L’écouteur - Tome 1 - Bossé Corentin - E-Book

L’écouteur - Tome 1 E-Book

Bossé Corentin

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Beschreibung

"L’écouteur – Tome I – Les missionnaires Oriüls" se déroule dans l’Elicküm, une terre sauvage où la survie exige une vigilance absolue. Au cœur de l’intrigue, un élu des Oriüls, peuple résilient dissimulé derrière de vastes forêts, se bat contre des attaques incessantes. Tandis que les Eriens défendent leur territoire face à l’invasion des Plarins venus de l’Est, le sol se couvre de sang. Dans ce monde autrefois paisible, le retour des Ernëls de l’Ouest pourrait bien restaurer l’équilibre perdu. Les mystères et périls de l’Elicküm n’attendent que les plus audacieux pour être révélés.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Corentin Bossé, inspiré par l’univers de John Ronald Reuel Tolkien, a choisi de plonger dans l’écriture pour explorer des mondes vastes et imaginaires. Avec une approche intrigante et accessible à tous, il aspire à captiver un large public grâce à ses récits de fantaisie.

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Veröffentlichungsjahr: 2025

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Ähnliche


Couverture

Titre

Corentin Bossé

L’écouteur

Tome I

Les missionnaires Oriüls

Roman

Copyright

© Lys Bleu Éditions – Corentin Bossé

ISBN : 979-10-422-4640-2

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Oriül

Quand les Oriüls décident de passer à l’attaque, personne ne peut les arrêter ; voilà pourquoi ils ne se mélangent jamais. Le plus long chemin de leurs forêts n’atteint jamais leurs buts, raison pour laquelle s’y perdre est toujours mauvais. Construire leurs projets est une tâche difficile. Ils reflètent toujours la verdure quand ils se baladent dans la nature. Pourquoi utiliser ce que l’on a écrit quand une vingtaine de millions d’arbres et de jeunes pousses se présentent devant nous ? Les batailles qu’ils entendent ne se passent qu’au-delà de la grande forêt. Les chemins qu’ils ont suivis étaient bien dessinés ; ils se faufilent entre les fougères qui grandissent en haute branche, ressemblant à du houx la nuit, dans les plus profonds endroits.

Ce que les Oriüls ne savent pas, c’est qu’ils sont libres de se confronter à ceux qui réduisent ce monde en poussière. À force de se battre, ils écument les forêts et les plaines qui regorgent de rivières et de petits ruisseaux serpentant entre les herbes qui poussent et fleurissent constamment pour créer la vie et ainsi nourrir les animaux. Dans leurs cabanes, ils se renferment pour se réunir autour d’un bon repas sorti du jardin de chaque voisin qui a apporté de quoi planter des graines pour pouvoir manger l’année suivante. Quand ils s’attablent, ils ne parlent pas énormément. Disons qu’ils chantent ou récitent des histoires aux mille mots pour donner un but aux plus jeunes qui sont souvent en train de manger sur une table disposée à côté de celle des plus âgés. Les plats qui se présentent sur la table varient entre morceaux de viande, accompagnés de quelques fruits et légumes venant contourner les morceaux précisément découpés dans certaines formes. Certains étaient trop gras et faisaient grossir les plats, les rendant bien plus appétissants pour de jeunes sauvages. Les plus âgés dégustent des morceaux de volaille venant des chemins entourant les cabanes. Ces petits volatiles affluent continuellement et abondamment. Comment et pourquoi se reproduisent-ils si vite ? Aucun des sages Oriüls ne le sait. Ils sont là depuis l’arrivée et servent de proie depuis. Alors ils se font dévorer par les Oriüls qui restent généralement non loin de leurs cabanes. D’autres de ces créatures préfèrent aller s’aventurer dans les bois pour trouver de meilleurs gibiers.

Les traqueurs sont généralement attendus dans leurs foyers, et souvent ce n’est pas par n’importe qui. Ils sont très rapides et à la fois puissants, mais se font trop de fois avoir à cause de leur naïveté ; voilà pourquoi il y a les guides qui veillent à les garder à bonne distance pour ne pas les perdre ni les voir. Les guides sont plus lents, mais pas pour autant endormis. Prendre le temps d’écouter la forêt, voilà ce qui les aide à savoir si les batailles et la guerre se rapprochent ; ils ont une ouïe très fine et ne peuvent rater un seul son. Quand ils n’en entendent plus un seul, c’est qu’une de leurs voix s’est éteinte et qu’il n’y a plus grand-chose à craindre. Les guides s’habituent au silence et ont pris pour habitude de réfléchir à leur destinée ainsi qu’à celle de leurs peuples, qui n’est pas vraiment un peuple, mais plutôt une grande famille. En se répétant souvent, ces événements viennent à la création d’une ronde hebdomadaire que traqueurs et guides venaient à apprécier.

À force de se balader dans la forêt, les Oriüls qui osent suivre ces escapades deviennent alors des mâles imposants et apportant toujours quelque chose à manger ; ils deviennent alors les plus importants de ces sauvages. Sauvages, ainsi appelés par les sages de l’autre côté de la forêt. Voilà aussi une nouvelle raison pour laquelle les Oriüls ne se mélangent pas aux autres peuples. Ceux qui veulent se battre sont plus en retrait vers les montagnes, en train de s’entraîner constamment, essayant de gravir les plus hauts pics enneigés. Les jeunes Oriüls de ce côté du cirque naissent dans le froid des pierres qui composent la maison de leurs parents. En grandissant, ils apprennent à chasser les prédateurs, commençant par de petites créatures ressemblant à des oslos ; ils sont plus tôt et plus tard à la fois, car ces petites créatures s’énervent pour un rien et possèdent cet instinct de survie qui les a fait s’avancer et grandir avec la force de combattre la peur qu’elles pourraient offrir aux Oriüls. Une fois ces épreuves passées, les jeunes Oriüls des montagnes peuvent accéder à une étape supérieure, à savoir la conquête des bois qui se perdent dans la neige des montagnes.

Tuer un Ulsör est une chose bien facile par rapport à ce que les froides nuits des montagnes peuvent cacher. Les Oriüls qui arrivent à grimper plus haut se demandent pourquoi il n’y a pas de lapins ou de créatures faciles à chasser et donc à manger ; les plus malins répondent que les lapins n’aiment pas le froid et avancent. Que c’est la raison pour laquelle ils tuent ces Ulsörs plus jeunes. Le seul moyen de survivre dans les montagnes est de continuer à gravir ces longues pentes et de savoir tuer, car les prédateurs qui vivent dans ces endroits ont déjà chassé toutes les proies faciles qui y régnaient par milliers auparavant. Les Ulsör se retrouvent à se manger entre eux ; voilà pourquoi il ne fut pas si simple d’en abattre un, surtout pour de jeunes sauvages qui dorénavant se demandent si de plus grosses proies se permettraient de chasser les Ulsörs, car en apprenant de leurs aînés, les jeunes montraient et faisaient preuve de respect en abattant ces simples créatures.

D’un coup, l’un d’entre eux s’arrêta, ayant senti comme une sorte de bruit sourd venant de la terre. Son frère qui se trouvait à ses côtés lui dit de s’accroupir pour voir s’il n’y a pas de piège attaché entre les arbres. Un autre pencha son oreille sur l’écorce d’un arbre pour entendre les vibrations qu’émettait cette créature tout en se rapprochant. Seulement, celle-ci n’était pas assez lourde pour porter son poids jusqu’à faire trembler l’écorce des arbres. Les autres jeunes Oriüls jetèrent leurs regards tout autour des trois qui écoutaient les sons qui se rapprochaient. Pendant que ceux-ci écoutaient le bruit lourd qui résonnait sourd, les créatures affamées avaient lancé une diversion, faisant appel aux pachydermes pour couvrir leurs pas. Ce qu’entendaient les jeunes Oriüls n’était pas ce qu’ils croyaient. Alors quand la créature blanche avec de longs crocs acérés surgit de l’ombre, arrachant la tête d’un de ceux qui regardaient, les autres se retournèrent ; les trois qui écoutaient prirent peur et reculèrent en courant aussi rapidement que la foudre à travers un nuage de pleine lune. Quand ils reconquirent la sérénité, ils se rendirent compte que deux Ulsörs les observaient dans l’ombre de la forêt en contrebas.

Ces Ulsörs paraissaient bien trop énormes. Les quatre yeux se rapprochaient et, en s’approchant, ils grossirent tellement au point de se confondre avec les étoiles. Les trois qui écoutaient furent surpris et prirent peur une seconde fois, mais cette fois-là, ils ne prirent pas la fuite ; ils dégainèrent des lames fabriquées par leurs ancêtres. Elles sont aussi claires que du cristal et aussi solides qu’un diamant sorti d’un des volcans qui pullulent de l’autre côté des montagnes de l’Est. Les deux Ulsörs qui se sont révélés être des Zack, cachés depuis bien trop longtemps, se répètent encore des victimes qu’ils ont faites par le passé. Les Zacks ont entendu parler, car ils savent écouter, des créatures qui ne devraient pas être ici, mais qui sont pourtant présentes. Les deux Zack n’ont fait qu’une bouchée des premiers Oriüls ; le troisième résista en réussissant à trouver une branche morte qu’il raviva grâce au cristal du pommeau de sa lame. Quand il eut le temps de monter cette branche morte, les deux Zack retournèrent directement dans l’ombre.

Les autres jeunes des montagnes continuaient de lutter contre les créatures aux crocs blancs ; déjà trois d’entre eux sont morts. Au bout d’un certain temps, ils arrivèrent à l’abattre, mais ils ne festoyèrent pas en dépit des larmes qu’ils versèrent du fait de leurs frères mis à mort bêtement ; ils comprirent les mises en garde d’un fossoyeur qui les menèrent à l’erreur. En allumant un feu après avoir enterré leurs frères, ils se mirent à manger celui que l’on appelait Crocs Blancs. Celui qui écoutait fut ravi de s’asseoir auprès d’un feu ; quand il s’assit avec son bâton flamboyant, il changea la couleur du feu, le faisant passer du rouge et jaune au vert pâle et blanc, puis vint le violet qui illumina les étoiles. Pris d’une surprise, les jeunes Oriüls des montagnes œuvraient à faire éclore la richesse de la sélection naturelle.

L’écouteur dévora Crocs Blancs, L’écouteur repousseur de Zack et dévoreur de Crocs Blancs. Ils prirent donc la tête du reste de la troupe des jeunes Oriüls, les autres qui se repassaient le passage où le premier d’entre eux se fit dévorer, leurs têtes furent bien trop prises et ne purent qu’uniquement se taire. Les voici maintenant liés pour la vie, jusqu’à ce qu’ils atteignent le sommet, rien ne pourra les faire s’arrêter ou du moins au premier échec qui aurait l’autorité de venir s’imposer ici. L’écouteur dévoreur de Crocs Blanc se leva et dit à ses compères de faire de même. Ils se levèrent donc tous et se rendirent compte que le sommet était encore très loin, alors ils se mirent à suivre le vent qui faisait se soulever une neige légère qui allait et grimpait comme une petite brume le soir.

Les traces qu’ils laissaient dans l’épaisse poudreuse se retourneraient contre eux, ils sont encore trop jeunes pour avoir la prévoyance de cacher leurs traces. Même en voyant le cadavre de Crocs Blanc, L’écouteur qui survit au Zack sentait encore une fois qu’ils le suivaient, alors il se mit à courir aussi vite qu’il put, se faisant suivre par ceux qui l’observaient. Esquivant les ronces et les fougères ainsi que les branches se semant sur le passage, ils coururent aussi longtemps qu’ils le purent, pour voir si ce qui les poursuivait aurait l’audace de les rattraper sous la lumière de la lune. Les Zack sont encore loin d’entrer en Lumière, L’écouteur les sent, mais ne pourra pas les voir arriver s’ils passent à l’acte. Les jeunes Oriül des montagnes s’arrêtèrent en plein milieu d’une plaine enneigée, à découvert total pour rester dans la lumière et éviter l’ombre qu’entraînent les Zack.

Ils se retrouvèrent maintenant encerclés au milieu de cette nuit de pleine lune aussi froide qu’un cadavre gelé. Les deux Zack ont été rejoints par trois autres encore plus gros, les pauvres jeunes Oriül ne vont pas tenir deux minutes face à cinq Zack déchaînés et affamés. L’écouteur les sent s’approcher, ceux qui l’observent regardent les bois et scrutent l’horizon pour voir s’il n’y a pas d’autres créatures qui pourraient surgir par surprise. D’un coup, l’un d’eux hurla pour se faire entendre, car il semblait avoir vu et entendu une corne de l’un de leurs frères plus âgés dépasser l’ombre de l’horizon. C’est là qu’une centaine d’Oriül des montagnes dévalèrent la pente en courant et en hurlant si fort qu’ils déclenchèrent une avalanche. Les Zack qui étaient cachés dans l’ombre des bois furent obligés de se dévoiler à la lumière pour leur faire face.

Quand les jeunes Oriüls, pétrifiés par la peur, virent la taille de ces monstres, ils ne purent faire autre chose que les admirer. Les yeux de ces choses rougeoyaient d’une lumière vive, reflétant les flammes qu’ils virent en grandissant dans leurs contrées. Elles faisaient quatre fois la taille des jeunes Oriüls de haut pour les trois plus récents, deux fois pour les premiers qui ont déjà fui par la gauche pour prendre, en essayant d’être le plus discrets possible, à revers en montant plus haut encore dans les montagnes.

L’écouteur le sentit et se retourna pour grimper sur l’étendue de roche qui dépassait au-dessus de la plaine. Ils avaient la lune qui illuminait son dos quand il se releva mettant son bâton en avant pour créer une lumière au-dessus des observateurs pour les protéger de l’avalanche qui arrivait et lorsque la neige les atteignit, elle s’ouvrit en deux en même temps. L’écouteur, lui, arriva à sauter par-dessus et rester assis sur son bâton dans les airs. L’avalanche passa bien assez vite pour que les observateurs rejoignent L’écouteur, essayant de se regrouper pour faire face aux deux Zack qui n’ont eu le temps de les surprendre cette fois-ci.

L’écouteur ressortit l’épée qu’il cachait encore et le cristal qui reflétait les lumières des étoiles se mis à briller. Après cela, les Zack se mirent à attaquer d’un seul saut coordonné pour essayer d’écraser les jeunes Oriüls, qui ont eu la chance de se trouver à l’abri grâce au halo protecteur qu’a fait survenir L’écouteur. Les deux Zack se retrouvèrent expulsés de deux mètres en arrière. Quand les jeunes Oriüls remarquèrent cela, ils se précipitèrent pour aller planter chacun leurs épées dans le ventre de la bête pour l’abattre. L’écouteur arriva au-dessus de sa tête et lui perça les deux yeux avant de lui trancher la gorge. Le sang vint tacher la neige blanche. Le deuxième Zack sentit la colère monter en lui et se releva à une vitesse fulgurante pour charger les jeunes qui s’étaient déjà fait mutiler d’avance. La charge du Zack les fit se retourner et deux d’entre eux n’eurent le temps d’avoir peur qu’ils se firent sauvagement dévorer. Le Zack bondit une seconde fois pour éviscérer deux de plus, pendant qu’il arrachait la tête du dernier.

L’écouteur attaqua en lançant son épée de cristal qui alla se planter dans l’œil gauche du Zack qui poussa un si énorme hurlement de douleur qu’il en fit peur à tous les oiseaux de nuit qui assistaient à la scène, attendant de dévorer les cadavres qui joncheraient le sol après la bataille, les faisant s’envoler dans le ciel étoilé. Leurs trois frères qui se battaient contre la centaine d’Oriüls venus en renfort des jeunes comprirent qu’il fallait s’en retourner. Alors, ils arrêtèrent leurs massacres pour retourner chercher celui qui se battait contre cette sorte de magicien. Quand les quatre Zack se retrouvèrent ensemble, ils se mirent à courir si vite que L’écouteur n’eut le temps de rappeler sa lame restée plantée dans l’œil du plus petit, mais qui semblait être celui qui donnait les ordres ou les guidait.

Les trois Zack partis, la lune commençait à s’éteindre. Il ne restait plus que six des jeunes Oriüls qui étaient partis à plus d’une vingtaine, et trente quand ils n’étaient que des enfants. Les cinq observateurs sont à genou devant L’écouteur qui ne sait que faire et ne sait pourquoi ni comment il a obtenu cette chose qui réveilla sa nouvelle magie. En levant les yeux au ciel, il vit une étoile traverser le grand noir de la nuit. Il se dit alors qu’il n’avait pas acquis ces choses par hasard. C’est là qu’il entendit une voix résonner dans son crâne, lui disant d’aller récupérer son épée de cristal, car elle sera bien plus qu’importante quand les Zack reviendront. Ceux-ci ont trouvé logis dans une grotte un peu plus loin sur l’autre versant de la montagne. De la centaine d’Oriüls arrivés en courant, une soixantaine se sont retrouvés morts dans la neige ou dans l’énorme estomac des trois bêtes. Les quarante qui survivaient encore avaient comme chef l’un des meilleurs traqueurs des forêts. Quand il arriva à distinguer cette lumière verte qu’émettait L’écouteur, il s’empressa de faire suivre les Oriüls qui le suivaient et qui avaient su rester en vie face aux trois Zack qui les auraient tous dévorés sans aucun remords.

Arrivés au niveau de L’écouteur, ils ne virent en face d’eux qu’un étranger, pourtant il est de même racine qu’eux. Ils soulevèrent tous leurs armes en le contemplant posé sur ce rocher. Il leur dit de le suivre, car la guerre contre les Zack vient de débuter. Quand ils entendirent cela, les Oriüls des forêts hurlèrent en chœur pour prouver qu’ils étaient du même côté. L’écouteur leur dit de ne pas avoir peur du froid et de ne jamais sous-estimer le pouvoir des arbres et de la verdure. Ils se mirent à suivre le Dévoreur de Crocs Blancs, vers un chemin semé d’embûches. Ils allaient devoir faire face à la « traversée gelée », un glacier qui fend en deux la chaîne de montagnes de l’Yraniü. C’est le chemin le plus court pour atteindre l’autre versant de ces monts. Ils entamèrent donc une longue marche à travers le froid, le jour commençait à se lever, laissant place à la couleur pourpre et rose finissant sur du rouge pour sublimer un ciel mauve quittant l’effroi de la nuit.

Pour avancer, les Oriüls sont contraints d’avoir les jambes à moitié dans la neige. La progression est difficile pour ceux des forêts habitués à la fraîcheur chaude et humide du matin, le froid les aveugle et les empêche de distinguer ce qui se passe à dix mètres devant eux. Certains d’entre eux, qui sont un peu plus jeunes, se mettent à rire des flocons qui tombent sur leurs visages. Tout en avançant difficilement, ils arrivent à entendre ce qu’il se dit en avant de la troupe, qui s’allonge à quarante-six Oriüls maintenant. Le Dévoreur de Crocs Blanc mène la yül qu’ils ont créée lentement, mais par habitude les Oriüls, lors de voyages, ont le réflexe de s’aligner. Une longue queue se forme à chaque fois qu’ils arrivent à trouver un vrai leader qui aurait obtenu quelque chose de meilleur qu’un don des dieux.

Le meilleur des traqueurs des forêts semble déboussolé, mais arrive à suivre Le Dévoreur de Crocs Blanc ainsi que ses cinq fidèles observateurs qui avancent sans crainte et avec une facilité qu’il ne peut comprendre. Les six jeunes des montagnes prennent conscience qu’ils ont l’avantage sur ces sentiers dépourvus de marques ou de terre, alors ils se sentent obligés de se mettre à ralentir avant de s’arrêter complètement pour contempler la Yül qu’ils viennent désorganiser. En s’approchant du mur sur lequel ils se sont approchés déjà en grimpant une espèce de marche qui fut taillée naturellement par le vent, ils virent en contrebas une gigantesque forêt s’étendre au loin avec la citadelle d’Avaria dépassant tout au loin, elle paraît bien ridicule vue d’ici.

Les quarante-six Oriüls suivent L’écouteur et ses fidèles se demandent pourquoi ils se sont arrêtés. Les jeunes se regardent et apprennent l’un de l’autre en observant le pas de la montagne, tachés de sang : « Tuer pour survivre, pour manger et trouver une tournée », voilà les mots qu’ils se sont échangés. La montagne s’étend encore à perte de vue, les jeunes Oriüls devinent qu’il ne faut pas perdre de temps, alors ils se remirent en route vers la grotte des Zack. Le chemin n’est pas tracé puisqu’ils doivent slalomer entre les arbres et les rochers. Quand ils arrivèrent devant la grande traversée, un long glacier se tenait devant eux, arrêté sur une estrade de roche dépassant au-dessus du vide, laissant place à une vue imprenable sur ce serpent de glace. Ils se rendirent compte que le chemin qu’ils avaient pu suivre s’arrêtait là où ils se trouvent, alors ils se mirent à réfléchir pour savoir comment faire pour traverser cette mer de glace.

L’un des six jeunes proposa de descendre par la gauche, là où les rochers semblaient les moins escarpés et moins coupants. Un autre proposa de descendre par la droite, mais par ici les rochers sont certes moins nombreux et le chemin plus clair, mais la route serait bien plus longue. Le troisième voulut suivre la voie du second, car une forêt s’étend plus loin et il proposa l’idée de s’y installer pour faire du feu histoire de se reposer et de manger. Le quatrième, lui, regarda derrière et se rendit compte de la longueur de la Yül et se demanda comment passer inaperçu à travers ces plaines enneigées. Le cinquième est toujours en train de réfléchir si les traqueurs auront assez de volonté pour réussir cette traversée. Le Dévoreur de Crocs Blanc hurla en direction de la Yül, un lent écho se répétant trois fois se fit entendre. Les quarante traqueurs s’arrêtèrent net et relevèrent la tête pour voir L’écouteur qui leur fit signe de commencer à marcher vers la droite pour atteindre la forêt en contrebas.

Les cinq jeunes observateurs le suivirent sans poser de questions, malgré un bref et discret regard du second vers la gauche avant de partir en direction de quelque chose qu’il n’avait pas choisi. Voici la Yül maintenant séparée, non loin de se regrouper dans la forêt, une Yül qui se détache est peut-être l’une des choses les plus dangereuses qui existent sur ce monde. Un Oriül ne parle pas, il hurle ; un Oriül ne boit pas, il chasse et se repaît du sang de ses victimes. Quand une Yül se détache, chacun de ses membres se remet à chasser, prêt à attaquer ses propres frères si la nourriture se fait rare. Voilà maintenant les deux clans éclatés, ils se retrouvent tous en contrebas vers la forêt. Ils se rendirent compte que le noir et l’ombre les recouvraient, le soleil planait pourtant au-dessus d’eux ; la forêt elle-même semblait ne pas vouloir recevoir la lumière. En remarquant ceci, certains des traqueurs commencèrent à se regrouper comme une habitude qu’ils auraient trouvée en faisant leur ronde dans les bois du cirque.

Voilà maintenant une vingtaine d’Oriüls regroupés en une nouvelle colonne ; ils forment ceci pour masquer leur nombre, mais ce dont ils ne se rendent pas compte, c’est qu’ils sont repérables de loin. La vingtaine d’Oriüls qui ne s’est pas regroupée reste à errer dans les bois, à travers les arbres gelés par le froid de la haute montagne. Ils se regrouperont bien plus tard ; pour l’instant, les Oriüls de la forêt sont occupés à rester concentrés sur le fait qu’ils soient épiés. Les six jeunes, eux, sont devant et s’approchent d’un endroit où les arbres semblent s’écarter pour laisser apparaître un cercle où la neige est absente ; ce sera un bon endroit pour faire un feu, dit l’un des six. L’écouteur fit signe au chef des traqueurs qu’ils s’arrêteront ici pour manger et se reposer. Le chef des traqueurs ordonna à ses frères de commencer à découper du bois et à ramasser le plus de brindilles qu’ils trouveraient. Les trente-neuf Oriüls se mirent à sortir des haches et à ranger les hachettes qui leur servaient d’armes. Dans une musique rythmée comme les battements d’un cœur, ils se mirent à faire sonner leurs haches contre l’écorce des arbres gelés.

Certains commençaient à se demander pourquoi ils faisaient cela, car ils savaient pertinemment que les bûches ne brûleraient pas. Les autres entendirent les ragots qui se rapportaient et commencèrent à se rapprocher de la Yül déjà formée. Puisque les arbres ne sont pas coupés entièrement, ils resteront en vie. Le feu ne s’allumera pas sans combustible, voilà pourquoi l’un des Oriüls osa demander à L’écouteur s’il ne pouvait pas user de sa magie. Le Dévoreur de Crocs Blanc ne put admettre qu’il y arriverait sûrement, mais lorsqu’il voulut allumer la flamme, une lumière verte et chaude sortit du milieu du cercle, des rochers semblables à des menhirs apparurent du sol.

Les observateurs ainsi que les traqueurs restèrent là, ébahis par la beauté que cet événement a engendrée : une sorte de fleur entourée de ses racines, une sorte de perle verte luisant en son centre, quelques autres bulles de chaleur illuminaient le bas de ce foyer qui engendrait une lumière assez forte pour illuminer jusqu’en dehors du cercle que formaient maintenant les quarante-cinq Oriüls. Les racines qui sont sorties après se mirent à onduler le long du sol pour venir former des bancs ; ainsi les Oriüls pourront s’asseoir pour discuter et se réchauffer dans ces lieux froids. Ceux qui étaient encore en train de couper du bois dans le noir de cette forêt commencèrent à se rapprocher.

L’écouteur Dévoreur de Crocs Blanc prit la parole et dit :

« J’ai grandi dans ces montagnes, je les connais comme ma poche, mes frères qui me suivent vous en diront autant, mais ce qui suit m’est complètement inconnu. »

Le chef des traqueurs des montagnes, sur ces mots qui n’avaient guère de but, se leva à son tour pour dire :

« Écoutez tous, je ne connais pas cet Oriül, ce que je peux vous dire c’est qu’il est de même sang que nous, celui de la mère et de la terre. »

Tous se levèrent et dans un mimétisme presque parfait, s’agenouillèrent, le son de leurs lourds genoux résonna contre le sol faisant tomber les dernières feuilles de l’automne, Omiion en langue des sages et en langue Oriül. L’un des quarante traqueurs se releva et haussa la voix pour ses frères et dit en langue Oriül :

« … »

Et dans un nouveau bruit qui fit s’envoler les oiseaux et les petites créatures qui restaient à épier, ils firent trembler l’écho jusqu’à ce qu’il s’entende durant assez de temps pour parvenir un retour des Zack, à ce moment-là L’écouteur regarda le ciel qui commençait à s’éteindre, les étoiles n’étaient pas encore levées, alors il se demanda bien pourquoi cette magie lui était apparue si ce n’est que pour savoir quand un écho répond présent, comment faire pour savoir si la présence n’est pas assez élevée pour ceux qui l’ont suivi. Ils bâtirent une sorte de cabane pour pouvoir s’abriter, à partir du bois qu’ils avaient coupé auparavant. Ceux qui voulurent s’apprêter ou se remettre au goût du jour commencèrent à se couvrir de plus en plus, car le froid qui régnait était très rude. Ils eurent la chance de savoir ce que le bien pouvait permettre de mettre dans les gencives du mal. Pour remettre les choses en ordre, certains Oriüls ne voulaient pas de cette magie. Alors ils construisirent eux-mêmes des tabourets de rondins. Ils arrivèrent après le discours de L’écouteur et se demandèrent pourquoi ils étaient tous en train de hurler. Ils n’arrivaient pas à comprendre pourquoi un certain Oriül plus qu’un autre aurait le droit d’agir sur la terre. Ils commencèrent à vouloir se soulever pour contrer le soi-disant mensonge que leurs offres apparurent si facilement entre les mains d’un Oriül qui n’avait jamais connu la forêt. Ce genre de propos s’entendit jusqu’aux oreilles des Oriüls plus âgés qui hurlaient plus faiblement, alors ces anciens personnages se retournèrent et expliquèrent à ces mutins qu’il ne s’agissait pas de sens, mais de destin. D’après eux, une vieille prophétie récitait l’histoire d’un Oriül qui aurait la destinée d’aller combattre les ravageurs du monde de l’autre côté de la forêt. Sur ces mots, les renégats qui étaient bien jeunes comprirent qu’ils n’étaient qu’en fait trop naïfs pour se croire eux-mêmes. Alors ils regardèrent une nouvelle fois L’écouteur pour s’imprégner de son charisme sortant droit du fond des montagnes, et ils songèrent aux histoires contant les péripéties des peuples des montagnes. En se rappelant de ce qu’ils purent, ils respectèrent sa parole et continuèrent d’écouter ce qu’il avait à dire.

« Écrire l’histoire ne se résume pas à des actes de barbarie, même si nous aimons chasser tout ce qui peut bouger et que nos ancêtres étaient des cannibales. »

Voilà ce qu’a dit le Dévoreur de Crocs Blancs. Les quarante-six Oriüls étaient regroupés autour de cette création de L’écouteur qui lui-même ne savait pas comment il avait réalisé cela, juste en agitant son bâton en pensant à faire apparaître un feu de camp, bêtement et simplement, seulement le bâton qui n’était qu’une branche auparavant se mit à dépérir entre ses mains et finit par disparaître complètement.L’écouteur se retrouva sans aucune défense puisque son épée était plantée dans l’œil du Zack avec lequel il s’était battu. Il alla donc seul dans la forêt en quête d’une plus grosse branche de bois, celle-ci étant en tout point trop solide pour être brisée par une épée, fendue par une hache ou même écrasée par un marteau. Il en trouva une qui lui semblait assez longue et assez solide pour à la fois contenir sa nouvelle magie et lui permettre de se défendre face aux attaques physiques. Il l’arracha de l’arbre et retourna en compagnie de ses frères, emprunta une épée, et tailla un bâton élégant grâce à la branche. Une fois le bâton taillé, L’écouteur s’agenouilla et se concentra pour écouter la voix qui lui parlait depuis la découverte de cette magie. D’après ce qu’il entendit, la voix le guiderait vers la grotte où étaient cachés les Zacks. Puis, en se relevant, son bâton se mit à luire en son milieu ainsi qu’à son sommet. Après cela, il reprit la parole et dit à ses quarante-cinq frères :

« Nous reprendrons la route demain matin, finissez vos cabanes et mangez, dormez autant que vous voulez, dix d’entre vous tourneront par équipe de cinq pour surveiller les alentours. » Les Oriüls qui n’étaient pas en accord avec la magie de L’écouteur vinrent à lui et demandèrent :

— Comment est-ce possible de faire ce que tu fais ?

— Moi-même je n’en sais rien. Quand je me battais face au premier Zack, une voix m’est apparue et c’est à partir de là que j’ai pu réaliser des choses surprenantes.

— Comment se fait-il que ce soit un aussi jeune Oriül qui ait pu être choisi ?

— La tournée ne fait que se mouvoir, alors pourquoi la mère et la terre m’ont choisi, ça je n’en sais rien.

— Nous croyions que tu n’étais qu’un menteur et que ce n’était pas de toi que survenait cette magie.

— Au début je ne pensais faire surgir qu’un simple feu de bois, mais quand ce nœud de lumière est apparu, j’ai vite compris qu’il ne s’agissait pas d’une simple magie. Ma mémoire se souvient des récits des anciens qui contaient les histoires dans les huttes, et ils nous parlaient d’un pouvoir qui était le fluide de la vie, la mère et la terre eux-mêmes en dépendent, le nom m’est impossible à récupérer.

— Le flux continuel ! répondirent en chœur les Oriüls des montagnes qui étaient des mutins il y a peu avant. Les mutins se retournèrent et allèrent se ranger tranquillement parmi leurs frères. Sans qu’ils ne s’en aperçoivent, L’écouteur leur donna une partie de sa magie pour rallonger leur durée de vie, il a simplement donné un brin d’espoir à de simples Oriül naïfs. Sur ces paroles, les Oriül de la forêt continuèrent de construire leurs cabanes pour pouvoir y dormir et manger, certains traqueurs expérimentés allèrent chasser des proies dans le noir de la forêt. Ils se firent prudents grâce au conseil des jeunes nés dans ces montagnes ; les proies qui rôdent par ici ne sont pas de paisibles herbivores. Les chasses des forêts sont longues et très difficiles à réaliser, mais celles des montagnes sont en plus de cela périlleuses et dangereuses.

Alors, les traqueurs eurent l’idée de ne pas prendre de torches, pour pouvoir rester invisibles et ainsi surprendre un Ulsör ou d’autres créatures comestibles. L’écouteur, lui, alla marcher pour récupérer le chemin à suivre. En s’en allant chercher ce qui se passait au loin devant pour repérer si la neige et les roches sont toujours aussi tenaces et discontinues, en prolongeant son chemin, il put s’apercevoir qu’une lumière brillait au loin. Il ne put s’empêcher d’aller plus avant. Essayer d’avoir plus d’allure dans ses déplacements le rendit allègrement moins élégant puisqu’il devait masquer ses pas. Une trace laissée dans la neige est très difficile à cacher ou à retrouver puisqu’une fois cachée, plus rien ne permet de les retrouver. Le vent balaye la poudreuse, recouvrant les traces les plus fines. L’écouteur s’en rendit compte et comprit alors qu’il ne servait à rien de les effacer. Cette nuit-là, il épia la flamme qui illuminait au loin, cherchant à savoir s’il s’agissait d’un camp ou uniquement d’une grotte qui renfermait certainement des trésors, que ce soit des parchemins ou des pièces d’or ; une autre monnaie que l’or existerait au-delà de la forêt, là où les batailles du monde se déroulent. Les Oriüls n’ont pas réellement de monnaie ; entre eux, ils préfèrent pencher pour le troc, cela évite les querelles inutiles. Le Dévoreur de Crocs Blancs avança encore prudemment jusqu’à atteindre un rocher assez élevé pour qu’il puisse avoir un large point de vue. L’écouteur arriva à percevoir les lumières qui semblaient marquer le début d’une grotte ; l’entrée de celle-ci est ornée de sculptures. Les Zack sont certainement entrés ici. Il déduisit cela grâce aux énormes marques qu’ils avaient laissées sur le sol, ainsi qu’au sang laissé par terre à cause de son épée, qui devait être encore plantée dans l’œil de celui qui semblait être le guide de ces créatures tout droit sorties du Néant. En s’apercevant de tout cela, il retourna dans la forêt en contrebas pour donner et partager ce qu’il avait appris à ses frères qui étaient tous restés aux camps qu’ils avaient fabriqués.

En arrivant au milieu du cercle, il put se rendre compte que tout le monde s’était endormi ; alors il laissa la nuit défiler pour prétendre avoir découvert l’entrée de la grotte où les Zacks avaient laissé leurs empreintes pour y trouver logis. Pendant que la nuit défilait, L’écouteur regardait ses frères dormir ; même les fidèles n’avaient pu survivre face à ce qu’il avait accompli. Il leva les yeux au ciel et se demanda si certains allaient encore mourir. Le voilà reparti sur des suspicions qui le persécutent depuis qu’il s’est développé à cause ou grâce à cette magie qui l’a soudainement fait se sentir autrement ; il en réalisa les conséquences bien trop tard, puisque les étoiles s’en allaient déjà se fondre dans le ciel sombre de la nuit. Que vont dire ses frères lorsqu’ils se réveilleront le voyant encore debout à l’aube ? Pour l’instant, il profite de l’air que peut lui apporter le vent. Ce vent frais venant du Nord le fit se surprendre puisqu’il ne sait plus comment cette magie peut créer. Comme si à chaque fois qu’il l’utilisait, il perdait sa mémoire sur le court terme. Ce qu’il fit en tout premier lieu, se donner la foi pour avancer encore plus avant face à l’ennemi ; ces créatures possédaient une aura bien trop immense pour réussir à la garder inerte. L’écouteur sent ce genre de chose, ce qui complique sa vision vient en fait de son flair qui se fait rare à cause ou dû à la hauteur à laquelle il se trouve ; l’altitude lui fait vivre des choses auxquelles il n’aurait jamais pensé. Quand il ouvre les yeux, la beauté qu’il perçoit au loin, rien ne pourrait embellir mieux que la vision de celui qui est arrivé ici sans rien demander. Qui pourrait contredire les dires de celui qui ne s’éveille jamais ? C’est le choix de ceux que l’on ne voit pas ; ils ne peuvent se permettre de venir s’installer ici.

Le Dévoreur de Crocs Blancs se remit en route vers ce qu’il pouvait apercevoir. Au premier regard, il vit ce qui semblait être quelque chose de bien attrayant pour vouloir s’y introduire. Il se demanda comment faire pour voir plus loin qu’uniquement à dix mètres devant lui. Ce qu’il réussit à enjamber, personne ne le sait, mais il s’agirait d’un ancien mur des premières civilisations qui ont eu l’instinct de venir s’écrire bien avant que la neige ne recouvre ces hauteurs. L’écouteur se releva plusieurs fois avant de se rendre compte qu’il y avait une chose cachée derrière les écrits des portes qu’il avait cru apercevoir. Les torches qu’il vit sur cette colline l’avaient non seulement aveuglé, mais aussi ébloui, lui révélant ainsi les écrits des premières apparitions des innommables. En revenant sur ses pas, il put s’apercevoir que la forêt ne faisait que rapetisser. En revenant une nouvelle fois vers le camp où ses frères dormaient, il n’était pas encore l’aube quand il vit ses fidèles se réveiller ; les observateurs se mirent à l’amadouer et à le louer du regard. Il sentit cela et leva les yeux au ciel, qui était inexistant puisque, en y regardant de plus près, l’égalité des mondes ne se faisait pas ressentir ; peut-être est-ce pour cela que les Zacks sont arrivés en Elicküm. Les Oriüls sont bien trop arriérés pour pouvoir savoir ce qui se passe derrière les guerres se déroulant de l’autre côté de la forêt et surpassant la chaîne de montagnes qui forme et protège le cirque où ils ont bâti leurs cabanes. Peureux ou timides, ce n’est pas dans leur genre ; disons qu’ils préfèrent rester discrets face à la diversité. Restant cachés au fond du cirque, ils préfèrent rester terrés le long des montagnes plutôt que d’aller plus avant. Ce ne sont pas des lâches ; bien au contraire, ils sont les premiers à vouloir découvrir la nouveauté. Cependant, ils ne veulent pas propager la guerre, ils veulent l’éviter, ils ne font que cela. En ce moment même, les quarante Oriüls dorment, pendant que L’écouteur ainsi que ses fidèles observateurs se préparent pour aller explorer l’autre côté, là où les arbres se comptent par centaines. La forêt dans laquelle ils se trouvent s’étend bien plus loin qu’ils ne le pensaient. L’aube embellit les fougères et les vivaces qui arrivent à subsister malgré le froid et la neige. L’écorce des arbres brille au soleil qui s’éclaircit à travers la brume. Les rayons de lumière qui arrivent à percer les pauvres feuilles qui résistent encore se font plutôt rares, car les branches et les brindilles remplacent le feuillage vert qui arrive à s’étoffer lors du printemps.

À ce moment, l’un des observateurs se mit à se rendre compte qu’il ne fallait plus avancer en direction de l’espoir, puisqu’il aperçut une étrange lumière au loin. Il s’arrêta et commença doucement à tendre l’oreille pour savoir s’il entendait un son ou quelque chose d’autre. Seul le vent des branches qui se cognaient et se craquaient brusquement, certaines se cognaient si fortement qu’elles s’en brisaient, les faisant ainsi tomber dans la neige blanche, devenait bien plus sombre en recueillant les brindilles qui s’éclipsaient. L’observateur qui aperçut la lumière avança toujours plus loin jusqu’à se rendre compte qu’il s’agissait d’une torche qu’une créature bipède faisait naviguer dans le noir des bois. Malgré le soleil levant, la lumière peinait encore à éclairer son visage. La créature que l’observateur percevait ne faisait que simplement se balader comme si elle prenait ce chemin comme une habitude. Les autres, censés être leurs frères, ne se retrouvèrent qu’à la dernière minute. La créature semblait être vieille dû à son allure dendilonnante. Elle semblait savoir où aller, alors l’observateur appela ses frères ainsi que L’écouteur pour aller à la rencontre de cette vieille créature.

Les six se mirent en marche vers la torche qui scintillait au milieu de la brume. Ils slalomaient entre quelques arbres puis découvrirent un chemin enfoncé dans le sol, des talus de deux mètres de haut faisaient de ce sentier un endroit chaud, un endroit parfait pour marcher vite. Les six voulurent y descendre, mais ils ne purent y arriver. Alors, ils restèrent sur leurs côtés du chemin, longeant tout en ne perdant pas de vue la créature qui, elle, semblait ne pas avoir réussi à y descendre non plus. La torche qu’elle possédait commençait à s’affaiblir, mais juste avant qu’elle ne s’éteigne, la créature lança une petite poignée d’une sorte de poudre faisant s’enflammer l’espèce de paille chiffonnée qui lui servait de combustible. Les six Oriül étaient en retard par rapport à elle et se demandaient même comment elle faisait pour marcher aussi vite.

L’observateur qui l’aperçut en premier possédait une légère avance sur ses confrères. Il se mit à courir alors, à ce moment-là, il perdit la torche de vue, car en courant il s’enfonçait de plus en plus. Lorsqu’il courait, il n’allait guère plus vite que celle qui le devançait. Les cinq autres n’arrivaient plus à le distinguer à travers les arbres et à moitié enterré dans la neige. Ses frères étaient presque invisibles malgré le soleil qui perçait enfin à travers les nuages bas de la matinée. Le premier observateur commença à rattraper petit à petit la créature qui entendait ses pas difficiles faisant craquer la neige. Elle prit la fuite d’un pas léger sans se faire remarquer par celui qui la suivait. Elle resta cachée derrière un arbre avant de faire un bond surprenant au-dessus du chemin pour atterrir du côté où les Oriüls se trouvaient, puis elle se recacha derrière un arbre laissant ainsi le premier observateur approcher. Lui courait encore. Quand il arriva au niveau d’où il avait perdu de vue la torche, la créature surgit d’au-dessus de lui avec un filet. Lui ne put rien faire, car il était toujours enfoncé dans la neige.

Son visage était empli de poils, ses tuyaux étaient difficiles à trouver. L’Oriül ne pouvait se débattre malgré le fait qu’il réussissait à la faire bouger pendant qu’elle le mordillait de partout. La créature poilue sortit un petit bocal et le renversa sur la tête de l’observateur qui s’endormit sur le coup. Ses frères entendirent le bruit du hurlement qu’il poussa et commencèrent à courir vers où le son était arrivé. Lorsqu’ils n’entendirent plus les sons et les cliquetis des armes de leurs frères, ils acquirent une foi déterminante les faisant se sentir plus légers. L’écouteur se servit du bâton qu’il tailla dans une branche des sombres arbres de la forêt. Une ombre verte sortit de son être et arriva au niveau de la créature poilue, la repoussant pendant que L’écouteur resta assis au-dessus de son bâton. Les cinq observateurs se mirent à courir sur la neige comme si elle n’existait plus. La créature se défendait face à la réflexion de L’écouteur qui la retenait pendant que son frère dormait sous son filet.

Quand les cinq frères arrivèrent sur place, L’écouteur vit à travers les yeux de son être et put le rappeler. La créature prit peur encore une fois et grimpa dans l’arbre le plus proche. Elle resta perchée sur sa branche, le soleil l’éclairant un peu plus, encapuchonnée et vêtue d’une robe et d’une cape ficelée grâce à une corde. Les rayons clairs du soleil mettaient son corps en avant en cachant son lasso. Les Oriül ne l’ont pas lâchée du regard et continuèrent de l’observer en se demandant comment elle avait fait pour grimper aussi vite là-haut. L’écouteur descendit de son bâton pendant que son être disparaissait dans le ciel éclairci par le soleil. Quand L’écouteur arriva sur place, il vit cette petite chose vouloir s’échapper, mais en arrivant, il attrapa le lacet de cette créature grâce à son bâton qui le fit venir à ses pieds.

La créature le regarda, descendit de sa branche pour venir voir celui qui fait léviter les objets, de démarche cassée, pliée à moitié sur quatre pattes. Elle vint au pied de L’écouteur et lui tendit un autre bocal. Celui-ci était rond, recouvert d’une sorte de tissu pour éviter qu’il ne se renverse lors de ses escapades. La créature poilue désigna du doigt le frère de L’écouteur comme s’il voulait qu’il lance le contenu du bocal sur celui qui lui avait fait peur. L’écouteur s’avança discrètement et doucement par peur que cette chose l’ait transformé en créature des siens. Alors, il prit le bocal, l’ouvrit, en saisit une poignée et la lança sur son frère. Celui-ci essayait de se défaire des mailles du filet.

Ses quatre frères l’aidèrent, venant à secourir leur frère. Ils se rendirent compte que trois suffisaient pour l’aider. Le dernier se retourna pour attraper la créature et réussit à l’attraper par les poils du cou pour s’apercevoir qu’il ne valait pas la peine d’être mis à terre. Alors, il la lâcha et recula, lui montrant ses crocs pour lui dire de se méfier. La créature comprit qu’une seule erreur avec eux et la mort accompagnée de misère la frapperaient. L’écouteur prit la parole pour détendre les trois autres qui n’arrivaient pas à défaire le filet de cette chose qui avait réussi à les duper. Elle sortit un petit crochet de son espèce de trousse. En l’actionnant, cet objet s’allongea pour devenir quelque chose de tranchant, mais à la fois forgé de manière à ce qu’une croix ne pourrait tenir. Elle s’approcha sans peur des quatre Oriül qui la laissèrent donc faire. La suite fut bien plus rapide qu’ils ne l’espéraient, alors les trois frères se regardèrent pour évidemment laisser le quatrième sortir du filet.

Quand leur frère s’en libéra, les quatre autres se mirent à s’enfoncer dans la neige. L’écouteur resta là, mais commença à changer de couleur. Il devint vert-noir foncé pourtant éclairé par le soleil qui grandissait à midi. Ils se retrouvaient éclairés par le haut, le jaune de la cape de la créature poilue se faisant refléter par les rayons du soleil. Elle regrimpa sur une des branches, puis une autre, et encore une autre pour atteindre la clarté. Elle poussa un cri que les six entendirent. Ils se mirent donc à la suivre en continuant à marcher dans la neige. Lorsque la créature se rendit compte qu’ils ne pouvaient grimper aux arbres, elle descendit de là où elle était perchée. Elle esquiva les branches arrivant au niveau des six qui avaient du mal à marcher dans la neige. Elle ramassa quelques feuilles au passage. Elle en ferait certainement un médicament pour sauver sa vie.

En arrivant sur la neige, elle ne fit aucun bruit et ne laissa qu’une seule trace définie par un carré grâce à ses quatre pattes. Elle vit les Oriül dans la misère alors elle fit signe d’aller vers la droite. Un passage était certainement présent d’après ce que L’écouteur pensait. Alors elle se mit à montrer la voie, les six la suivirent sans aucun mot, dans le froid et la neige malgré le soleil à son zénith. Même lui n’arrivait pas à réchauffer les quarante-six Oriül qui dormaient encore jusque-là. Ils se réveillèrent un peu plus tôt, voyant la cabane de L’écoute vide ainsi que celle de ses fidèles, ils se mirent à croire à l’abandon. Le chef des traqueurs vit des traces de pas allant vers l’Est et, en se retournant, il vit d’autres pas aller vers l’Ouest. Alors, il comprit que L’écouteur n’était pas loin.

Les saisons se passent de l’autre côté de la forêt, pendant que les Oriüls recherchent encore à savoir si la neige va les abattre, le cirque duquel ils viennent se fait bien distant dorénavant. Leurs cabanes leur manquent, certains qui avaient déjà l’esprit à se rebeller se mirent à se demander pourquoi ils ont suivi cette chose qui les a laissés pendant la nuit et qui ne donne plus aucune nouvelle. Qu’est-il advenu de celui dont on ne prononce plus le surnom ? Les traqueurs se sont fait rejoindre par deux fidèles de celui-ci quand ils voulurent aller voir si L’écouteur, d’après ce qu’ils s’en rappellent, avait récupéré sa lame dans l’œil du Zack, qui était accompagné de deux d’entre eux. Depuis ce temps, L’écouteur devint de plus en plus sombre, et ceci même le jour. Les deux qui ont rejoint les traqueurs ont pris peur de lui et ont donc décidé de ne plus vouloir le suivre.

Quand ils retrouvèrent ceux qui sont censés être leurs frères, ils virent qu’ils ont bâti une sorte de cabane dominante au-dessus des pierres qu’ils ont entassées pour délimiter une petite forme de croissant leur permettant ainsi de veiller à qui venait à leurs points faibles. Ils ont bâti de quoi forger des armes, aucune lime de fer ne se faisait entendre, seulement de belles lames polies par de magnifiques traditions de leurs parentés. Les plus anciens des quarante-six Oriüls savent manier le sol à coups de pioche jusqu’à atteindre une sorte de pierre qui prend une couleur noire teintée de bleu. Seuls les anciens savent manier la lime comme il faut pour arriver à fabriquer des haches assez solides pour ne pas être rayées de la carte. Pour ne pas être cassées au premier choc, ils appliquent une sorte de crème sortie de graine qu’ils prirent sur la première route avant de partir.

Les haches qu’ils fabriquèrent en premier servirent à couper les arbres du coin. En faisant ceci, une impression de vol leur est venue à l’esprit, comme si, à chaque fois qu’ils coupaient un arbre, des cris de douleur se faisaient entendre. Les quarante-six Oriüls ont tout de même continué, malgré le fait qu’ils devenaient de plus en plus fous sans qu’ils ne s’en rendent compte. Lorsqu’ils eurent fini de construire cette forteresse, ils entassèrent les pierres des murs qui restaient. Elles serviront à faire des tabourets et des tables. Les menuisiers, les architectes et les forgerons se sont déjà installés. Ils commencent à battre la pierre et à affûter les outils qu’ils ont emmenés, ces outils qui les affaiblissent au combat.

Voilà pourquoi la plupart de ces travailleurs manuels sont des montagnes de muscles. Ils sont souvent très grands et très larges. Ceux qui ont été volontaires pour accompagner le chef des traqueurs sont des travailleurs expérimentés. Ils sont âgés, leurs fils tiennent les forges, les cabanes d’architecte et pour tout ce qui est charpente, menuiserie et maçonnerie. Les trois fils du menuisier le remplacent avec labeur, car leur père savait gérer ces trois corps de métier à lui seul. Dans les plaines du cirque où ils se trouvent, tout est calme, même si les haches sont forgées et façonnées moins rapidement. Les arbres repoussent aux pieds des montagnes. Les Oriüls recoupent plus vite que la nature ne repousse. L’écouteur et ses fidèles qui sont restés avec lui sont perdus à jamais dans les vastes endroits de ce monde.

La complexité de la chose est que les Zack sont toujours en vie. Dans leurs grottes, qui sont en fait une caverne, ils se pensent en sécurité. Ils n’ont pas bougé, ou du moins les Oriüls ne les ont pas vus sortir. Il s’agit là d’une question à laquelle il leur faut répondre. Le chef des Traqueurs prit donc l’initiative pour aller à la rencontre de ces créatures des ténèbres. Des volontaires ? demanda-t-il. Seule une dizaine de jeunes Oriüls ont crié pour le suivre. La loyauté de ceux-ci ne sera pas oubliée. Il en choisit cinq de plus pour former une yül de seize frères.

Dans un petit matin de brumes, où le soleil ne perçait pas à travers les nuages, la yül entama une marche glaçante vers la caverne des Zack, le chef gardant à l’esprit qu’il est possible que l’épée de L’écouteur soit encore dans l’œil de l’un d’entre eux. Ils avancent petit à petit. En sortant de la forêt, le vent qu’ils sentirent venir de l’Ouest leur gelait les os. Certains en tombèrent presque de douleur, tellement le froid était mordant, mais ils continuèrent tout de même à progresser le long de la crête rocheuse qui laissait une vue imprenable sur la vallée. Un lac et des chutes d’eau se mélangent avec le blanc et le bleu turquoise de la glace.

Les conifères poussent à quelques endroits, formant de petits chapiteaux blancs embellissant la couche réfléchissante et brillante d’une neige aussi lisse qu’une lame polie par l’un des maîtres forgerons qui se terre dans le cirque duquel viennent ces Oriüls. Certains membres de la yül, ayant froid, s’arrêtèrent pour observer la vallée. Ils ne discernèrent que le lac avec les quelques reflets des infimes rayons de soleil qui arrivaient à percer à travers l’épaisse couche de nuages. Le chef des traqueurs, voyant ces tirailleurs perdre du temps, s’arrêta et alla les chercher en leur hurlant qu’il ne fallait pas s’arrêter. L’un d’entre eux reçut même un coup derrière le crâne pour comprendre que cet endroit est dangereux.

La yül repart enfin. La voilà arrivée au sommet de cette première pente en regardant au loin. Le chef de celle-ci arrive à voir le col auquel les Zack ont trouvé refuge. Disons plutôt qu’il en déduit cette réponse par les traces que L’écouteur a laissées en y allant. Bien que la poudreuse recouvre les traces de pas de chaque créature qui marche dedans, celle que L’écouteur possède comme une aura que lui seul décide de laisser paraître à celui ou celle qu’Il veut. Voilà pourquoi le chef des traqueurs arrive à récupérer les traces de L’écouteur, de par ses qualités de pisteur, mais aussi grâce à son flair qui est tellement développé qu’il en arrive à faire un sonar dans son esprit lorsqu’il ferme les yeux.

Ils pourraient marcher tout en ayant les yeux bandés ou si le combat les rendait aveugles. Ce chef des traqueurs est un Oriül très respecté pour ses prouesses au combat, mais aussi grâce à sa manière de penser. Ils ne cherchent jamais à déclencher le chaos, mais quand celui-ci se déclare, il est l’un des premiers à vouloir y mettre un terme. Il s’agit -là d’une des vieilles racines Oriül des bois, qui ont une résistance au temps supérieure à la normalité de leurs confrères. Cette catégorie peut aussi aisément devenir très cruelle quand il s’agit d’histoire sur le lien du sang. Certains de cette souche des bois ont même développé des capacités hors norme pour survivre lors des rudes hivers dans les basses vallées où les bois et les forêts sont plus sombres.

Ce ne sont pas le genre à reculer devant une tempête. Ils préfèrent se battre plutôt que de se laisser diriger et deviennent cannibales s’ils se sentent trahis. Si la loyauté existe quelque part, c’est chez ces créatures qu’elle est née. Du sommet de cette pente enneigée, le chef de la yül prit la décision de partir en courant, d’une part pour se réchauffer, d’autre part pour arriver plus vite. Malgré le fait d’une neige si fine qu’elle en arrive à mi-cuisse, les Oriüls arrivent tout de même à courir, certains moins vite que d’autres, mais la yül reste bien homogène et droite.

Rien ne les gêne dans leur progression et rien ne les gênera jusqu’à ce qu’ils arrivent là où les Zack se terrent. Le vent dans les vêtements, la neige dans les yeux et le froid gelant leur peau, les Oriüls peinent à discerner la distance qu’il leur reste à parcourir. Leurs tissus deviennent aussi durs que de la pierre à cause du gel, les faisant encore ralentir. Combien d’entre eux sont en train de prier pour ne pas mourir de froid, le chef des traqueurs lui-même doute sur la réussite de cette aventure. Dans son esprit, le froid n’était pas aussi fort que cela et le vent était absent, mais c’est seulement une fois sorti de la forêt dans laquelle ils avaient trouvé refuge qu’il comprit qu’il ne s’agissait peut-être pas d’une bonne idée.

Seulement, le destin a voulu qu’il ne renonce pas, et maintenant le voilà, lui et ses quinze frères, perdus dans le blizzard, car une tempête de glace est en train de s’abattre sur eux. Les seize Oriüls sont en très mauvaise posture, car toutes les choses servant d’abri sont bien trop éloignées d’eux dorénavant. Heureusement, l’un d’entre eux eut l’idée de génie, celle de vouloir creuser un trou dans la neige pour au moins se protéger du vent. Le chef des traqueurs est à bout de force, mais arrive à trouver l’énergie restante pour ordonner à ses frères de sortir leurs pelles pour creuser.

Seul huit d’entre eux ont eu le courage de commencer à creuser. Le chef de la yül leur dit de creuser un passage vers le bas en pente douce pour pouvoir faire une salle sous une épaisse couche de neige, car grâce à cela ni le vent ni la gelée ne viendront les tuer à petit feu. Les Oriüls qui creusent ont du mal à continuer ; le manche de leurs pelles est comme une stalactite, impossible de le tenir sans qu’il ne glisse. De plus, le froid gèle leurs gros doigts sur le manche, les faisant ainsi se coller à celui-ci.

Les Oriüls qui ont commencé à creuser ne peuvent s’arrêter sous peine de se voir mourir d’hypothermie. Pendant une heure, ils creusèrent dans la neige pour enfin réussir à avoir une sorte de sphère, assez large pour pouvoir faire entrer seize Oriüls. D’ailleurs, les Oriüls qui attendaient dehors n’arrivaient plus à bouger. Heureusement que le chef eut l’intelligence de leur dire de rester collés au maximum pour garder la chaleur. Quand ils virent leurs frères sortir de l’entrée, ils se mirent tous à ressentir un bonheur intense. Au lieu de se dire que la mort est proche, ils peuvent à présent avoir une chance de survie.

Ils se levèrent donc tous avec une certaine difficulté ; leurs tissus étaient collés à leur peau, et leurs armes étaient plus froides encore qu’un corps dépourvu de vie. Quand ils furent tous entrés dans le trou creusé, ils commencèrent à se réchauffer. Certains étaient plutôt âgés et avaient pensé à apporter des bâtons de feu, des petits ustensiles créant une flamme de vingt centimètres pendant trente secondes. Un en avait pris deux, ce qui leur faisait cent cinquante secondes de feu pour tenir la tempête et faire fondre la glace de leurs longs manteaux en tissu.

Les plus jeunes pourront s’en servir un peu après les plus faibles qui n’arrivent plus à bouger un doigt. Les deux plus âgés laissèrent l’honneur de claquer le premier bâton au chef, qui le refusa en disant qu’il fallait le donner au plus faible en premier. Les Anciens activèrent cet ustensile avec difficulté puisqu’ils avaient un mal phénoménal à esquiver le froid. Leurs doigts sont remplis de crevasses, elles sont ensanglantées tellement le froid est rude ; des doigts aux poignets, les gelures figent la vivacité qu’ils cachaient quand ils ne faisaient qu’uniquement couper du bois.

Du moment qu’il a réussi à activer le bon endroit, il pourra toujours essayer de vouloir allumer le bâton, mais cette fois-ci il n’y arrivera pas. Alors le second ancien arriva à son aide pour qu’il puisse sentir le mouvement du seul doigt qui résiste encore. Il le poussa pour réveiller ses jambes et activa le bouton qui fit surgir la flamme. Ainsi, le premier ancien put survivre ; il garda la flamme pendant une trentaine de secondes puis la fit passer à celui qui se trouvait à côté. Le second ancien sortit un autre bâton de sa ceinture et l’activa aussi facilement que le premier grâce à la chaleur de l’allumage que le second lui donna.

D’un coup, tous commencèrent à se réveiller du froid ; résistants, ils ont été jusque-là, dorénavant ils recommencent à avoir le jour. Peut-être arriveront-ils à reprendre pleine connaissance de leurs êtres, mais certainement pas entièrement. Les traqueurs des forêts n’ont jamais enduré telle souffrance ; ils se trouvent dans les montagnes du Nord. Encore moins dans quel but leur chef veut poursuivre cette lutte. Quand les quinze le regardèrent, ils virent en lui l’étincelle de la victoire. Le premier ancien alluma un troisième bâton de feu pour l’envoyer au niveau des pieds du chef des traqueurs, qui le ramassa d’une main tremblante et rouge. Il le saisit avec aisance pour se réchauffer le visage et ainsi sortir la tête du trou où ils sont enneigés.

D’ailleurs, certains remarquèrent qu’il ne faisait pas fondre la glace directement ; une couche de glace se forme avant que des gouttes d’eau ne se mettent à tomber. Pendant ce temps-là, le chef jeta un coup d’œil vers le premier des anciens pour voir s’il n’était pas mort. Il vit d’un œil éclairé que tout allait bien pour lui. Alors il sortit un peu plus du trou où ils sont, essayant d’apercevoir quelque chose à travers la brume. La tempête s’était calmée apparemment ; il sortit donc avant d’avoir réchauffé ses tissus. Il avança et sentit ce léger froid qu’ils ressentaient au multiple de cent, et le laissa passer comme si rien ne se passait. Il fit demi-tour et dit à ses frères de réchauffer un dernier bâton pour se réchauffer avant de partir enfin.

Tous se mirent alors auprès de celui qui allumait cet outil. Ils purent ainsi dégeler leurs tissus sans défaire une seule parcelle de leur peau, pourtant celle-ci restera marquée à jamais, du vert qui était plus foncé et vivace que les feuilles fournies et épaisses d’une saison pluviale, devenu marron puisqu’elle fut glacée jusqu’à en devenir rouge. Le chef alla plus avant, se protégeant de la légère brume accompagnée de vent glacial persistant grâce à ce long manteau qu’ils ne possédaient que très peu auparavant, encourageant ses idées. Ils arrivèrent à grimper jusqu’au prochain sommet. Les quinze finirent de se réchauffer, et le premier ancien sortit en premier et sentit le froid du dehors comme un accueil chaleureux.