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Le Baron Yora Artorius Hawkwood est de retour à Leminkaïnen, sa planète natale. Après des années de guerres impériales au sein de la Garde Phénix de l’Empereur Alexius 1er, il revient demander à la Duchesse Catherine une chance de lever le sceau d’infamie qui pèse sur sa famille. Avec le frère Vlad et Korvan son conseiller, il s’engage sur le chemin de la rédemption et met malheureusement les pieds au cœur d’une conspiration visant à agiter la planète entière. Réussiront-ils à repousser la menace qui flotte sur l’Empire ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Passionné de science-fiction et de jeu de rôle,
Olivier Élie nous propose
L’honneur des Artorius, son premier roman basé sur l’univers de Fading Suns.
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Seitenzahl: 421
Veröffentlichungsjahr: 2023
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Olivier Élie
L’honneur des Artorius
Roman
© Lys Bleu Éditions – Olivier Élie
ISBN :979-10-377-7907-6
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce roman est basé sur l’univers de FADING SUNS, un jeu de rôle américain de science-fiction qui mêle de références au moyen âge publié par HOLISTIC DESIGN en 1996. L’histoire du monde s’inspire de l’histoire humaine, avec une anticipation du futur : l’action du jeu se déroule au sixième millénaire après J.-C.
L’histoire du roman reprend la trame de fond de l’univers du jeu mais ne suit pas celle de la campagne officielle.
L’action se passe dans la période de l’empire en 4999 après la diaspora (voyage interstellaire dans le jeu).
Avant l’Empire existait un âge d’or, appelé la république, très avancé technologiquement avant son effondrement politique. Cet âge d’or est désormais appelé Antiquité dans cet univers.
L’Empire compte maintenant 4 puissances : L’Empereur, les nobles, l’Église et la Ligue des marchands. Il est toujours menacé par les barbares, les symbiotes, les démons ainsi que l’assombrissement progressif des étoiles.
Les maisons nobles majeures sont :
Maison Impériale
Fondée à la naissance de l’Empire par Alexius 1er en demandant aux nobles sans terre et aux Maisons nobles mineures de se placer sous sa bannière, en leur offrant des terres. Il a fondé un ordre de chevalerie : les chevaliers Phénix dont Yora le héros est membre. Il s’agit de chevaliers errants qui sont chargés d’explorer la galaxie, de combattre le mal et d’aider les plus faibles à travers de la galaxie.
Malgré sa puissance, l’Empereur doit composer politiquement avec ces différentes puissances car les temps de voyages spatiaux l’empêchent d’intervenir rapidement.
Maison Hawkwood
Les membres de la maison Hawkwood sont de type anglo-saxon. Ils sont très fiers et cherchent à exceller à la fois par leur intelligence et par leur force. Ils ont un sens de l’honneur très développé. L’empereur Alexius vient de cette maison, cependant, pour des raisons politiques, il ne privilégie pas sa maison. La plupart des personnages de ce roman et la planète où se situe l’action appartiennent à cette maison.
Maison Décados
Les membres de la maison Décados sont de type russe, ou du moins s’en réclament. Pour eux, tous les moyens sont bons pour atteindre leur objectif : dominer l’univers. C’est la famille noble possédant le meilleur réseau d’espionnage. Ils jouent beaucoup sur leur apparence.
Maison Hazat
Les membres de la maison Hazat sont de type hispanique. Ils sont connus pour être de bons militaires, et ne pas savoir faire grand-chose à côté. Ils ont un sens de l’honneur basé sur le code du guerrier. Les Hazat donnent beaucoup d’importance à leur armée.
Maison Li Halan
Les membres de la maison Li Halan sont de type asiatique. Ils sont connus pour leur dévotion à l’Église Universelle. De ce fait, les serfs Li Halan sont généralement bien traités s’ils restent à leur place. Il est parfois difficile de cerner un Li Halan du fait de son haut degré de spiritualité.
Maison Al Malik
Les membres de la maison Al Maliik sont de type arabe. Ils sont connus pour leur finesse d’esprit et leur très grande intelligence. Ils parlent couramment par métaphore, ce qui rend leur discussion difficile à comprendre. On dit qu’ils parlent le langage fleuri. Les membres de cette maison sont très proches de la Ligue des marchands, ce qui fait qu’ils sont à la pointe de la technologie.
Les auriges
Les auriges conduisent les vaisseaux et ont le monopole de la technologie permettant d’utiliser les portails. Les gens cherchant à casser ce monopole se retrouvent éjectés dans l’espace sans scaphandre. Ce sont aussi les marchands des mondes connus.
Les ingénieurs
Les ingénieurs sont les spécialistes de la haute technologie. Ils passent leur temps à essayer de restaurer les anciennes technologies de la seconde république.
Les fouinards
Ils disposent du meilleur réseau d’information des mondes connus. Ce sont des récupérateurs, des magouilleurs, des malfrats et autres. Ils sont spécialisés dans l’art de gagner de l’argent avec tout et n’importe quoi.
Les recruteurs
Les recruteurs sont des mercenaires en tout genre. Ils peuvent remplir des missions de combat, résoudre des enquêtes, mener des chantiers de construction, ou tout autre travail propre à rapporter de l’argent. Ils ont aussi une solide réputation d’esclavagistes.
Les baillis
Les baillis sont les banquiers des mondes connus, ils servent aussi d’avocats et occasionnellement d’enquêteurs. Certains racontent que s’ils réclamaient le remboursement de toutes les dettes contractées, ils posséderaient tous les mondes connus.
L’humanité et l’univers
Tous les humains ne sont pas dans l’empire, de nombreuses planètes ont désormais disparu à la suite de l’effondrement des nations et certaines se sont regroupées en d’autres empires et royaumes, comme le califat kurgan et les Vuldrocks.
Ces derniers étant au centre du roman.
Il existe également des races extraterrestres comme les Ur obun et les Ur ukars, races humanoïdes jumelles, aux philosophies totalement opposées. Les Ur obun étant assez pacifistes et intégrés à l’empire, tandis que leurs cousins ukar sont pour la plupart militaristes et rebelles.
Ces races extraterrestres ne sont pas ou peu représentées.
Leminkaïnen
La planète verte, seule planète habitable du système solaire du même nom, appartenant à la maison hawkwood. Son étoile, comme toutes les autres, se meurt et est devenue une géante rouge. Le changement de taille du soleil, associé à la présence de trois lunes, a rendu la météo de cette planète imprévisible. Des tempêtes monstrueuses, de puissantes tornades et des marées changeantes, voilà le quotidien des habitants de cette planète frontière.
Planète longtemps disputée entre hawkwood et barbares vulkdrock dans de terribles guerres.
La majorité de la population et de la planète est sous l’autorité de l’empire et contrôlée par la maison hawkwood, il y a également deux autres maisons mineures, les dextrite et les vasalayana toutes deux vassales des hawkwood.
Enfin, le continent de valdalla est resté sous le contrôle des barbares vuldrock, peuple se référant aux Vikings de l’ancienne terre et dirigé par un mutant : le géant et terrible Ukrops. Il existe une tête de pont hawkwood sur ce continent avec la baronnie de cortran qui résiste depuis des siècles aux attaques barbares.
La maison est maintenant dirigée par la princesse Victoria, mise sur le trône azur et jaune de la maison par Alexius lui-même lorsqu’il fut appelé à de plus hautes fonctions. Elle dirige la maison d’une poigne de fer et contrôle la destinée de plusieurs milliards d’individus répartis sur plusieurs planètes : Delphes, Ravenne, gwinneth et enfin leminkaïnen.
La planète Leminkaïnen est dirigée par un gouverneur planétaire (fonction aussi appelée siridar). En l’occurrence, la siridar de la planète est la duchesse Catherine Hawkwood, surnommé également la « grande catherine », tant elle a la réputation de diriger la planète d’une main de fer dans un gant de velours.
Hakkonen, capitale hawkwood de Leminkaïnen, datant de la seconde république, était réputée pour ses hautes tours dorées, et où, disait-on dans le temps, le serf était roi, tant la technologie était présente, et ce même pour les esclaves.
Carte tirée du supplément Fading suns © Fief Hawkwood.
La chaleur de ce mois de mai et l’absence de vent rendaient l’air étouffant en ville. En cette après-midi, seulement quelques serfs étaient visibles dans les rues et s’affairaient à leurs tâches quotidiennes hors des zones climatisées.
Dans le palais Ducal, la Grande Catherine, surnom donné à la Duchesse Catherine Hawkwood régente de Leminkaïnen, le calme régnait. Dans la grande salle, la Duchesse tenait audience. Aujourd’hui, elle devait statuer sur la requête du chef d’une maison infâme de la planète, le Baron d’Albi, Yora Artorius Hawkwood qui désirait laver son honneur.
— Pourquoi accepterais-je de lui donner une chance, Kieran ? avait-elle demandé la veille de l’audition.
— Ce n’est pas parce qu’une branche est pourrie que l’on doit forcément abattre l’arbre, Votre Altesse, lui répondit son conseiller, le psychomancien et mentat Kieran Fenn.
— De plus, nous lui adjoindrons mon jeune apprenti Korvan, il est temps pour lui de prendre son envol.
— Et c’est suffisant ?
— Mes talents de conseiller vous ont-ils déjà fait défaut, Votre Majesté ? dit Kieran sans émotion apparente.
Les mentats étaient les plus prisés des conseillers. Véritables ordinateurs humains et puits de connaissance.
Chacune de leurs décisions avait toujours été soupesée longuement.
— Tu sais bien que non, Kieran et ton orgueil veut me l’entendre dire.
— Vous savez bien que nous autres mentats n’avons aucun orgueil, fit Kieran avec un demi-sourire.
— Eh bien soit ! Kieran, c’est d’accord, décréta Catherine Hawkwood.
Plus tard, alors qu’il arpentait les longs couloirs du palais, Kieran réfléchissait.
« Ce n’est pas possible qu’il soit comme Geoff, non ce n’est pas possible. »
Kieran avait, pour la première fois de sa vie, du mal à être objectif. Il avait été, dans sa jeunesse, le conseiller du grand-père de Yora, Yora Geoffius, et le précepteur d’Artor, leur père, alors non, Yora ne pouvait être comme son frère.
Le Baron d’Albi, Yora Artorius Hawkwood, était un chevalier du Phénix, l’élite des combattants impériaux. Il s’était battu vaillamment par monts et par vaux dans tout l’espace connu.
Lui qui avait connu maintes batailles stellaires et planétaires, lui, le preux chevalier, avait peur. Il avait le ventre noué par la tension ; il était là, à genoux devant la Duchesse et attendait le verdict, un peu comme un condamné attend sa sentence.
Yora était un jeune et bel homme blond d’à peine 25 ans, à la chevelure abondante et à la barbe fournie. Ses yeux bleus dégageaient un magnétisme certain. Malgré son jeune âge, il avait déjà derrière lui de nombreuses années de guerre, mais avait conservé sa joie de vivre et une certaine nonchalance.
La salle était grande, mais la présence des membres de la cour la rendait presque minuscule. Yora allait enfin savoir, savoir s’il avait une chance de laver l’honneur familial.
Trois ans après son départ à l’Académie Spatiale Hawkwood, son frère Geoff, le frère trois fois maudit, avait trahi en fomentant un attentat contre Catherine en personne et rejoint les barbares Vuldrock.
À cause de sa trahison, l’Inquisition avait frappé sa famille et Artor son père avait été exécuté, Dame Louisa, sa mère ainsi que ses trois sœurs enfermées dans un couvent avestite et ce depuis dix ans.
Lui n’avait échappé à l’Inquisition que pour la simple raison qu’il était trop loin à l’époque, élève de l’Académie spatiale Hawkwood. Il avait néanmoins dû vivre avec la honte de l’infamie et subir les harcèlements incessants de ses camarades.
Depuis lors, son aînée Noah s’était enfuie du couvent, sa seconde sœur, Katarina était devenue quasiment folle et enfin Éole, sa petite sœur était devenue une avestite pure et dure.
Et pis que tout, le nom des Artorius était à présent souillé à jamais et sa descendance devrait vivre avec.
Cela Yora ne pouvait le tolérer. Le temps de la vengeance et de la rédemption allait arriver.
« Me voilà devant la grande Catherine. Après avoir vécu les dix dernières années à écumer l’espace dans la Marine Impériale ou en tant que Chevalier de l’Ordre du Phénix. Dix ans passés dans l’honneur et l’humilité à essayer de faire oublier mon nom : Artorius Hawkood de Jyvaskyla.
Tout ça, c’est la faute de mon frère aîné : Geoff. Il était le meilleur bretteur du pays, le plus charismatique d’entre nous, celui qui devait porter notre famille à la lumière.
Mais il a trahi la maison Hawkwood, plongeant notre nom dans les ténèbres et l’ignominie, amenant mon père à l’échafaud. Quant à ma mère et mes sœurs, elles ont été envoyées dans un couvent Avesti pour faire pénitence de fautes qu’elles n’ont pas commises.
Ces avestites, je les hais. Comment le Pancréateur peut-il permettre qu’ils commettent de tels actes en son nom ?!
Me voici donc, moi, Yora, le cadet de la famille, devant mon destin. Devant la responsabilité de la restauration de mon nom. Devant mon serment de vassalité ultime que j’ai fait envers la grande Catherine, autant dire allant au-devant d’une mission suicide.
Ce serment je l’assume. Cette responsabilité je l’assume. Et même si la tâche me paraît désespérée, je l’accomplirai du mieux que je pourrai : avec honneur et humilité. »
Après un temps qui lui sembla être une éternité, la Duchesse prit enfin la parole :
— Yora Hawkwood, j’ai décidé de t’accorder une chance : retrouve ton frère et le barbare Halfdan le noir. Amène-les-moi pour qu’ils soient jugés.
— Bien Votre Altesse, répondit simplement Yora.
— Je nomme pour te seconder dans cette tâche un conseiller, Korvan.
— Korvan, rejoins le Baron ! ordonna-t-elle.
Un homme sortit de derrière une tenture et vint se placer à sa droite. Le jeune homme avait un visage assez commun et des cheveux châtains coiffés en bataille, vêtu d’une tenue noire stricte uniquement rehaussée de galons fins de couleurs blanches. Ce qui était le plus perturbant chez Korvan était son regard qui semblait dénué de toute humanité. Il semblait étudier chaque élément et chaque personne de la grande pièce.
« Un mentat, certainement l’apprenti de Kieran », pensa Yora.
— Merci Votre Altesse, dit Yora.
— Ne me remercie pas, Halfdan est au Valdalla, dit-elle sentencieusement.
La Duchesse laissa passer quelques secondes de silence pour donner encore plus de poids à sa prochaine annonce.
— En accord avec la Sainte Église et comme le permet ma fonction de Siridar, j’ai décidé que la punition de ta mère avait assez duré, continua-t-elle.
Pour te montrer ma confiance en toi, j’ai décidé de lever, ce matin même, l’ordre de réclusion pour elle et ta sœur Katarina.
Dans l’attente de ta réussite, elles logeront dans l’aile des novices près de la chapelle du palais, conclut-elle.
— Merci Votre Altesse, répondit une nouvelle fois Yora.
Korvan s’était posté à deux pas sur la droite du Baron. C’était sa première mission sans son maître.
Il n’avait pas un physique impressionnant, il était même passe-partout et s’était précisément cet atout qui l’intéressait.
Korvan revenait à peine de la retraite que lui avait imposée son maître Fenn. Ceci pour parfaire ses capacités de mentat, mais aussi afin de développer ses dons de psychomancien. Aussi, le jeune mentat se sentait un peu déboussolé dans cet environnement surpeuplé.
En tant que Psychomancien, Korvan maîtrisait la voie de la chimère et pouvait générer toutes sortes d’illusions. De plus, Korvan apprenait également la voie du sixième sens mais ne se sentait pas encore à l’aise avec, alors il l’utilisait peu.
Tous ces dons, il les devait à Kieran qui appartenait à un convent secret.
La règle voulait que chaque maître forme quatre disciples, ni plus ni moins, et l’un d’entre d’eux deviendrait à son tour un maître.
« Si je suis envoyé en mission avec lui, c’est que Maître Kieran a toute confiance en lui et en mes capacités à le conseiller.
« Il est de mon devoir de ne pas le décevoir », pensa Korvan en attendant la suite.
« Je sais qu’il veut que j’étudie la situation. Que manigance Germanus ? Il prépare quelque chose, certainement la surveillance du jeune Baron. »
En effet, le jeune mentat avait repéré, tout comme Kieran, il en était certain, que l’Archevêque Germanus préparait un mauvais coup.
L’Archevêque Germanus, maître du temple Avesti sur la planète s’avança d’un pas et prit alors la parole.
Le temple Avesti était le plus terrible des ordres religieux de l’église universelle du Pancréateur. Ils étaient tellement fanatiques que même les prêtres des autres ordres n’étaient pas à l’abri d’être brûlés pour hérésie.
— Votre Altesse, le temple Avesti, désire aider ce pa… repentant en lui adjoignant un confesseur, membre de notre ordre : le frère Vlad, commença-t-il.
— Il aura à charge de la sauvegarde de l’âme de ces… hommes et sera le garant de l’intégrité morale de ce… cet homme, conclu-t-il.
— Voilà une idée fort intéressante Monseigneur Germanus, c’est avec plaisir que j’accède à votre demande, répondit la Duchesse.
L’Archevêque se tourna et désigna un jeune novice d’un doigt noueux.
— Frère Vlad prenez place à côté de ces… deux hommes. Que le Pancréateur soit avec vous, dit alors Germanus d’un ton sentencieux.
Le frère Vlad Pavlov de Sévérus était une rareté, puisque né noble, fils d’une famille noble de la maison Décados. La maison ennemie des Hawkwood.
Vlad avait renié sa naissance ; répugné par la luxure et le vice qui régnaient au sein de la maison Décados, il l’avait abandonnée pour rejoindre le temple Avesti.
Depuis toujours, il était tiraillé entre sa foi inébranlable envers le Pancréateur et son ego surdimensionné de Décados. Il avait l’intention de mener sa mission à bien, fidèle à Germanus son mentor. Ce n’était qu’un simple novice et pourtant l’Archevêque croyait en lui.
« Bien entendu, je ne décevrai pas Monseigneur et s’il le faut, je brûlerai ce Baron au moindre signe de traîtrise et d’hérésie. », pensait Vlad en regardant fixement Yora.
Puis il tourna son regard vers le conseiller Korvan.
« Quant à lui, je le brûlerai à la fin, cet hérétique ! »
Vlad aurait certainement été beau s’il n’avait pas eu le crâne rasé et un bouc taillé en pointe. Il avait passé des heures à se forger un visage sévère. Des traces de brûlures abîmaient son visage, dues aux longues heures d’entraînement à manier le lance-flamme, l’arme préférée de son ordre et les huiles Khas qui l’alimentaient.
La Duchesse Catherine embrassa la grande salle d’audience du regard avant de reposer ses yeux sur le jeune Baron.
— Yora Artorius Hawkwood, vous pouvez disposer et ne revenez que lorsque vous aurez accompli votre mission ou ne revenez pas ! ordonna-t-elle d’un ton autoritaire.
Yora, suivi de sa suite, sortit après avoir salué d’une petite révérence. Une fois dehors, il fut accueilli par Kieran Fenn qui était déjà sorti.
— Suis-moi, dit simplement le vieil homme.
Kieran le conduisit vers une aile du château sans un mot. Finalement, ils entrèrent, lui et sa suite, dans un petit salon au mobilier épuré.
— Attends ici, je te prie, dit le vieil homme.
Kieran sortit de la pièce et entra dans la pièce voisine. Dame Louisa Masseri Hawkwood était là avec sa fille Katarina à attendre ce moment. Malgré le poids des années et la réclusion dans un couvent, elle avait gardé sa beauté et son magnétisme. Katarina, quant à elle, était à genou devant la croix du Pancréateur et récitait en boucle une prière.
— Dame Louisa, vous pouvez voir votre fils maintenant.
Puis il ajouta en tendant la mallette en acajou, une essence de bois très rare qu’il avait ramenée avec lui.
— Donnez-lui ceci, cela lui revient de plein droit, c’était l’épée de son père, il en aura bien besoin.
La mère du Baron prit la mallette et murmura :
— Merci Kieran.
— Viens, Katarina, murmura-t-elle à nouveau.
Louisa ouvrit la porte et entra dans la pièce où son fils attendait.
Le silence était pesant et Yora le brisa en voyant entrer sa mère et sa sœur. D’une voix cassée par l’émotion il dit :
— Maman !
Il s’approcha et prit sa mère dans ses bras.
Dame Louisa lui rendit son étreinte mais semblait mal à l’aise, sans doute à cause de ses longues années de pénitence au sein d’un couvent où les moindres marques d’affection étaient interdites. La sœur de Yora entra juste après. Elle ne faisait que répéter une prière et ne semblait pas s’apercevoir de la présence du jeune Baron.
Yora vit sa sœur et interrogea du regard sa mère.
— Katarina est en réclusion et ne fait que prier. Elle t’a vu mais ne peut pas te parler pour le moment, mais elle est ravie de te voir, rassura Dame Louisa.
Elle s’écarta et regarda son fils puis lui fit son premier sourire.
— Par le Pancréateur ! Que tu es beau et fort, mon fils !
Elle fit un mince sourire et ses yeux s’embuaient de larmes.
— Je vois encore le petit garçon timide qui partait pour l’Académie spatiale.
Louisa parlait toujours d’une voix basse mais on pouvait entendre la fierté qui perçait dans le ton.
— Yora que je suis heureuse de te revoir, murmura-t-elle.
Depuis sa réclusion, elle avait pris l’habitude de parler à voix basse.
— Mère, répondit simplement Yora avant de l’étreindre à nouveau.
Korvan était sorti dans le couloir avec Vlad pour laisser une certaine intimité à son nouveau maître.
Il attendait seul dans le couloir puisque le nouveau confesseur du Baron s’était excusé avant de rejoindre la Chapelle.
Korvan vit arriver son mentor Kieran Fenn qui sortait de la pièce.
— Korvan, j’ai quelque chose à te donner. Prends cette broche, c’est une relique antique, un bouclier psi qui pourra-t-être très utile. Je n’ai pas besoin de te le dire mais méfie-toi de l’avestite et préserve-toi de ses réactions.
— Merci Maître, mais ne vous inquiétez pas, je suis prêt.
— Je sais Korvan, je sais.
Le vieux mentat allait partir quand soudainement il sembla se rappeler quelque chose.
— Ah ! J’allais oublier, il paraîtrait que Geoff aurait tenté d’acheter des armes en ville et se serait renseigné auprès d’un certain Grendel qui tient « La Brute Épaisse », un bar des bas quartiers. Commencez par là.
— D’accord maître, répondit simplement Korvan.
Alors qu’il voyait son Mentor s’éloigner pour rejoindre la Duchesse, Korvan réfléchissait aux dernières paroles prononcées par Fenn.
« Tout à un sens, même la façon de le dire. Il cherche autre chose et pense que Geoff n’est pas ici. »
Le frère Vlad avait rejoint l’Archevêque Germanus dans la chapelle du palais. Le vieil homme lui avait demandé la veille de l’audience, alors qu’il lui avait annoncé son intention de l’envoyer en mission, de revenir le voir après l’audience. Il avait abandonné son nouveau Baron et son conseiller le temps de rejoindre Germanus.
— Vlad, mon fils, tu vas être exposé au mal et à l’hérésie, tu devras te montrer fort. Prends ceci, c’est une phalange de Paulus, elle te protégera pendant cette quête. À bientôt, mon fils.
— Merci monseigneur, dit simplement Vlad avant de partir rejoindre Yora.
Alors que Vlad marchait dans le couloir, il s’arrêta, attiré par une discussion qu’il entendait à l’extérieur.
Il s’approcha de la fenêtre ouverte et vit l’archevêque Paulus, l’ennemi politique de Germanus en compagnie de la diaconnesse Eole Artoria Hawkwood, sœur du jeune Baron. La discussion était terminée et ils se séparaient.
« Que mijote-t-il ? » pensa le jeune disciple.
Yora et sa mère avaient relâché leurs étreintes et se regardaient en silence, ne savant pas quoi se dire malgré ces longues années de séparation. Finalement, Louisa rompit le silence pesant.
— Yora, prend ceci, c’est l’épée de ton père. Dame Louisa tendit la mallette à Yora.
Yora prit la mallette que lui tendait sa mère et retira l’épée mono filament qui était à l’intérieur, la garde finement ouvragée, elle était ornée des armoiries familiales. La relique avait traversé les siècles au sein de sa famille et un jour viendra, où il pourra la porter fièrement.
Yora et sa suite quittèrent le palais Ducal plus tard dans la journée pour se diriger vers le bar indiqué par le conseiller de la Duchesse Kieran Fenn.
Le bar était en plein centre de la zone des guildes et Korvan pensait que le bar était aux mains de la Guilde des Fouinards. Le bar ressemblait à l’un de ces bouges infâmes que l’on trouvait dans la favela de Bizantium Secundus, la capitale des mondes connus.
Yora connaissait un peu ce genre d’établissement et la clientèle que l’on y trouvait. Mais il était désireux de voir comment allaient réagir les deux boulets qu’il traînait depuis le palais et qu’il allait devoir se coltiner durant sa quête de rédemption.
Il était déjà amusé rien qu’en pensant à la réaction du cul béni d’avesti alors qu’il entrait dans le bar en tête de sa troupe.
Quant à son conseiller Korvan, lui qui avait toujours vécu dans les environs du palais Ducal, était aux antipodes des personnes que l’on trouvait dans ce genre d’établissement.
Paradoxalement, Yora se sentait à l’aise ici, il faut dire que son statut de paria et sa gouaille lui avait valu l’admiration de ses hommes de troupe.
Aussi avait-il souvent été avec eux dans les bouges des bas quartiers de toutes les planètes qu’il avait visitées.
— Tavernier, je veux parler à Grendel, déclara Yora d’un ton qui ne laissait pas d’autre solution que de lui obéir.
— Pas là, répondit laconiquement le barman, tout en appuyant discrètement sur un bouton.
De leur côté, Korvan étudiait la salle du regard et le frère Vlad regardait avec mépris la danseuse qui s’agitait mollement devant un parterre d’hommes et de femmes à moitié saoul.
« Cet endroit mérite une purge », pensa-t-il.
Dans le bureau de Grendel, une alarme retentit, celui-ci était en pleine communication holographique avec son maître « le Bateleur ». Cela faisait maintenant cinq ans que Grendel avait quitté la guilde des fouinards pour se joindre à la mystérieuse organisation du Tarot qui semblait contrôler en secret la planète.
Il ne connaissait pas les intentions réelles des arcanes de l’organisation mais à dire vrai il s’en moquait, depuis cinq ans, grâce à cette organisation, il était devenu riche et avait comme rang, celui de Roi de Cœur.
Il appuya sur un bouton de sa machine pensante (ordinateur) et aussitôt les moniteurs de surveillance montrèrent la salle du bar.
Au comptoir, il voyait un jeune noble et sa suite composée d’un homme en noir et d’un avestite.
À la vision du prêtre, Grendel ne put réprimer une moue de dégoût.
— Des problèmes, Roi de Cœur ? demande le Bateleur.
— Non, maître, un jeune noble demande à me voir, il est accompagné d’un avestite et d’un domestique.
— C’est le Baron Yora et sa suite, il est parti en quête du Valet et du Roi de Trèfle. Méfie-toi du domestique comme tu dis, c’est un disciple de Fenn et c’est sûrement lui qui les a envoyés ici.
— Je vais demander au Valet de Cœur de les supprimer sur le champ, répondit Grendel.
— Non crétin, il y a mieux à faire, pesta le Bateleur. Les recruteurs ont reçu comme contrat d’acheminer des armes à la Baronnie de Cortran, Envoie-les là-bas en disant que Geoff s’y trouve, ils vont les attaquer et le malentendu nous servira.
— Bien maître, répondit Grendel d’une voix respectueuse alors que le Bateleur coupait la transmission.
L’hologramme disparut et Grendel appuya sur un autre bouton de sa console pour signaler au barman de les laisser entrer.
Valdo Van Gelder, le Valet de Cœur de Grendel, était attablé dans le fond du bar, il regardait ce noble qui demandait après Grendel. Il examina attentivement ce jeune coq et pensa qu’il n’en ferait qu’une bouchée, lui le tueur psychomancien, adepte de la voie de la fureur.
Valdo était également un noble, mais un fils de famille dévoyé et banni et il fallait le faire dans une maison remplie d’assassins assujettie aux infâmes Décados.
Le Barman regarda le Baron.
— Grendel est rentré, passez derrière, Votre Seigneurie.
Yora ne se formalisa pas de l’impolitesse du serveur, après tout lui-même n’était pas porté sur l’étiquette.
Il passa derrière le comptoir suivi de Korvan et Vlad. Les deux compères examinaient toujours attentivement la pièce et ses occupants depuis un moment.
« Intéressant ces structures en bois », pensa Vlad.
Korvan les savait surveillées, il avait déjà repéré plusieurs des minicaméras. Il avait également repéré deux ou trois vigies dissimulées parmi les clients.
Les trois hommes entrèrent dans le bureau par une luxueuse porte en chêne finement ouvragée. Le bureau était grand et richement décoré uniquement pour mettre en valeur l’homme à l’intérieur.
Grendel était de ces hommes répugnants, gras, et suintant le mal par tous ses pores, il respirait la luxure.
— Que me vaut l’honneur de votre visite, seigneur Baron ? demanda-t-il d’une voix de stentor.
« C’est décidé, je vais demander à l’Inquisition d’enquêter ici », pensa Vlad à la vue du propriétaire de l’établissement.
Il fut pris d’un haut-le-cœur en regardant cet homme et son étalage de luxure qui lui rappelait son enfance. Son regard se porta sur une statuette obscène qui trônait sur une étagère derrière Grendel.
Korvan prit la parole avant Yora :
— Le Baron désire savoir où se cache son frère, le traître Geoff Hawkwood ?
— Mais comment voulez-vous que je le sache ? répondit Grendel avec une mauvaise foi évidente.
— OÙ EST MON FRÈRE DUCON ? hurla Yora devant l’attitude du fouinard.
L’énervement soudain et simulé de Yora avait légèrement surpris Grendel mais il en fallait plus pour le déconcerter que le célèbre jeu du « bon flic, mauvais flic. »
— Nous savons qu’il est en affaires avec vous, et qu’il désire acheter des armes, dit Korvan d’un ton parfaitement neutre.
— Oh ! Là ! C’est faux je ne travaille pas avec lui, je ne sais pas qui vous a dit cela mais c’est faux.
Ici les armes, Ce sont les recruteurs et Sven leur capitaine qui s’en occupent.
Korvan étudia le visage du fouinard avec attention pour y déceler le moindre signe de mensonge.
— Et où peut-on trouver ce Sven ? compléta le frère Vlad, parlant pour la première fois en lui adressant un sourire carnassier.
— Ça, je peux vous le dire, dit Grendel semblant être effrayé par le jeune confesseur.
— Sur le port, il a un rendez-vous ce soir pour une vente d’armes paraît-il, indiqua Grendel.
Grendel était malgré lui plus inquiet qu’il ne le voulait car l’attitude de l’avestite lui faisait froid dans le dos, le conseiller paraissait un peu trop malin et le Baron semblait être un impulsif, de ceux qui tapent d’abord avant de causer.
« Mais ils ne connaissent pas Grendel ceux-là, oh non ! Ils ne le connaissent pas », pensa-t-il.
— Merci, dit simplement Korvan avant de sortir de la pièce à la suite du Baron.
Une fois ses visiteurs sortis du bar, Grendel déboula dans la salle et appela Valdo, le Valet de Cœur de l’organisation du tarot.
— Suis-les avec tes hommes et tu les butes une fois qu’ils auront rejoint les recruteurs. Les armes ne doivent pas partir à Cortran.
Grendel retourna dans son bureau et appela le Duc Honorius Masseri de la maison Dextrite.
— Votre Majesté, la livraison est-elle prête à partir ?
— Cinq transporteurs remplis de fusils Blaster et d’armures de combat, comme prévu.
— Merci, Votre Altesse, de notre côté la marchandise est prête, des jeunes comme demandés.
— Ce soir, même heure, même endroit ?
— Oui, Votre Altesse.
Geoff essuyait la lame de son épée.
« À quel pied ! » pensa-t-il en regardant le charnier.
Ils avaient fondu sur le village de mutants tels des aigles sur des lapins.
Après avoir tué les guerriers, il s’était amusé un peu avec les quelques survivants et avait réalisé son œuvre d’art, un arbre humain…
— Ils sont regroupés Maître Geoff, dit le Vuldrock.
— Bien, en avant répondit-il détournant pour la première fois les yeux de son « œuvre ».
Geoff contemplait la colonne de jeunes mutants attachés les uns aux autres.
— Ils ne sont pas au bout de leurs peines ceux-là, ils vont regretter ne pas être accrochés à l’arbre, s’amusa celui qui fut autrefois Geoff Artorius, frère aîné de Yora, chevalier Hawkwood et meilleur duelliste de Jyväskylä.
Yora, Vlad et Korvan venaient de sortir du bar, ils n’avaient pas un instant cru en l’innocence du fouinard mais il leur fallait maintenant confirmer ces soupçons.
Ils allaient partir lorsque Korvan et Vlad aperçurent un homme les surveiller. Vlad reconnut Gladius, un indicateur avestite travaillant avec Paulus, il était trop loin pour que Vlad puisse faire quelque chose contre lui sans se faire repérer, de plus il ne voyait pas l’intérêt d’en avertir ses compagnons.
Korvan, quant à lui, fixa l’indicateur et utilisant ses dons de psychomancien, et le persuada qu’ils venaient de monter dans un taxi. Gladius crut en l’illusion.
Vlad réprima une envie de meurtre en apercevant les Stygmates de la manifestation des pouvoirs du conseiller, en effet les cheveux du jeune homme semblaient se mouvoir de leur propre volonté et ses yeux étaient devenus translucides.
— Il nous pense partis en taxi, dit simplement Korvan.
Yora avait également vu les Stygmates mais dit simplement.
— On y va.
Les trois hommes s’en allèrent à pied mais malheureusement pour eux, n’avaient pas repéré les formes noires qui se détachaient sur le toit du bar.
Valdo, qui venait de sortir du bar par le toit, aperçut également Gladius. Il le connaissait bien et savait pertinemment pour qui il travaillait.
Il fit un geste et plusieurs de ses hommes se séparèrent pour suivre les trois hommes en passant par les toits.
Si le tueur avait eu le moindre sens de l’honneur, il serait rentré dans le bar, aurait prévenu Grendel de la probable arrivée d’inquisiteurs.
Ou mieux aurait-il pu tuer l’indic mais… il était temps pour lui de devenir le nouveau chef. Valdo souriait en imaginant Grendel se faire poser la question par les avestites.
Gladius clignait des yeux de stupeur, il avait soudainement perdu le Baron et sa suite, il se demandait encore comment ils avaient échappé à sa vigilance. Mais cela n’était pas si grave, il prit son hurleur et appela l’Evêque Fédor.
— Mon Père, ils sont entrés dans le bar « La Brute Épaisse » et ont discuté avec Grendel le patron. L’homme est un hérétique de premier ordre.
— Merci, mon fils, continuez à les suivre et ne les perdez pas, répondit l’Évêque.
Cette dernière parole avait été comme si le prélat l’avait marqué du fer rouge des avestites.
Il valait mieux pour lui, disparaître. Il doutait de l’indulgence de Fédor.
Dans le monastère avesti, Fédor rendit compte à son supérieur, l’Archevêque Paulus de la communication de l’indicateur.
— Bien, envoyez Sœur Éole sur place et qu’elle se mette en quête. Et dites-lui que la Sainte Flamme guide ses pas et que rien ne doit entraver son passage. Rien ni personne et surtout pas ces trois gêneurs, expliqua Paulus.
— Le Baron est son frère monseigneur, rétorqua Fédor presque indigné.
— Depuis qu’elle a embrassé la religion et obéi au précepte de la Sainte Flamme, elle n’a plus de famille, dit simplement l’Archevêque d’une voix neutre.
— Bien Monseigneur, je la dépêche sur l’instant.
L’évêque retrouva Éole quelques minutes plus tard alors que celle-ci était en prière dans l’une des nombreuses chapelles du grand temple Avesti de Leminkaïnen.
— Ma sœur, Monseigneur l’Archevêque vous confie une nouvelle mission de la plus haute importance.
La Diaconesse se leva et se mit en position de garde à vous devant son supérieur. Le visage ne montrant aucun signe d’émotion. Il faut dire qu’Éole n’aurait jamais été une belle femme selon les critères Hawkwood, de plus, ses années au sein de l’ordre avaient encore endurci les traits de son visage, une mince cicatrice zébrait son menton jusqu’à sa lèvre inférieure, ancienne trace d’une sévère punition pour avoir parlé sans y avoir été autorisé par la mère supérieure. Ses cheveux étaient coupés très court selon les critères avestites.
— Allez à « La Brute Épaisse » et faites parler Grendel, puis mettez-vous en chasse. Personne ne doit barrer votre route, pas même votre frère, expliqua-t-il.
— Mais… hésita Éole qui malgré les années et le lavage de cerveau qu’elle avait subi, avait encore de l’affection pour son frère.
Cette fois-ci, l’expression du visage d’Éole montra à Paulus tout le désarroi qui venait de s’emparer d’elle. Paulus, qui comprenait son émoi, lui fit néanmoins un regard dur comme pour la sermonner.
— La Sainte Flamme guide vos pas ma sœur ne l’oubliez pas et si votre frère est un innocent, il ira au paradis, dit Paulus d’un ton ferme.
— Bien monseigneur, je pars sur l’instant, répondit Éole d’une voix triste.
Korvan en était absolument certain maintenant, ils étaient suivis par plusieurs hommes sur les toits.
Malheureusement, il ne pouvait pas générer d’illusion sur un si grand nombre.
— Baron nous sommes suivis par des individus. Là-haut sur les toits.
— Bien ! répondit simplement Yora.
Le jeune Baron avait répondu machinalement, plus par l’habitude de ne jamais montrer ses doutes à ses hommes qu’autre chose.
« Est-il si certain de ses dons de combattants ou est-il téméraire ? » pensa Korvan un instant.
Entretemps, le frère Vlad s’était arrêté à une cabine téléphonique pour appeler l’évêque Leandro, le second de l’Archevêque Germanus.
— Monseigneur, le bar « La Brute Épaisse » est un repère d’hérétiques et spécialement Grendel le patron. Je suis sûr que cet homme a des choses à raconter.
— Bien mon fils, continuez.
Leandro fit appeler Gaïus la matriarche, cheffe des « Salamandres », un ordre secret de sœurs-guerrières, même pour bon nombre d’avestites puisque fondé par Germanus en personne. La matriarche arriva quelques minutes plus tard.
Gaïus était impressionnante même sans son armure, Elle mesurait plus de 1m80 et avait une impressionnante musculature.
Son crâne rasé mettait son regard bleu encore plus en valeur. Lorsqu’elle regardait quelqu’un, ses yeux semblaient vous juger et trouver le moindre péché dissimulé.
Léandro regarda la matriarche postée au garde-à-vous devant elle. Il s’humecta les lèvres discrètement pour ne pas lui montrer que malgré lui, elle l’impressionnait.
— Gaïus, allez à « La Brute Épaisse » et ramenez-moi Grendel, j’ai des questions à lui poser, lui dit-il.
— À vos ordres monseigneur, répondit simplement la matriarche.
La mission était indigne de Gaïus, Leandro le savait mais il était certain de la loyauté de la matriarche envers Germanus.
Ce qui n’était pas le cas de bon nombre d’inquisiteurs du temple.
Éole remit une claque à cet immonde pourceau, il l’écœurait et elle s’essuya la main sur la tenue de Grendel. Éole le regarda, cet homme semblait terrorisé, et espérait mourir au plus vite. Il n’aurait pas cette joie.
— Parle immonde créature et j’abrégerais tes souffrances sinon tu souffriras mille maux avant d’expirer.
— Ils sont partis dans les docks, Sven le recruteur fourgue des armes à Geoff et des Vuldrocks. Ce soir…
Il se tut, il devait gagner du temps, Valdo n’allait plus tarder à arriver, voilà maintenant une demi-heure qu’il l’avait appelé. Il encaissa encore une série de coups.
— QUAND ? hurla la diaconesse en lui brisant deux doigts.
— Aaargh ! Minuit, ce soir. Dock 212, répondit-il la voix étouffée par la douleur.
« Maudit Valdo, il m’a trahi, il ne viendra pas », pensa Grendel et cette fois-ci, il ne simulait plus la peur.
Éole était satisfaite.
— Bien, brûlez ce taudis et laissez-le dedans, ordonna-t-elle à ses hommes.
La Diaconesse apposa sur le front de l’ancien parrain d’Hakkonen la marque des avestis à l’aide de son crucifix chauffant.
Grendel hurla de douleur en sentant le fer rouge sur son front. Puis elle fit un signe à l’un de ses novices qui aspergea Grendel d’huile khâ.
— Tu brûleras en dernier hérétique, cela te laissera le temps de prier pour le salut de ton âme.
Et les avestites s’en allèrent en allumant le brasier.
Gaïus et ses sœurs venaient juste d’arriver lorsqu’elle remarqua la diaconesse Éole et ses inquisiteurs sortir du bar tandis que les flammes commençaient à prendre dans les boiseries du bâtiment.
Bien dissimulée, elle attendit que la troupe d’Éole s’en aille.
« Ainsi c’est pour cela que Léandro m’a confié cette mission, Paulus est dans le coup. »
Une fois Éole hors de vue, elle fit signe à ses sœurs de se diriger vers l’entrée du bar en flamme. Bien protégées par leurs armures ignifugées, elles entrèrent sans crainte dans le bâtiment et en ressortirent quelques instants plus tard en portant Grendel, le parrain de la pègre d’Hakkonen qui n’avait pas encore commencé à brûler.
Grendel allait remercier cette femme en armure qui venait de le sauver et semblait commander cette unité inconnue lorsqu’il vit le discret symbole avesti qui ornait leurs armures. Il savait qu’il allait souffrir le martyre.
Yora était devant l’entrée des Docks, il était maintenant près de minuit. Avec ses conseillers, il avait passé les quelques dernières heures, en vain, à essayer de confirmer leurs soupçons. La confiance de Yora envers Grendel étant très limitée.
Ces dernières heures avaient permis à Yora de découvrir les talents d’enquêteurs de Vlad. Ainsi ils avaient réussi à prouver l’existence d’un chargement nocturne d’armes effectué par la guilde des recruteurs.
Ils sautèrent les barrières de l’entrée et entrèrent dans les docks discrètement. Mieux valait pour eux de ne pas être repérés par la guilde des dockers.
D’autorité, Korvan passa devant, le jeune conseiller ayant également des talents d’infiltration et il s’engagea une dizaine de mètres devant le Baron. Derrière lui, le Baron suivait en utilisant les ombres pour se dissimuler ce qui en revanche n’était pas le cas du Frère Vlad.
Les docks d’Hakkonen étaient de loin les plus grands de la planète mais ressemblaient davantage à un dédale de caisses et de containers en tout genre, stockés à l’air libre, sans ordre logique apparent. Entre les containers, de grandes rues éclairées menaient vers les quais où quelques navires attendaient d’être chargés ou déchargés. Ils pouvaient distinguer de grandes grues de chargement en mouvement, signe d’une activité nocturne. Un curieux mélange d’épices, et d’autres effluves moins nobles parfumait les lieux.
— On a de la visite, chef, annonça le vigile à son chef, le Contremaître Perkins.
Perkins se pencha pour regarder les moniteurs de la salle de contrôle des docks.
— Voyez-vous ça, un avestite perdu et un novice en plus, déclara Perkins.
Sur les écrans de surveillance, on voyait nettement Vlad marcher dans une rue. Le contremaître appuya sur un bouton et une alarme retentit.
— On va aller voir ce jeune fanatique, dit-il, un petit sourire aux lèvres.
Yora qui venait de s’arrêter dans un endroit sombre, regarda derrière lui pour vérifier que son confesseur suivait et réprima un frisson d’angoisse lorsqu’il vit son confesseur arpenter la rue sous la lumière.
Il n’allait pas tarder à avoir de la visite et instinctivement se dissimula un peu plus dans l’ombre entre les caisses stockées, en attente d’être chargées sur un quelconque navire.
— Planque toi, murmura-t-il au jeune prêtre.
Vlad s’arrêta au milieu de la rue, il ignorait tout des principes de bases de la discrétion. En entendant le Baron lui dire de se cacher, il sourit et annonça :
— Je ne crains aucune mort car le Pancréateur est mon berger, dit-il avant de reprendre sa progression.
Yora secoua la tête lentement de dépit.
« Quel sinistre imbécile », pensa-t-il.
Vlad vit arriver un groupe de vigiles devant lui, stoppa et les laissa s’approcher de lui.
— Halte-là ! annonça Perkins arrivé à quelques mètres de l’intrus.
— Vous n’avez rien à faire ici, s’empressa-t-il d’ajouter.
Tous les hommes de Perkins s’approchèrent alors du jeune novice et se mirent à l’encercler.
— Le Pancréateur guide mes pas et vous n’avez pas à vous opposer à mon passage, répondit Vlad en fixant Perkins d’un regard glacial.
— Ha ! Tu crois ça ! Emparez-vous de lui les gars, lâcha le contremaître.
Yora savait le sort qui était généralement réservé aux avestites esseulés. Bien qu’il en ait envie, il ne pouvait laisser faire cela. Le jeune Baron sortit de l’ombre.
— Il faudra me passer sur le corps, lança Yora.
Yora marcha vers la lumière, afin de se rendre visible pour la troupe.
Cela eu l’effet escompter puisque les dockers stoppèrent net et se retournèrent vers lui.
— À qui ai-je l’honneur ? demanda Perkins.
— Je suis le Baron Yora Artorius Hawkwood et cet homme est mon confesseur.
— Avec tout le respect que je vous dois, vous n’avez rien à foutre ici seigneur Baron, répondit le contremaître nullement impressionné.
Il fit un signe à ses hommes d’encercler le Baron.
Lui ainsi que ses hommes étaient concentrés sur le Baron et le jeune prêtre. Le contremaître n’avait pas remarqué l’ombre qui venait de se glisser derrière lui.
— Et si nous discutions ? murmura Korvan juste après avoir placé une lame sous la gorge de Perkins.
— Stop ! hurla Perkins à ses hommes, une sueur froide ruisselait le long de sa nuque.
Cette fois-ci, sa voix n’était plus aussi assurée.
— D’accord que voulez-vous ? Le contremaître tentait de se reprendre.
— Un trafic d’armes a lieu ce soir dans les docks. Je veux savoir où ? annonça Yora en fixant le contremaître qui avait toujours la dague sous la gorge.
— De quoi parlez-vous ? Il n’y a pas de trafic en cours.
— Sven le recruteur, où est-il ? s’agaça le jeune Baron.
— Il n’est pas là, et il n’a pas intérêt car la guilde des dockers n’a rien autorisé.
— Vous devriez vous renseigner en ce cas, murmura le jeune conseiller.
Il relâcha légèrement son étreinte pour permettre à Perkins de prendre sa radio. La bouche sèche, un peu hésitant, Perkins appela le surveillant à la salle de contrôle.
— Andres, vérifie tous les docks.
Une minute plus tard, qui parut une éternité à Perkins.
— On a les caméras du Dock 212 HS, chef.
— Envoie du monde de suite, ordonna-t-il.
Perkins regarda ensuite Yora.
— D’accord, je suis disposé à vous croire, suivez-moi à la salle de contrôle, je vous prie, seigneur Baron, marmonna-t-il.
Yora regarda Korvan et lui fit un signe de tête. Celui-ci enleva sa dague et se replaça à côté du Baron.
— Nous vous suivons contremaître, fut la seule parole de Yora.
Ils marchèrent une dizaine de minutes vers un grand entrepôt sur lequel reposait une grande tour de contrôle.
La petite troupe arriva finalement quelques minutes plus tard dans la salle de contrôle des docks d’Hakkonen.
Yora se dirigea vers les fenêtres et regarda au travers des vitres de la salle. En dessous de lui, il vit le bal des dockers qui chargeait un petit porte-container aux couleurs de l’Empire.
« Du ravitaillement pour l’enclave impériale », pensa-t-il.
— Alors Andres ? demanda Perkins brisant le silence qui régnait dans la salle.
— Nos gars arrivent au 212, chef.
Le technicien mit l’intercom sur haut-parleur et tous purent entendre :
— Chef, il y a des avestites, un paquet, il nous tire dessus, argggghhhh…
La voix se tut et ils entendirent une voix de femme hurler :
— On continue.
Pendant ce temps, Valdo et ses hommes étaient sur le toit d’un Hangar voisin. Il observait la tour de contrôle à l’aide de jumelles. Il pouvait distinguer le jeune Baron qui se tenait devant les vitres.
— Qu’attends-tu ? Petit Baron, s’impatientait le tueur.
— Où est ce dock ? ordonna Yora d’un ton qui ne souffrait aucune contestation.
— À 800 m au Nord, seigneur Baron.
— OK, on y va, trancha Yora avant de sortir et dévaler les escaliers, suivi immédiatement après par Korvan et Vlad.
Perkins resta un instant figé avant de lancer :
— Andres sonne l’alarme, que tous les hommes dispos s’équipent.
Valdo vit le Baron et sa suite sortir de la tour en courant.
— Ça y est, ils se sont décidés dit-il et en se retournant vers ses hommes :
— On bouge, dit-il simplement.
Rapidement, Yora, Korvan et Vlad arrivèrent à l’endroit où les dockers étaient morts. Les caisses, entreposées là, étaient encore en feu et une forte odeur prenait aux narines. Yora eut une moue de dégoût en avisant les corps des hommes qui gisaient à terre et ne perdit pas un instant pour repartir, ignorant les râles d’agonie des quelques rares survivants.
Vlad reconnut immédiatement l’odeur de l’huile Khâ et se demanda ce que ses frères pouvaient bien venir faire ici.
Ils laissèrent les cadavres calcinés et continuèrent leur chemin jusqu’au dock 212 qui était encore à une centaine de mètres d’eux.
À peine repartis qu’au détour d’une rue, ils tombèrent nez à nez sur une troupe avestite, menée par Éole.
La diaconesse les aperçut également et reconnaissant Yora, hésita un instant mais se remémorant les paroles de l’Evêque Paulus.
« La Sainte Flamme guide vos pas ma sœur ne l’oubliez pas et si votre frère est un innocent, il ira au paradis. »
— Tuez ces hérétiques, ordonna-t-elle en désignant du doigt quatre de ses novices, avant de repartir avec le reste de sa troupe.
Puis se retournant une derrière fois pour regarder Yora :
— Pardonne-moi, mon frère, murmura-t-elle.
Les quatre novices allèrent tirer avec leurs lance-flammes mais Yora fut plus rapide. En combattant expérimenté, celui-ci bondit se mettre à couvert sur le côté, tout en dégainant son pistolet. Dans le même temps, Korvan sauta également à l’abri, tandis que Vlad protégé par sa robe ignifugée et sa foi envers le Pancréateur décida de rester immobile et dégaina son lance-flamme miniature.
Caché derrière des caisses, Yora ne laissa pas le temps à ses ennemis de tirer et fit feu à trois reprises, sa première balle tua net un des novices, la seconde se perdit dans la nuit et la dernière en toucha un deuxième à l’aine. Ce dernier s’effondra, hurlant de douleur.
Vlad fut également plus rapide que ses confrères et sans la moindre hésitation appuya sur la détente et une langue de flamme aspergea les quatre avestites.
Les survivants se jetèrent en hurlant dans le port pour éteindre leurs tuniques en feu.
Le combat venait de prendre fin avant même d’avoir commencé.
Se remettant debout, Yora n’en revenait pas de l’ordre qu’avait lancée sa sœur.
« Comment a-t-elle pu ? » pensa-t-il.
« Je suis son frère, merde ! »
— On repart et cette fois-ci, on essaie d’être discret. Hein ! frère Vlad ! dit Yora de son ton de commandement.
— D’accord, mon seigneur, répondit simplement Vlad.