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Après avoir assisté aux meurtres sauvages de toute sa famille et avoir été sauvé par son oncle Harry, Ethan Dullac a intégré l’ordre de la Fraternité au sein de laquelle il s’est initié à son don et à un nouvel environnement. Il poursuit son apprentissage quand un don nouveau émerge en lui, bousculant tous ses repères tandis qu’il doit faire face aux mystères qui sommeillent à Atlandide. Entre rebondissements, flous, incertitudes et aventures, les apparences semblent plus que jamais trompeuses…
À PROPOS DE L’AUTEUR
Sylvain Forestier développe une affection particulière pour la science-fiction et la fantaisie sous l’influence des auteurs tels que Tolkien et Herbert, entre autres. Avec Ethan Dullac, il signe une suite d’intrigues passionnantes mûrie par vingt ans d’imagination.
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Seitenzahl: 527
Veröffentlichungsjahr: 2023
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Sylvain Forestier
Ethan Dullac
Le retour de la magie
Tome II
Roman
© Lys Bleu Éditions – Sylvain Forestier
ISBN : 979-10-377-9853-4
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La cité d’Atlantide
Prologue
En ce début de matinée, le soleil brillait de mille feux. Les rayons rasants de cette fin de mois d’août s’abattaient sur les vitres d’un building perdu dans le centre-ville de Miami. Ils léchèrent la façade puis tout doucement atteignirent une des suites de l’hôtel que le bâtiment abritait. L’occupant de cette chambre, Alifax fils d’Ajax, se retourna avant de pousser un juron.
La femme se leva en poussant un grognement. Elle se dirigea d’un pas ensommeillé vers les lourds rideaux qu’elle tira l’un vers l’autre, d’un mouvement rageur. La suite fut de nouveau plongée dans la pénombre.
La femme obéit sans rien dire. Elle savait trop bien ce qu’elle risquait en déplaisant à l’homme avec qui elle venait de passer la nuit. Dès qu’elle fut rallongée, Alifax l’attira contre lui. Il lui fit l’amour sauvagement, comme il en avait l’habitude. La femme se laissa faire comme il se devait lorsqu’on avait la chance de partager la couche d’un des élus. Lorsqu’il eut fini, il la congédia d’un simple geste de la main. Après tout, ce n’était qu’une humaine sans don, une esclave.
Il se prélassa au lit encore un petit moment avant de se faire livrer un petit déjeuner qu’il avala en lisant ses journaux. Il se leva, se doucha et s’habilla avant de prendre la direction du bureau qui se trouvait dans la suite qu’il occupait. Là, il composa un numéro et appuya sur la touche haut-parleur du combiné avant de s’enfoncer dans le fauteuil en cuir.
Lorsqu’Alifax raccrocha, il avait le sourire de celui pour qui la journée avait bien commencé.
Le courage n’est pas l’absence de peur mais la capacité de vaincre ce qui fait peur.
Nelson Mandela
À un autre endroit non déterminé pour nous sur la Terre, le soleil se couchait. Ethan Dullac, jeune garçon de bientôt dix-sept ans, venait de se mettre au lit épuisé après une journée harassante d’entraînement en vue de la cérémonie qui devait se dérouler le lendemain matin. Ses vingt-et-un camarades de deuxième année et lui étaient soumis par Maître Eiwaz à un entraînement particulièrement éprouvant. Ils le subissaient depuis des jours et des jours, sans relâche, pour le numéro qu’ils devaient y interpréter.
Lorsqu’Ethan pensait à la cérémonie de l’accueil, cela le ramenait toujours à celle qu’il avait lui-même vécue un an auparavant. Il fouilla dans ses souvenirs et se remémora, avec clarté, la nuit où son destin avait basculé. Il n’avait rien oublié de cette nuit de novembre où sa famille avait été mise à mort par l’ordre du Chaos. Les visages de ses parents, Estelle et Henry, de son frère Albert et de sa petite sœur Louise lui revinrent très clairement en mémoire. Il ignorait pourquoi, mais il y pensait souvent ces derniers temps.
Il n’avait pas oublié comment il avait été sauvé in extremis par son oncle Harry. Pas plus que les révélations que ce dernier lui avait faites sur sa famille ainsi que sur cette lutte sans merci que se livraient dans l’ombre, l’ordre de la Fraternité et l’ordre du Chaos. Il se souvenait, avec plus de joie, des années qu’il avait vécues avec son oncle Harry ainsi que de sa rencontre avec celui qui allait devenir son meilleur ami, Alex. Il se remémora son arrivée dans la cité et l’émerveillement qu’il avait ressenti en la découvrant ainsi que la rencontre avec ceux qui allaient devenir sa famille de cœur.
Il se repassa le film de l’année écoulée : les cours, son amour grandissant pour Aurélia, la vie au sein de la tribu verte, la trahison de Gasper et sa fin tragique. Ses souvenirs plus récents le ramenèrent à l’épreuve de la tour qu’il avait réussie avec brio, lui permettant d’être dans cette chambre. Il n’avait rien oublié et avait tout gravé dans sa mémoire.
Il se tourna vers la table de nuit et regarda la photo qui s’y trouvait. Ses parents, son frère, sa sœur ainsi qu’une autre personne, qu’il avait du mal à reconnaître comme étant lui, souriaient au photographe. C’était une photo qui reflétait la joie, le bonheur.
Ethan fut interrompu dans sa rêverie par le bruit de la porte de la chambre qu’on tentait d’ouvrir sans faire de bruit. Sur le qui-vive, il se tourna prestement. Dans l’embrasure, un rayon de lumière vint éclairer le visage d’Alex qui entrait dans la chambre. Il referma la porte puis se dirigea vers son lit à pas de loup.
Ethan, qui était sur le dos, se tourna vers son ami.
Alex savait que, dans ces moments-là, quoi qu’il dise ou quoi qu’il fasse, cela ne changeait rien. Ethan traversait parfois des périodes d’introspection et de doute. Généralement, il suffisait d’attendre que cela passe. Les récents événements ajoutés au fardeau de se voir catalogué comme « le messie » n’ont rien arrangé, songea-t-il.
Alex se redressa d’un seul coup et s’empara de son oreiller. Il l’envoya directement sur Ethan qui dévia le projectile. Il valdingua contre le mur, rebondit et atterrit au sol. Ethan prit le sien et le jeta vers la tête de son ami qui l’esquiva à son tour. Sur quoi, ils éclatèrent de rire, comme des gamins.
En même temps qu’il prononçait ces paroles, Alex se leva puis se dirigea vers les oreillers qui étaient restés par terre. Il les ramassa et renvoya le sien à Ethan avant de de se recoucher.
Ethan mit plusieurs minutes à s’endormir mais la discussion avec son ami l’avait calmé et la fatigue des derniers jours finit par l’emporter.
Le lendemain matin, le soleil filtrait déjà à travers les panneaux de bois lorsqu’Ethan se réveilla. Il se tourna vers le lit d’Alex, qui était déjà vide. Il ne lui fallut pas longtemps pour deviner où ce dernier se trouvait. Depuis qu’ils étaient arrivés ici, la cuisine était devenue son endroit préféré.
Après s’être préparé, Ethan remonta le couloir des garçons pour parvenir au palier qui menait vers l’escalier.
Toujours en plaisantant, ils descendirent, bras dessus bras dessous, les quelques marches qui les firent arriver dans l’atrium principal où ils croisèrent plusieurs de leurs camarades. En passant devant le tableau d’affichage où étaient postées toutes les informations qui les concernaient, ils constatèrent qu’un nouveau message avait fait son apparition dans la nuit. Il s’agissait d’une grande affiche avec un grand 0 peint.
« C’est le grand jour !
Rendez-vous dans les vestiaires
du colisée à quinze heures précises !
Shepard de Brassacourt »
Là, ils se servirent au buffet puis s’attablèrent avec les autres en se joignant aux conversations qui tournaient toutes autour de la cérémonie.
Le reste de la matinée d’Ethan fut consacré aux tâches aussi diverses et variées que le rangement de la chambre, qu’Alex avait bien évidemment oublié, à quelques longueurs dans la piscine et à une séance à l’arme blanche pour se remettre en tête les mouvements qu’il allait devoir réaliser dans l’arène. Sans oublier la préparation du repas, dont il avait la charge pour toute la semaine.
Après le déjeuner, tout le monde se retrouva devant l’entrée afin de partir ensemble pour la cité. Ils passèrent par la forêt qui se trouvait entre leur bâtiment et la ville moderne, pour arriver directement au pont menant vers l’île. Ils n’étaient pas passés par la route longeant les villas, afin de ne pas être vus des premières années qui en avaient pris possession la veille au soir.
Ethan, tout en marchant, se remémorait le moment magique où il avait pénétré dans la cité. Il se rappelait l’émerveillement qu’il avait ressenti en sortant de la caverne tout là-haut, de la beauté des lieux mais aussi du secret qui semblait envoûter toute la cité.
Sans savoir pourquoi, au moment où il pénétrait sous le couvert de la forêt, Ethan pensa aux Elfes qui vivaient cachés dans les bois, de l’autre côté de la vallée. Lui qui s’était promis de partir à leur recherche, au cours de l’été, avait été tellement occupé qu’il n’avait pas eu le temps de le faire.
Ethan se massa le bras à l’endroit qu’Alex avait pincé, puis il s’engagea sur le pont qui menait vers l’île. Là se trouvait un forum à la mode romaine autour duquel se dressaient d’immenses bâtiments de style antique qui accueillaient les différents services publics de la cité.
Après avoir pris un embranchement sur la gauche, ils arrivèrent au détour d’une ruelle, devant l’entrée du tunnel qui menait vers les tréfonds du colisée. La descente restait, comme à son habitude, un moment excitant, même s’il avait perdu de son mystère depuis qu’ils l’empruntaient régulièrement pour aller s’entraîner. Ses compagnons et lui connaissaient désormais les chemins et les méandres du bâtiment mieux que quiconque.
Ils descendirent les uns derrière les autres vers la coursive souterraine principale. En bas, le maître Shepard les attendait. Au fur et à mesure, ils se rangèrent les uns à côté des autres afin de lui faire face et lorsque le dernier arriva, il prit la parole.
Ethan n’écoutait plus que d’une oreille. Il avait remarqué un drôle de bruit, comme celui que faisaient les battements d’ailes d’une mouche, mais assourdi. Il essaya de détecter où se trouvait l’insecte mais il ne vit rien. Il se concentra un peu plus et finit par comprendre que le bruit ne venait pas d’un insecte mais d’au-dessus de leurs têtes. D’un seul coup, un éclair de compréhension le frappa. Le stade devait être plein et c’était le bruit de la foule qu’il entendait. Il regarda ses camarades et vit qu’il n’était pas le seul à l’avoir perçu. D’autres, comme lui, avaient le regard qui se perdait vers le dessus de la galerie.
Cette remontrance eut l’effet de faire revenir Ethan à la réalité. Il mit le bruit en sourdine, dans un coin de son esprit.
Ethan écoutait sans rien dire. Il ne voulait surtout pas se mêler à la conversation et ne voyait pas bien où tout cela allait finir. De toute façon, qu’ils le veuillent ou non, cette cérémonie aurait lieu.
Sans attendre, Ethan partit vers la pièce où se trouvait sa tenue, bientôt suivi par tous les garçons, tandis que les filles se dirigeaient vers une autre pièce. Ethan prit sa place sur le premier banc, comme il le faisait depuis plusieurs semaines. Il se déshabilla et enfila le justaucorps marron qu’il devait porter sous la combinaison qui descendait jusqu’au niveau des chevilles. Par-dessus le plastron, il enfila une sangle qui se terminait par une boucle de fer. Il se déplaça vers le râtelier qui se trouvait sur le mur opposé et se saisit de son épée Excalibur.
À son contact, elle vibra et se mit à le chatouiller comme elle le faisait à chaque fois. Le dragon qui ornait la garde ondula la queue et vint se recroqueviller à l’endroit où la garde touchait la lame. Comme à chaque fois, Ethan tressaillit. Il n’arrivait pas à s’y habituer. C’était au-dessus de ses forces que d’imaginer que son épée avait une « âme ».
Autour de lui, tous ses compagnons finissaient de se préparer. Il fit coulisser la lame dans la boucle et fit retomber la poignée sur sa taille. Il était prêt. Un coup d’œil de chaque côté lui indiqua que c’était maintenant le cas pour tout le monde. Il sortit de la cellule et retrouva les filles qui sortaient elles-aussi.
Aucun d’entre eux ne souriait ni n’avait envie de parler, ils étaient tous concentrés. Au-dessus d’eux, ils entendaient la foule qui s’agitait de plus en plus. Si les souvenirs d’Ethan étaient bons, les nouveaux devaient avoir fait leur entrée sous les arches et ils entendaient le tonnerre d’applaudissements qui les accompagnait. Il donna un petit coup de coude à Alex qui lui rendit.
Ils se mirent deux par deux et avancèrent en colonne jusqu’à la porte qui se trouvait quelques mètres plus loin. Ils prirent sur la droite et commencèrent à monter sur la rampe qui menait vers la grande et lourde porte donnant sur l’arène. Le chemin n’était pas très long, quelques mètres à peine qu’ils parcoururent en moins d’une minute. Ils s’arrêtèrent devant puis attendirent, comme lors des entraînements, que la porte coulisse pour leur laisser le passage.
Lorsque le premier cliquetis retentit, Ethan sut que le moment tant désiré, mais redouté, arrivait. Les portes se mirent à glisser pour se séparer. Un fin rayon de soleil fit son apparition sur le sol de sable et s’agrandit peu à peu. Plus il pénétrait dans le couloir sombre, plus ils étaient aveuglés mais ils en avaient maintenant l’habitude.
Alex à ses côtés fit la même chose, entraînant l’autre colonne. Ils avancèrent en pleine lumière et découvrirent que les gradins étaient bien remplis. Une foule considérable était présente, hurlant à pleins poumons.
Ethan lança un coup d’œil vers les gradins sans prêter attention à la conversation. Il cherchait Aurélia et la repéra dans la loge officielle. Elle lui fit un signe de la main et un « je t’aime » silencieux. Il répondit seulement par un sourire car il savait que des centaines de paires d’yeux étaient braquées sur eux. À côté d’elle, son père se leva puis s’approcha du pupitre qui se dressait devant lui. Dès qu’il l’atteignit, il leva les bras afin de faire baisser le volume sonore dans l’arène et prit la parole.
La foule applaudit de nouveau à tout rompre et Arturus dut relever les mains afin d’obtenir le silence.
La foule applaudit de nouveau tandis qu’une musique s’élevait dans le cirque.
Dès les premières notes, Ethan planta son épée dans le sol puis fit deux pas en arrière avant de mettre un genou à terre. Il baissa la tête et attendit. Ses camarades firent de même. Ils avaient réalisé un cercle parfait tourné vers l’intérieur. Une nouvelle note et il fit une roulade qui l’amena à hauteur de son épée qu’il saisit d’un geste ample et souple. Il se tourna et fit face à Justine qui tenait sa propre épée. Ils entamèrent un ballet en échangeant des coups entrecoupés par des figures acrobatiques.
Dès le début, Ethan avait fait appel au vide comme il l’avait appris dans la tour de l’épreuve. Ses gestes étaient devenus mécaniques. Il oubliait où il était et ce qu’il faisait. Les figures s’enchaînaient sans temps mort mais les entraînements les avaient préparés à résister à la fatigue et aux douleurs. Ils finirent par une salve de lancers d’objets sur des cibles que les uns et les autres tenaient à tour de rôle dans leurs mains, sur les têtes, en équilibre sur un pied, etc. Cela conféra à la démonstration un caractère inoubliable, surtout le final.
Sur un signal de Shepard, Ethan, Doriane et Rufus sortirent du lot et allèrent se mettre à l’opposé de la piste. Une fois en place, Ethan prit l’arc que lui avait offert l’Elfe Alatapao et d’une simple pression de la main le détendit. Il prit ensuite trois flèches qu’il planta dans le sol et attendit à côté de ses deux camarades qui s’étaient eux-aussi saisis d’un arc et de flèches.
Pendant ce temps-là, les autres firent une pyramide où plusieurs étages se succédaient. Justine qui se tenait sur son sommet posa un pomelo sur sa tête et le maintint en équilibre tandis qu’elle tenait dans chaque main, une pomme entre les pouces et les index.
Au premier signal de Shepard, Ethan et ses camarades bandèrent leurs arcs et lâchèrent leurs flèches. Elles traversèrent toutes les trois la pomme tenue dans la main droite en la faisant exploser. Au deuxième signal, les trois suivantes firent de même avec la pomme de la main gauche. Et enfin, au troisième signal, les flèches se figèrent dans le pomelo qui vacilla mais ne tomba pas.
La foule pensait que le spectacle était terminé mais Justine, avec d’infinies précautions, se saisit de deux pièces de monnaie. Elle en prit une dans chaque main et tendit les bras. Ethan, de l’autre côté de la piste, prit deux flèches qui avaient un bout perforant très fin. Il les glissa toutes les deux dans l’arc et fit signe à Justine qu’il était prêt. Alors, elle leva les bras au-dessus de la tête, écartant ses mains d’une quinzaine de centimètres. Un silence assourdissant régnait dans l’arène lorsqu’Ethan leva puis banda son arc. La foule ne pouvait pas s’en rendre compte mais Ethan était toujours absorbé dans le vide. Le temps avait ralenti, ses battements de cœur rythmaient ses gestes. Il relâcha la corde d’un geste fluide et les flèches filèrent chacune vers leur cible. Les deux pièces furent transpercées puis tombèrent au sol.
Après avoir retenu son souffle, la foule laissa éclater sa joie tandis que Justine glissait vers le sol, bientôt suivie par le deuxième étage puis le troisième et enfin la base de la pyramide. Les vingt-deux élèves se regroupèrent au centre de la piste avant de se mettre à genou, dans un cercle parfait, tourné vers les spectateurs, la tête baissée. Tout s’était déroulé comme prévu. Ethan et ses camarades avaient joué leur partition à la perfection. Un tonnerre d’applaudissements retentit dans les gradins. La foule hurlait leurs prénoms et cela provoquait chez Ethan un sentiment de jouissance et de puissance.
Ethan était toujours au sol et transpirait par tous les pores de la peau. Parcouru de frissons, il sentait l’adrénaline couler dans ses veines. À ce moment précis, il se dit que rien ne pouvait leur arriver. Ses camarades et lui étaient capables de renverser des montagnes. C’est alors qu’ils entendirent le « Hop » leur indiquant qu’ils pouvaient rompre leur formation. Il se redressa et saisit les mains des deux compagnons qui l’encadraient avant de s’incliner vers le sol en signe de salut à la foule. Ils firent plusieurs fois ce mouvement tout en se tournant afin de saluer tous les gradins. Ils s’immobilisèrent lorsqu’ils se retrouvèrent devant le maire Arturus qui se leva.
C’est à ce moment-là qu’Ethan sentit sa vue se troubler. Il connaissait bien cette sensation, il savait qu’il allait avoir une vision. Ce don était dans ses gênes mais il ne commandait rien et la vision pouvait arriver à n’importe quel moment. Il se cramponna à ses deux amis et laissa le voile l’envahir.
Il n’était plus dans le colisée. Il se trouvait au bord de la forêt, vers la cascade qui s’enfonçait dans les entrailles de la muraille de granit entourant Atlantide. Il scrutait la paroi rocheuse au-dessus de la forêt, semblant y chercher quelque chose. Au détour d’un chemin, il trouva ce qu’il cherchait et s’enfonça en ligne droite sous le couvert des arbres. Il déboucha dans une clairière au centre de laquelle se trouvait un arbre. Alors qu’il allait s’en approcher, un être surgit du couvert des arbres, devant lui. C’était un Elfe. Il s’inclina devant Ethan et l’invita à le suivre. Alors qu’Ethan se retournait pour parler, le voile blanc se déchira et il retrouva la réalité.
Les applaudissements reprirent de plus belle tandis qu’ils refluaient vers la grande porte menant aux profondeurs du colisée. Alex s’approcha d’Ethan et le soutint sans que personne ne remarque rien.
Lorsqu’ils arrivèrent devant les vestiaires, Shepard les y attendait les mains sur les hanches. Un franc sourire illuminant son visage.
Le son, amplifié par la voûte de pierre ocre, résonnait. Il fut bientôt rejoint par les claquements, tout d’abord discrets, puis retentissants des deuxièmes années qui s’applaudissaient eux-aussi. Ethan comprit à quoi avaient servi la préparation et la cérémonie. Elles les avaient soudés et avaient fait d’eux une nouvelle tribu. Il ressentit de l’amour et de la fierté pour ses camarades et voyait dans leurs yeux la même chose. Les anciennes couleurs avaient disparu. Ils appartenaient tous à une nouvelle et indivisible tribu pour les années à venir.
Plusieurs voix s’élevèrent pour appuyer ce que venait de dire Rufus. Des mains claquèrent les unes dans les autres, certaines atterrirent sur des épaules. Ils se congratulèrent en véritables amis qu’ils étaient devenus dans l’épreuve.
Enfin prêts, ils sortirent par grappes pour rejoindre le forum sur lequel l’ensemble des Atlandiens avait pris place autour des tables qui y avaient été dressées. Tout autour se trouvaient des étals sur lesquels des montagnes de victuailles attendaient d’être dévorées.
En avançant parmi la foule, Ethan salua, ici et là, les personnes qu’il connaissait de vue. Il croisa aussi ses professeurs ainsi que d’anciens élèves de l’académie, qui avaient changé de voie après l’épreuve de la tour.
Il se tourna et la vit. Elle arrivait vers lui, l’air ravie de le retrouver. Elle était habillée d’une jupe noire qui lui descendait jusqu’aux genoux, d’une chemise blanche et d’une écharpe bleue. Depuis la séparation de la tribu verte et son intégration dans la confrérie des étudiants en sciences politiques, ils n’avaient pas eu l’occasion de se voir beaucoup.
Cette dernière ne se laissa pas faire et leur tira la langue avant de se précipiter dans leurs bras. Les deux garçons la saisirent au vol et l’étreignirent. Ils restèrent dans cette position un bon moment. Préciosa ne voulait pas les lâcher, elle rattrapait les dernières semaines où elle n’avait pas eu l’occasion de les voir. Ces trois-là avaient été très proches depuis les sélections et rien ni personne ne pourrait les séparer.
En entendant son ami, Ethan eut un hoquet de surprise. Il ne partageait pas ce sentiment. Pour lui, Atlantide était sa maison. Il n’imaginait pas vivre ailleurs. Rien à l’extérieur ne lui manquait. Enfin si, se dit-il en y réfléchissant. J’aimerais bien faire un pèlerinage sur l’île où ma famille est enterrée.
Ethan se retourna vers ses amis et n’eut rien à dire, ils avaient compris. Il tourna les talons et se mit à courir vers le côté opposé du forum, tandis qu’Alex et les autres se dirigeaient vers l’une des tables. Courant comme un dératé, il ne lui fallut pas longtemps pour arriver à destination. Il franchit les grandes portes de bronze puis se dirigea droit vers le vestibule qui précédait le bureau d’Arturus. Lorsqu’il poussa la porte, il sentit comme une résistance. Il força pour l’ouvrir et entendit un «aïe » très sonore suivi d’un bruit de chute.
Aurélia se radoucit et lui sourit.
Dehors, elle l’attira contre elle, puis l’embrassa longuement et langoureusement. Lorsqu’ils se détachèrent, ils restèrent le regard plongé dans celui de l’autre. Ethan ne se lassait pas des yeux verts d’Aurélia. Son regard l’envoûtait comme au premier jour, comme au premier regard. Il aimait cette fille plus que tout.
Toujours main dans la main, ils partirent vers le banquet.
En s’approchant, Ethan vit avec plaisir que la plupart de leurs amis étaient attablés autour d’Alex. Pourtant à peine assis, il ressentit comme une gêne, quelque chose clochait. Il regarda autour de lui et comprit. Les nouveaux le regardaient bizarrement. Après plusieurs minutes et maints regards en biais, il craqua.
Aussitôt, les conversations autour de la table s’arrêtèrent. Ethan sentit que la plupart des regards étaient braqués sur lui. Les deux garçons, tout d’abord extrêmement gênés, baissèrent le nez dans leurs assiettes.
Les deux jeunes élèves hésitaient manifestement à répondre, malgré l’attitude souriante d’Ethan. Il ne rêvait pas, quelque chose était là, présent. Il voulait savoir quoi. Alors qu’il commençait à se renfrogner, il sentit la main d’Aurélia se poser sur sa cuisse et la caresser doucement, comme pour l’apaiser.
Ethan comprit d’un seul coup qu’il s’était placé dans une situation déplaisante. Il devinait déjà quelle serait la question suivante. Depuis plusieurs semaines, la rumeur courait qu’il était le messie et la cérémonie de l’épée n’avait rien arrangé. Il avait pris l’habitude de l’entendre et de l’ignorer, surtout depuis qu’il vivait avec les deuxièmes années. Avec eux, il était juste Ethan et cela lui avait permis de prendre du recul mais aujourd’hui, il devait faire une mise au point.
La réponse calme et posée qu’il venait de faire détendit l’atmosphère. Les deux garçons relevèrent la tête et Ethan put lire dans leurs regards qu’il ne leur faisait plus peur. Je me demande bien ce qu’on a pu leur raconter, se dit Ethan frappé par leurs réactions. Leur avait-on dit que le messie explosait de colère, qu’il était incapable de garder son calme ou qu’il devenait fou à la simple évocation de son statut ? En fait, je n’en ai rien à faire. Je viens de montrer à tout le monde que cette historie n’a aucune prise sur moi.
À la surprise générale, Ethan éclata de rire tout en mettant les deux mains l’une contre l’autre pour les frotter de plaisir.
À ces mots, tous les convives assis autour de sa table, ainsi que ceux des tables avoisinantes, se levèrent avec leur verre à la main.
Lorsqu’Ethan se rassit, les conversations autour de lui avaient repris mais il n’était plus le centre de l’attention. C’est alors qu’il sentit la main d’Aurélia lui agripper le cou et l’attirer vers elle. Elle l’embrassa avant de laisser sa bouche glisser vers son oreille.
Ethan l’embrassa à son tour, il jubilait. Pour la première fois depuis longtemps, il avait réussi à ne pas exploser à l’évocation de son statut supposé d’élu. C’était un grand pas et il espérait que la rumeur finirait par s’éteindre d’elle-même.
Le reste du banquet se déroula de façon tout à fait normale. Plus personne ne le regardait bizarrement. Il passa même une excellente après-midi avec ses amis. Au milieu d’une conversation, il fut interrompu par une main qui se posa sur son épaule.
Lorsqu’Ethan libéra Harry, il fut remplacé par Alex. Son oncle serra ensuite de nombreuses mains. Dans la cité d’Atlantide, c’était une personnalité. Il était extrêmement connu et populaire en tant qu’ancien élève, ancien résident et ancien général des forces d’Atlantide.
Autour d’eux, les discussions avaient repris. Alex avait Pauline sur les genoux et ils riaient franchement avec Siva et Justine. En face d’eux, Préciosa flirtait plus ou moins avec un garçon qu’Ethan ne connaissait pas. Il lorgnait clairement sur son amie et cette dernière semblait plutôt réceptive à ses avances. Un peu plus loin, Archi discutait avec des garçons de première année. Il leur racontait, en le grossissant, tout ce qui allait les attendre.
Ethan souriait en voyant tous ses amis, assis là autour de lui. C’était un moment rare dans la vie de la cité. Après cette journée, ils seraient de nouveau happés par leurs activités et ne seraient plus réunis avant longtemps.
Ethan se retourna et fit face à son oncle.
Harry le saisit par les épaules.
Cet intermède mit fin à leur conversation. Tandis qu’Harry et Dean partaient dans l’évocation de leurs souvenirs, Ethan se rapprocha d’Aurélia qui était en pleine conversation avec Préciosa et les autres membres de sa tablée.
Alors que les derniers rayons de soleil éclairaient encore le forum, Ethan vit Arturus se lever puis se diriger vers le kiosque au centre du forum.
Ethan regarda Aurélia qui lui sourit en signe d’assentiment.
Les gesticulations d’Ethan imitant Harry firent rire tout le monde.
Harry lui sourit puis s’éloigna.
Ethan se saisit de la main d’Aurélia et suivit son ami, bientôt rejoint par Alex et le reste du groupe. Au total, ils étaient une vingtaine qui avançait rapidement vers le village. Au moment où ils passèrent à côté des villas, Ethan eut un pincement au cœur en voyant les lumières à l’intérieur. Il imaginait sans mal ce que devaient ressentir les nouveaux locataires en découvrant et en prenant possession des lieux. En regardant la sienne, il se demanda qui allait prendre sa chambre. Ce serait amusant que cela soit Valentin Atreides, se dit-il en souriant.
Plusieurs têtes hochèrent la tête en signe d’assentiment.
Alors que le groupe repartait, Ethan se laissa volontairement décrocher pour se trouver à la hauteur d’Alex et de Préciosa qui parlaient ensemble.