Ethan Dullac - Tome 2 - Sylvain Forestier - E-Book

Ethan Dullac - Tome 2 E-Book

Sylvain Forestier

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Beschreibung

Après avoir assisté aux meurtres sauvages de toute sa famille et avoir été sauvé par son oncle Harry, Ethan Dullac a intégré l’ordre de la Fraternité au sein de laquelle il s’est initié à son don et à un nouvel environnement. Il poursuit son apprentissage quand un don nouveau émerge en lui, bousculant tous ses repères tandis qu’il doit faire face aux mystères qui sommeillent à Atlandide. Entre rebondissements, flous, incertitudes et aventures, les apparences semblent plus que jamais trompeuses…


À PROPOS DE L’AUTEUR

Sylvain Forestier développe une affection particulière pour la science-fiction et la fantaisie sous l’influence des auteurs tels que Tolkien et Herbert, entre autres. Avec Ethan Dullac, il signe une suite d’intrigues passionnantes mûrie par vingt ans d’imagination.

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Veröffentlichungsjahr: 2023

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Sylvain Forestier

Ethan Dullac

Le retour de la magie

Tome II

Roman

© Lys Bleu Éditions – Sylvain Forestier

ISBN : 979-10-377-9853-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

La cité d’Atlantide

Prologue

En ce début de matinée, le soleil brillait de mille feux. Les rayons rasants de cette fin de mois d’août s’abattaient sur les vitres d’un building perdu dans le centre-ville de Miami. Ils léchèrent la façade puis tout doucement atteignirent une des suites de l’hôtel que le bâtiment abritait. L’occupant de cette chambre, Alifax fils d’Ajax, se retourna avant de pousser un juron.

— Putain ! Les rideaux ! Tu ne pouvais pas les tirer ! Vas-y ! beugla-t-il en donnant une claque sur les fesses dénudées de la jeune femme qui se trouvait allongée à ses côtés.
— Hum ! dit-elle en s’éveillant. Tu ne peux pas y aller ?
— Faut-il que je te rappelle qui je suis ? dit-il sur un ton méprisant, sans appel.

La femme se leva en poussant un grognement. Elle se dirigea d’un pas ensommeillé vers les lourds rideaux qu’elle tira l’un vers l’autre, d’un mouvement rageur. La suite fut de nouveau plongée dans la pénombre.

— Allez, reviens te coucher ! l’admonesta Alifax, sur un ton plus calme mais péremptoire.

La femme obéit sans rien dire. Elle savait trop bien ce qu’elle risquait en déplaisant à l’homme avec qui elle venait de passer la nuit. Dès qu’elle fut rallongée, Alifax l’attira contre lui. Il lui fit l’amour sauvagement, comme il en avait l’habitude. La femme se laissa faire comme il se devait lorsqu’on avait la chance de partager la couche d’un des élus. Lorsqu’il eut fini, il la congédia d’un simple geste de la main. Après tout, ce n’était qu’une humaine sans don, une esclave.

Il se prélassa au lit encore un petit moment avant de se faire livrer un petit déjeuner qu’il avala en lisant ses journaux. Il se leva, se doucha et s’habilla avant de prendre la direction du bureau qui se trouvait dans la suite qu’il occupait. Là, il composa un numéro et appuya sur la touche haut-parleur du combiné avant de s’enfoncer dans le fauteuil en cuir.

— Allo ? répondit une voix puissante après trois sonneries.
— Père, c’est Alifax !
— Je suis content de t’entendre, mon fils. Comment vont les affaires à Miami ?
— Très bien, Père ! répondit Alifax sans s’étendre.
— As-tu accompli ta mission ?
— Oui, j’ai réussi à attirer une nouvelle famille dans notre ordre.
— Félicitations. Et pour Harry Dullac, tu en es où ?
— Impossible de le localiser Père. C’est une véritable anguille.
— Rhaaaaa… Nous aurions dû le tuer, il y a des années, quand nous en avons eu l’occasion. Continue de le traquer, tu finiras bien par le trouver.
— Très bien Père, répondit Alifax avant de poursuivre, puis-je vous demander quand vous comptez lancer l’autre mission ?
— Le plus tôt possible. Je suppose que tu veux en faire partie ?
— Oui, Père, je veux vous aider à écraser cet ordre minable.
— Dès que le piège sera prêt à fonctionner, l’équipe de Christine te fera signe afin que tu puisses participer à la mise à mort, répondit Ajax sur un ton qui laissait percevoir la fierté qu’il ressentait pour son fils.
— Merci Père. Cette marque de confiance m’honore.
— Tu le mérites, mon fils. As-tu autre chose à me dire ?
— Non, père, c’était tout.
— Très bien, alors je vais te laisser. Tiens-moi au courant de la suite des évènements.
— Oui, Père. À bientôt.
— Oh dernière chose, Alifax. Ne te fatigue pas trop en joutes amoureuses, tu pourrais manquer d’énergie au moment opportun, ajouta Ajax avant d’éclater de rire.
— Vous me faites surveiller Père ?
— Bien sûr que non ! Je prends soin de toi, c’est différent. Dois-je te rappeler que tu es mon seul héritier ?!
— Non Père !
— Très bien. À bientôt Alifax.
— À bientôt Père.

Lorsqu’Alifax raccrocha, il avait le sourire de celui pour qui la journée avait bien commencé.

Chapitre 1

La cérémonie

Le courage n’est pas l’absence de peur mais la capacité de vaincre ce qui fait peur.

Nelson Mandela

À un autre endroit non déterminé pour nous sur la Terre, le soleil se couchait. Ethan Dullac, jeune garçon de bientôt dix-sept ans, venait de se mettre au lit épuisé après une journée harassante d’entraînement en vue de la cérémonie qui devait se dérouler le lendemain matin. Ses vingt-et-un camarades de deuxième année et lui étaient soumis par Maître Eiwaz à un entraînement particulièrement éprouvant. Ils le subissaient depuis des jours et des jours, sans relâche, pour le numéro qu’ils devaient y interpréter.

Lorsqu’Ethan pensait à la cérémonie de l’accueil, cela le ramenait toujours à celle qu’il avait lui-même vécue un an auparavant. Il fouilla dans ses souvenirs et se remémora, avec clarté, la nuit où son destin avait basculé. Il n’avait rien oublié de cette nuit de novembre où sa famille avait été mise à mort par l’ordre du Chaos. Les visages de ses parents, Estelle et Henry, de son frère Albert et de sa petite sœur Louise lui revinrent très clairement en mémoire. Il ignorait pourquoi, mais il y pensait souvent ces derniers temps.

— Peut-être que c’est dû à l’approche de mon anniversaire ou de celui de leurs morts, se dit Ethan tandis qu’il sentait son cœur se serrer.

Il n’avait pas oublié comment il avait été sauvé in extremis par son oncle Harry. Pas plus que les révélations que ce dernier lui avait faites sur sa famille ainsi que sur cette lutte sans merci que se livraient dans l’ombre, l’ordre de la Fraternité et l’ordre du Chaos. Il se souvenait, avec plus de joie, des années qu’il avait vécues avec son oncle Harry ainsi que de sa rencontre avec celui qui allait devenir son meilleur ami, Alex. Il se remémora son arrivée dans la cité et l’émerveillement qu’il avait ressenti en la découvrant ainsi que la rencontre avec ceux qui allaient devenir sa famille de cœur.

Il se repassa le film de l’année écoulée : les cours, son amour grandissant pour Aurélia, la vie au sein de la tribu verte, la trahison de Gasper et sa fin tragique. Ses souvenirs plus récents le ramenèrent à l’épreuve de la tour qu’il avait réussie avec brio, lui permettant d’être dans cette chambre. Il n’avait rien oublié et avait tout gravé dans sa mémoire.

Il se tourna vers la table de nuit et regarda la photo qui s’y trouvait. Ses parents, son frère, sa sœur ainsi qu’une autre personne, qu’il avait du mal à reconnaître comme étant lui, souriaient au photographe. C’était une photo qui reflétait la joie, le bonheur.

— J’aurais tant aimé partager mon bonheur avec vous ! chuchota-t-il à la photo.

Ethan fut interrompu dans sa rêverie par le bruit de la porte de la chambre qu’on tentait d’ouvrir sans faire de bruit. Sur le qui-vive, il se tourna prestement. Dans l’embrasure, un rayon de lumière vint éclairer le visage d’Alex qui entrait dans la chambre. Il referma la porte puis se dirigea vers son lit à pas de loup.

— Tu peux allumer, je ne dors pas encore, dit Ethan.
— OK ! répondit ce dernier en allumant la lumière.
— Tu n’arrives pas à t’endormir ? demanda Alex. Cela fait un petit moment que tu es monté pourtant ! ajouta-t-il alors qu’il se mettait en pyjama.

Ethan, qui était sur le dos, se tourna vers son ami.

— Je gamberge en pensant à demain, répondit-il d’une voix lasse.
— Arrête de t’en faire. Avec l’entraînement que vient de nous faire subir Maître Eiwaz, aucun autre groupe n’a jamais été aussi préparé que nous, dit-il en se glissant sous sa couette.
— C’est certain ! répondit Ethan en se souvenant des séances éprouvantes qu’ils avaient vécues au cours de ces dernières semaines.
— Je te connais depuis de nombreuses années maintenant. Qu’est-ce qui te perturbe à ce point ?
— Je n’arrête pas de penser à tous les événements qui m’ont conduit ici. En plus, Harry me manque.
— C’est vrai que cela fait beaucoup pour un seul cerveau, se contenta de répondre Alex en se moquant doucement de son ami.

Alex savait que, dans ces moments-là, quoi qu’il dise ou quoi qu’il fasse, cela ne changeait rien. Ethan traversait parfois des périodes d’introspection et de doute. Généralement, il suffisait d’attendre que cela passe. Les récents événements ajoutés au fardeau de se voir catalogué comme « le messie » n’ont rien arrangé, songea-t-il.

— C’est normal avec tous les événements de ces derniers mois. Tu devrais essayer de ne plus y penser. Regarde, moi, j’ai choisi une autre solution pour ne pas penser à demain, ajouta-t-il tout sourire.
— Ah ça oui ! répondit Ethan en riant. J’ai vu ça tout à l’heure, au bord de la piscine.
— Quoi ?! Qu’est-ce que tu vas imaginer ? répondit Alex faussement surpris.
— Rien. Mais je sais déjà de quelle manière tu as évacué ton stress. D’ailleurs, vous n’en avez pas marre Pauline et toi d’être toujours ensemble maintenant que nous faisons partie de la même tribu ?

Alex se redressa d’un seul coup et s’empara de son oreiller. Il l’envoya directement sur Ethan qui dévia le projectile. Il valdingua contre le mur, rebondit et atterrit au sol. Ethan prit le sien et le jeta vers la tête de son ami qui l’esquiva à son tour. Sur quoi, ils éclatèrent de rire, comme des gamins.

— Pour tout te dire, non ! commença Alex. Je dirais même le contraire. En parlant de ça, comment va Aurélia ? Tu ne la voyais pas aujourd’hui ?
— On s’est vu en coup de vent, répondit Ethan. Elle va bien mais elle est épuisée par la préparation de l’arrivée des nouveaux.
— Elle t’a donné des nouvelles de Préciosa et des autres ? continua Alex voyant qu’il était arrivé à lui changer les idées.
— Aurélia m’a dit qu’elle s’était superbement intégrée et qu’elle allait bien. Il paraît que Bald les rend déjà chèvres, reprit Ethan, mais que c’est une super recrue.
— Et pour Siva, elle t’a dit quelque chose ?
— Qu’elle les a tous conquis.
— Normal, ce sont d’anciens verts et nous étions les meilleurs. Aucune raison que cela change, quelles que soient les filières auxquelles nous nous destinons.
— Je suis bien d’accord, répondit Ethan avant de changer de sujet. Tu te sens prêt pour demain ?
— Shepard et Eiwaz semblent le penser donc aucune raison de s’en faire.
— Tu as sûrement raison. Je m’inquiète pour rien, comme d’habitude.
— C’est bien de le reconnaître, dit Alex en souriant.

En même temps qu’il prononçait ces paroles, Alex se leva puis se dirigea vers les oreillers qui étaient restés par terre. Il les ramassa et renvoya le sien à Ethan avant de de se recoucher.

— Si on veut être en forme, demain, il vaut peut-être mieux dormir maintenant.
— C’est vrai, rétorqua Ethan en secourant la tête en signe d’assentiment. Bonne nuit.
— Bonne nuit, répondit Alex avant d’éteindre la lumière.

Ethan mit plusieurs minutes à s’endormir mais la discussion avec son ami l’avait calmé et la fatigue des derniers jours finit par l’emporter.

Le lendemain matin, le soleil filtrait déjà à travers les panneaux de bois lorsqu’Ethan se réveilla. Il se tourna vers le lit d’Alex, qui était déjà vide. Il ne lui fallut pas longtemps pour deviner où ce dernier se trouvait. Depuis qu’ils étaient arrivés ici, la cuisine était devenue son endroit préféré.

Après s’être préparé, Ethan remonta le couloir des garçons pour parvenir au palier qui menait vers l’escalier.

— Ethan, attends-moi ! lui lança Justine en déboulant du couloir des filles. Tu vas déjeuner ou tu pars faire un tour ? luidemanda-t-elle tout sourire.
— Première suggestion.
— Je peux me joindre à toi ?
— Hum, laisse-moi réfléchir ? répondit Ethan en se frottant le menton l’air sérieux.
— Sympa comme remarque !
— Évidemment, avec grand plaisir, ajouta Ethan en éclatant de rire devant la mine déconfite de son amie.
— Tu t’es réveillé dans le corps d’un clown ce matin ! répondit-elle en rigolant à son tour, comprenant qu’Ethan avait voulu lui jouer un tour.

Toujours en plaisantant, ils descendirent, bras dessus bras dessous, les quelques marches qui les firent arriver dans l’atrium principal où ils croisèrent plusieurs de leurs camarades. En passant devant le tableau d’affichage où étaient postées toutes les informations qui les concernaient, ils constatèrent qu’un nouveau message avait fait son apparition dans la nuit. Il s’agissait d’une grande affiche avec un grand 0 peint.

« C’est le grand jour !

Rendez-vous dans les vestiaires

du colisée à quinze heures précises !

Shepard de Brassacourt »

— Il était temps, dit Justine en pointant du doigt le chiffre 0. Je suis contente que ce maudit décompte des jours soit terminé, ça commençait à me stresser.
— Je suis 100 % d’accord. Shepard était vraiment pénible avec ça. On y avait le droit tous les jours.
— Oh que oui ! le coupa Justine. J’ai parfois l’impression qu’on n’a pas eu de vacances, continua-t-elle en prenant sa tête de petite fille tristouille.
— N’exagère pas Juju, on a eu pas mal de temps libre quand même.
— Ah ! dit-elle en arborant un large sourire. Je ne m’en suis pas rendu compte.
— Et c’est moi que tu traitais de clown tout à l’heure ? ajouta Ethan en prenant la direction de la cuisine.

Là, ils se servirent au buffet puis s’attablèrent avec les autres en se joignant aux conversations qui tournaient toutes autour de la cérémonie.

Le reste de la matinée d’Ethan fut consacré aux tâches aussi diverses et variées que le rangement de la chambre, qu’Alex avait bien évidemment oublié, à quelques longueurs dans la piscine et à une séance à l’arme blanche pour se remettre en tête les mouvements qu’il allait devoir réaliser dans l’arène. Sans oublier la préparation du repas, dont il avait la charge pour toute la semaine.

Après le déjeuner, tout le monde se retrouva devant l’entrée afin de partir ensemble pour la cité. Ils passèrent par la forêt qui se trouvait entre leur bâtiment et la ville moderne, pour arriver directement au pont menant vers l’île. Ils n’étaient pas passés par la route longeant les villas, afin de ne pas être vus des premières années qui en avaient pris possession la veille au soir.

Ethan, tout en marchant, se remémorait le moment magique où il avait pénétré dans la cité. Il se rappelait l’émerveillement qu’il avait ressenti en sortant de la caverne tout là-haut, de la beauté des lieux mais aussi du secret qui semblait envoûter toute la cité.

Sans savoir pourquoi, au moment où il pénétrait sous le couvert de la forêt, Ethan pensa aux Elfes qui vivaient cachés dans les bois, de l’autre côté de la vallée. Lui qui s’était promis de partir à leur recherche, au cours de l’été, avait été tellement occupé qu’il n’avait pas eu le temps de le faire.

— Il faudra vraiment que je trouve le temps de les chercher. Je veux savoir ce qui les rattache à ma mère, se dit Ethan lorsqu’il aperçut, au loin sur sa droite, l’immense forêt qui les abritait.
— Tu rêves ? lui demanda Alex en lui pinçant le bras. On arrive !

Ethan se massa le bras à l’endroit qu’Alex avait pincé, puis il s’engagea sur le pont qui menait vers l’île. Là se trouvait un forum à la mode romaine autour duquel se dressaient d’immenses bâtiments de style antique qui accueillaient les différents services publics de la cité.

Après avoir pris un embranchement sur la gauche, ils arrivèrent au détour d’une ruelle, devant l’entrée du tunnel qui menait vers les tréfonds du colisée. La descente restait, comme à son habitude, un moment excitant, même s’il avait perdu de son mystère depuis qu’ils l’empruntaient régulièrement pour aller s’entraîner. Ses compagnons et lui connaissaient désormais les chemins et les méandres du bâtiment mieux que quiconque.

Ils descendirent les uns derrière les autres vers la coursive souterraine principale. En bas, le maître Shepard les attendait. Au fur et à mesure, ils se rangèrent les uns à côté des autres afin de lui faire face et lorsque le dernier arriva, il prit la parole.

— Bonjour à tous ! dit-il de sa voix puissante qui résonnait sur les parois du tunnel.
— Bonjour Maître, répondirent-ils en chœur.
— Aujourd’hui, c’est le grand jour ! Nous…

Ethan n’écoutait plus que d’une oreille. Il avait remarqué un drôle de bruit, comme celui que faisaient les battements d’ailes d’une mouche, mais assourdi. Il essaya de détecter où se trouvait l’insecte mais il ne vit rien. Il se concentra un peu plus et finit par comprendre que le bruit ne venait pas d’un insecte mais d’au-dessus de leurs têtes. D’un seul coup, un éclair de compréhension le frappa. Le stade devait être plein et c’était le bruit de la foule qu’il entendait. Il regarda ses camarades et vit qu’il n’était pas le seul à l’avoir perçu. D’autres, comme lui, avaient le regard qui se perdait vers le dessus de la galerie.

— Vous dormez ou vous m’écoutez ? demanda brusquement Shepard de sa voix tranchante.

Cette remontrance eut l’effet de faire revenir Ethan à la réalité. Il mit le bruit en sourdine, dans un coin de son esprit.

— Si vous m’avez écouté, mais j’en doute, dit Shepard en insistant sur ce dernier point, je vous disais que vous alliez vivre un moment magique. Une sorte de communion entre le peuple d’Atlantide et vous.
— Communion ?! Je dirais plutôt évaluation ! objecta Alex.
— Pourquoi dis-tu cela ? demanda d’un ton agressif leur mentor.
— Il faut être réaliste, les spectateurs vont comparer notre prestation par rapport à celle des années précédentes. En fait, c’est une évaluation ni plus ni moins, insista Alex.
— Je ne vois pas les choses comme toi. Chaque année, c’est un recommencement et chaque session est différente. Elle vous permet de vous faire remarquer et surtout de faire honneur à ceux qui ont fait l’effort de venir vous voir.
— Enfin, Maître Shepard, ils sont surtout venus voir les premières années, dit Artemis, un ancien rouge qui pensait comme Alex. Venus voir si nous arrivons encore à recruter. Je pense que cela les rassure de constater que, malgré tout, le renouvellement a lieu chaque année.
— Ah bon, tu crois vraiment qu’ils sont venus pour eux plus que pour vous ?
— C’est évident, enchérit Justine qui avait l’air du même avis que son voisin.
— Vous ne réfléchissez pas ! Heureusement que j’ai une année pour vous faire rentrer des choses dans la tête, commença Shepard en les regardant droit dans les yeux. La cérémonie d’accueil n’est pas faite pour les nouveaux, elle est faite pour vous mettre en valeur, poursuivit-il en pointant son doigt vers eux. C’est un symbole, un rite de passage entre eux et vous, une sorte de transmission de témoin.

Ethan écoutait sans rien dire. Il ne voulait surtout pas se mêler à la conversation et ne voyait pas bien où tout cela allait finir. De toute façon, qu’ils le veuillent ou non, cette cérémonie aurait lieu.

— À quoi bon discuter sur son enjeu, se dit-il. Shepard semblait lire dans ses pensées lorsqu’il s’exprima de nouveau.
— Bon de toute façon, quel que soit l’objectif de cette cérémonie, c’est bientôt l’instant. Je sais que vous êtes prêts et surtout que vous serez à la hauteur. Mettez-leur-en plein la vue mes petits.
— C’est nous qu’il traite de petits ?! demanda Bernard en riant.
— Je crois bien ! lui répondit Camille Laurent, une jeune fille qui avait fait partie de la tribu jaune et avec qui Ethan avait sympathisé depuis que les tribus avaient fusionné.
— Vous savez ce que vous avez à faire, les interrompit Shepard. Vous avez une heure pour vous préparer. Je compte sur vous, termina-t-il en leur tournant le dos.

Sans attendre, Ethan partit vers la pièce où se trouvait sa tenue, bientôt suivi par tous les garçons, tandis que les filles se dirigeaient vers une autre pièce. Ethan prit sa place sur le premier banc, comme il le faisait depuis plusieurs semaines. Il se déshabilla et enfila le justaucorps marron qu’il devait porter sous la combinaison qui descendait jusqu’au niveau des chevilles. Par-dessus le plastron, il enfila une sangle qui se terminait par une boucle de fer. Il se déplaça vers le râtelier qui se trouvait sur le mur opposé et se saisit de son épée Excalibur.

À son contact, elle vibra et se mit à le chatouiller comme elle le faisait à chaque fois. Le dragon qui ornait la garde ondula la queue et vint se recroqueviller à l’endroit où la garde touchait la lame. Comme à chaque fois, Ethan tressaillit. Il n’arrivait pas à s’y habituer. C’était au-dessus de ses forces que d’imaginer que son épée avait une « âme ».

Autour de lui, tous ses compagnons finissaient de se préparer. Il fit coulisser la lame dans la boucle et fit retomber la poignée sur sa taille. Il était prêt. Un coup d’œil de chaque côté lui indiqua que c’était maintenant le cas pour tout le monde. Il sortit de la cellule et retrouva les filles qui sortaient elles-aussi.

Aucun d’entre eux ne souriait ni n’avait envie de parler, ils étaient tous concentrés. Au-dessus d’eux, ils entendaient la foule qui s’agitait de plus en plus. Si les souvenirs d’Ethan étaient bons, les nouveaux devaient avoir fait leur entrée sous les arches et ils entendaient le tonnerre d’applaudissements qui les accompagnait. Il donna un petit coup de coude à Alex qui lui rendit.

— Deuxièmes années ! C’est le moment de faire votre entrée ! hurla Shepard pour couvrir le bruit qui provenait du colisée. En rangs par deux, comme pendant les répétitions avec Maître Eiwaz ! Écoutez comme ils vous attendent, comme ils vous réclament. Faites honneur à votre statut ! En avant !

Ils se mirent deux par deux et avancèrent en colonne jusqu’à la porte qui se trouvait quelques mètres plus loin. Ils prirent sur la droite et commencèrent à monter sur la rampe qui menait vers la grande et lourde porte donnant sur l’arène. Le chemin n’était pas très long, quelques mètres à peine qu’ils parcoururent en moins d’une minute. Ils s’arrêtèrent devant puis attendirent, comme lors des entraînements, que la porte coulisse pour leur laisser le passage.

Lorsque le premier cliquetis retentit, Ethan sut que le moment tant désiré, mais redouté, arrivait. Les portes se mirent à glisser pour se séparer. Un fin rayon de soleil fit son apparition sur le sol de sable et s’agrandit peu à peu. Plus il pénétrait dans le couloir sombre, plus ils étaient aveuglés mais ils en avaient maintenant l’habitude.

— En avant ! dit Ethan avant de s’avancer sans hésitation suivi par sa colonne.

Alex à ses côtés fit la même chose, entraînant l’autre colonne. Ils avancèrent en pleine lumière et découvrirent que les gradins étaient bien remplis. Une foule considérable était présente, hurlant à pleins poumons.

— Y’a foule cette année ! dit Nolan derrière lui.
— C’est normal ! répondit Camille. Le messie est parmi nous. Du coup, la foule est venue en masse pour le voir.
— Ils sont venus pour voir la bête curieuse, ajouta Artemis Bliss en souriant content de sa bonne blague.
— C’est bon ! répondit Malory, une ancienne bleue devenue son amie. Laissez-le tranquille ! On est avec lui.
— On a autre chose à penser que ces âneries, ajouta Alex. On a un numéro à faire et si on le rate, tout le monde se fichera de savoir que le messie était ou non parmi nous.
— C’est sûr, renchérirent Malory et Justine d’une même voix. Allez, soyons unis.

Ethan lança un coup d’œil vers les gradins sans prêter attention à la conversation. Il cherchait Aurélia et la repéra dans la loge officielle. Elle lui fit un signe de la main et un « je t’aime » silencieux. Il répondit seulement par un sourire car il savait que des centaines de paires d’yeux étaient braquées sur eux. À côté d’elle, son père se leva puis s’approcha du pupitre qui se dressait devant lui. Dès qu’il l’atteignit, il leva les bras afin de faire baisser le volume sonore dans l’arène et prit la parole.

— Mes chers concitoyens, merci à vous d’être venus aussi nombreux pour accueillir nos nouveaux étudiants. Ils nous rejoignent le cœur plein d’espoir. Nous les accueillons avec bonheur !

La foule applaudit de nouveau à tout rompre et Arturus dut relever les mains afin d’obtenir le silence.

— Chères premières années, vous avez surmonté bien des défis pour arriver jusqu’ici mais il vous reste un long chemin à parcourir. Lors de cette première année, vous allez apprendre beaucoup de choses avec vos professeurs mais avant de penser au dur labeur qui vous attend, reprit Arturus, devant vous se trouvent ceux qui vous ont précédés. En votre honneur, ils ont préparé un spectacle qu’ils vont maintenant réaliser, termina Arturus en faisant un signe de main.

La foule applaudit de nouveau tandis qu’une musique s’élevait dans le cirque.

Dès les premières notes, Ethan planta son épée dans le sol puis fit deux pas en arrière avant de mettre un genou à terre. Il baissa la tête et attendit. Ses camarades firent de même. Ils avaient réalisé un cercle parfait tourné vers l’intérieur. Une nouvelle note et il fit une roulade qui l’amena à hauteur de son épée qu’il saisit d’un geste ample et souple. Il se tourna et fit face à Justine qui tenait sa propre épée. Ils entamèrent un ballet en échangeant des coups entrecoupés par des figures acrobatiques.

Dès le début, Ethan avait fait appel au vide comme il l’avait appris dans la tour de l’épreuve. Ses gestes étaient devenus mécaniques. Il oubliait où il était et ce qu’il faisait. Les figures s’enchaînaient sans temps mort mais les entraînements les avaient préparés à résister à la fatigue et aux douleurs. Ils finirent par une salve de lancers d’objets sur des cibles que les uns et les autres tenaient à tour de rôle dans leurs mains, sur les têtes, en équilibre sur un pied, etc. Cela conféra à la démonstration un caractère inoubliable, surtout le final.

Sur un signal de Shepard, Ethan, Doriane et Rufus sortirent du lot et allèrent se mettre à l’opposé de la piste. Une fois en place, Ethan prit l’arc que lui avait offert l’Elfe Alatapao et d’une simple pression de la main le détendit. Il prit ensuite trois flèches qu’il planta dans le sol et attendit à côté de ses deux camarades qui s’étaient eux-aussi saisis d’un arc et de flèches.

Pendant ce temps-là, les autres firent une pyramide où plusieurs étages se succédaient. Justine qui se tenait sur son sommet posa un pomelo sur sa tête et le maintint en équilibre tandis qu’elle tenait dans chaque main, une pomme entre les pouces et les index.

Au premier signal de Shepard, Ethan et ses camarades bandèrent leurs arcs et lâchèrent leurs flèches. Elles traversèrent toutes les trois la pomme tenue dans la main droite en la faisant exploser. Au deuxième signal, les trois suivantes firent de même avec la pomme de la main gauche. Et enfin, au troisième signal, les flèches se figèrent dans le pomelo qui vacilla mais ne tomba pas.

La foule pensait que le spectacle était terminé mais Justine, avec d’infinies précautions, se saisit de deux pièces de monnaie. Elle en prit une dans chaque main et tendit les bras. Ethan, de l’autre côté de la piste, prit deux flèches qui avaient un bout perforant très fin. Il les glissa toutes les deux dans l’arc et fit signe à Justine qu’il était prêt. Alors, elle leva les bras au-dessus de la tête, écartant ses mains d’une quinzaine de centimètres. Un silence assourdissant régnait dans l’arène lorsqu’Ethan leva puis banda son arc. La foule ne pouvait pas s’en rendre compte mais Ethan était toujours absorbé dans le vide. Le temps avait ralenti, ses battements de cœur rythmaient ses gestes. Il relâcha la corde d’un geste fluide et les flèches filèrent chacune vers leur cible. Les deux pièces furent transpercées puis tombèrent au sol.

Après avoir retenu son souffle, la foule laissa éclater sa joie tandis que Justine glissait vers le sol, bientôt suivie par le deuxième étage puis le troisième et enfin la base de la pyramide. Les vingt-deux élèves se regroupèrent au centre de la piste avant de se mettre à genou, dans un cercle parfait, tourné vers les spectateurs, la tête baissée. Tout s’était déroulé comme prévu. Ethan et ses camarades avaient joué leur partition à la perfection. Un tonnerre d’applaudissements retentit dans les gradins. La foule hurlait leurs prénoms et cela provoquait chez Ethan un sentiment de jouissance et de puissance.

Ethan était toujours au sol et transpirait par tous les pores de la peau. Parcouru de frissons, il sentait l’adrénaline couler dans ses veines. À ce moment précis, il se dit que rien ne pouvait leur arriver. Ses camarades et lui étaient capables de renverser des montagnes. C’est alors qu’ils entendirent le « Hop » leur indiquant qu’ils pouvaient rompre leur formation. Il se redressa et saisit les mains des deux compagnons qui l’encadraient avant de s’incliner vers le sol en signe de salut à la foule. Ils firent plusieurs fois ce mouvement tout en se tournant afin de saluer tous les gradins. Ils s’immobilisèrent lorsqu’ils se retrouvèrent devant le maire Arturus qui se leva.

C’est à ce moment-là qu’Ethan sentit sa vue se troubler. Il connaissait bien cette sensation, il savait qu’il allait avoir une vision. Ce don était dans ses gênes mais il ne commandait rien et la vision pouvait arriver à n’importe quel moment. Il se cramponna à ses deux amis et laissa le voile l’envahir.

Il n’était plus dans le colisée. Il se trouvait au bord de la forêt, vers la cascade qui s’enfonçait dans les entrailles de la muraille de granit entourant Atlantide. Il scrutait la paroi rocheuse au-dessus de la forêt, semblant y chercher quelque chose. Au détour d’un chemin, il trouva ce qu’il cherchait et s’enfonça en ligne droite sous le couvert des arbres. Il déboucha dans une clairière au centre de laquelle se trouvait un arbre. Alors qu’il allait s’en approcher, un être surgit du couvert des arbres, devant lui. C’était un Elfe. Il s’inclina devant Ethan et l’invita à le suivre. Alors qu’Ethan se retournait pour parler, le voile blanc se déchira et il retrouva la réalité.

— … et encore merci à eux, dit Arturus en levant les bras.

Les applaudissements reprirent de plus belle tandis qu’ils refluaient vers la grande porte menant aux profondeurs du colisée. Alex s’approcha d’Ethan et le soutint sans que personne ne remarque rien.

— Ethan, tu as eu une vision ? lui demanda son ami de but en blanc.
— Oui ! répondit-il doucement.
— Tu as vu quoi ?! continua son compagnon à voix basse.
— Ce n’est pas le moment, répondit Ethan qui ne voulait pas qu’on remarque son absence. On en parlera ce soir ! termina-t-il en continuant d’avancer vers les entrailles du colisée.
— OK ! répondit Alex qui continuait de le soutenir avec l’aide de Justine comme si de rien n’était.

Lorsqu’ils arrivèrent devant les vestiaires, Shepard les y attendait les mains sur les hanches. Un franc sourire illuminant son visage.

— Vous avez été grandioses. De mémoire d’Atlandiens, je ne pense pas que nous ayons eu un groupe qui ait fait aussi bien que vous, dit-il en se mettant à les applaudir.

Le son, amplifié par la voûte de pierre ocre, résonnait. Il fut bientôt rejoint par les claquements, tout d’abord discrets, puis retentissants des deuxièmes années qui s’applaudissaient eux-aussi. Ethan comprit à quoi avaient servi la préparation et la cérémonie. Elles les avaient soudés et avaient fait d’eux une nouvelle tribu. Il ressentit de l’amour et de la fierté pour ses camarades et voyait dans leurs yeux la même chose. Les anciennes couleurs avaient disparu. Ils appartenaient tous à une nouvelle et indivisible tribu pour les années à venir.

— Changez-vous et allez rejoindre les autres pour le banquet, dit Shepard en les regardant l’air vraiment fier, vous l’avez bien mérité et encore bravo, ajouta-t-il en leur faisant un dernier salut avant de partir vers les tréfonds du colisée.
— Yes ! lâcha Alex. On a été trop forts, ajouta-t-il en relâchant Ethan qui parvenait enfin à garder l’équilibre.
— Tu m’étonnes, ajouta Artémis, on les a complètement subjugués.
— On a été GRANDIOSES, enchérit Camille Laurent en sautant dans les bras d’Ethan qui prit sur lui afin de ne pas montrer qu’il n’avait pas complètement repris ses esprits. Tous, on a tous été grandioses. Et vous avez vu notre pyramide ?! Ce succès !
— Pas un raté ! Personne n’a fait aussi bien que nous, JAMAIS ! enchérit Angéla Alpilles, une ancienne membre de la tribu noire, complètement survoltée par leur démonstration.
— On se calme ! la coupa gentiment Ethan en reposant Camille à terre. Il faut se préparer pour le banquet.
— Pfft rabat-joie ! lui cria Justine avant d’éclater de son rire cristallin.
— Rien à voir ! répondit Ethan très sérieusement. C’est juste que j’ai faim, pas vous ? Moi j’avalerais bien un bœuf.
— Pas faux ! rétorqua Rufus. Je voudrais juste ajouter une chose : ce qui me fait plaisir, encore plus que la réussite de notre démonstration, c’est que nous sommes devenus un vrai groupe soudé, une famille.

Plusieurs voix s’élevèrent pour appuyer ce que venait de dire Rufus. Des mains claquèrent les unes dans les autres, certaines atterrirent sur des épaules. Ils se congratulèrent en véritables amis qu’ils étaient devenus dans l’épreuve.

Chapitre 2

Retrouvailles

Enfin prêts, ils sortirent par grappes pour rejoindre le forum sur lequel l’ensemble des Atlandiens avait pris place autour des tables qui y avaient été dressées. Tout autour se trouvaient des étals sur lesquels des montagnes de victuailles attendaient d’être dévorées.

— Les cuisines de la cité ont encore accompli des miracles, se dit Ethan en passant à côté de l’une d’elles.

En avançant parmi la foule, Ethan salua, ici et là, les personnes qu’il connaissait de vue. Il croisa aussi ses professeurs ainsi que d’anciens élèves de l’académie, qui avaient changé de voie après l’épreuve de la tour.

— Ethan, encore en train de rêver ? lui demanda Préciosa. Tu ne fais plus que cela !

Il se tourna et la vit. Elle arrivait vers lui, l’air ravie de le retrouver. Elle était habillée d’une jupe noire qui lui descendait jusqu’aux genoux, d’une chemise blanche et d’une écharpe bleue. Depuis la séparation de la tribu verte et son intégration dans la confrérie des étudiants en sciences politiques, ils n’avaient pas eu l’occasion de se voir beaucoup.

— Très drôle, Préciosa. Je vois que d’avoir rejoint les politiques ne t’a pas empêché de garder une langue bien pendue.
— Notre amie n’a jamais su la tenir ! ajouta Alex en éclatant de rire devant la mine déconfite de Préciosa.

Cette dernière ne se laissa pas faire et leur tira la langue avant de se précipiter dans leurs bras. Les deux garçons la saisirent au vol et l’étreignirent. Ils restèrent dans cette position un bon moment. Préciosa ne voulait pas les lâcher, elle rattrapait les dernières semaines où elle n’avait pas eu l’occasion de les voir. Ces trois-là avaient été très proches depuis les sélections et rien ni personne ne pourrait les séparer.

— Alors Précio, c’est comment ta nouvelle vie ? demanda Ethan en la relâchant enfin.
— Intéressant, passionnant et hum… prenant. Et vous ?
— Crevant mais motivant, répondit Ethan.
— Pas mieux ! Je suis épuisé, ajouta Alex.
— Y’a de quoi ! surenchérit Pauline qui venait de les rejoindre en prenant la main d’Alex. Tu connais Shepard et Maître Eiwaz ! Ils ne nous ont pas lâchés ces dernières semaines.
— J’imagine que cela n’a pas été facile mais le résultat était impressionnant.
— Et encore tu ne sais pas tout ! surenchérit Archi qui venait de les rejoindre à son tour. Maître Eiwaz et Maître De Brassacourt étaient comme fous. Plus la cérémonie approchait, plus ils devenaient nerveux et nous surchargeaient de travail.
— J’imagine sans peine, lui répondit Préciosa. La cité bruissait des rumeurs sur votre préparation. Et je vous assure qu’on a entendu de tout, ajouta-t-elle en prenant Ethan par le bras. Je suis drôlement fière de vous.
— Merci ! répondit Ethan. Et toi, raconte-nous, ajouta-t-il en prenant la direction des tables.
— C’est beaucoup plus cool en fait. J’en ai fini avec les exercices physiques et le reste. En revanche, les cours sont plus poussés et plus denses. Nous avons eu quinze jours de repos après la fin de l’épreuve et depuis nous n’arrêtons plus.
— Cela te plaît ? demanda Ethan.
— Beaucoup ! C’est ma vraie voie, je n’ai jamais été faite pour combattre.
— Aurélia m’a dit qu’Arturus disait que tu étais prometteuse, dit Ethan.
— Madame la future maire, nos respects, dit Alex en faisant la révérence pour se moquer de son amie. Nous sommes à votre service.
— Rhhhhooo. Arrête tes bêtises ! lui rétorqua Préciosa en rougissant.
— Tu as vu Aurélia ? lui demanda Ethan changeant de sujet.
— On était ensemble à la cérémonie, répondit Préciosa en se tournant vers lui, mais elle a dû s’absenter pour une affaire à régler, continua-t-elle en se mettant à sourire encore plus franchement. Je crois qu’elle avait une réunion téléphonique avec Antone.
— Antone ! s’écria Ethan qui s’inquiétait pour son ancien maître de maison qui avait quitté Atlantide quelques semaines plus tôt avec les troisièmes années. Tu as des nouvelles ?
— Non, je sais juste qu’elle avait une visio-conférence avec lui.
— Dommage, j’espérais le voir et avoir des nouvelles.
— Rassure-toi Ethan ! commença Préciosa. La dernière fois que je lui ai parlé, il allait très bien. Ils sont actuellement en mission d’infiltration dans une région que contrôle plus ou moins l’ordre du Chaos.
— Vivement qu’on soit dehors. Je commence à avoir envie de retrouver l’extérieur. J’étouffe ici ! ajouta Alex.

En entendant son ami, Ethan eut un hoquet de surprise. Il ne partageait pas ce sentiment. Pour lui, Atlantide était sa maison. Il n’imaginait pas vivre ailleurs. Rien à l’extérieur ne lui manquait. Enfin si, se dit-il en y réfléchissant. J’aimerais bien faire un pèlerinage sur l’île où ma famille est enterrée.

— Est-ce que vous avez eu des nouvelles d’Harry ? demanda Alex à tout hasard.
— Aucune nouvelle ! Mais vous savez bien que c’est un électron libre. Il ne fait que ce qui lui plaît, termina-t-elle en éclatant de rire, bientôt accompagné par Ethan qui reconnaissait bien son oncle dans cette image.
— J’espère qu’il va bien ! ajouta Ethan. Son oncle était un sacré phénomène sur lequel rien ni personne n’avait de prise. Il l’aimait comme personne et les liens qu’ils avaient tissés depuis que ce dernier l’avait sauvé, cinq ans plus tôt, étaient devenus indéfectibles.
— Comment peux-tu en douter Ethan. Voyons, on parle d’Harry ! dit Alex.
— C’est vrai, mais je ne peux pas m’empêcher de m’inquiéter pour lui ! ajouta Ethan d’un ton troublé par l’inquiétude qu’il ressentait de savoir son oncle seul tout le temps.
— Pour qui ? dit la voix rocailleuse et puissante du professeur Eiwaz qui s’approchait d’eux.
— Pour mon oncle Harry, Maître Eiwaz.
— Harry ?! Harry Dullac ? demanda Maître Eiwaz.
— Oui, Maître.
— Rassure-toi vite, il va bien.
— Vous avez eu des nouvelles ? demanda Ethan tout excité par cette perspective.
— Oui ! Il est ici.
— Ici ?! À Atlantide ?
— Oui ! Je l’ai vu sortir du colisée avec Arturus et se diriger vers la bibliothèque.

Ethan se retourna vers ses amis et n’eut rien à dire, ils avaient compris. Il tourna les talons et se mit à courir vers le côté opposé du forum, tandis qu’Alex et les autres se dirigeaient vers l’une des tables. Courant comme un dératé, il ne lui fallut pas longtemps pour arriver à destination. Il franchit les grandes portes de bronze puis se dirigea droit vers le vestibule qui précédait le bureau d’Arturus. Lorsqu’il poussa la porte, il sentit comme une résistance. Il força pour l’ouvrir et entendit un «aïe » très sonore suivi d’un bruit de chute.

— Désolé, je ne savais pas que tu te trouvais là ! dit Ethan lorsqu’il reconnut Aurélia, tout en contournant la porte afin de lui tendre la main pour l’aider à se relever.
— Ethan ?! répondit Aurélia étonnée de le trouver là. Qu’est-ce qui te prend de rentrer ici comme ça ?! ajouta-t-elle visiblement contrariée. Et puis, qu’est-ce que tu fais là ?
— On m’a dit qu’Harry était ici ! répondit-il, avant de poursuivre, je voulais le voir.

Aurélia se radoucit et lui sourit.

— Mon amour ! Crois-tu que ce soit une raison pour débarquer comme un chien dans un jeu de quilles ?!
— Non, tu as raison… comme souvent, dit-il en l’embrassant pour se faire pardonner. Je voulais être sûr de ne pas le rater.
— Tu crois qu’Harry serait venu sans passer te voir ? dit-elle en lui prenant la main.
— Non ce n’est pas cela mais…
— Pas de mais, mon amour. Laisse-les tranquilles et je te promets qu’Harry te rejoindra après, dit-elle en l’entraînant doucement vers la sortie. Allons retrouver les autres.

Dehors, elle l’attira contre elle, puis l’embrassa longuement et langoureusement. Lorsqu’ils se détachèrent, ils restèrent le regard plongé dans celui de l’autre. Ethan ne se lassait pas des yeux verts d’Aurélia. Son regard l’envoûtait comme au premier jour, comme au premier regard. Il aimait cette fille plus que tout.

— Pourquoi tu m’as attiré dehors ? demanda Ethan. Vous me cachez quelque chose ?
— Pas du tout ! s’offusqua Aurélia. Qu’est-ce que tu vas imaginer ? C’est juste que mon père m’a dit qu’il ne voulait pas être dérangé, et ce sous aucun prétexte.
— C’est si grave ?! ajouta Ethan un peu inquiet par tant de mystère.
— Je n’en sais rien. Père ne me dit pas tout. La seule chose que j’ai remarquée, c’est qu’Harry avait un air grave.
— Ce n’est pas bon signe !
— Sans vouloir anticiper, lorsqu’Harry fait la tête, c’est rarement bon signe, dit-elle en se détachant de lui. Elle entreprit alors de renouer ses cheveux en chignon avant d’y glisser une baguette qu’elle sortit de sa poche.
— Rha !! Comme j’aimerais être une souris et entendre ce qu’ils se disent.
— Tu es incroyable. Allez, viens. N’insiste pas, tu le verras bien assez tôt.

Toujours main dans la main, ils partirent vers le banquet.

— On dirait que l’ambiance est au rendez-vous, dit Ethan en entendant les cris et les rires qui leur parvenaient du forum.
— J’espère qu’Alex nous a réservé une place, ajouta Aurélia.
— On dirait que tu as raison, répondit Ethan avec un sourire en voyant ce dernier leur faire de grands signes pour attirer leur attention. Allons les rejoindre !

En s’approchant, Ethan vit avec plaisir que la plupart de leurs amis étaient attablés autour d’Alex. Pourtant à peine assis, il ressentit comme une gêne, quelque chose clochait. Il regarda autour de lui et comprit. Les nouveaux le regardaient bizarrement. Après plusieurs minutes et maints regards en biais, il craqua.

— J’ai remarqué que vous me regardiez avec insistance, dit-il en s’adressant calmement aux deux garçons qui se trouvaient un peu plus loin en face de lui. Il y a un problème ?! Vous avez quelque chose à me demander ?

Aussitôt, les conversations autour de la table s’arrêtèrent. Ethan sentit que la plupart des regards étaient braqués sur lui. Les deux garçons, tout d’abord extrêmement gênés, baissèrent le nez dans leurs assiettes.

— Alors ?! insista gentiment Ethan, conscient que beaucoup de personnes attendaient sa réaction, vu ce qu’il s’était passé quelques semaines plus tôt, lorsqu’il s’en était pris à une fille qui avait fait des commentaires sur son présupposé rang de « messie ».

Les deux jeunes élèves hésitaient manifestement à répondre, malgré l’attitude souriante d’Ethan. Il ne rêvait pas, quelque chose était là, présent. Il voulait savoir quoi. Alors qu’il commençait à se renfrogner, il sentit la main d’Aurélia se poser sur sa cuisse et la caresser doucement, comme pour l’apaiser.

— On se demandait si tu étais Ethan Dullac…finit par répondre l’un des deux garçons d’une voix mal assurée.

Ethan comprit d’un seul coup qu’il s’était placé dans une situation déplaisante. Il devinait déjà quelle serait la question suivante. Depuis plusieurs semaines, la rumeur courait qu’il était le messie et la cérémonie de l’épée n’avait rien arrangé. Il avait pris l’habitude de l’entendre et de l’ignorer, surtout depuis qu’il vivait avec les deuxièmes années. Avec eux, il était juste Ethan et cela lui avait permis de prendre du recul mais aujourd’hui, il devait faire une mise au point.

— Je vais te répondre, commença Ethan sachant que tout le monde l’écoutait. Je vais aussi répondre à l’autre question que tu n’as pas encore posée mais à laquelle tu penses sûrement, ajouta-t-il avant de se lancer. Premièrement, oui, je suis bien celui que tu crois et deuxièmement, je ne sais pas si je suis le messie, termina-t-il en insistant bien sur la fin de sa phrase.

La réponse calme et posée qu’il venait de faire détendit l’atmosphère. Les deux garçons relevèrent la tête et Ethan put lire dans leurs regards qu’il ne leur faisait plus peur. Je me demande bien ce qu’on a pu leur raconter, se dit Ethan frappé par leurs réactions. Leur avait-on dit que le messie explosait de colère, qu’il était incapable de garder son calme ou qu’il devenait fou à la simple évocation de son statut ? En fait, je n’en ai rien à faire. Je viens de montrer à tout le monde que cette historie n’a aucune prise sur moi.

— Comment tu savais pour l’autre question ? lui demanda le second garçon.

À la surprise générale, Ethan éclata de rire tout en mettant les deux mains l’une contre l’autre pour les frotter de plaisir.

— Parce qu’à ta place, je me la serais posée, répondit-il sur le ton de la conversation avant de hausser le ton pour se faire entendre du plus grand nombre, et puis on me l’a déjà posé plusieurs fois. Je sais aussi que beaucoup d’autres se la posent en me voyant. J’ai tellement entendu de racontars depuis la fin de l’épreuve ou sur mes présupposés talents que je finis par en avoir l’habitude, termina-t-il en souriant franchement aux deux garçons.
— Désolé de t’avoir embêté avec ça, lui répondit celui qui avait parlé en premier, visiblement sincèrement peiné.
— Tu n’es pas le premier et tu ne seras pas le dernier, ça me colle à la peau. Toi, tu n’as fait que demander confirmation de rumeurs que tu as entendues !
— Oui ! répondit-il en secouant la tête. Je trouve cela tellement bizarre de manger avec toi après tout ce qu’on m’a raconté. Tu es presque une icône, tu sais !
— Hey ! s’exclama Ethan. Je suis un garçon normal ! Même si je suis le messie, et je ne te cache pas que j’en doute, ajouta-t-il en le regardant droit dans les yeux. Je reste avant tout Ethan Dullac, élève de deuxième année. Ne me vois pas autrement. C’est promis ? demanda Ethan en lui souriant avec un air complice.
— Oui, Ethan, c’est promis !
— Et toi, quel est ton nom ?
— Je m’appelle Valentin Atreides.
— Tu es de quelle tribu ?
— Je suis dans la tribu verte, répondit-il fièrement.
— Forcément, se dit Ethan avant de sourire tout en levant son verre. Les amis, je vous propose de porter un toast en l’honneur des nouveaux arrivants.

À ces mots, tous les convives assis autour de sa table, ainsi que ceux des tables avoisinantes, se levèrent avec leur verre à la main.

— À la santé des premières années !!! dit Ethan en levant le sien vers le ciel.

Lorsqu’Ethan se rassit, les conversations autour de lui avaient repris mais il n’était plus le centre de l’attention. C’est alors qu’il sentit la main d’Aurélia lui agripper le cou et l’attirer vers elle. Elle l’embrassa avant de laisser sa bouche glisser vers son oreille.

— Bravo mon amour. Je te félicite d’avoir gardé ton calme, lui chuchota-t-elle.

Ethan l’embrassa à son tour, il jubilait. Pour la première fois depuis longtemps, il avait réussi à ne pas exploser à l’évocation de son statut supposé d’élu. C’était un grand pas et il espérait que la rumeur finirait par s’éteindre d’elle-même.

Le reste du banquet se déroula de façon tout à fait normale. Plus personne ne le regardait bizarrement. Il passa même une excellente après-midi avec ses amis. Au milieu d’une conversation, il fut interrompu par une main qui se posa sur son épaule.

— Bonjour Ethan.
— Harry !hurla Ethan ravi. Je suis content de te voir, ajouta-t-il en bondissant de sa chaise pour prendre son oncle dans les bras.

Lorsqu’Ethan libéra Harry, il fut remplacé par Alex. Son oncle serra ensuite de nombreuses mains. Dans la cité d’Atlantide, c’était une personnalité. Il était extrêmement connu et populaire en tant qu’ancien élève, ancien résident et ancien général des forces d’Atlantide.

— Alors champion, on m’a dit que tu avais encore fait des étincelles ! dit Harry à Ethan une fois qu’il parvint à s’asseoir.
— Qui t’a dit cela ? demanda Ethan surpris que son oncle, qui partait toujours très loin, puisse avoir des nouvelles régulièrement.
— Mon petit doigt, répondit ce dernier en lui montrant.
— Non sérieusement, Harry !
— Shepard ! Qui d’autre ?! dit-il faussement honteux.
— Qui d’autre effectivement, répondit Ethan en haussant les épaules. Je n’ai rien fait de spécial Harry ; en tous les cas rien qui mérite autant de louanges.
— Hum ! se contenta de répondre son oncle.

Autour d’eux, les discussions avaient repris. Alex avait Pauline sur les genoux et ils riaient franchement avec Siva et Justine. En face d’eux, Préciosa flirtait plus ou moins avec un garçon qu’Ethan ne connaissait pas. Il lorgnait clairement sur son amie et cette dernière semblait plutôt réceptive à ses avances. Un peu plus loin, Archi discutait avec des garçons de première année. Il leur racontait, en le grossissant, tout ce qui allait les attendre.

Ethan souriait en voyant tous ses amis, assis là autour de lui. C’était un moment rare dans la vie de la cité. Après cette journée, ils seraient de nouveau happés par leurs activités et ne seraient plus réunis avant longtemps.

— Tu souris Ethan ! À quoi penses-tu ? lui demanda Harry en regardant son neveu.
— Juste que je suis heureux ici et maintenant.
— C’est un sentiment que j’ai aussi connu ici… voici quelques années.

Ethan se retourna et fit face à son oncle.

— Tu n’as pas envie de revenir ?

Harry le saisit par les épaules.

— J’en aurais bien envie. Ne serait-ce que pour te surveiller, ajouta-t-il en souriant avant de se taire.
— Je n’ai pas besoin d’être surveillé, ajouta Ethan qui connaissait bien les silences de son oncle, mais pourquoi pas !
— J’ai des choses à faire à l’extérieur. Tu le sais.
— Est-ce qu’au moins tes projets avancent ? demanda Ethan à son oncle en espérant que pour une fois, il allait enfin lui dire de quoi il s’agissait.
— Oui, mais j’ai besoin de l’aide de l’ordre pour la suite car mes réseaux ne sont pas assez étendus pour ma prochaine cible.
— Et Arturus est d’accord pour t’aider ?
— Je ne sais pas, il doit réfléchir.
— Cela veut dire que tu restes plusieurs jours ? demanda Ethan sans trop y croire.
— Exactement ! Je vais rester le temps qu’Arturus se décide.
— Ça, c’est que j’appelle une bonne nouvelle, répondit Ethan tout en se mettant à imaginer un scénario où, avec l’aide d’Aurélia, il persuadait Arturus de garder Harry le plus longtemps possible.
— Je me disais bien que tu penserais ça !
— Harry, c’est toi ? demanda une voix derrière eux.
— Dean ! répondit Harry en reconnaissant la personne qui l’avait interpellé.
— Je suis content que tu sois toujours en vie, mon ami, ajouta le dénommé Dean.
— Moi aussi ! commença Harry avant de se tourner vers Ethan. Je te présente Dean Saint Vigor, l’un de mes camarades de première année.
— Enchanté ! dit Ethan en regardant le nouvel arrivant.
— Enchanté aussi Ethan ! répondit Dean en lui tendant la main.
— Tu te joins à nous ? demanda Harry, visiblement heureux de retrouver son ancien compagnon.
— Avec plaisir ! répondit ce dernier en s’installant à côté d’eux.

Cet intermède mit fin à leur conversation. Tandis qu’Harry et Dean partaient dans l’évocation de leurs souvenirs, Ethan se rapprocha d’Aurélia qui était en pleine conversation avec Préciosa et les autres membres de sa tablée.

Alors que les derniers rayons de soleil éclairaient encore le forum, Ethan vit Arturus se lever puis se diriger vers le kiosque au centre du forum.

— Mes amis, dit-il dans le micro pour attirer l’attention de tous les convives. Comme vous le voyez, la nuit tombe. Avant de clore cette journée, je voudrais remercier tous ceux qui l’ont préparée. Merci de leur faire une ovation, ajouta-t-il en se mettant à applaudir, bientôt accompagné par les cris et les applaudissements de la foule réunie sur le forum. Merci pour eux, cria-t-il au bout d’une minute afin de reprendre la parole. Je vous souhaite une bonne soirée et à bientôt.
— Bon, je pense que cela veut dire que c’est fini ! dit Alex en se levant.
— Et si on allait à la taverne Kamelott pour finir la soirée, demanda Archi aux anciens verts ainsi qu’à ceux qui se trouvaient autour de leur table.
— Oh oui, oui ! répondirent plusieurs voix de concert.

Ethan regarda Aurélia qui lui sourit en signe d’assentiment.

— Tu viens avec nous ? demanda-t-elle à Harry qui venait de se lever.
— Oh que non ! Je suis trop vieux pour tout cela, dit-il en souriant malicieusement. Je vais me coucher.
— Sûr ? demanda Alex.
— Oui ! Pour moi, ce genre de distraction, c’est fini. Amusez-vous bien mais restez sérieux.
— Alors là, pas sûr. En plus demain pas de réveil.
— Comment cela ? demanda Harry surpris.
— Eh oui ! Le lendemain de la cérémonie d’accueil, les deuxièmes années ont le droit à une journée de repos.
— Les choses ont bien changé depuis mon époque, dit-il en faisant la moue.
— Arrête Harry. Tu vas encore nous dire qu’on est chouchouté et que toi nanana nanère, le mima Ethan en faisant de grands gestes.

Les gesticulations d’Ethan imitant Harry firent rire tout le monde.

— Allez, filez et amusez-vous. Ethan, on se voit demain soir ! OK ?
— OK ! répondit Ethan en faisant un signe de tête.

Harry lui sourit puis s’éloigna.

— On y va ! demanda Archi tellement impatient qu’il était déjà en train de partir vers le grand pont qui permettait de sortir de l’île.

Ethan se saisit de la main d’Aurélia et suivit son ami, bientôt rejoint par Alex et le reste du groupe. Au total, ils étaient une vingtaine qui avançait rapidement vers le village. Au moment où ils passèrent à côté des villas, Ethan eut un pincement au cœur en voyant les lumières à l’intérieur. Il imaginait sans mal ce que devaient ressentir les nouveaux locataires en découvrant et en prenant possession des lieux. En regardant la sienne, il se demanda qui allait prendre sa chambre. Ce serait amusant que cela soit Valentin Atreides, se dit-il en souriant.

— Toi aussi, tu y penses ? lui demanda Alex en regardant la villa.
— Oui ! Et on n’est pas les seuls, répondit Ethan en montrant certains de leurs amis qui avaient le regard tourné vers les villas en contrebas.
— C’est vrai qu’on a passé de bons moments ici, poursuivit Justine qui se tenait juste derrière eux.
— Tu m’étonnes, ajouta Rufus. J’ai quand même un regret !
— Ah oui, lequel ? demanda Araël, une ancienne de la tribu rouge.
— Qu’on n’ait pas fait l’effort de se connaître avant, répondit Rufus. Regardez comme on a appris à se souder.
— C’est le but des tribus, répondit Camille de sa voix douce. C’est pour nous forcer à être en compétition afin que nous trouvions le meilleur dans chacun d’entre nous. Ensuite, nous devenons solidaires pour agir comme un seul et unique corps.

Plusieurs têtes hochèrent la tête en signe d’assentiment.

— Maintenant, on est unis et on va de l’avant, les coupa Préciosa.
— Allez en route, sinon il faudra repartir à peine arrivés ! conclut Malory.

Alors que le groupe repartait, Ethan se laissa volontairement décrocher pour se trouver à la hauteur d’Alex et de Préciosa qui parlaient ensemble.

— Ça va Ethan ? demanda Alex.
— Oui ! Je voulais juste vous parler de ce qui m’est arrivé à la fin de l’épreuve, chuchota Ethan. On devait en reparler mais on n’en pas encore eu l’occasion.
— Ah oui !! Ta vision, ajouta Alex dont le visage devint sérieux.
— Quoi ?! Tu as eu une vision et tu ne nous as rien dit ! crièrent Aurélia et Préciosa de concert.
— Vous devriez parler plus fort. Ce n’est pas comme si j’avais envie que tout le monde soit au courant, dit-il tandis que les filles regardaient autour d’elles afin de s’assurer que personne ne les avait entendues.
— Excuse-moi, dit Aurélia bientôt imitée par Préciosa.
— C’est bon ! leur répondit-il en esquissant un sourire. C’est vrai, j’ai eu une vision à la fin de l’épreuve, juste avant qu’on ne retourne dans les sous-sols du colisée. Et je n’ai pas pu vous en parler avant.
— C’est pour ça que j’ai eu l’impression que tu chancelais, dit Préciosa.
— J’ai eu le même sentiment, ajouta Aurélia, mais comme Alex et Justine t’entouraient, je me suis dit que c’était normal après votre numéro.
— Pas vraiment, rétorqua Ethan avant de leur raconter ce qu’il avait vu : le gouffre, les bois, l’Elfe puis le retour à la réalité.
— Qu’est-ce que ça peut bien vouloir dire ? demanda Alex pour briser le silence.
— Je n’en sais rien, répondit Ethan avant de se reprendre. Peut-être que les Elfes vont m’aider, ou que quelque chose ou quelqu’un m’attend dans le gouffre.
— Tu as raison, c’est sûrement un truc de ce genre.
— Hum ! Vous allez un peu vite en besogne, les garçons, les tempéra Préciosa. Je pense qu’on doit réfléchir avant de faire n’importe quoi. Je vous vois venir ; vous allez foncer la tête baissée dans les ennuis.
— Je suis d’accord avec toi, enchérit Aurélia en la regardant avant de se tourner vers Ethan. Et pour les Elfes, ils ont disparu depuis des siècles et ceux de la cité ne se montrent jamais.
— Tu oublies qu’ils ont une dette envers la mère d’Ethan. Ils ont peut-être décidé de l’aider afin de la rembourser.
— Ça fait beaucoup de peut-être, répliqua Aurélia en regardant Alex droit dans les yeux.
— OK, mais j’en ai vu un me faire signe. C’est un fait.
— Et si ton don évoluait ? suggéra Préciosa.
— Qu’est-ce que tu veux dire par là ?
— Et si tu étais comme Cassandre ou la Pythie ?
— C’est-à-dire ? demanda Alex.
— Que ce que voit Ethan ne serait plus une réalité dans le temps mais quelque chose à interpréter.
— Oui, répondit Ethan. C’est possible mais comment le savoir ?
— En cherchant mieux ce que cela peut vouloir dire ; sans se précipiter.
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