurer ce poste. C’était l’excellente entente entre les deux hommes qui leur permettait une synchronicité parfaite dans chacune de leurs manœuvres et qui les rendait aptes à utiliser ce mode. Ils étaient concentrés dans le moment présent, ni plus ni moins.

Les vaisseaux n’étaient plus très loin du portail qu’ils devaient traverser. Tout à coup, ils virent sur leurs écrans radar s’allumer plusieurs signaux. C’était un mur qui se dressait devant eux. Vu le nombre de vaisseaux, il s’agissait sûrement d’au moins trois équipages pirates qui avaient fait une alliance.

En voyant ce nombre, Joshua dit à Ely.

— Nous allons bientôt être fixés maintenant.

Ely le savait, il était impossible que des pirates de l’espace s’organisent en alliance pour effectuer de simple pillage dans une zone donnée. Ce type d’arrangement créerait beaucoup trop de problèmes lors de la répartition des biens mal acquis. Pour que des pirates de différents équipages se regroupent comme cela, ils devaient avoir un but commun. Un but dicté par un commanditaire qui les payait gracieusement pour leur service. Tout comme Joshua, Ely était sûr à présent que c’était l’armée, leur ancien ami, le Général Erwin Myers qui était derrière tout ça.

— Il laisse la sale besogne à des moucherons.
— Montrons-lui qu’il nous a sous-estimés, dit Johsua.

Les impacts de tirs étaient absorbés puis dispersés par le champ de force du vaisseau cargo. Les attaques étaient si nombreuses qu’ils ne purent avancer davantage. Un bouclier est plus efficace lorsque les réacteurs de l’engin sont coupés. La stratégie était simple, attendre tout d’abord que les canons ennemis surchauffent puis contre-attaquer. Personne dans l’espace ne pouvait tirer trop longtemps sans surchauffe. La gestion de l’énergie est aussi un art dans la guerre spatiale. Les vaisseaux pirates ne pouvaient plus tirer, le bouclier était trop puissant pour eux.

C’est alors que surgit de derrière le grand cargo un vaisseau. C’était Ely et Joshua qui contre attaquaient seuls en premier lieu. Le vaisseau allait à une vitesse ahurissante. Il slalomait entre ses ennemis sans peur. Il rompit ainsi le grand bloc qui était formé. Dans ce slalom, Joshua tirait sans retenue et touchait à chaque fois. Du cockpit des Capitaines Forgold et Le Florentin, la vue que l’on avait était celle d’une boule clignotante créant des explosions à chacun de ses passages. Le Capitaine Forgold jubilait sur son siège.

— Regardez-vous tous ! C’est de l’art ! Ils jouent là une symphonie pour nos yeux ! Vous avez en face de vous l’étoile noire d’Aal ! Estimez-vous heureux d’être de leur côté ! Si ce n’était pas à cause de ces deux-là, nous aurions remporté la guerre ! 

Le mode manuel qu’utilisait Joshua lui permettait une meilleure gestion de la surchauffe. Ils pouvaient tirer plus longtemps que la moyenne sans avoir à se replier. Une fois que l’ennemi reprit son cycle d’attaque, Ely et Joshua parvinrent à se réfugier à nouveau derrière le grand vaisseau cargo. Les pirates étaient désemparés, la ligne ne tenait plus. Lorsque ces derniers se rendirent compte qu’ils avaient perdu beaucoup trop de vaisseaux dans cette première attaque ennemie, ils menèrent une offensive de plein front en direction du vaisseau cargo.

Ely cria dans le communicateur de son vaisseau.

— Ils ont rompu leur ligne ! C’est le moment que l’on attendait ! Vous entendez Capitaine Forgold ! C’est à vous de jouer ! 

Le vaisseau qui n’était qu’un ensemble d’autres vaisseaux se fissura et une formation en pointe se dessina autour du vaisseau cargo. La flèche directionnelle qui s’était créée ne laissait aucune chance à l’ennemi. Les pirates venaient s’engouffrer sur les tirs des canons énergétiques. Ils battirent alors en retraite, mais sur leur retour, un vaisseau apparu qui leur coupa la route.

— Ces excentriques sont là pile au bon moment ! cria Forgold.

Il s’agissait du premier équipage que Joshua avait rencontré sur la planète balnéaire. Le vaisseau des artistes était là, pile à l’heure. Il coupait la retraite des pirates. Les tirs n’avaient pas une aussi grande précision que celle des autres, mais cela fit l’affaire pour que les pirates partent à la déroute.

— Colonel Ely ! Colonel Joshua ! J’ai un énorme signal qui provient de derrière nous ! cria Le Florentin.

Ely tourna le vaisseau en un rien de temps. Face à lui ou plutôt derrière eux se dressait le grand vaisseau amiral de la marine du Général Myers.

— Ely, me recevez-vous ? J’ai bien reçu votre message.
— Oui Général ! C’est bien là une sacrée chance de vous voir ici à un moment pareil.
— Vraiment Ely ? Vous aurais-je donc sous-estimé ? Je sens dans le ton de votre voix que vous avez deviné mon petit subterfuge.
— Je ne pensais pas que vous seriez capable d’engager des pirates pour faire le travail à votre place ! N’avez-vous donc plus aucun honneur ?
— Nous ne sommes plus en guerre Ely ! L’honneur n’existe que sur le champ de bataille. Ici, nous avons tous deux une mission à accomplir. En employant tous les moyens nécessaires.
— Que voulez-vous Myers ?
— L’artefact que vous transportez.
— Je ne peux pas vous le donner et vous le savez très bien.
— Ne faites pas l’idiot ! Donnez-le-moi de suite ! Êtes-vous prêt à mourir pour une pauvre branche ou un caillou ramassé par des archéologues poussiéreux ?
— Nous n’avons pas l’artefact avec nous Général, finit par répondre Ely avec du dépit dans la voix.
— Très bien, si c’est comme ça que vous voulez jouer.

Le vaisseau de la marine fit feu. Le rayon d’énergie était énorme et d’une rapidité incroyable, personne ne pouvait éviter un tir pareil. Le vaisseau de Papy Irving explosa en ne laissant que des débris flottant dans l’espace.

— Non Général ! Arrêtez ça tout de suite ! Nous n’avons pas l’artefact avec nous ! cria Joshua plein de rage.

Les vaisseaux du Capitaine Forgold changèrent leur formation de l’avant pour se positionner à l’arrière du vaisseau cargo. Ely et Joshua entendirent dans le communicateur de leur vaisseau la voix du Capitaine Forgold.

— Ely ! Joshua ! Nous savions tous depuis le début que c’était vous la mission de rang A. On espérait vous gratter un peu de crédit à l’arrivée, mais allez-y. Maintenant que la voie est libre, prenez le portail et terminez votre mission. On s’occupe de lui.
— Forgold, tu ne fais pas le poids face à eux ! Et de toute façon, on n’a pas l’artefact avec nous. C’était une mission d’ouverture. Nous allons les occuper et vous filez en même temps ! Vos morts ne serviraient à rien.
— Désolé messieurs ! Mais ça ne fait pas partie de mon ADN ! J’abandonne jamais des hommes derrière moi !
— Forgold idiot ! On va tous y rester ! cria Ely dans son communicateur.

Le vaisseau de la marine fit feu une seconde fois et brisa le champ de force du vaisseau cargo.

Plus personne n’était à couvert ! Il fallait du temps pour que les ingénieurs puissent trouver une nouvelle solution.

— Le Florentin ! Votre champ de force est mort ! Passer la porte ! cria Ely.
— Désolé Colonel ! Ceci n’est pas possible pour moi non plus. Mes gamins vont partir et je resterais à bord du vaisseau pour faire une manœuvre qui vous protègera. Mon vaisseau est le plus gros donc la cible la plus facile.

Au moment où il parlait, on pouvait voir des rayons bleutés quitter le grand vaisseau blanc. C’était les navettes de survie de ses ingénieurs. Le gros engin pivota sur lui-même et se posa à l’horizontale face au grand vaisseau de la marine. Le grand canon du vaisseau amiral était en surchauffe, il lui fallait trente secondes pour être à nouveau utilisable. Myers déploya ses canons d’énergie, et c’est pas moins d’un millier de tirs qui vinrent écorcher le vaisseau cargo qui ressemblait à une magnifique baleine blanche géante, il se scinda en deux. Derrière, couvert par la carcasse métallique, les vaisseaux de Forgold attendaient le bon moment pour contre-attaquer.

Dans le communicateur, la voix sûre et affirmée du vieux Général se fit entendre. Il était impossible pour lui de les laisser partir sains et saufs sans récupérer l’artefact. Sa mission serait un échec.

—