Il sera toujours temps d’aller ailleurs - Christine Paris Bruyère - E-Book

Il sera toujours temps d’aller ailleurs E-Book

Christine Paris Bruyère

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Beschreibung

Il sera toujours temps d’aller ailleurs vous entraîne dans une quête où se mêlent évasion, passion et mystère. Lise, trentenaire célibataire en quête de sens, quitte tout après la vente de la maison familiale et s’envole pour l’Irlande, un pays qu’elle connaît à peine, mais qui l’attire irrésistiblement. Dans le village de Ballyvaughan, elle découvre la beauté sauvage du Burren, la chaleur de ses habitants, et l’art de la peinture qui bouleverse sa vision du monde et d’elle-même. Entre paysages enchanteurs et tourments du cœur, Lise trouvera-t-elle enfin sa place ? Le voyage ne fait que commencer…

À PROPOS DE L'AUTRICE  

Grâce à son expérience en tant que fonctionnaire internationale à l’UNESCO, Christine Paris Bruyère a été imprégnée par une vaste diversité culturelle. Sa plume, aussi fluide que son pinceau, puise dans l’imaginaire et le réel. Passionnée de peinture, elle transpose dans ses récits l’harmonie entre l’art et l’écriture, explorant des univers où l’autobiographie, l’essai et la romance se rencontrent. Il sera toujours temps d’aller ailleurs est un hommage à l’Irlande profonde, un pays qui occupe une place essentielle dans son cœur et qu’elle peint avec les couleurs de son âme.

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Seitenzahl: 110

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Christine Paris Bruyère

Il sera toujours temps

d’aller ailleurs

Roman

© Lys Bleu Éditions – Christine Paris Bruyère

ISBN : 979-10-422-5681-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Chapitre 1

Elle est là, juste à côté, et la seule pensée qui l’habite, c’est une envie de fuir à l’autre bout du monde, enfin, peut-être plus près tout de même, mais fuir.

Pourtant, ils sont tous très gentils avec elle, ils ne sont habités d’aucune mauvaise intention, mais ces regards de pitié qu’ils ne peuvent s’empêcher de lui lancer la font bouillir. Non, elle ne veut pas de leur pitié ! Ni de leur amitié ! Ni même de leur gentillesse ! Elle n’a aucune envie de les voir, de les entendre.

Dans la pièce d’à côté, le cercueil de chêne est encore ouvert. Le visage que l’on aurait dit être modelé avec une bougie blanche, une de ces bougies ordinaires que l’on sort lors d’une panne d’électricité, est celui de sa mère. Son dernier lien familial.

Vite, qu’on ferme ce cercueil ! Elle ne veut plus la voir ! Elle se barde de sa protection habituelle : regard fixe, épaules droites, corps rigide, elle ne regarde personne. Allez, qu’on en finisse et qu’elle quitte ce bled pourri !

Trente ans et seule dans la vie : pas de mari, pas d’amant, si ce n’est quelques aventures sans lendemains, une vague amie, une de celles qui vous déverse tous ses petits problèmes – vrais ou imaginaires – et vous quitte en disant « mais toi, tout va très bien, comme toujours ».

Eh bien non ! Tout ne va pas très bien ! Elle est seule. Il paraît que ce n’est pas naturel d’être seul, que ce n’est pas possible : on a toujours quelqu’un à qui parler. Pas elle. Elle a trente ans, elle ne se trouve ni belle ni laide, ni grande ni petite, ni grosse ni maigre, ni brune ni blonde, des yeux qui ne sont même pas bleus, mais presque gris, un teint quelconque. C’est ça, elle se sent quelconque, elle est quelconque.

Sa mère l’aimait certainement, à sa manière, mais jamais elle ne le lui avait dit ni même montré, jamais une étreinte, jamais un baiser franc et sonore, seulement un baiser sec du bout des lèvres, le moins de contact possible. De temps en temps une petite phrase : « fais bien attention de ne pas prendre froid » ou « sois prudente en conduisant ; tu ne devrais pas rentrer à la nuit ». Elle se console en se disant que cela devait être sa manière de l’aimer.

Sa mère est enfin en terre. Après les fleurs sur la tombe, le défilé des gens du village et leurs mots de condoléances, elle rend une dernière visite à la maison dans laquelle tout est méticuleusement rangé : sa mère ne supportait pas le désordre. Elle emporte un ou deux objets, une photo de sa mère tout de même et ferme la maison, définitivement. Elle file à la ville voisine, avise une agence immobilière et met immédiatement la maison en vente. Elle ne veut plus d’attaches.

Quatre mois plus tard, la dernière attache à son passé est vendue. Que va-t-elle faire de ce petit pécule ? Elle réfléchit pendant une semaine. Si elle était raisonnable, elle l’investirait dans l’achat d’un appartement, mais si, pour une fois, elle n’était pas raisonnable : c’est vrai, elle n’a plus de compte à rendre à personne. Elle décide de ne plus y penser, la réponse finira bien par s’imposer.

Sa décision est prise : elle décide de tout plaquer. Elle demande un congé sans solde – on ne sait jamais, si elle avait envie de reprendre son travail minable, mais très bien payé ! Elle sous-loue son appartement à une collègue, des fois que… Elle fait sa valise – suffisamment légère pour ne pas s’encombrer, elle file à l’agence de voyages en bas de son immeuble pour prendre un billet d’avion aller et retour – open pour le retour – mais pour quelle destination ? Un dilemme s’offre à elle, où va-t-elle aller ? Vers des contrées lointaines et exotiques : l’Asie, l’Amérique latine, ou moins exotiques comme les États-Unis ou le Canada, non, pas le Canada, il fait trop froid l’hiver, ou bien va-t-elle rester en Europe ?

Pourra-t-elle se construire une vie nouvelle en fuyant ? Son passé ne changera jamais, certes, mais si, libérée de toute entrave, elle pouvait oublier d’être une petite souris grise qui passe inaperçue, qui se faufile entre les situations, entre les personnes, entre les émotions, et qui, pour ne pas avoir mal, ne pas faire de mal à sa mère, évite de mettre la barre de sa vie trop haute, la plaçant franchement basse.

L’employée de l’agence, devant son indécision, la questionne :

« Parlez-vous anglais ?

— Oui, je me débrouille, je travaille beaucoup en anglais. Je travaille, non, je travaillais dans une grande boîte internationale.
— Alors pourquoi n’iriez-vous pas en Irlande ? Ce n’est pas loin, avec une mer seulement à traverser, c’est assez dépaysant, et peut-être que cela vous semblera même exotique.
— Exotique ?
— Les paysages, les églises et monastères en ruine, la côte du sud au nord très découpée et tout de même différente, si vous aimez les endroits sauvages, vous allez adorer, et la furie de la mer…
— Oui, cela me semble tentant.
— Et les Irlandais sont adorables.
— D’accord, je prends un aller simple.
— Pourquoi pas un aller et retour ?
— Je sais quand je pars, mais pas quand je rentrerai.
— Alors pourquoi pas un “open” pour le retour ? Il peut être valable plusieurs mois, trois, six ou même un an et plus. Ah, je vous envie de pouvoir tout quitter ainsi.
— Non, ne m’enviez pas, je vous assure. Bon, est-ce que je peux y aller avec ma voiture ?
— Oui, alors je vous donne juste la traversée Cherbourg/Rosslare et quelques prospectus pour vous mettre l’eau à la bouche.
— Merci, et si je ne m’y plais pas, il sera toujours temps d’aller ailleurs. »

Chapitre 2

Elle est enfin partie. Seule dans sa petite Twingo, elle roule vers Cherbourg pour prendre le bateau pour l’Irlande. Elle a pris soin d’emporter tous ses CD dans une grande pochette noire, ainsi elle ne fera pas la route toute seule, ses airs préférés l’accompagneront. Son bateau est à 19 heures, elle a tout son temps, la route est dégagée, un peu plus de circulation autour de Caen, mais rien de sérieux. Très en avance, elle s’arrête à Cherbourg, trouve une place non loin du port et se balade le nez en l’air, il pleut pour ne pas faire mentir l’idée que l’on se fait de cette presqu’île qui s’avance en mer de Manche telle un bateau échoué là depuis des millénaires. En passant devant un magasin au nom évocateur des « Parapluies de Cherbourg », elle ne peut s’empêcher de sourire.

Reprenant sa voiture, elle se dirige vers le port maritime et le bateau de la Celtic Line qui va la mener en Irlande. Deux heures à tuer sous cette pluie de mars, elle n’a pas d’autre solution que de rester dans sa voiture. Elle laisse sa pensée errer sans but et bientôt elle se rend compte qu’une procession de camions s’enfile à la queue leu leu dans la gueule béante du bateau, puis sa file de voitures avance à son tour, des hommes en ciré jaune leur balisent le chemin et elle se gare là où on le lui ordonne : pas besoin de réfléchir. Elle se munit de son imperméable, son petit sac de voyage et son sac à main, quitte la soute malodorante par une porte de fer et monte les escaliers vers la zone civilisée. Elle s’arrête à un comptoir où une hôtesse lui remet la clef de sa cabine. Comme il y a peu de monde, peu de touristes, en ce mois de mars, elle n’a pas besoin de partager sa cabine de quatre couchettes avec d’autres passagers. Elle pose son sac de voyage et sort de sa cabine pour se diriger vers le restaurant. Elle n’a pas pensé à s’acheter un sandwich et, de toute façon, elle a décidé de profiter pleinement de son aventure : profiter des commodités du bateau en est une, à sa mesure.

Le restaurant étant fermé, elle va prendre un coca au bar. Le barman parle anglais, comme tout le personnel – elle est déjà en Irlande – et elle a du mal à se faire comprendre. Ici, un coca light se dit « diet coca » et dire qu’elle croyait que « light » était le mot correct en anglais ! Elle s’assied à un endroit où elle peut surveiller la porte du restaurant. Lorsque celle-ci s’ouvre enfin, elle laisse passer quelques personnes. C’est un self et, en montrant du doigt le plat principal, elle ne prend pas de risques. Elle va s’asseoir à une table seule. Bientôt, un homme vient prendre place à la table d’à côté, presque en face d’elle, et lui sourit en lui lançant un « hey ». Elle lui répond de même. Il commence à manger en silence, et une fois son plat terminé, il lui pose une question qu’elle ne comprend pas. Il répète sa question en ajoutant avec un accent indéterminé : « Française ? ». Elle sourit en lui répondant par l’affirmative. Il lui demande ensuite s’il peut la rejoindre à sa table. Pourquoi pas ? N’est-elle pas prête pour l’aventure ?

Il est ukrainien, chauffeur d’un camion irlandais, il fait le voyage Berlin/Limerick régulièrement, son véhicule plein à l’aller comme au retour. Peu à peu, sa réserve naturelle laisse place à un intérêt pour cet homme et son désir de parler. Il est assez grand, costaud, avec un visage carré, des cheveux châtains et des yeux bleus lumineux qui participent à son sourire incessant. Elle se laisse happer par sa gentillesse et lui offre son prénom en retour : Lise. Lui s’appelle Piotr. Une fois leur repas terminé, ils vont ensemble au bar où il lui offre un whiskey en lui expliquant la différence entre le whiskey irlandais et le whisky écossais. Elle n’a que peu besoin de lui faire répéter, car son accent ukrainien lui est plus facile à comprendre que l’accent irlandais, bien que sa connaissance du vocabulaire ne soit tout de même pas suffisante pour cette conversation anodine. La société internationale dans laquelle elle travaillait ne traitait pas ce genre de discussion.

Elle ne s’est pas rendu compte que le bateau avait largué les amarres et qu’il naviguait à présent en pleine mer. Ils se donnent rendez-vous le lendemain pour le petit déjeuner. Il la raccompagne à sa cabine, lui prend la clef des mains, l’ouvre et s’efface pour la laisser passer. Après un instant d’hésitation, elle fait un pas et jette un coup d’œil derrière elle : il est toujours là, son regard lui claque à la figure. Elle se retourne et, lui prenant la main, l’entraîne avec elle. Il l’étreint en silence. Où est partie sa réserve ? Elle obéit à une pulsion première. Le bateau commence à tanguer très légèrement, ils perdent l’équilibre et tombent ensemble sur la couchette. En riant, elle fait mine de se relever, mais il la plaque et commence à la caresser. De rires en caresses, de caresses en baisers, ils commencent à se défaire de leurs vêtements et finissent nus ; leurs corps se frottent, s’électrisent, de pénétration en halètements, ils se conduisent l’un l’autre vers l’orgasme. Un feu, une passion éphémère. Ils se séparent et découvrent avec étonnement leur état. Il est satisfait, elle est bien, même très bien, et lui chuchote à l’oreille son remerciement. Il la serre dans ses bras et l’embrasse à nouveau et, bientôt, ils s’endorment, bercés par le léger roulis du bateau.