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Pensez-vous sincèrement que nous sommes seuls dans l’Univers ? Jeune femme timide et réservée, Violette, surnommée Ivi, s’engage dans la section administrative de l’armée française. Lors d’une mission tremplin en Égypte, le convoi est attaqué par des rebelles. Violette tente de protéger ses camarades et se retrouve engloutie dans les profondeurs d’une pyramide. Ivi se réveille dans un monde qui n’est pas le sien. Comment a-t-elle pu voyager de l’autre côté de l’Univers ? Sauvée par Odhor, le Dynaste de Kamoxy, Violette se démènera pour prouver sa bonne foi et sa vaillance pour devenir Officier de la Flotte oxylienne. Cependant, la révélation d’une lointaine prophétie et la déclaration de guerre des pirates bousculent son destin. Découvrez avec elle, la véritable histoire de l’Univers.
À PROPOS DE L'AUTEURE
Passionnée d’astronomie et de science-fiction, Marion Le Hintec s’intéresse depuis sa tendre enfance à la création de notre galaxie et à la naissance de l’Humanité. Réfugiant son imagination dans la littérature, elle franchit tout récemment le pas de l’écriture de ce roman qui décrit le monde qu’elle croit exister au-delà des étoiles.
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Seitenzahl: 216
Veröffentlichungsjahr: 2023
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Marion Le Hintec
Kamoxy
Tome I
De l’autre côté de l’Univers
Roman
© Lys Bleu Éditions – Marion Le Hintec
ISBN : 979-10-377-8025-6
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.
Aujourd’hui est le premier jour du reste de ma vie, cette phrase je l’ai entendu et lu de nombreuses fois au cours de mon existence sur Terre et pourtant… pour moi, simple mortelle, qui suis née et décédée plus d’une fois, elle n’a jamais été aussi réelle qu’aujourd’hui.
Je suis née à Paris dans le 14ᵉ, le 17 juin 1991 à Port Royal, j’ai grandi dans une famille biculturelle, ma mère est de religion chrétienne et mon père est de religion juive. Annie est secrétaire à la SNCF et Joseph est barman dans une brasserie chic, quartier Saint-Michel. Ils se sont rencontrés à l’âge de 30 ans lors d’une soirée dansante près des Champs-Élysées. Maman aime me raconter l’histoire de leur coup de foudre, leur idylle a longtemps bercé ma jeunesse jusqu’à ce que leur amour s’éteigne un jour de printemps.
Ils se sont séparés lorsque j’avais 11 ans. Mon père a refait sa vie quelques années plus tard. De mon plus jeune souvenir, j’ai toujours eu une relation délicate et compliquée avec ma belle-mère. Je ne dirais pas qu’elle me déteste mais je n’ai jamais ressenti de l’affection de sa part. Adolescente, je ne comprenais pas pourquoi les enfants étaient les premiers à subir les dommages collatéraux d’une séparation. Aujourd’hui, je suis une jeune adulte et je perçois avec recul les aléas de la vie, même si cette période de mon enfance restera marquée au fer rouge dans mon âme. Nous avons mis des années à nous comprendre mon père et moi, je n’étais jamais assez intelligente ou assez mince. Lors d’un week-end chez mon père, l’écart se creusa lorsqu’il donna une somme astronomique d’argent de poche à sa belle-fille alors que ma mère peinait à finir les fins de mois. Cette mère célibataire, travailleuse et dévouée qui ne touchait pas assez pour vivre correctement mais gagnait trop pour avoir des aides de l’État. Ma mère s’est toujours sacrifiée pour moi malgré les hauts et bas, elle est mon pilier, mon repère et la personne que j’aime le plus dans tout l’Univers.
Annie m’a élevée seule dans un petit appartement en banlieue parisienne, de l’autre côté du périphérique, comme disent les bobos. Il n’était pas grand, mais confortable. Situé au huitième étage dans une résidence privée, le panorama nous offrait une vue incroyable sur la banlieue. Nous avons longtemps voulu le quitter, car il représentait l’appartement pansement à la suite de la rupture avec mon père, mais finalement nous y sommes restées car aucun autre logement n’était son équivalent. Il représentait notre cocon, notre endroit à nous deux, notre havre de paix. Malgré ce que les médias racontent sur la Seine-Saint-Denis, je me suis toujours sentie en sécurité.
Après avoir obtenu mon bac, j’ai décidé de poursuivre mes études encore quelques années. J’étudiais la semaine et travaillais le week-end. J’évitais les sorties et journées entre amis, le manque de confiance en moi, la peur du jugement… ça vous parle ? J’ai toujours préféré rester seule avec ma mère. Elle est la seule personne sur qui je peux véritablement compter.
Malheureusement pour elle, je ne lui ai jamais laissé le temps et l’espace d’avoir un compagnon, elle a bien essayé, mais il n’était vraiment pas assez bien pour elle, trop narcissique, un monsieur je-sais-tout (qui ne sait rien). Il fut le premier amour de ma mère pendant sa vingtaine, il lui promit de ne pas se marier, de quitter sa compagne et future mère de ses enfants. Mais vous devinez bien qu’il n’en fit rien.
Vingt ans plus tard et quelques mois après la séparation de mes parents, le voilà de nouveau, essayant de reconquérir ma mère, m’évinçant de sa vie et lui donnant des conseils d’éducation.
« Fais ci, fais ça, ta fille est difficile, un internat ferait l’affaire, tu la verras le week-end. »
Après quelques mois de cohabitation, un matin, sa femme (qu’il était censé avoir quittée et même ne jamais avoir épousée) appela. Il n’était pas là, ma mère décrocha… Un florilège d’insultes et de menaces sortit de la bouche de cette épouse trompée, bafouée et seule. Ma mère écouta, acquiesça et pleura.
Ce fut la fin de leur histoire, et vous noterez bien que ce n’était en aucun cas de ma faute. Après ce nouveau désastre amoureux, ma mère décida de ne jamais refaire sa vie, elle eut quelques fréquentations mais rien de sérieux, j’ai vu son cœur se refermer à l’amour, sans pouvoir l’aider, car égoïstement notre petite vie à deux me suffisait largement.
Je n’ai jamais su quel métier je souhaitais exercer plus tard. La chanson m’a traversé l’esprit… mais avec une mère secrétaire qui avait du mal à boucler les fins de mois… la chanson, la vie d’artiste, n’était clairement pas une option.
Lors d’un forum de l’emploi à la porte de Versailles, traversant les allées et regardant les stands avec le plus grand des désintérêts, mon regard s’attarda sur un petit stand, accompagné d’une énorme banderole « rejoignez-nous ». Un homme, assez grand, les cheveux courts et grisonnants accrocha mon regard.
« L’armée a besoin de femmes fortes, volontaires et ambitieuses, vous trouverez ce que vous recherchez si vous savez ce que vous voulez. »
« Je ne sais même pas ce que je recherche », répondis-je d’un ton coupable.
« Le goût du risque non merci, recrutez plutôt de jeunes garçons forts et musclés, prêts à devenir de la chair à canon et laissez ma fille, elle a d’autres ambitions », rétorqua ma mère.
Mon ambition est la chanson… mais je n’ai jamais fait de solfège et puis ma voix aussi belle soit elle selon moi, risque de ne pas être de l’oreille de tout le monde.
« Il faut parfois oser, la peur n’évite pas le danger, mais le courage permet de tout surmonter et de se surpasser jeune fille. Si vous recherchez l’estime de soi, l’accomplissement et le goût du risque, vous serez à votre place. Les femmes ont autant de mérites que les hommes », insista l’Officier.
L’air faussement blasé et désintéressé, je répondis : « Je vous remercie, je vais y réfléchir. »
Il me tendit un prospectus bleu blanc rouge et me sourit avec un clin d’œil. S’il n’était pas de la génération de ma mère, j’aurais éventuellement pu me laisser tenter par ses gros muscles. La journée passa et le salon se poursuivit, avec la résonance de ses mots en tête. Que voulais-je vraiment ? Apprécierais-je le goût du risque ? Dormir à la belle étoile et sûrement trempée ? Manger des boîtes de conserve ? Porter un treillis ? Connaissez-vous quelqu’un à qui le kaki sied à merveille ? Être entourée d’hommes forts et musclés qui sentent la transpiration et accepter de me battre deux fois plus puisque je suis une femme.
À ce moment précis, le confort chez Annie était un luxe appréciable. J’aurais pu me trouver un petit travail de bureau, louer un appartement dans la même résidence que ma mère et vivre une belle vie de célibataire entourée de mes chats, mon hamster, mes deux lapins et mes quatre poissons rouges jusqu’à ce que le destin m’offre un bel homme avec qui partager tout cela.
Et pourtant, malgré mon petit programme de vie, ces fameux mots sur le courage m’avaient bien plus imprégné que je n’aurais voulu l’admettre.
Et si finalement, moi, Violette Jupin, 1 m 70 pour 75 kilos, brune aux yeux marron, gourmande et rêveuse, prenais le taureau par les cornes et osais rêver plus haut qu’un petit travail pépère et d’une fermette dans un petit appartement au loyer exorbitant dans une banlieue sympa.
À la fin de mon BTS et de mon stage obligatoire, ma décision était sans appel, il était hors de question pour moi de devenir bureaucrate et de recroiser un potentiel harceleur comme mon maître de stage. Ce fameux Claude, le stéréotype même du mec frustré, équeuté à la maison qui se défoule sur les stagiaires au bureau.
« C’est moi le chef ! C’est moi qui commande ! Ma main sur vos petites fesses, si vous ne faites pas ce que je vous demande, ce serait dommage que l’on se retrouve tous les deux dans le même ascenseur. »
Après cette expérience enrichissante sur le monde du travail, j’ai décidé de me lancer dans une troisième année d’étude pour me spécialiser dans le droit public. J’étudiais la semaine puis je travaillais le week-end. C’était une façon de ne plus dépendre de ma mère et de pouvoir la soulager financièrement.
Après l’obtention de mon dernier diplôme, j’ai décidé de laisser passer l’été, ma vie était rythmée entre mon job étudiant, mes séries et mes week-ends shopping avec ma mère et mes marraines. Les Martine, deux femmes indépendantes et autonomes, l’une couguar l’autre célibataire endurcie. Imaginez une ado grandir dans un monde de femmes, où les hommes ne sont pas une priorité mais bien une option. Grâce à toutes ces femmes qui m’ont entourée, je suis devenue la Violette que je suis aujourd’hui. Fière, droite et affirmée, capable de prendre des décisions qui changeront le cours de ma vie et de mon destin.
Le dernier samedi d’août, prise d’une montée d’adrénaline et de courage, j’avouai à ma mère que j’étais recrutée par l’armée de Terre. J’avais passé les tests de sélection à Vincennes durant l’été et je faisais partie des quelques courageux recrutés.
La nouvelle a causé de nombreuses disputes entre ma mère et moi, mais j’étais certaine que ce chemin était celui qui me convenait le plus.
« Mais tu n’es pas plus sportive que moi, pourquoi intégrer l’armée, tu aimes l’autorité autant que ton père ! Pourquoi cherches-tu à partir à l’autre bout du monde ? J’ai bien conscience qu’un enfant doit prendre son envol mais enfin Violette ! Ce n’est plus un envol que tu me fais là, tu changes de monde ! »
« Maman, j’ai besoin de trouver qui je suis, je n’ai pas beaucoup d’amis, je passe mon temps entre mes études, mon travail et mes sorties avec toi. J’ai besoin de connaître mes limites. Si je n’essaye pas, si je ne vais pas au bout de mon ambition, je le regretterai maman. J’ai besoin de trouver ma place dans cette société qui ne me correspond plus. La maltraitante animale, le manque de tolérance envers les personnes différentes, l’industrialisation qui nous détruit petit à petit. J’ai besoin de me sentir utile et de savoir que mes actes laisseront une trace. »
« C’est vrai qu’à l’armée, tu vas les dépasser tes limites mais pendant combien de temps ? Penses-tu sincèrement avoir la patience de supporter ce monde d’hommes ? »
« J’ai pris ma décision, c’est la route que j’ai décidé d’emprunter, je viendrai te voir pendant mes permanences, de toute façon, je n’ai nul par où aller sinon. Je conviens que la méthode est brutale, mais nous devons nous séparer, tu as besoin de te retrouver en tant que femme et laisser cette vie de maman. Je suis adulte maintenant, il est temps pour moi de prendre mes propres décisions. Est-ce que je vais le regretter ? Sûrement. Est-ce que je vais en chier ? C’est évident. Mais c’est ma décision et il n’appartient qu’à moi de suivre ma propre voie. Tu es et resteras la personne la plus importante à mes yeux, tu es ma mère, celle qui m’a donné la vie et pour cela je te serai éternellement reconnaissante maman. Je t’aime du plus profond de mon cœur. Ne prends pas ce choix comme une envie de m’éloigner de toi et mais plutôt comme un besoin de partir à la conquête de moi-même. »
« Ton père est au courant ? »
« Non, je n’arrive pas à le joindre, il est parti en Nouvelle-Calédonie avec sa femme pour leur anniversaire de mariage ou un séjour dans le genre, il ne s’est pas éternisé, tu le connais. Loin des yeux loin du cœur. »
« Violette ! Il reste quand même ton père ! »
« Arrête de m’appeler Violette, je déteste ce prénom, il est moche. C’est un prénom de grand-mère qui refuse de vieillir et puis tu auras l’occasion de lui dire si un jour il t’appelle, ça lui en bouchera un coin. Sa fille grosse et imparfaite qui s’engage dans l’armée afin de protéger son pays, qui peut faire mieux ? »
« Tu es mon étoile à moi, petite Ivi, ton père ne m’appellera jamais, il n’a pas de téléphone, c’est sa femme qui le garde en lieu sûr, certainement dans un coffre-fort. Bon sang, il n’est plus l’homme que j’ai connu c’est une certitude. »
Je me souviens de notre fou rire, ma mère me prit dans ses bras et me serra de toutes ses forces. C’est exactement ce dont j’avais besoin, de l’amour et du soutien de ma mère. Les quelques semaines qui me séparaient de ma rentrée furent difficiles pour mon entourage comme pour moi. Il était évident que la Violette que j’étais à ce moment précis, sur le quai du train qui me conduisait directement à mon école, n’existerait plus. Pendant que le train s’éloignait de la gare, je disais adieu à la petite Ivi timide et réservée qui rêvait sa vie au lieu de la vivre.
Après mes huit mois de formation à l’École des Officiers, j’ai décidé de me spécialiser dans l’administration, en tant que Responsable des Ressources humaines. Il est vrai que les administratifs sont de vrais militaires, c’est inéluctable. Cependant, nous préférons laisser les autres partir en mission les premiers et intervenir lorsque vraiment la situation nous l’impose. Nous aimons le risque mais avec parcimonie. Mais qui est Parcimonie ?
Ma première mission m’emmena en Guyane, à la poursuite des braconniers et pilleurs d’or. Ce fut mes premières vacances, nourrie, logée, blanchie à la caserne, pendant que les hommes du terrain partaient chasser les pirates et dormaient dans les tentes sous l’humidité. C’est d’ailleurs là-bas que j’ai rencontré Maxime, un beau corse de 24 ans avec une silhouette de dieu grec. Je ne dirais pas que mon cœur eut le coup de foudre pour ce bellâtre. En revanche, ma virginité, elle, se voyait bien mourir en lui. Comment ne pas résister à 90 kilos de muscles, 1 m 95 de force et un regard à faire frétiller les minettes ? Il était clairement le plus beau mec de la caserne. Contre toute attente, notre idylle dura 2 ans. Jusqu’à ce que les services de renseignements eurent vent de ce jeune militaire qui n’avait peur de rien et gérait excellemment bien ses équipes, il partit aussitôt rejoindre sa nouvelle école emmenant avec lui mon premier amour.
Le 10 mai 2013, en mission à Tahiti, admirant l’éclipse lunaire, mon Supérieur m’appela pour m’informer qu’une équipe m’attendait à Castres. Une révolution était en marche en Égypte, et les ressortissants français, dont un orphelinat dans une région du sud, souhaitaient être rapatriés en France, car ils avaient peur d’être la cible d’attentat puisque la directrice de l’établissement, française, s’était mariée avec un proche du gouvernement. Une fois sur place, notre camp n’était pas des plus confortables, mais au moins nous étions positionnés sur un endroit stratégique. Une partie des militaires avait pour mission d’aller récupérer les ressortissants de la région nord du pays, et nous étions en charge de la région sud avec le sauvetage de l’orphelinat.
Dans la nuit du 3 juillet 2013, le parti adverse ordonna l’arrestation du Président et le destitua, s’ensuivit de nombreux coups d’État. Le temps se hâtait d’aller récupérer les enfants.
Au milieu du désert, à bord du camion, j’étais bien loin de mes logiciels de paie ou bons de prise en charge. Mon Officier m’avait clairement dit :
« Soit vous prenez le risque soit vous ne risquez rien. Dans ce cas, demandez-vous pourquoi vous êtes devenue militaire Lieutenant JUPIN ? »
Ses paroles me touchèrent plus que celles du groupe Coldplay que j’écoutais en boucle. Il était temps pour moi de m’affirmer en tant que Sous-Officier et en tant que femme soldat.
Nous partîmes dans la nuit, éclairés par la lune, les camions escaladaient les dunes, tel un bateau en pleine tempête. Lorsque nous arrivâmes près de la cible, il régnait un calme lourd, presque étouffant. Les visages étaient fermés, les enfants entassés dans la salle qui devait très certainement leur servir de lieu de culte.
« Nous ne vous attendions plus. Quel soulagement de vous voir enfin ! Les Rebelles sont plus proches que jamais. Les villageois ont déjà pris la fuite, il ne reste que les enfants et nous. Nous devons partir aussi vite que possible. Le Président est destitué, tous les membres assimilés de près ou de loin seront exécutés. Je ne peux pas prendre le risque que mon mari et les orphelins soient pris en otages. Je n’ose imaginer ce qu’ils feront des petits. »
Nous ne restâmes que quelques heures sur place, le temps d’installer les enfants et de charger les quelques affaires nécessaires au voyage.
« L’aéroport n’est qu’à trois heures de route, si nous partons maintenant, nous y serons pour le lever du soleil. Une fois embarqués, vous ne risquerez plus rien », nous informe l’un des soldats allemands.
Le camion partit une heure après, le trajet se passait sans encombre, le calme dominait les visages sombres et les plus petits s’étaient endormis. Lorsque tout à coup, un bombardement se fit ressentir. Le calme laissa la place à la panique et aux cris. Le camion tentait difficilement de continuer sa route, jusqu’à l’assaut des rebelles, quatre voitures nous prirent en chasse.
Le groupe se scinda en trois, le premier composé des enfants, de la Directrice et de sa famille réussit à s’enfuir sous la protection de mes collègues allemands. Le second groupe se chargea de ralentir les rebelles et le troisième, le mien, tentait de les distraire. De longues minutes de tirs et de courses s’ensuivirent. Jusqu’à ce que nous atteignions un village abandonné près d’une pyramide, les villageois avaient sûrement pris la fuite par peur de subir le même sort que nous.
« Lieutenant ? Que faites-vous ? Nous devons les prendre de front ! » me lança un camarade sous les tirs ennemis.
« Non, nous sommes trop vulnérables ici, ils nous retrouveront, nous devons les prendre par surprise, ils ne sont pas si nombreux, nous pouvons les contrôler et les mettre hors d’atteinte. La mission est d’expatrier les enfants, ils ne sont pas loin de l’aéroport. Nous devons maintenir le cap et les distraire. Je refuse de mourir sans me battre, allons sur les hauteurs de la pyramide, la prise de vue nous permettra de les voir arriver et d’estimer le nombre de rebelles. »
Nous arrivâmes à la pyramide, les camarades, aussi épuisés que moi, s’installèrent prêts à faire feu. Quoi qu’il en coûte, nous ne les laisserions pas gagner le combat. Malheureusement, nous n’avions pas anticipé les camions à tir roquette jusqu’à ce qu’ils lancent un missile sur la pyramide. La dernière chose, dont je me souviens, est ma chute dans les profondeurs de la pyramide et de mon dernier souffle.
« Ha bon sang ! J’ai mal partout, alors c’est donc ça que ressemble la mort, rapide mais douloureuse ? Où suis-je ?! Les gars ?! Est-ce que quelqu’un m’entend ?! Did someone hear me ? »
Je ressens comme une drôle de sensation, comme si l’air inhalé est plus étouffant que d’habitude.
« Mais où suis-je tombée ? Pourtant la pyramide ne me semblait pas si profonde que ça, comment ai-je atterri ici ? »
La panique me prend, je tremble, je sue, j’hallucine, j’ai du mal à respirer. Je sens comme une oppression sur mes poumons, ma gorge me brûle et mes jambes me lâchent, mon cœur se serre. Mon esprit s’envole.
Je me suis longtemps imaginée mon avenir si j’avais écouté ma mère. Quelle tournure aurait pris ma vie si je n’avais pas fini vieille célibataire solitaire ? J’aurai certainement continué mes études dans les Ressources Humaines, peut-être serais-je devenue bureaucrate. J’aurai rencontré un gentilhomme 2.0, qui m’aurait profondément aimée, nous nous serions mariés au bout de quelques années, je serais maman d’un petit garçon qui s’appellerait Bastien et une petite fille nommée Charlotte. Nous habiterions dans une maison en banlieue parisienne, toute blanche à la décoration campagne chic branchée, avec de nombreuses photos de notre famille, un petit jardin pour les apéros entre amis.
Nous partirions en vacances au camping, un endroit différent chaque année car c’est mode de voyager. On réunirait la famille le dimanche pour manger le fameux poulet pomme de terre. Cette vie me tendait les bras, facile, cadrée, posée et confortable. Le mariage, la maison, les enfants, le travail, la routine de la vie. Je ne me suis jamais dit que cette vie ne me rendrait pas heureuse, mais le jour où j’ai remis ma candidature au CERFA de mon département, j’ai su que mon destin était bien plus que tout cela.
C’est comme si je sentais depuis ma naissance que j’étais appelée à autre chose qu’une vie confortable. Enfin bref, il est évident qu’à l’instant où je me perds dans mes rêves, cette décision est bien loin de mon self-control. Pour le moment, mon corps me fait souffrir, je ne le maîtrise pas, je lutte pour respirer et retrouver ma pleine conscience. Je sens que l’on me déshabille, que l’on me retourne, un coup sur le ventre, un coup sur le dos, si j’étais en capacité de bouger, je vomirais.
Mais bon sang ! Où suis-je ? Qui me touche ? Que se passe-t-il ? On me stabilise enfin lorsqu’une douleur m’irradie dans le bras. Une brûlure s’invite dans mon corps. J’ai mal. Bon sang, ce que ça démange !
Au bout de quelques minutes de souffrance, mon corps se relâche, mes poumons s’allègent, ma gorge s’aère. Je me réveille, encore étourdie par ce qu’il vient de m’arriver, puis j’ouvre les yeux. Si je n’étais pas envahie par l’euphorie et l’instinct de survie, croyez-moi, je retomberai instantanément dans les pommes.
Pincez-moi ! Mordez-moi ! Réveillez-moi. Où suis-je ? Je devrai être morte, le tir roquette, la pyramide, ma chute. Suis-je au paradis ? Suis-je devenue un ange ? Ou peut-être suis-je en enfer ? Après tout, personne n’est parfait.
De toute évidence, je suis toujours habillée de mon pantalon et de mes sous-vêtements, il ne manque que ma veste treillis, mes chaussures et mon arme, que je perçois sur une sorte de petite table en matière bois. Je reprends peu à peu l’usage de mes membres, ma bouche inclus, qui jusqu’à lors ne réagissait absolument pas aux ordres de mon cerveau, je n’ose imaginer la tête d’abruti que je dois avoir. Je n’arrive pas à décrire réellement ce qu’il m’arrive. Plusieurs paires d’yeux sont rivées sur moi, le regard ébahi, stupéfait. J’ose deviner des armes, pointées en mon sens, comme si je revivais un remake de la Guerre des Étoiles. Un bruit de porte se claque, des pas rapides et francs se rapprochent. Je fais volte-face et me retrouve nez à nez avec un individu, bien plus grand que moi, habillé d’une longue toge blanche, similaire à nos ancêtres romains. Trois bonnes têtes de plus que moi, une épaisse barbe blanche et des yeux bleus transperçant. Je perçois à la fois la vie et la mort, la bienveillance et l’animosité, et surtout de la force et de la sagesse.
Il a pris cher César.
Cet homme me fait penser à un vieux sage qui a tout vécu. Je me sens à la fois en sécurité et en danger. Il s’adresse à moi, dans une langue complètement inconnue, malgré mon parfait anglais et mon allemand bâclé, je n’arrive pas à reconnaître son langage. Il est évident qu’il ne parle pas latin, je n’ai pas entendu le mot dominus. Alors je fais ce que tout bon militaire apprend à l’école, j’écoute ses intonations, j’observe ses mouvements, sa façon de me regarder, surtout je ne le quitte pas des yeux. Puis il s’adresse à l’un de ses compères dans la pièce, qui se dirige vers une sorte d’armoire avec de drôles d’écritures familières sur le dessus, je pense que je suis dans un laboratoire, car il y a des machines assez technologiques, qui de toute évidence, n’ont pas été créées par les Américains ou les Chinois. L’homme revient quelques instants plus tard, et me tend un petit boîtier, une lumière violette s’en dégage. Il s’avance délicatement vers moi les paumes vers le haut, comme pour me rassurer. (Je ne sais pas si cela fonctionne, mais seule contre toutes ces personnes, en toute franchise, je n’en sortirai pas indem.) Il m’installe le boîtier autour du cou et de l’oreille, fait quelques réglages puis recule.
« Intelligis me ? »1
« Pardon ?! Je ne comprends pas. Qui êtes-vous ? Où suis-je ? »
« Intelligis me ? »
« Quoi Intelligis me ? Vous me parlez latin ? Qu’est-ce qu’il me veut Gandalf ? C’est comme ça que vous vous appelez ? C’est bizarre ! Bonjour Intelligis me, moi je m’appelle Violette, Ivi pour les intimes, et il est évident que je ne devrais pas être là en ce moment même, pouvez-vous me ramener en Europe, en France ? Vous connaissez la France ? C’est un petit pays, où l’on mange des croissants au beurre ou du beurre au croissant ça dépend du boulanger. »
« Non es ex nostra galaxia. Quomodo huc venisti ? »2