L’inconnue de la Cité-Baby - Alain Lozac’h - E-Book

L’inconnue de la Cité-Baby E-Book

Alain Lozac’h

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Beschreibung

La découverte du corps d'une femme lance Anita Goddard dans une enquête palpitante !

Le corps d'une jeune femme est découvert sur un terrain dans un quartier un peu particulier d'une ville de l'Ouest de la France. L'endroit, pour le moins pittoresque, lieu de villégiature d'été, est constitué de bicoques en bois et en tôle construites en bord de mer depuis le début des congés payés.

Anita Goddard, jeune lieutenant de police, originaire de Martinique et récemment mutée au commissariat de Belleville-sur-Mer, est chargée de l'enquête. Elle doit dans un premier temps découvrir l'identité de la victime dont la mort remonte à plusieurs semaines.
Grâce à la découverte de traces de crottes d'oies bernaches sur l'imperméable de la victime, oiseaux migrateurs qui viennent hiberner dans la baie, elle peut cerner de plus près la date de la mort de la jeune femme …

Après des recherches, elle reconstitue les événements qui pourraient justifier sa présence à Belleville-sur-Mer...
Une enquête bien difficile qui l'amène à s'intéresser de près au milieu politique de la ville. Anita Goddard parviendra-t-elle à découvrir la vérité ?

Plongez-vous sans plus attendre ce polar à Belleville-sur-Mer et découvrez la vérité qui entoure la vie politique d'une petite ville en apparence sans histoires.


EXTRAIT

Anita, après deux heures sur place, regagna son appartement. L’agent Mareuil la déposa au pied de l’immeuble. Elle lui demanda de venir la chercher le lendemain, elle l’appellerait vers 8 h.
Mika, son chat vint à sa rencontre. Elle le prit dans ses bras, le caressa puis le reposa. Elle examina les lieux afin de voir s’il n’y avait pas trop de dégâts car il avait du mal à se faire à sa nouvelle vie. Il lui avait griffé les jambes à plusieurs reprises la semaine précédente. Il était nerveux, avait pris du poids. C’était pourtant un animal calme jusqu’alors. Un Highland Fold à poil gris-bleu et à une seule courbure des oreilles. Ne connaissant pas encore suffisamment le quartier, Anita le maintenait reclus toute la journée. C’est probablement cela qui le stressait… Si cela durait, elle irait voir un vétérinaire…
Elle n’avait pas encore eu le temps de défaire tous les cartons après son déménagement. Son trois-pièces se situait au rez-de-chaussée d’une résidence récente dont les propriétaires avaient du mal à louer du fait de la crise. Les promoteurs avaient construit des immeubles locatifs bien au-delà de la demande, avaient appâté des acheteurs par d'alléchantes déductions fiscales.
Anita avait réussi à négocier le loyer, de toute façon, largement inférieur à ce qu’elle payait auparavant dans la région parisienne. Elle descendit le volet roulant du séjour et se déshabilla. Elle avait l’impression d’avoir sur elle l’odeur du cadavre.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Alain Lozac'h, installé en Bretagne près de Saint-Brieuc, passionné d'histoire, est l'auteur d'une vingtaine d'ouvrages. Après une carrière d'ingénieur en chef territorial dans une grande collectivité s'occupant de routes, d'ouvrages d'art, de ports, de nouvelles technologies et de réseaux à haut et très haut débit, il poursuit ses travaux de recherches et d'écriture.

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Veröffentlichungsjahr: 2018

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L’inconnue de la Cité-Baby

Roman

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

© Lys Bleu Éditions—Alain Lozac’h

ISBN : 978-2-85113-509-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

 

 

Du même auteur

 

 

Mystère à Orsay, La Gidouille, 2018

Grandeur et décadence des mines d’argent en Bretagne, avec Servane Duterne et Noël Brouard, Goater, 2016

Une femme dans la Résistance, La Gidouille, 2017

La clairière du mensonge, L’Harmattan, 2015

Les pirates de la liberté, Coop Breizh, 2014

Visages de la Résistance bretonne, Coop Breizh, réédition 2013

Naufrages en eaux troubles, Astoure, 2012

Mystère au musée, Mon petit éditeur, 2012

Les ailes de la fraternité (l’escadrille Normandie-Niemen), Oskar, 2010

La piraterie, de l’antiquité à nos jours, Gulf Stream, 2010

Les ailes de la liberté, Oskar, 2009

Avec Fleuriot de Langle et La Pérouse (1785-1788) ; Carnets de bord des aventures d’un marin breton, Yoran Embanner, 2009

Ports de Bretagne atlantique, de Brest à Bourgneuf-en-Retz, histoire d’un patrimoine maritime, Coop Breizh, 2008

Ports de Bretagne-Nord, histoire d’un patrimoine maritime, de Cancale au Conquet, Coop Breizh, 2006

Jim Hawkins, gentleman corsaire, La Découvrance, 2007

Port Coton, Siloé, 2006

Petit lexique de la seconde guerre mondiale en Bretagne, Keltia Graphic, 2005

Sur les Routes de Bretagne, Coop Breizh, 1999

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Il est bon que les romanciers sachent que ce n’est pas toujours commode de mourir »

 

John Irving

Dernière nuit à Twisted River

Éditions du Seuil 2011.

 

 

 

 

 

 

La vie est un drame dont chaque minute vous rapproche de la mort

Tuomas Kyrö

Les tribulations d’un lapin en Laponie

Éditions Denoël 2012.

 

**

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Avertissement habituel !

 

Toute ressemblance avec des personnes, des événements qui se seraient produits, ou qui pourraient se produire à l’avenir, ne peut être qu’une pure coïncidence due à l’imagination de l’auteur, de même pour certains lieux évoqués dans ce livre.

 

*

 

 

 

 

 

 

 

1

 

 

 

Anita s’approcha du cadavre. Il était plaqué contre une haie, recouvert de branches. Un corps de femme habillée d’un imperméable de couleur claire. Elle eut un haut-le-cœur. Ce n’était pas la première fois qu’elle était appelée sur les lieux d’un crime. Mais cette fois elle ressentit comme un malaise, comme la réminiscence d’un drame qui l’avait touchée de près, de très près… Depuis combien de temps était-elle là ?

C’était un vendredi de la mi-décembre. Une grosse tempête venue de l’Atlantique avait déferlé dans la nuit du mercredi au jeudi. Un homme s’était rendu à la Cité afin de vérifier s’il n’y avait pas trop de dégâts sur son cabanon.

Le vent s’était calmé, il faisait frais, le soleil se couchait à l'horizon quand la lieutenant de police Anita Goddard arriva sur les lieux, vers 17 h 30. Il y avait déjà beaucoup de monde sur le petit terrain.

Beaucoup trop de monde, pensa-t-elle. La meilleure façon de bousiller une enquête, de perdre des indices. Première chose à faire, dégager tous ceux qui n’avaient rien y à faire, des gens qui devaient habiter dans le coin, que cela leur plaise ou non. Il y avait là le SAMU, deux policiers en patrouille dans le secteur. Ils s’étaient rendus sur place dès que le commissariat avait reçu l’appel,

Elle fit signe à l'un d'eux, un balèze ; ses collègues le surnommaient Baloo probablement du fait de son physique, un peu ours mal léché. L'autre du même acabit, le brigadier Danacol, parlait toujours de son taux de cholestérol qu’il devait surveiller tous les mois. Le commissariat était-il en surpoids ?

Elle demanda à Baloo de faire reculer tous ces curieux au-delà du périmètre qu’il convenait d’établir aux abords du terrain, puis de noter leurs noms et adresses. Avec plus ou moins de bonne grâce, ils finirent par s’éloigner sans pour autant quitter les lieux.

 

Le médecin du SAMU lui confirma que la mort remontait à plusieurs jours, probablement à plusieurs semaines. Sa présence n’étant plus indispensable, il quitta les lieux. Le corps allait être transféré au service de la médecine légale dès que les agents de la police scientifique auraient procédé au relevé de tous les indices.

Le terrain était humide, l’herbe grasse, d’une hauteur de trente centimètres, des feuilles mortes un peu partout. Une haie, une barrière en bois couleur bleu marine, une petite terrasse réalisée avec des dalles en béton devant une cabane également en bois. Le tout devait faire une centaine de mètres carrés tout au plus. Des terrains similaires, de tailles différentes, il y en avait bien des dizaines dans cette cité-jardin, que l’on appelait couramment la Cité-Baby.

Tout ici était petit ; les ruelles, les terrains, les cabanes, les gens qui occupaient les lieux de génération en génération depuis les années 1930, le Front Populaire, les congés payés. Des gens simples…

Un de ses collègues, le brigadier Mareuil l’avait accompagné sur les lieux, sinon elle se serait perdue.

Anita Goddard, en poste à Belleville-sur-mer depuis un mois à peine, n’avait pas encore eu le temps de se familiariser avec la ville et ses quartiers. Surtout celui-là, aucun panneau indicateur pour y mener.

Pour vivre heureux, vivons cachés !

C’était la première affaire importante depuis son départ de la région parisienne. Elle avait enfin obtenu, après dix demandes, une mutation en province, histoire de prendre le large, de souffler un peu.

Elle sortit son smartphone, prit une vingtaine de clichés de la femme, des lieux.

 

*

 

Les agents de la police scientifique arrivèrent enfin. Ils s’excusèrent de venir si tard, mais ils avaient été appelés pour une autre affaire à près de cent kilomètres.

Le responsable de l’équipe, Pierre Lefranc, un grand type à la voix grave demanda à Anita de faire en sorte que tous ces gens dégagent au plus vite. Elle précisa que leurs noms et adresses avaient été relevés. On ne comptait plus les affaires où le coupable se trouvait là dès le début de l’enquête, à quelques mètres des policiers. On en avait même vu participer bénévolement aux recherches de personnes disparues, en réalité assassinées…

Un rideau en toile avait été planté autour de l’endroit où se trouvait le cadavre, histoire de ne pas dévoiler d’éventuels indices laissés sur place. Habillés d’une combinaison blanche, de gants, de masques les deux policiers, un homme et une femme, inspectèrent les lieux avec minutie. Tout ce qui se trouvait dans l’herbe au pied de la haie fut prélevé avec des pincettes, rassemblé dans des sachets de plastique. Des prélèvements furent également opérés sur les vêtements et les chaussures de la victime. Aucun sac à main ne fut trouvé à proximité, ni de bijoux hormis les boucles d'oreilles. Pas de téléphone mobile non plus ! Il restait à enlever le corps. Pour cela un véhicule était attendu.

 

Anita n’avait pas en mémoire la moindre déclaration de disparition de femme de cet âge enregistrée ces derniers temps au commissariat.

 

Depuis trois jours on cherchait vainement un homme de 75 ans échappé d’une maison de retraite. Il avait réussi à fausser compagnie aux surveillantes qui l’avaient déjà récupéré plusieurs fois auparavant au troquet du quartier à boire des petits rouges et à jouer aux cartes. Cette fois, chou blanc ! Aucun des clients attitrés du bar « Les copains d’abord » n’avait aperçu M. Bernardet.

 

Les premières investigations terminées, le corps fut délicatement placé sur un brancard. Direction le service de médecine légale. L’emplacement, libéré du cadavre, fut à nouveau photographié. Tout le monde s’apprêtait à quitter les lieux quand Anita demanda que l’on relève les empreintes laissées sur le terrain, bien que la plupart devaient être celles des curieux et des enquêteurs. On ne sait jamais !

 

 

 

 

 

 

 

2

 

 

 

Anita, après deux heures sur place, regagna son appartement. L’agent Mareuil la déposa au pied de l’immeuble. Elle lui demanda de venir la chercher le lendemain, elle l’appellerait vers 8 h.

 

Mika, son chat vint à sa rencontre. Elle le prit dans ses bras, le caressa puis le reposa. Elle examina les lieux afin de voir s’il n’y avait pas trop de dégâts car il avait du mal à se faire à sa nouvelle vie. Il lui avait griffé les jambes à plusieurs reprises la semaine précédente. Il était nerveux, avait pris du poids. C’était pourtant un animal calme jusqu’alors. Un Highland Fold à poil gris-bleu et à une seule courbure des oreilles. Ne connaissant pas encore suffisamment le quartier, Anita le maintenait reclus toute la journée. C’est probablement cela qui le stressait… Si cela durait, elle irait voir un vétérinaire…

 

Elle n’avait pas encore eu le temps de défaire tous les cartons après son déménagement. Son trois-pièces se situait au rez-de-chaussée d’une résidence récente dont les propriétaires avaient du mal à louer du fait de la crise. Les promoteurs avaient construit des immeubles locatifs bien au-delà de la demande, avaient appâté des acheteurs par d'alléchantes déductions fiscales.

Anita avait réussi à négocier le loyer, de toute façon, largement inférieur à ce qu’elle payait auparavant dans la région parisienne. Elle descendit le volet roulant du séjour et se déshabilla. Elle avait l’impression d’avoir sur elle l’odeur du cadavre.

La salle de bain lui plaisait bien. C’est pour cela qu’elle avait choisi cet appart. La déco moderne et l’espace n’avaient rien à voir avec son deux-pièces à Paris. Elle se glissa sous la douche après avoir laissé l’eau prendre la bonne température. Elle se savonna abondamment, resta plusieurs minutes immobile sous le jet. Elle se massa les seins. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas senti les mains d’un homme l’enlacer, la caresser. La dernière fois, c’était trois mois auparavant avec celui qu’elle venait de quitter. Elle avait choisi de s’en éloigner, de prendre le large… Elle avait eu la chance d’obtenir cette mutation à Belleville.

 

 

*

 

Michel Legrand, son amant, son ex, était aussi son supérieur au commissariat. Leur liaison avait débuté lors d’une planque dans un immeuble d’une dizaine d’étages. Un appartement avait été loué afin de surveiller jour et nuit un malfrat habitant un pavillon en contrebas.

Un dénommé Jimmy à la tête d’un réseau de trafic de stupéfiants. Il était impossible de placer en permanence un véhicule banalisé devant chez lui. Il fallait prendre un peu de hauteur. Anita était de quart ce soir-là quand Michel Legrand vint, vers 22 h, faire un point.

 

Il ne se passe rien, répondit Anita qui avait pris le soin de faire des provisions de lecture (le dernier roman d’Anna Gavalda.)

Cela fait deux jours qu’il est parti, il n’y a personne dans cette maison !

Il faut continuer la veille, il va revenir. On a des informations sur ce qu’il manigance.

Quoi ?

Une bonne cargaison, de quoi alimenter la banlieue pour plusieurs mois.

Elle vient d’où ?

Une équipe suit cela, je t’en dirai plus une autre fois…

 

En attendant, ils burent un café côte à côte. Puis leurs mains se rejoignirent. La surveillance fut, quelques moments, perturbée. Cela faisait déjà plusieurs semaines que Michel Legrand s’intéressait à elle. Anita n’était pas insensible à son charme, à son physique.

 

La quarantaine, à peine. Le cheveu ras, une coupe militaire. Son père avait « fait » l’Algérie. C’était un sportif, un adepte du trekking, de la course à pied. Le marathon de Paris, il le faisait régulièrement avec, à l’arrivée, un temps honorable sans être épuisé. Un homme que l’on croiserait tous les matins dans l’escalier de son immeuble sans se douter qu’il est policier ; comme tous ceux qui travaillent dans l’ombre, en civil. Il s’est donné à fond dans son métier, avait gravi à une vitesse fulgurante (suspecte pour certains) les grades dans la police. Avait-il des appuis au ministère ? Un parcours exceptionnel !

C’est grâce à lui qu’avait été démantelé le réseau autour d’un malfrat dénommé Franck Lagrange lié au milieu de la drogue et du racket dans la région parisienne qui sévissaient dans certains beaux quartiers. Cocaïne, héroïne, salles de jeux occultes, prostitution de luxe pour hommes d’affaires en manque d’accompagnatrices durant leur séjour, un soir ou deux, à Paris. Chantage, de temps en temps, auprès de ces mêmes hommes, en général mariés tombés dans une souricière et ayant de hautes responsabilités dans de grands groupes internationaux qui ne voulaient pas voir leur image ternie par de sombres histoires de cul !

C’était à se demander si Michel Legrand n’en savait pas plus que Franck Lagrange sur les clients de ce réseau et les relations qu’il entretenait avec certaines personnalités proches du pouvoir. Il y a souvent mélange des genres…

On peut dire qu’il avait sacrifié sa vie personnelle, sa vie familiale au service de la police. Il n’était pas le seul ! Pour autant, cela ne rend pas plus heureux quand on rentre seul dans un appartement vide, déserté par son épouse, ses enfants. Derrière les honneurs accordés par la République à ses serviteurs, il y a souvent des vies gâchées, des renoncements, des souffrances invisibles…

Anita était sous ses ordres quand la brigade réussit à intercepter des renseignements sur ce Jimmy.

 

*

 

Cette liaison, si on peut la qualifier ainsi, fut de courte durée. Plusieurs nuits à faire l'amour, un court séjour de trois jours dans un hôtel d'Honfleur. Anita apprit un soir par Michel qu'il avait deux enfants d’un premier mariage dont il devait s’occuper un week-end sur deux, ainsi qu’une semaine sur deux durant les vacances scolaires. Elle décida de lever le pied, de prendre le large…

 

Coup de bol, un poste venait de se libérer à Belleville, suite au départ d’un collègue qui venait de rejoindre une société de gardiennage et de sécurité. Ça payait mieux apparemment dans le privé !

 

 

 

 

 

 

 

3

 

 

 

Anita, installée sur son canapé, Mika à ses côtés, nota les éléments qui lui venait à l'esprit afin d'engager au plus vite l'enquête. Il fallait impérativement inspecter toute cette « cité » afin de vérifier s'il n'y avait pas d'autres cadavres sur des terrains voisins. Elle appela le commissariat afin que dès le lendemain matin une équipe avec des chiens inspecte les lieux. Elle demanda qu'il y ait au moins deux chiens. Le rendez-vous fut fixé à 10 h après plusieurs tergiversations, les chiens…, l'équipe déjà mobilisée sur une autre affaire de disparition d'un enfant, etc.

 

Après une courte nuit, Anita se retrouva la première sur les lieux avec Mareuil qui s'était pointé à l'heure, avait sonné afin de la prévenir qu'il l'attendait au pied de son immeuble.

Il faisait froid, un vent d'Est s'était installé dans la baie. L'équipe cynégétique se présenta avec une demi-heure de retard. Anita salua ses collègues emmitouflés dans leur gabardine, leur expliqua l'enquête en cours. Deux chiens tenus en laisse furent sortis de la camionnette. Ils se dirigèrent d'abord vers le terrain où le corps avait été découvert la veille. De là elle demanda à chacun de ses collègues d'inspecter tous les terrains. L'un partit vers la gauche, l'autre vers la droite. Elle avait en main une vue aérienne de la Cité Baby trouvée sur Google Earth que Mareuil avait imprimée en plusieurs exemplaires.

Après une heure de marche, Anita qui suivait la chienne Bella et son maître se retrouva au point de départ. Aucun cadavre. Un seul terrier de lapin découvert sous un mobile home, ce qui excita un moment Bella. Le deuxième policier avec Rocky les rejoignit. Pas le moindre indice sur son parcours. Anita leur demanda de refaire l'inspection en inversant leur cheminement. On ne sait jamais ? Les collègues firent plus ou moins comprendre que cela ne servirait pas à grand-chose. Ils se plièrent aux ordres bon gré mal gré. Une heure plus tard, ils se retrouvèrent au même endroit, avec le même résultat. Un policier fit remarquer qu'ils savaient parfaitement comment leurs chiens réagissaient et qu'ils pouvaient quadriller le secteur en long, en large, les chiens ne pouvaient faire plus... Il était manifeste qu'aucun cadavre ne se trouvait dans le périmètre de la Cité qui avait été inspecté.

Mais il pouvait y en avoir d'autres ailleurs...

 

*

 

Les premiers éléments concernant la victime n’arrivèrent que le lundi après-midi, le 22 décembre. Anita trouva sur sa boîte mail le rapport du médecin légiste ainsi que le relevé des indices effectué par ses collègues de la police scientifique. Elle allait pouvoir s’attaquer à l’enquête, son supérieur le commissaire Jean-Marc Thébault lui ayant demandé de s’y consacrer en priorité. Elle n’avait pas attendu de recevoir ces rapports pour se rendre à nouveau sur les lieux durant le week-end.

 

Cette disparition n’avait pas, depuis que la presse en avait parlé, suscité la moindre remontée d’informations. Il y avait des crimes de proximité qui indignait l’opinion publique, la presse locale et nationale comme l’emblématique affaire « Grégory » ; d’autres de « lointainité » qui n’intéressaient personne, si ce n’est quelques journalistes ou animateurs d’émissions de télévision, une fois l’affaire résolue.

 

Anita avait arpenté une nouvelle fois la Cité-Baby, puisque c’est ainsi que l’on dénommait ce lieu pour le moins pittoresque. Plusieurs résidents étaient revenus passer quelques moments sur leur parcelle. Certains avaient des petits potagers, d’autres cultivaient des fleurs. Il était temps de nettoyer, d’arracher des mauvaises herbes aux premiers jours de l’hiver.

 

Henri Dugoin, le propriétaire du terrain sur lequel le cadavre avait été découvert, lui avait donné rendez-vous dans son cabanon. Il lui rappela qu’il était venu pour jeter un coup d’œil à sa bicoque après la tempête des derniers jours, le vent avait soufflé jusqu’à 130 kilomètres par heure. En général après ce genre d’intempéries il y avait toujours des dégâts plus ou moins importants, des branches cassées, des bouts de toit arrachés.

Henri Dugoin était retraité depuis une dizaine d’années après avoir trimé durant quarante ans dans une usine sidérurgique. Cela faisait près de cinquante ans qu’il fréquentait les lieux. Ses parents avaient acheté un bout de champ après la guerre 39-45 pour une bouchée de pain, quelques francs de l’époque, de la main à la main. Il y avait déjà pas mal de monde sur le site. Un collègue de son père lui avait passé l’information comme quoi il y avait encore de la place à la Cité. Alors il n’avait pas hésité. Il avait pris goût à cette atmosphère, à cette fraternité. Son père avait construit, sans rien demander à la mairie, une petite cabane en bois pas bien plus grande qu’une caravane. Puis au fil du temps il avait ajouté quelques annexes, une chambre supplémentaire, un abri pour les vélos puis les mobylettes, car au début on y venait en deux-roues avec tout le barda sur le porte-bagages, y compris les gamins. Pas de bus, pas de voiture à cette époque.

 

Il invita Anita à entrer, remit l’électricité en appuyant sur le bouton du compteur. Il lui proposa un café. Maintenant que le jus était rétabli, tout pouvait fonctionner. D’un placard il sortit une vieille cafetière, un filtre, du café, deux tasses et du sucre qui avait pris un peu d’humidité.

En attendant, Henri lui fit visiter les lieux. Le mobilier était plutôt vieillot, la déco pas très tendance. Elle aurait besoin d’être relookée après une visite chez IKEA, se dit Anita.

 

Installée sur une banquette en moleskine hors d’âge, la discussion s’engagea par bribes.

Pouvait-on suspecter Henri de quoi que ce soit dans cette affaire ? La victime n’avait aucun lien avec lui ! clama-t-il à plusieurs reprises.

Qu’en savait-il ? On ne l’avait pas encore identifiée ! Quand son corps avait-il été déposé là ? Mystère ! Qui étaient les gens occupant les terrains voisins ?

 

Au début, Henri resta sur une certaine réserve. En effet, tous les résidents de cette Cité étaient dans l’illégalité. Elle s’était constituée au fil des ans, les gens achetaient des lopins de terre dans une zone inconstructible en bordure du littoral sans véritablement disposer d’acte de propriété en bonne et due forme. Les parcelles se vendaient de la main à la main, avec des dessous de table, en prenant l’apéro. Quelques billets de banque et l’affaire étaient conclus. Combien de personnes occupaient les lieux ? On ne le savait pas ! Cela fluctuait d’une année sur l’autre.

 

La mairie essayait de contrôler la situation tant bien que mal. La zone avait été placée en zone de préemption afin que la ville puisse acheter les terrains quand une vente était déclarée. Mais personne ne prenait la peine de se compliquer la vie avec des formalités pour indiquer aux autorités qu’il avait décidé de céder son terrain. Bien au contraire…

 

Bref il régnait une certaine suspicion, pour ne pas dire une suspicion certaine chez les résidents vis-à-vis des services officiels. Un moment, le maire avait envisagé de faire dégager les lieux à la manière forte, histoire de montrer qui était le patron ! Certains avaient bien proposé de nettoyer les banlieues à coup de Karcher ! Alors pourquoi pas ici ! Mal lui en prit, il dut faire face à une levée de boucliers, des reportages dans la presse nationale plutôt désobligeants. Depuis personne n’avait eu le courage d’employer la manière forte pour déloger tout ce petit monde bien sympathique.

 

La Cité-baby faisait partie du paysage, probablement pour encore pas mal de temps. Les résidents avaient beau jeu de mettre en évidence les constructions de villas en bordure de mer un peu partout, ces personnalités parisiennes qui, à quelques kilomètres de là, trouvaient facilement un arrangement avec la loi sur la protection du littoral pour construire, pour agrandir, leur résidence secondaire. Un entraîneur de football, un éditeur, un écrivain habitué des émissions « people »…

Eux n’avaient que ce petit plaisir, vivre en communauté, prendre l’apéro au coucher du soleil sur une terrasse, sous une pergola faite de matériaux de récup. Certains allaient à la pêche à pied, ramenaient des palourdes, des coques, des crevettes, d’autres jouaient à la pétanque dans les allées de la cité. Ici se retrouvaient trois ou quatre générations, l’instant d’un repas autour d’un barbecue.

 

*

 

Anita usa de persuasion, promit de ne rien dévoiler qui ne soit strictement utile à l’enquête. Après avoir fait appel aux chiens policiers, elle aurait bien pu faire intervenir une brigade entière pour fouiller toutes les « résidences » de la cité au pas de charge, au peigne fin. Solution peu efficace probablement. Il lui semblait préférable de contacter les gens qui auraient pu voir quelque chose le jour, plus probablement la nuit, où ce corps avait été déposé là.

Sur la vue aérienne de la Cité qu'elle avait conservée dans son carnet, Anita pointa les lieux après avoir fait un tour avec Henri. Un chemin de terre menant à une ruelle, puis une petite placette, une dizaine de lopins avec chacun une construction. Une roulotte en bois de couleur rouge et noire, des bâtiments en bois, d’autres en tôles, des caravanes restées à demeure depuis des années. Des abris de jardin. Certains semblaient abandonnés, des herbes hautes, des signes de dégradations dus au temps. Chaque terrain disposait d'un branchement électrique partant d’un poteau en béton armé. Une vraie toile d’araignée.

 

Henri donna quand même le nom de quelques-uns des occupants et le lieu où ils habitaient sans pour autant connaître leur adresse exacte. Mais il insista plusieurs fois ; il ne souhaitait pas qu’Anita dise comment elle avait eu ces informations. Certains résidaient dans des communes des environs, d’autres dans des départements voisins, voire la région parisienne. Des recherches sur l’annuaire téléphonique permettront de les trouver, précisa Anita qui le rassura une nouvelle fois sur ses intentions. Il ne s’agissait que de découvrir la vérité sur cette affaire, rien de plus !

 

D’après Henri Dugoin, seule une de ses proches voisines à la Cité-Baby avait une fille de l’âge indiqué par Anita ; 25-30 ans. Madame Garcin ; peut-être d’autres ? Enfin, on ne se disait pas forcément tout entre voisins. Il y avait beaucoup de familles recomposées parmi les habitués de la Cité.

— De quoi écrire un roman, ajouta Henri

- Pourquoi pas ! répliqua Anita.

 

En poursuivant ainsi, par cercles successifs, en douceur, elle espérait bien établir la liste de tous ces gens qui fréquentaient la Cité-Baby. Cela prendrait du temps, il y en avait près d’une centaine.

 

 

 

 

 

 

 

4

 

 

 

Anita se cala dans son fauteuil. Elle ouvrit le carnet qu’elle utilisait habituellement quand elle commençait une enquête, au format allongé, un peu comme un livre de poche. Outre les éléments recueillis la veille auprès d’Henri Dugoin, elle ajouta les informations reçues sur sa boîte mail.

 

La victime, sur laquelle on n’avait trouvé aucune pièce d’identité, était âgée de 25-30 ans, de taille moyenne, 1 m 70, poids d’environ 63 kilos. Cheveux mi-longs couleur châtain avec des mèches de diverses teintes. Yeux marron, visage portant encore de légères traces de maquillage. De prime abord, pas de violence sexuelle, mais elles pouvaient avoir disparu naturellement avec le temps.

 

Une jupe portant une étiquette « H et M », un modèle récent. Un chemisier, acheté chez « Zara ». Ces deux vêtements étant référencés dans les collections automne-hiver selon les informations disponibles sur les catalogues en ligne de ces deux marques. Les chaussures à petit talon, légèrement usées ; sous-vêtements : un slip et un soutien-gorge de chez « Aubade ». La victime portait également un imperméable de couleur claire avec des traces d’herbe. Une tache de couleur marron dont l’origine, difficile à cerner, était en cours d’analyse.

Aucune trace de balles, de coups mortels. Il était précisé que les analyses concernant les résidus de nourriture prélevés dans l’estomac ne donneraient des résultats que dans quelques jours. Le corps devait reposer, à l’endroit où il avait été découvert, depuis près de trois à quatre semaines, sans qu’il soit pour l’instant permis de définir avec précision la date et la cause de la mort.