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Quelles prévisions effectuer afin que notre postérité puisse voir les temps lointains ? Comment la prochaine génération s’adaptera-t-elle à ce que nous lui laissons ? À cet instant, les conséquences de nos modes de vie sont plus que déterminantes. Mais alors, plus tard, comment nous faudra-t-il vivre ? Qu’inventerons-nous ?
Dans
Et puis…, tout commence avec Maximo et ses coopératives mixtes. Ensuite viennent les autres, et certains moments de notre futur nous sont révélés, sachant que chaque seconde des temps à venir est à venir et que rien n’existe encore de ce qui viendra. Tout le monde a la certitude aujourd’hui qu’il faut impérativement changer de système de vie si on veut survivre collectivement sur le long terme. Effectivement, il faut le faire. Peut-être chacun à sa façon. Et puis on verra bien…
À PROPOS DE L'AUTEUR
Artiste-plasticien depuis 2004,
José Sales Albella travaille à l’École des Beaux-Arts, dans les ateliers de recherche graphique et de photographie. Ces dernières années, il décide de se consacrer activement à l’une de ses passions longtemps délaissée : l’écriture.
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Seitenzahl: 437
Veröffentlichungsjahr: 2022
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José Sales Albella
Et puis…
Roman
© Lys Bleu Éditions – José Sales Albella
ISBN : 979-10-377-6724-0
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
À Audrey et Noémie Sales Albella
Il est vrai que Maximo est obsédé depuis longtemps. Il faisait partie de ces presque enfants qui défilaient le vendredi, identifiés à Greta Thunberg. Un peu, les premiers, pour croire qu’ils étaient totalement respectables et un peu pour ne pas aller en classe, pour prendre leurs propres initiatives.
Il est clair que la frontière entre un adolescent et un jeune adulte est diaphane, entremêlée. Pour certaines choses, l’adolescence se prolonge et pour d’autres, l’âge adulte apparaît prématurément.
Mais bon, c’était déjà il y a dix ans, entre-temps il y a eu les études supérieures d’agronomie à l’Université de Toulouse et le travail qu’il a trouvé dans un laboratoire agroalimentaire à Montpellier.
Plus tard, lorsque son laboratoire a été fermé, lors de la crise du 22, il est revenu ici et a commencé le travail qu’il fait maintenant.
Il s’avère que Maximo est le fils d’une femme de ces régions et d’un homme qui n’a eu ni le plaisir ni le déplaisir de le connaître. Et que certains disent qu’il était bulgare, d’autres disent qu’il était roumain.
Il y a ceux qui cherchent et remuent ciel et terre pour trouver qui est leur père, leur vrai père et ils ont besoin de ça.
Il y a cependant ceux qui n’aiment pas leur propre passé si l’histoire ne s’avère pas trop vérifiable. Et plus encore s’il y a des parties cachées ou si elles ne sont pas claires. La plupart d’entre eux sont ceux qui préfèrent fuir vers l’avenir.
Jusqu’à présent, Maximo a l’impression qu’il n’a fait que courir et courir pour obtenir un dixième de ce qu’il voulait.
Bien finies ses études primaires, puis sa carrière. Pour ensuite parcourir tout le circuit des cours et des concours, des lettres de motivation et des petits ou mauvais boulots. Et puis il a travaillé pour la recherche dans l’industrie alimentaire à Montpellier.
Et après trois ans, quand il commençait à penser que ça allait durer. Les crédits ont été coupés. Pas un seul euro de plus, en raison d’un de ces réajustements dus à la pandémie et aux guerres de Poutine.
Ensuite, il a changé de lieu en lieu et trois autres années se sont écoulées et il aurait fait ça toute sa vie si un jour, comme hypnotisé, il n’avait pas regardé cette carte d’Espagne dans un vieux livre acheté au marché aux puces.
Ce jour-là, il s’est dit que peut-être, dans le village d’où venait sa mère, il pourrait commencer quelque chose.
De ce village, il n’a gardé que des souvenirs fugaces des deux fois, des deux seules fois où il lui rendit visite étant encore enfant.
En moins de trois jours, la décision a été prise. Partant d’abord en vacances pour voir si l’environnement était bon, se proposant, une fois les vacances finies, comme journalier ou peintre en bâtiment. Puis, lentement, déplacer toutes ses affaires et s’installer peut-être pour de bon.
Sa mère est morte depuis trois ans, son frère aîné n’est plus et l’autre il est resté à Paris.
Maximo dans trois mois il fêtera ses trente-deux ans, ce n’est pas un enfant et surtout il ne veut pas y ressembler. Son retour à la campagne après avoir perdu son emploi de scientifique est comme un déchaînement irrépressible.
Cette petite maison au coin d’une rue non loin de l’avenue principale du village lui est venue comme un coup de soif, cette petite maison, le seul bien de sa vie, qu’il a finalement achetée. Cette maison est le seul témoin de son passé familial. Ce passé qu’il porte toujours avec lui, et qu’il s’est discrètement approprié avec ses petits signes, détails et rénovations.
Cette petite maison lui offrait un avenir possible qui commençait à se construire autour de sa situation.
Cela fait un ou deux ans qu’il a emménagé. Il a d’abord touché son chômage. Plus tard, par apport à ce qui s’est passé avant, j’imagine, ils lui ont donné un emploi dans la coopérative, sur la base de ses diplômes et de son expérience. Il a fait du bon travail en tant que chimiste au moulin à huile d’olive.
De France, il a apporté des choses, pas trop, mais beaucoup de livres, un bon ordinateur et les vêtements nécessaires pour vivre.
Dans la petite maison, il n’y a pas de chauffage, juste une cheminée, alors quand le premier hiver est arrivé, il a mis une combinaison de ski sous sa laine polaire. Lorsqu’il sort, pour ne pas se ridiculiser, il se change et met son jean, son blouson et un bon pull. Tout cela, et pas toujours, car les hivers sont plus remplis de vents et de grêles que de vrai froid. De ce froid qui durait presque trois mois, il ne reste que chocs et destruction. Du froid d’avant, il semble seulement que nous ayons hérité du vent.
Avant même son arrivée et son installation ici, il a commencé à avoir des contacts avec Monica, le maire et Anselmo le président de la coopérative agricole et de sa banque rurale.
Au moins trois fois par semaine, il a l’habitude de déjeuner avec l’un ou l’autre.
La coutume du déjeuner est ce qu’il préfère dans la vie de ce village levantin, des délicieux sandwiches, un verre de vin ou une bière et ensuite un café.
Maximo aime un sandwich qu’il commande deux fois sur trois : faites-moi une omelette avec du jambon, mais le jambon à l’extérieur de l’omelette, le tout dans le pain.
Gustavo le serveur le sait par cœur et il plaisante, puis il crie dans la cuisine : Un « Maximo », pour le Français ! C’est ainsi qu’ils l’ont surnommé son sandwich préféré à l’omelette.
Pendant qu’ils déjeunent, de nombreuses questions qui les inquiètent sont soulevées dans la conversation. Des projets, des idées et quelques controverses. Maximo interroge régulièrement son président sur l’idée d’ajouter un parc avec des panneaux photovoltaïques à sa coopérative.
Un beau jour, il avait terminé tout son projet, avec ses estimations de coûts et toutes les descriptions techniques. Il est allé les voir, son président et son maire, chacun dans son bureau, officiellement. Et il leur a proposé d’installer un parc solaire sur les collines dénudées devant le village, de l’autre côté de la rivière. C’est une zone stérile de forêts et de champs agricoles, très caillouteux et accidentés dans laquelle ne poussent que des mauvaises herbes et un peu de romarin. Ce n’est pas la seule installation de ce type dans la région, mais les autres sont toutes privées.
Il existe des subventions et des facilités pour ce type d’entreprise et cela est souligné toutes les quatre pages dans les centaines de feuilles laissées sur le bureau de ses deux amis.
Ce projet n’est pas original, mais bienvenu. Parce que cela devait être fait, il fallait juste que quelqu’un l’organise vraiment.
Les associés semblent en paix avec l’idée que seuls ceux qui ont des terres dans le village et sont partenaires peuvent avoir des capitaux investis dans cette affaire et en attendre des dividendes.
Il est vrai qu’ils ne veulent ni des Maures ni des Roumains, sauf bien sûr ceux qui sont entrés par mariage dans leur famille. Ils sont bien… c’est ce qu’ils disent.
Maximo sait qu’il doit admettre qu’il s’agit d’un ensemble de sociétés fermées. Un peu, comme les tribus d’autrefois. Chaque village a les siennes !
Même s’il a des projets à long terme, il ne tient pas trop à ce que les choses soient trop fermées.
Pour quelqu’un qui voulait vivre tranquillement à la campagne, il commence à prendre un rythme un peu trop soutenu avec ce travail au noir : Maximo continue à travailler au moulin d’huile, deux mois à plein temps après chaque récolte, en plus, il a été nommé directeur. Directeur de cette affaire de panneaux solaires. Avec cela, il a hérité de la supervision d’une station d’épuration du lisier où sont collectés les excréments de porc de plus de trois cents exploitations d’élevage porcin qui font vivre les quelques familles restées sur place.
La station est utilisée pour fabriquer du méthane. Elle n’est pas rentable, mais elle emploie deux salariés et résout en partie l’excès d’ammoniac dans le sol agricole.
Les employés, ici oui, sont tous deux roumains.
Les panneaux solaires donnent de la lumière gratuite aux partenaires et le surplus est vendu. Cela permet de réduire presque complètement les impôts locaux, mais cela n’apporte pas non plus d’énormes avantages.
Bien sûr, c’est une excuse pour donner un salaire aux trois ouvriers d’entretien, qui sont bien sûr un Marocain et deux Péruviens.
Une fois, ce premier projet mis en place, et ce en quelques mois, il a remué ciel et terre pour le rendre plus grand, en y intégrant des éoliennes par exemple. Mais cette deuxième étape résiste un peu et malgré ses multiples voyages et rencontres avec des entités bancaires ou politiques au niveau de la généralité, la coopérative de production électrique reste dans ce qu’elle est et les subventions qu’elle promet pour l’avenir ne semblent tenir compte de rien d’autre que de l’entretien et pas du tout de l’expansion.
Le moment n’est pas propice pour jeter l’argent par les fenêtres. Cela ne fait pas perdre courage à Maximo, car il n’y a pas une semaine où il ne propose pas de nouvelles choses.
Anselmo lui dit que c’est parce qu’il la sortit de son emploi de chimiste dans le moulin pour l’huile, et ce n’est pas entièrement faux.
La chose qui a donné le plus de profit en parallèle est les ruches d’abeilles.
Il n’a pas été difficile de convaincre Laurentino, un apiculteur de trente-cinq ans, de mettre ses ruches sous les panneaux. Chacun d’entre eux se trouve à environ un mètre et demi au-dessus du sol, fixé à un cadre et à un mécanisme qui l’oriente en fonction du soleil.
Cela laisse de la place pour planter des plantes tant qu’elles ne sont pas trop hautes et pour installer des ruches, car il semble que cette chose qu’est l’abeille se rétablisse très lentement, même après que toute la liste des insecticides et des produits agricoles qui les ont décimées a été interdite.
Tout le monde le sait, sans ces petits insectes, presque aucun fruit n’arrive à terme de ceux qui sont cultivés ici.
Bien sûr, tout cela n’est pas sans critiques ni problèmes. En fonction de chaque famille et de leur tradition politique, il y a ceux qui les soutiennent, d’autres qui les critiquent avec des arguments bien fondés comme le manque de solvabilité ou la pollution visuelle de tous ces panneaux en aval.
Mais ce qui est le plus typique et souvent désorientant, ce sont les arguments grossiers ou puérils, les gros mensonges ou même les insultes qui naissent autour de chaque changement.
Maximo est clair : comme on ne peut jamais satisfaire tout le monde, il faut faire ce qu’on peut et ne jamais cesser d’insister pour construire ce qui est proposé.
Le fait d’installer ce matériel de la sixième génération de panneaux solaires n’a aucun mérite. Je pense que le fait de collectiviser cette entreprise en a. Mais le projet de remodeler le paysage avec l’excuse d’en profiter pour ces tâches a non seulement du mérite, mais il a un avenir.
Il passe chaque jour à réfléchir à l’utilisation de tous ces hectares de garrigue que le maire lui a montrée dans les plans cadastraux.
Il y a de nombreux hectares pour lesquels il ne trouve pas assez de subventions pour installer de plus en plus de panneaux.
S’il attend cinq ans entre deux campagnes, il pourrait en mettre dix mille de plus à chaque fois. Ainsi, il convaincrait les associés de laisser la moitié de leurs dividendes à la coopérative.
Il pense que ce serait parfait, mais il ne pense pas que rien ne convaincra plus de la moitié.
Franchement, après les premières années de nouveauté, chacun est retourné à ses affaires et cette entreprise coopérative verte semble bonne pour tout le monde, mais ils ne veulent pas faire trop d’efforts.
Mais bon parmi les amandiers qui sont la plupart des arbres fruitiers du contour et du miel, finalement à la machine à décortiquer les amandes de la coopérative se sont ajouté un atelier, une petite usine pour le nougat et un autre module pour le lait d’amande. Cela commençait déjà à ressembler à quelque chose, un premier cercle était en train de s’achever.
Au début, quand vingt-cinq personnes étaient employées, vingt du village et cinq de l’extérieur, les familles les plus influentes prenaient les meilleurs emplois.
Ici, tout est une histoire de clans très discrets, mais solidement constitués, il y a des clans de gauche et de droite, soutenus par les deux extrêmes.
Ainsi, ceux qui avaient une petite carrière et ne trouvaient pas de travail étaient mis dans la partie administrative et de gestion. Bien sûr, ils sont presque tous les enfants de ceux qui sont considérés comme les meilleurs ici.
Puis viennent ceux qui n’ont tout simplement pas de salaire ni d’études et qui ne peuvent prétendre ni à des titres ni à une influence, étant d’ici, dans le manuel et dans le bureau de l’intendant, tout ce qui concerne le commandement ou les places de technicien a été distribué. Et puis il y a les cinq autres qui vont nécessairement servir de pions, tous étrangers.
Cette situation donne à Maximo une idée claire de la façon dont le pays va au-delà des choses de l’endroit.
Lors des réunions plénières suivantes, les membres se plaignent de plusieurs choses. Tout d’abord, les coûts élevés de l’entretien et certaines dépenses difficiles à justifier.
Nombreux sont ceux qui ne comprennent pas cela à propos des ruches, car ils mélangent une affaire privée avec la coopérative.
Devant quoi Maximo se perd-il dans des explications sur des choses qu’il ne maîtrise pas totalement ? Comme le marché des circuits courts et d’autres idées du moment, souvent inapplicables. Sa théorie ou son excuse, selon le point de vue, est d’accueillir autour du projet énergétique, toutes les initiatives qui pourraient être développées en profitant de l’espace vide entre les panneaux.
Cette reconquête des anciennes terrasses, des friches et des sous-bois peut en quelque sorte exister. Tout dépend de sa rentabilité.
Cette histoire de rentabilité est un vieil argument.
Au cours des siècles passés, cette idée de l’économie comme voie exclusive de progrès a été avancée chaque fois. Et il nous a menés là où il nous a menés.
Pire encore, comme lorsqu’on nous a demandé de faire des sacrifices pour le pays en tant que modèle. N’est-ce pas vrai ?
Ces idées sont allées et venues avec le progressisme, l’État-providence et la société de consommation.
L’argument de la rentabilité est par tout, avec les gens du monde entier.
Tout cela est allé et venu, menant chacune de ces alternatives à un type de crise différente, composant une liste de plusieurs guerres et de multiples crises économiques.
Rien, ni le bolchevisme, ni le fascisme et toutes leurs alternatives diminuées n’ont réussi à apprivoiser la modernité.
Le culte du profit nous a conduits à être trop nombreux et sujets au gaspillage et à la pollution.
Puis, après cette longue série d’échecs et de déceptions, les pires furent les dernières déceptions vertes et les faux biologismes, tout a explosé.
Chaque génération se sent plus appauvrie que la précédente. Il est branché au téléphone portable, sans argent ni bons vêtements, et mange de mal en pis.
Maximo pense qu’il n’a même pas besoin d’essayer de trouver une solution à tout. Il n’y a pas de modèle ou de solution, rien ne doit être présenté comme global.
Son projet n’est qu’une coopérative qui est née au sein d’une autre dans une sorte de symbiose équilibrée.
Jusqu’à présent, tout est clair et il n’y a rien d’exceptionnel. Mais la question qui se pose est de savoir si d’autres symbioses doivent compléter l’ensemble. Tout dépend de ce que les gens veulent vivre, ou plutôt de ce qu’ils peuvent vivre.
La population ici, un peu comme dans toute l’Europe, est âgée et a tendance à investir dans quelque chose qui fonctionne facilement, elle a du mal à aller plus loin.
Les enfants de ceux d’ici sont partis, personne n’a voulu, ou presque, rester dans l’agriculture. Les enfants de ceux qui sont venus ici sont allés dans d’autres guerres ou dans nos villes. Chacun va avec sa propre histoire pour constituer ce que l’on pourrait appeler la société typiquement mondialisée.
Une société qui donne la préférence aux services et qui oublie trop souvent ses habitants sauf pour consommer.
Puis ce qui reste, les retraités qui entretiennent une partie de leurs champs pour se sentir liés à leur héritage, les agriculteurs qui dans leurs élevages de porcs ou de volailles survivent sans prestige et paient des études pour que leurs enfants n’aient pas à faire ce qu’ils font.
Et ici, il ne reste plus que les quelques professions libérales, les commerçants, les assureurs et quelques rares artisans ou mécaniciens. C’est tout ce qui reste. Pas de prolétariat et de nombreux travailleurs roumains et maures qui travaillent au noir.
Ici, il résonne même l’époque où il y avait des ennemis selon leur identité et leur provenance.
Ici, on raconte même la guerre et ce qui est arrivé après, et personne n’aime être pardonné ici.
Ainsi, chacun vit avec ses défauts jusqu’à ce que le temps les déguise d’abord et qu’on les oublie ensuite.
Dans les résidences secondaires dispersées autour de nos nombreuses fermes vivent de nombreuses personnes de l’extérieur.
Beaucoup d’entre eux sont, peut-être par hasard ici, des gens qui prétendent dominer, en politique, dans les affaires, dans le commerce, se sont répandus ici et ont souvent réussi. Quand ils reviennent, ils viennent s’expliquer.
Chacun d’entre eux explique comment ils ont atteint leurs objectifs en construisant une version avec des faits. Ils parlent de leur vie faite sur mesure, très flatteuse d’eux-mêmes et saupoudrée de pieux aveux et de leurs propres fautes, toutes tolérables ou justifiées.
Il n’est pas étrange ni singulier qu’ils se considèrent comme des gens bien ou des libérateurs, se considérant comme de grands acteurs du libéral et conscients de tout.
Mais parmi ces voisins occasionnels, aucun n’a approché la coopérative pour investir un centime. Nous leur en serions tellement reconnaissants.
Maximo pense à ces choses. Il a reçu cette semaine, l’un après l’autre, des représentants de produits et de projets qui devraient intéresser la coopérative.
Le fait est que depuis quelques mois, nous parlons de la situation dans ces garrigues qui entourent nos villages en mettant en place divers projets pour reconquérir ces montagnes dénudées, ce no man’s land qui devient, avec l’urgence écologique, un eldorado pour le panneau solaire et bien d’autres choses similaires.
Ces entrepreneurs, ces représentants d’entreprises vertes, que nous recevons, se disent être des champions si vous les faites parler, ils finissent par vous prodiguer des conseils sur la manière de mieux faire ce que vous essayez d’améliorer depuis des décennies, comme si, d’un seul coup, ils avaient compris bien mieux que nous tout ce que nous faisons ici ensemble, mieux que nous-mêmes.
Ces agents extérieurs finissent par venir parce que notre coopérative leur fait comprendre et déclare son désir d’accueillir de nouveaux projets dans ce que quelqu’un a appelé l’invention d’un nouveau biotope. Une invention qui mélange toutes les façons possibles d’absorber ou de transformer l’oxyde de carbone atmosphérique avec toutes les façons possibles de produire de l’énergie électrique durable.
Cela préfigure une cohabitation entre le technologique et le naturel, nous verrons bien où nous arriverons.
Hier, Maximo, pour échapper à tant de maux de tête, a regardé un documentaire sur Goya qui montre une rétrospective au Prado.
Ainsi ils parlent de lui une fois de plus.
Ils entent la vie de cet aragonais têtu qui, un peu par à-coups, s’est fait admettre comme celui qui était et restera : un génie.
Égoïstement, Maximo a vu des parallèles dans la façon dont l’obstination peut être un point de mire de la création. Et la création, un centre d’intérêt pour l’avenir.
Voyant comment les travaux avancent, Maximo compare ses idées et une voix intérieure l’interpelle en disant : peut-être faut-il rester plus ferme dans ces projets et y persévérer.
Sachant, c’est clair, que face au nécessaire, cette goutte d’eau ne suffit pas.
Le changement climatique fait l’objet de discussions constantes et plus d’une fois par mois.
On peut même dire que depuis quelques années, nous sommes dans diverses formes de totalitarisme vert, plus ou moins déguisés en démocratie plurielle et tout ne va pas bien, et nous n’allons pas encore assez loin.
Enfin, nous ne nous voyons pas libres et responsables et nous ne sommes pas non plus très guidés.
Ni la démocratie ni l’environnementalisme radical ne nous font avancer dans un avenir cohérent.
Les prévisions mondiales continuent d’être désastreuses et, dans de nombreux endroits, nous en subissons les conséquences. Nous avons ici largement abandonné la sensibilité sociale que nous avons acquise au cours des soixante premières années de démocratie.
Face à la peur que suscitent toutes ces mauvaises nouvelles, beaucoup sont prêts à accepter un autre mode de vie, non sans protestations, beaucoup de choses sont acceptées.
Le royaume des mégapoles s’achève, trop cher, trop sale et trop proche de la mer.
Beaucoup d’entre eux luttent pour sortir leurs pieds de l’eau. Maximo est venu de Montpellier un peu choqué quand Palavas a été évacué, pas entièrement, mais presque tout fait maintenant partie de la Méditerranée.
Quand cela s’est produit pendant ses années d’études, c’était le fait marquant, la nouvelle de l’époque. Par la suite, des travaux et des plans ont été réalisés et on oublie, c’est même un spectacle touristique macabre de voir l’hôpital de Saint-Pierre presque complètement submergé par les vagues. Ou ce qu’il en reste.
Et nous ne parlons pas de New York où Maximo n’est jamais allé, de ses parties inondées et de ses gratte-ciels et des avenues qui sont devenues des canaux. Depuis cette époque de la première ascension, beaucoup de gens quittent les villes pour aller se battre dans les campagnes. Je dis qu’il faut se battre pour ce qui doit être fait dans ces conditions d’urgence.
Maximo a eu cette idée de coopératisme, cette histoire de panneaux solaires dans cette coopérative qu’il connaissait bien, car sa mère y avait un compte et a été partenaire toute sa vie.
Elle lui a dit que lorsqu’il était enfant, ses parents avaient mis de l’argent pour lui, et surtout sa grand-mère, pour lui et son jeune frère sur le seul compte courant où allait l’argent des cadeaux, pour Noël et tout ça.
Pour Maximo, tout ceci est sa contribution à la lutte. Il s’agit d’une contribution sans originalité et pas très importante.
Il n’a pas été très difficile de convaincre les partenaires, car il existe des subventions et des facilités de prêts préférentiels pour toutes sortes d’initiatives qui vont dans ce sens.
Peut-être que l’ouverture du coopératisme à une symbiose sans précédent sur le terrain était un peu plus audacieuse. Aujourd’hui, Maximo se demande comment continuer.
Les mois passent et ces initiatives se font connaître. Sûrement grâce à Marta, webmaster expérimentée du conseil municipal, qui, grâce à son nationalisme villageois invétéré, ne fait que nous faire connaître de façon obsessionnelle.
Chacune de nos initiatives et tout ce qui se passe ici, elle et un ancien journaliste, Alberto Palma, ne cessent de monter des vidéos pour YouTube et toutes les autres plateformes et réseaux sociaux.
Ainsi, peut-être plus souvent qu’ils ne le souhaiteraient, ils reçoivent des projets. Certains d’entre eux, les plus viables, sont soumis à un vote et si les partenaires le souhaitent, ils sont mis en route ou du moins il faut essayer.
Chaque fois, il est nécessaire de recourir aux grandes instances autonomes et nationales, à des fondations ou à des entités étrangères et presque toujours à des mécènes du privé. Elles paient ici pour de cette façon racheter leurs fautes. Pour payer moins d’impôts, parce que par loi on paie tellement qu’on salit et il est possible de convertir comme impôt un investissement dans quelque chose qui aide une de nos initiatives, parmi d’autres.
Comme nous gagnons en importance, presque toutes les entreprises condamnées à payer nous ont contactés.
Il n’y a pas de santé environnementale sans maturité technologique. Voici le slogan.
Récolter de l’argent en divers endroits pour planter des panneaux solaires dans les sous-bois en vaut la peine, mais nous savons que cette idée ne durera pas longtemps, car dans quelques années, tous les panneaux possibles seront installés.
Même s’il y a beaucoup de montagnes dénudées par ici, les choses vont vite.
Et quels panneaux tous les trois mois en sortent d’autres, modèles et modèles de panneaux montrant de nouvelles efficacités, de meilleurs coûts ! On parle encore beaucoup de nouvelles piles ou de nouvelles méthodes de stockage de l’électricité… Tous ces facteurs nous font douter et parfois nous paralysent suffisamment pour ne rien faire.
Nous savons cependant que si nous ne nous renouvelons pas, malgré toutes ces solutions qui coïncident dans le temps, il n’y aura pas le cercle vertueux sans lequel cette histoire ne sera qu’une initiative de plus parmi toutes celles qui vivent ce qui est à la mode. Comme il y a vingt ans, nous pensions tous que la révolution de la mobilité à piles était déjà là et qu’elle allait changer nos vies.
Et puis il y a eu la preuve que la voiture électrique pollue en le faisant et en le défaisant, pour la charger, et tout le reste.
Certains disent que son ascension et sa chute ont été orchestrées pour favoriser ce qui allait suivre. C’est ce qui se passe. Une décennie entière perdue comme la précédente, je dis : soi-disant perdue.
Certains disent qu’elle n’a pas été perdue pour tout le monde. Les compagnies pétrolières et tous ceux qui dépendent d’elles ont fait monter les enchères et ont continué à investir dans ce qui était le plus rentable pour elles. Ainsi, évitant les critiques et les initiatives contraires, et sans se soucier le moins du monde de ce qui était dit, ils ont continué leurs jeux hypocrites sur les conséquences des émissions de CO₂.
Tout le monde savait que lorsque le point de rupture viendrait, l’aspect le plus critique des demandes et de l’opposition au changement serait plus facile à gérer.
Ainsi, si des réformes globales avaient été adoptées depuis les années 2020 comme on le prétendait à l’époque, beaucoup de choses auraient été faites contre les multinationales et autres groupes industriels ou les exploitants d’énergie fossile.
Ainsi, aujourd’hui, en pleine catastrophe climatique, ce sont toujours les mêmes qui rentabilisent leurs actions et leurs méthodes et font admettre des choses qui étaient impensables il y a seulement cinq ans.
Maximo parle de plus en plus avec Soraya de tous ces malheurs et injustices.
Il la rencontre et ils se disent bonjour quand il va dans son jardin près de la rivière qui serpente sous les murs du village.
Soraya a trente-cinq ans, elle a passé ses dernières années dans une usine de tuiles qui a fermé et est maintenant au chômage.
Elle est donc retournée vivre avec sa mère, les deux vivant de sa pension de vieillesse et son veuvage dans la grande maison du village.
Très vite, elle est devenue indispensable pour sa mère et pour tout le village. C’est parce qu’elle est une bonne gouvernante et qu’elle est toujours présente dans tout ce qui se passe.
Lorsqu’elle lui parle, elle compte souvent les entreprises et les multinationales qui ne participent pas à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ils dressent une autre liste de ceux qui sont nuisibles et une autre des pires.
D’autres listes contiennent également les personnes qui se conforment aux règles.
Ils aiment alors imaginer comment ils peuvent remplacer leurs services par d’autres qui répondent à leurs critères et s’ils parlent un peu plus, ils prennent le courage de ne pas consommer certaines choses ou de boycotter et de faire de la mauvaise publicité pour d’autres.
Ils y travaillent depuis si longtemps que tout le monde le sait et pour cela lors de la dernière réunion des membres, ils ont proposé de l’occupation pour Soraya.
Précisément pour approfondir ces questions et utiliser son raisonnement sur l’art de bien consommer avec le moins de dégâts possible.
Ainsi, là où tout semble libre, une dictature subtile s’est imposée, qui n’entre pas du tout dans les vieux domaines de la répression dictatoriale historique comme la liberté d’expression ou de réunion. Elle ne contrôle pas ni ne limite en aucune façon ce qui concerne la morale ou l’immoralité, la sexualité ou la religion, tant qu’elle respecte les thèses écologiques et féministes. Ces thèses sont à la base de la nouvelle mentalité depuis quelques années.
En tout cas, quoi que l’on dise, quoi que l’on fasse, tout doit se dérouler « librement » dans le cadre de ce que l’on voit, comme toujours.
Cela nous amène à la conclusion que le capitalisme libéral du passé en était venu à dominer ces questions avec beaucoup d’habileté, mais qu’en essayant de se camoufler en leur sein, il a fini par mourir.
Cela ne signifie pas que le capitalisme néolibéral a détruit le pouvoir de l’argent ou du capitalisme lui-même, mais qu’il a muté une fois de plus pour refléter les nouvelles mentalités.
Tout comme il s’est établi dans plusieurs autocraties par le monde en les transformant en dictatures de démonstration populiste ou mieux encore en devenant l’outil le plus précieux de l’État chinois et de sa société qui se situe quelque part entre le socialisme et l’État capitaliste réactionnaire.
Il nous semble à tous ici que l’image du monde réel se trouve dans des plans que les médias ne pourront jamais réaliser pleinement.
Et c’est vrai, c’est comme ça.
Tout est surtout dans le particulier, dans le privé ou dans le relationnel.
Dans chaque corpuscule de la réalité, il existe une sorte d’autonomie interactive qui évolue en fonction des circonstances.
Face aux faits, leurs synthèses deviennent vite caricaturales.
Plus encore, nous sommes pour beaucoup ces coopératives villageoises qui vendent de l’électricité et du nougat, dans des endroits où les gros problèmes semblent lointains.
Bien sûr, les fréquentes émeutes, l’opposition, les discours ou les écrits et même les mouvements d’opinion qui veulent influencer ou contrecarrer notre système sont commentés, et pas qu’un peu.
Mais c’est seulement quand ils sont assez grands que nous les écoutons. Et c’est cette même ampleur qui les oblige à la fois au slogan et à la mise à niveau. Sans pouvoir porter la vérité de chaque élément et encore moins de chaque personne.
Les guerres, qui restent les symptômes majeurs, se produisent dans nos lointaines périphéries mutantes, au Proche-Orient toujours convulsé, dans des endroits d’Asie ou d’Amérique latine, en Afrique, où les sécheresses sont plus graves et la désalinisation chère.
Nous voilà livrés à nous-mêmes, il faut savoir endurer la vengeance et les reproches des désespérés. Ils nous crachent au visage de continuer d’empoisonner le monde avec d’autres saletés, la sécheresse et la cupidité.
Ici, on nous laisse dire, on nous laisse protester jusqu’à ce que nous soyons fatigués et épuisés. Et malgré tous les accès de furie collective et les pentes à monter, le système continue de fonctionner.
La nouvelle dictature est donc similaire en tout point à notre monde libre habituel, un monde libre que nous n’avons peut-être jamais eu.
Nous nous croyons en sécurité, ici des millions de choses sont combattues et persécutées au nom du bien commun. Sans arrêter de penser que tout est décidé et manipulé au-dessus.
Les mois passent et le changement climatique continue à faire des ravages malgré toutes ces années de tentatives réelles pour prévenir les incendies dans les zones tropicales. Aujourd’hui, les forêts en train de brûler semblent banales.
Il y a un rééquilibrage de la détérioration, alors que le continent russe ou la partie allemande se réchauffe et augmente ses possibilités agricoles et forestières, l’Afrique est de plus en plus endommagée.
Vues de l’espace, ses forêts ont été décimées, tout comme les forêts amazoniennes.
Au lieu de cela, de vastes zones de production artificielle de bois et de bambou colonisent les côtes et cette ceinture verte entre le Sahara et le Maghreb. Cette ceinture est un projet, un vieux projet, longtemps insignifiant ou seulement diplomatique, sauf à quelques endroits.
Par la force des choses, ces dernières années, elle commence à avoir un sens et à déterminer en grande partie la vie de ces régions arides.
Des solutions telles que l’hydroculture et la pisciculture s’ajoutent à ces nouvelles sociétés agricoles fertiles grâce au dessalement de l’eau de mer.
Ce modèle africain est notre canon et nous tous, dans notre union et dans notre agglomération d’unions villageoises, nous en faisons partie et nous prenons comme exemple ce qui se fait en Mauritanie ou en Côte d’Ivoire, voire au Mali.
Des pays traditionnellement considérés comme pauvres qui se sont proposés récemment comme terrain d’essai pour ces nouveaux circuits d’énergie renouvelable et de permaculture raisonnée.
Là, une grande partie de la population voisine est absorbée et un plan de développement vert est mis en œuvre, mené au Maghreb par le Royaume du Maroc.
De l’autre côté de Gibraltar, toute l’Andalousie espagnole n’a pas cessé de se transformer.
Beaucoup de ses oliviers n’ont pas résisté à la sécheresse et après avoir à peine abandonné leur culture intensive d’antan, de catastrophe en catastrophe et de réussite en réussite. Les choses bougent, cette fois-ci, vers de nouvelles méthodes. La devise est l’absorption et non la production de gaz à effet de serre.
Revenons à notre région : comme je le disais, notre coopérative s’est associée aux coopératives des villages environnants qui ont entrepris de faire de même, en installant des panneaux solaires sur leurs terres non cultivées et leurs montagnes dénudées. Comme un minimum de travail a été effectué pour l’installation de chaque panneau, le sous-bois a été un peu « nettoyé ». Pendant les premières années, il n’y a pas beaucoup de crainte d’incendie.
Lors de la dernière réunion, nous avons commencé à en parler après la perte de trente panneaux dans la partie sud de notre « terme municipal », où la foudre a mis le feu à une petite forêt de pins et les flammes sont arrivées jusqu’à la mer. Tout cela s’est passé dans la partie adjacente à la Torre Blanca qui possède un district municipal allongé séparant la partie orientale de nos montagnes d’une trentaine de kilomètres de côte.
Le ministère central conseille de créer des pare-feu, nous avons donc commencé à en discuter.
Il suffirait de mettre quatre Caterpillar sur une base permanente et trois ou quatre employés de plus pour assurer des accidents majeurs. Le problème est que nos collines et nos montagnes sont des endroits très accidentés. Les ravins et les falaises sont fréquents, pleins de pentes raides et de coins de feuillage sec et difficile à nettoyer.
Pour Juan le Mérinos, la solution consiste à planter des pitas d’aloès et des figuiers de barbarie. Tout cela s’enflamme mal et s’il pousse, il peut former des ceintures qui seraient de véritables barrières au feu.
Filiberto Murcia, l’ingénieur d’ICONA présent dans toutes nos réunions, nous a dit que ces plantations devaient avoir au moins cinquante mètres de large et qu’elles devaient être régulièrement labourées ou désherbées.
Maximo, il avait déjà une vieille idée de tout cela, il a soulevé dans cette réunion l’obligation de planter des figuiers, des bambous, des acacias d’une race africaine qui semble contribuer au fait que la terre devient à terme plus fertile.
Cela donnerait une multitude de terrasses pleines de caroubiers et d’oliviers abandonnés en compagnie de ce qu’il en reste et permettrait d’intercaler tout cela avec des rangées de nouveaux panneaux solaires.
Après cette réponse, chacun se mit à parler fort. Certains ont dit qu’il n’est pas nécessaire de se compliquer autant la vie ou qu’il ne leur appartient pas de se charger de ce que personne ne veut faire et d’autres choses de ce genre.
Mais lorsqu’on leur a expliqué en détail les subventions et leurs répercussions à long terme, après leur avoir conseillé de toujours faire ce qu’ils voulaient et de ne pas en faire trop, les trois quarts ont dit oui et les autres n’étaient pas du tout contre.
Puis, on a parlé pendant des heures sans stresser de toutes les choses à faire. Qui prend chaque place et qui se laisse venir ?
Donc, après leur avoir promis que nous ferions un casting complet, les choses se sont calmées et Maximo a fini d’expliquer les détails du projet qui serait réalisé avec Torre Blanca i Alcalà de Xivert, un village côtier d’amandiers et de vergers qui a aussi beaucoup de sous-bois et des montagnes dénudées et qui partage avec le nôtre le long de la route qui nous rejoint en faisant des centaines de virages ; beaucoup de terrasses vides et de vieux champs de caroubiers abandonnés.
S’il y a une différence entre ce qui se passe ici et ce qui se passe dans le monde, c’est qu’ici tout se passe comme il nous semble et dans la limite de nos possibilités.
Nous sommes une véritable salade de nuances. Rien de radical ou de voyant, rien qui n’émerge ici d’abord qu’ailleurs.
Mais nous préférons que tout soit très bien fait, même un peu dans le désordre, on aime les choses bien achevées, pour ne pas avoir l’air d’être pauvres. Surtout, nous ne devons pas retourner à la pauvreté.
Cependant, nous sommes plongés dans des projets pleins d’une logique implacable qui, vus de loin, sont mal compris ou pas vus du tout.
Nous avons mis les doigts dans le cambouis.
Notre présent ressemble à une cocotte-minute où le bon et le mauvais sont en même temps.
Des nouvelles solutions, de nouveaux projets apportent des problèmes et une certaine déception, mais si toute cette lutte contre le changement climatique n’avait pas existé, sûrement, lentement, d’abord les anciens, puis toute la région aurait été vidée, village par village.
Paradoxalement, ces seize années que nous faisons tout ceci avec la coopérative ont coagulé ce qui restait de la population avec plusieurs familles de personnes recrutées à l’extérieur pour des occupations diverses.
Ce n’est pas comme si le village se remplissait à nouveau au maximum. Mais il a cessé de se vider pour l’instant et a cessé de vivre ce qui semblait être son dernier souffle.
Lorsque vous parlez de ce qui se passe, qu’est-ce qui vient en premier ? Les panneaux solaires, c’est le prétexte avec lequel tous les autres projets s’inscrivent. Ce n’est pas la même chose de vivre ici pour continuer ce que vous faisiez avant, pour travailler dans les champs ou comme ouvrier maçon ou dans une des usines de carrelages ou de meubles des grandes villes comme Sant Mateu ou la Vall d’Aba, que de venir ici pour installer des panneaux et en même temps transformer votre environnement en ce qui semble être l’embryon d’une nouvelle civilisation, ou du moins c’est ce à quoi tout ça peut ressembler.
Le temps passe et nous arrivons au jubilé d’argent de toute cette constellation de coopératives vertes. C’est un royaume sans monarque ; Maximo continue d’être influent, il a vieilli, il est chauve et grisonnant en même temps, mais il n’a jamais voulu du trône.
Dans chaque coopérative, il y a un président élu, un conseil d’administration et tout le reste. Tout passe par des élections démocratiques successives qui, combinant leurs inerties avec leurs mairies respectives et notre généralité en tant que communauté autonome, en viennent à faire de ce vieux concept de Maestrazgo, un tout petit concept nouveau, quelque chose d’immergé dans un changement accéléré.
Incomplètement nouveaux, car ici les nouveaux rejetons naissent des vieux troncs. Et tandis que vous greffez un nouvel arbre sur un arbre déjà fort, n’ayant pas ses propres racines et vivant pour jeter leur énergie du vieux tronc, ainsi vous gagnez du temps. Et le vieil arbre, peut-être, il se sent rajeuni par son apparence verte.
Et si on l’appelle Maestrazgo vert ou des choses comme ça sur les réseaux sociaux, ce n’est pas tout à fait exact, car cette confédération ne régit pas scrupuleusement le territoire Maestral en débordant un peu trop sur la côte et dans les villes de Tarragone et en ne montant pas trop haut vers le désert montagneux de Teruel.
Ce qui est fait dans d’autres parties du monde par les gouvernements ici est fait par les gens, ou du moins ils veulent donner l’illusion. Et tout n’est pas facile quand on le voit de l’intérieur la responsabilité de chacune de nos tâches.
Chacun sent que sa parole a du poids et il ressent cet idéal, qu’être souvent grossier et même féroce n’est pas le plus important. Chaque intérêt, chaque groupe, chaque personne négocie en détail perpétuellement chaque point. Et les problèmes ne manquent pas, car le siège extérieur n’est pas seulement climatique, mais aussi politique.
Nous avons besoin de soutien et c’est le contraire qui arrive, c’est vrai.
Partout, il y a une violence brute dans laquelle le monde met en scène ses symptômes de stress dans ce que l’on pourrait appeler « la tragédie de l’eau ».
Il y a trente ans, on nous parlait de la nouvelle société et du développement durable. Il n’y a pas eu et il n’y aura jamais de développement durable. Et même les meilleures solutions ne durent pas, car bien sûr elles sont capables de résoudre quelque chose en leur temps, mais elles se déforment avec ce qu’elles provoquent elles-mêmes ou se démodent ou se pervertissent en pourrissant à cause de nos mauvaises habitudes.
Et je ne parle pas seulement des nombreuses et diverses corruptions que toutes ces tentatives de transition ont entraînées.
Au cours des trente dernières années, par exemple, il n’y a pas eu de solution définitive qui aurait rendu la voiture compatible avec les nouvelles réalités.
Aucune batterie n’a donné de solution totale. Et seulement, ce qui a survécu est maintenu. Il en est ainsi pour de nombreux secteurs.
Les technologies qui peuvent apporter des solutions sont rarement applicables à grande échelle en raison du manque de matériaux ou pire encore. Certaines technologies exigent un sacrifice écologique supplémentaire dès leur développement.
Mais le pire, c’est de ne rien faire.
De nombreuses initiatives coulent sans pouvoir être accessibles à tous, certaines aussi importantes que l’abandon des combustibles fossiles a été presque entièrement admis, mais nous devons fermer les yeux sur le coût et les conséquences de la mise en œuvre des nouvelles solutions.
Comme nos collines pleines de panneaux solaires. Les premiers ont dû être remplacés il y a dix ans. De nombreuses batteries aussi.
Dès leur installation, de meilleurs panneaux ont été inventés. On se met à les critiquer et on se met à s’empresser de les remplacer, plus tôt, si possible, que les autres, sachant qu’avec les nouveaux, la même chose va se produire.
Si l’on compte la pollution due à leur production et à leur recyclage, on arrive à une chose scandaleuse.
D’une part, nous avons développé une région rurale et tout le reste, d’autre part, dans d’autres endroits, nous avons fait apparaître la pollution et même l’esclavage si l’on tient compte de qui et comment on les fabrique ?
Ainsi, pour notre propre conscience, nous maltraitons les autres.
Eh bien, beaucoup ont besoin de notre projet et l’étendent davantage pour sa gestion du paysage et du changement de mode de vie que pour son efficacité en ce qui concerne les énergies vertes.
Nous approchons lentement du 2060 et il est beaucoup question de prendre des décisions urgentes.
Et comme toujours, les mêmes gouvernements se réunissent et finissent par se mettre d’accord théoriquement sur tout et sur ce que veulent leurs sociétés, mais en contrepartie, tout ce qui a été signé ne coupe ni ne pique, et en général, cela pèche pour toute sa tiédeur.
Chacun représente une population, une population et une société constituée autour de ses propres intérêts et d’autres intérêts collectifs.
Nous essayons, en général, nous essayons de transformer, de corriger, de progresser, de créer des transitions pour les industries qui apportent de la pollution ou des habitudes néfastes. Mais seul notre grand nombre est en soi un facteur de régression.
Si pour la première chose, nous sommes lentement arrivés. Au fait, certaines choses se modifient. Cela ne servira à rien si nous n’arrivons pas à maîtriser la deuxième question. Comment sommes repartis et dans quel nombre ?
Il faudra alors prendre des mesures beaucoup plus systématiques et lentes, mais irrévocables, pour changer les choses en ce qui concerne les problèmes de densité et de quantité de population.
C’est surtout la nature même de l’économie fondée sur l’accumulation de la richesse et son contrôle, et non sur le progrès et la répartition du bien-être, qui pose un problème.
Et malgré ses apports infinis, nous devons pleurer toutes les formes de socialisme, c’est à dire que ni dans ses excès ni dans sa meilleure disposition et soif de justice, il n’a pas réussi à conduire l’essaim humain vers le bien commun.
Il n’y a pas de solution globale, même modérément générale, seulement une action locale, concrète, pratique et portée par un dévouement quotidien. Seulement ainsi on peut aller vers le bien commun, par une accumulation de symptômes et de projets.
C’est pourquoi nos constellations coopératives sont les plus adaptées à ce qui nous permettra de survivre.
L’âne n’est pas privé de la carotte pour survivre, mais de la carotte du profit et cela change beaucoup de choses.
Heureusement, la croissance démographique s’est ralentie, dans certains cas, plus précisément, par exemple au Japon ou en Allemagne.
Les flux et reflux de population ont leurs propres rythmes et difficultés.
D’une part, les sentiments nationalistes, les barrières culturelles ou les insuffisances pratiques forment un champ labyrinthique, et d’autre part, les ONG et toutes sortes d’organisations humanitaires ne mesurent pas l’ampleur de chacun de ces désespoirs, à la façon dont nous sommes corruptibles. Nous sommes lâches pour garder notre confort, méchants de cupidité.
Les prévisions pour l’avenir jouent contre tout optimisme. La population mondiale n’a pas diminué autant qu’on le pensait malgré ce que je viens de dire et les villes se vident de leur sang à cause de toutes les épidémies et de leurs rechutes que nous avons connues jusqu’à présent au cours de ce siècle.
Cet exode est appelé la grande transformation.
Les mégapoles ont mauvaise réputation et ce que l’on présentait pour ces temps-ci que certaines possèdent des aires métropolitaines de plus de 100 millions d’habitants est loin d’être le cas, aucune n’a dépassé les 30 millions, pas même en Chine.
Maximo met toujours en exemple ou en comparaison la Chine, c’est un lieu assez éloigné vu d’ici pour lui donner la forme que l’on veut.
Et dans cette grande nation, on dit qu’ils savent mieux que quiconque se cacher, manipuler, influencer et créer des dépendances.
Leur système cyberautoritaire est un fait acquis et ils s’autorisent des choses impossibles pour l’Occident et que celui-ci fait semblant de ne pas remarquer.
Parce que personne ne peut se permettre de subir les conséquences d’une déstabilisation, ce serait mauvais pour les affaires, n’est-ce pas ?
Ainsi, et presque sans dissimulation, ils prennent des mesures, ils prennent toujours des mesures et ne les adaptent pas, croyez-moi. Certains recherchent le bien commun, le progrès social, d’autres l’ordre. Un ordre qui n’est rien d’autre que la volonté impérieuse de maintenir fermement une hiérarchie et des élites.
Vu d’ici, tout ce qui y est décidé semble être le fruit d’un absolutisme pragmatique. Mais au fait, il est organisé pour dominer leur quantité, leurs leaderships s’occupant de tout prévoir.
D’autre part, selon Maximo, ces trente dernières années ont vu la transformation et l’échec du géant américain.
Il est passé du statut d’empire romain de son temps à celui de grande Argentine du Nord.
Aujourd’hui, cette nation ressemble plus que jamais à l’Argentine du XXe siècle, même s’il continue à conserver une armée très bien équipée et une fierté par fois naïve.
Le fait que l’Asie soit le leader économique pour les Européens signifie de nombreux changements, mais au fond, nous sommes deux vieilles civilisations. Vieux et assez machiavéliques pour trouver un moyen de parvenir à un accord et un équilibre apparent.
Cet hiver, nous avons passé des mois sans voir le ciel ou juste un peu de temps en temps.
Ce ne sont pas les gaz à effet de serre les coupables. De septembre à février, la région méditerranéenne vit sous l’effet de pluies continues.
Bien que les rayons ultraviolets traversent partiellement les nuages, moins d’électricité est collectée et certains orages ou grêlons finissent par casser des choses.
Beaucoup de gens ont prédit que nous vivrions de plus en plus dans les zones arides dans ces régions. En admettant que l’été soit généralement sec et torride, nous avons des hivers très pluvieux et nous n’avions pas pu compter dessus. Il y a des semaines où nous sommes continuellement enveloppés par le tonnerre et les orages.
Certains disent que c’est à cause de la reforestation du Maghreb et de la nôtre. Rien n’est jamais du goût de tout le monde.
Malgré tout, la santé de la population est meilleure, l’informatique quantique, maintenant qu’elle ne produit plus d’erreurs, a donné aux laboratoires quelques recettes à partir desquelles ils ont fait progresser certaines thérapies.
Il est vrai que la nature est réticente à se laisser apprivoiser et nous fait comprendre qu’elle n’aime pas les foules ni les misères des êtres humains.
De temps en temps, des épidémies ont éclaté, dont certaines sont dues à des virus virulents ou à des grippes très tenaces.
Au cours des huit dernières années, il y a eu peut-être deux millions de décès sous forme de pandémie. Depuis les coronavirus des années 20 et tout ce spectacle, nous nous sommes habitués à une plus grande fréquence d’épidémies que dans d’autres circonstances historiques auxquelles je ne veux même pas penser auraient tuée beaucoup plus encore. Si seulement les virus mutants d’aujourd’hui avaient été comme les célèbres fléaux d’antan, ils auraient tué des milliards de personnes.
Aujourd’hui, on ne confine plus, on ne le fait presque jamais. Les masques sont bien meilleurs, avec des microgrilles de cuivre entre deux couches de tissu, elles sont généralement comme ça, ou les jetables avec des films antiviraux très puissants ; ceci et le liquide hydroalcoolique suffisent à couper toute propagation, tant que les gens sont disciplinés.
De la grippe la plus courante, aux gastro-entérites, aux pires mutations virales qui s’adaptent progressivement à la prophylaxie utilisée, tout dépend des mécaniques du nombre. Plus nous sommes nombreux dans un lieu, plus il faut avoir une bonne hygiène.
Mais ce qui tourmente le plus l’habitant de notre temps, ce ne sont pas les pandémies ou les cancers récalcitrants ou autres dégénérescences atteignant un âge avancé, ce qui fait plus de ravages, c’est le vide existentiel et le fait de ne voir clair ni à court ni à long terme.
Nous vivons entre les autosatisfactions de ceux qui se croient des transformateurs du Nouveau Monde et les pessimistes qui vivent en réagissant aux défauts du système. Maximo me dit que ça a toujours été comme ça, que peut-on dire ?
Ici, depuis ces terres de lumière claire, marchant parmi les amandiers et les caroubiers, nous parlons des conséquences des types de transport. Nous parlons des zones à fortes ou faibles émissions. Nous discutons des voies à suivre, l’efficacité et les routes à prendre pour chaque problème.
Nous avons toutes ces conversations de bar, il en a de toutes sortes.
Nous avons compris rapidement que les guerriers du vert ne sont pas aussi courageux ou sacrifiés. Leurs détracteurs, non plus, parce qu’ils mettent beaucoup en garde et ne soutiennent rien, puis les laissent faire, par fatalisme ou pour avoir quelque chose de nouveau à critiquer, ils ne sont pas si courageux, surtout les bavards.