La danse des Monarques - Ana Azarov - E-Book

La danse des Monarques E-Book

Ana Azarov

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Beschreibung

La danse des Monarques dépeint, à travers une mosaïque de témoignages et de réflexions, l’histoire de la génération COVID, dont les premiers pas dans la vie adulte ont marqué la fin de l’insouciance. Il s’agit surtout du récit d’un pont qui se brise alors que nous n’en sommes qu’à la moitié. Une question se pose : devrions-nous courir le plus vite possible sans jamais nous retourner, dans l’espoir de survivre ? Ou nous laisser tomber avec les décombres ? La réponse réside en chacun de nous.


À PROPOS DE L'AUTRICE 


Ana Azarov s’est souvent tournée vers la philosophie et la sociologie dans ses lectures. À travers cet essai, qui allie témoignages et réflexions, elle donne la parole à la génération Z pour qui les premiers pas dans la vie d’adulte ont marqué la fin de l’insouciance.

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Seitenzahl: 155

Veröffentlichungsjahr: 2023

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Ana Azarov

La danse des Monarques

Essai

© Lys Bleu Éditions – Ana Azarov

ISBN : 979-10-422-0052-7

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L. 122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.

Préface

Cette préface est faite pour être relue, ou, a minima, certains brefs passages, dès lors que le lecteur a le désir de se recentrer sur l’exosquelette au fil de sa lecture. Je dirais en premier lieu que l’œuvre est à mi-chemin entre écriture poétique et crue, ce qui a, je l’imagine, le pouvoir de perturber et d’envoûter le lecteur. Tout est relatif. J’espère qu’au fil des pages, vous prendrez plaisir à vous égarer et à retrouver votre chemin, autant de fois que nécessaire, jusqu’à avoir de solides repères et trouver en vous-même des raccourcis.

Décortiquons le titre qui a lui seul, avec le contexte nécessaire, suffira à expliquer le propos de cet essai littéraire qui concentre, en deux mots bien choisis pour leurs multiples subtilités, toute la richesse et l’intensité de ce qu’il exprime.

Danse

nom féminin

Art de s’exprimer en interprétant des compositions chorégraphiques.

Comment se définit autrement cette notion ? La danse est une forme d’art vivant. Elle est un mode d’expression éphémère constitué de séquences de mouvements de corps dans l’espace, souvent accompagnés par de la musique. Les mouvements sont à dessein, intentionnellement rythmiques et façonnés culturellement.

La danse en soi est un art, et plus précisément, elle fait partie des « arts de la scène ». Elle est un objectif pour elle-même et un moyen qui permet à l’être humain d’exprimer ses émotions, pensées et expériences intérieures. C’est une forme naturelle d’auto-expression où le corps agit naturellement tout comme l’esprit.

Danser fait du bien au moral du fait de son pouvoir euphorisant. Certains spécialistes assurent que cela reconnecte à des souvenirs heureux et en particulier à des souvenirs de l’enfance.

Partout dans le monde, la danse est synonyme d’expression. Et pour terminer, elle n’est pas moins qu’une forme de langage : un langage universel qui ne connaît aucune barrière et qui surgit spontanément et revêt, selon le danseur, diverses significations et formes.

Monarque

nom masculin

Chef de l’État, dans une monarchie. Papillon diurne.

Le papillon monarque est ubiquiste. On le trouve partout : de la côte californienne (son nom vulgaire est « roi du pétrole ») à la Kate britannique, en passant par l’anagramme du nom Macron qui fait Monarc.

C’est un signe de transformation spirituelle. Le monarque est toxique pour la majorité des prédateurs. Les larves se nourrissent

d’asclépiades qui sont souvent nocives (mais pas pour le Monarque), et une partie de ces toxines ingérées par la larve perdurent dans le papillon adulte.

Avant d’avoir ses ailes, le papillon Monarque se replie sur lui-même, examinant tout ce qu’il a été, digérant les chapitres de son passé. C’est un travail de patience, un travail organique ; il s’isole du monde pour commencer sa déconstruction.

Les papillons monarques migrent sur plusieurs générations, plutôt qu’une fois dans leur vie. Il faut quatre à cinq générations de papillons monarques pour effectuer une migration complète.

Quand la chenille s’enferme dans sa chrysalide, elle n’a qu’une vague idée de ce qu’elle sera à sa sortie. Cette « idée » s’appelle un disque imaginal, un groupe de cellules à partir duquel seront formées les différentes parties dont le papillon aura besoin pour voler.

Vous aussi, sur le plan métaphorique, vous avez des disques imaginaux, des modèles profondément inscrits dans votre psyché qui vous aident à savoir qui vous êtes. Vous pouvez vous en servir pour vous reconstruire durant les phases de transition.

On sait que le papillon commence sa vie sous forme de chenille. Mais comment cette créature rampante peut-elle développer des ailes et s’envoler ? Eh bien, elle se digère, littéralement.

Quand la chenille est prête à se transformer, elle commence à dévorer les feuilles à une vitesse alarmante, stockant son énergie et ses forces créatrices dans une frénésie alimentaire qui précède la transition. Elle fabrique ensuite un solide exosquelette pour se protéger durant ce sale travail de transformation. À l’intérieur de sa chrysalide, la chenille commence à se manger, digérant et assimilant chaque parcelle de son être, jusqu’à devenir une soupe cellulaire. Cette soupe contient les composants de sa forme future. Quand le papillon a digéré son passé, il commence sa lente métamorphose, se fabriquant les ailes qui lui permettront de s’envoler.

Voici désormais la description finale de mon travail, qui donne, comme je l’imagine, également lieu à divers spectres d’interprétation.

J’aimerais définir ce livre comme étant une pincée de roman sur un lit d’essai philosophique.

Si l’on doit se préoccuper d’une seule chose sur cet ouvrage, ce n’est pas de savoir à tout prix de quoi il parle mais plutôt de quel sujet il ne traite pas. Effectivement, ce que je tiens à démontrer c’est qu’à la manière de chaque être humain fait de complexité, nos relations et notre système ont des subtilités insaisissables tant elles s’entremêlent à la manière de papillons multicolores aux diverses formes, s’envolant à travers les bois dans une danse hallucinante rythmée de battements d’ailes vaporeux.

Dans une chronologie à la fois linéaire et inconstante, tout dépend de votre point de vue, et de l’idée que vous avez de la temporalité et du réel, puisque je vous emmène aussi bien dans le monde que dans ma tête ce livre est une danse.

C’est un assemblage de pièces d’un puzzle dont le résultat est une chorégraphie féerique mêlant des témoignages qui s’entrecroisent, les incertitudes et les promesses d’une époque où la forêt paraît s’embraser, et où l’on ne voit dans l’obscurité de ce paysage que le reflet des feuillages et des gouttes de rosée, signe d’une nature terrestre et humaine qui s’efforce de se battre. À ce propos, la lueur que l’on verra sur ce puzzle achevé ne sera pas seulement le reflet blanchâtre du clair de lune, mais aussi le halo de lumière dorée et d’étincelles brillantes émanant de cette nuée de lépidoptères.

Les premiers jours

Nous vivons tant de premiers jours au cours de notre vie. Les premiers jours ont en commun l’importance des espoirs et des fantasmes qu’ils induisent. Qu’on les redoute ou qu’on les idéalise, ils suscitent tout notre intérêt, et ainsi nous ôtons toute valeur aux jours qui les suivent. Si souvent célébrés et remémorés à l’instar des naissances, des mariages, des rencontres, nous vivons tant de débuts qui seront tous les premiers jours d’un reste et d’un temps dont on ne fera pas éloge. Et nous avons tort. En effet, ce ne sont pas les premiers jours qui nous apprennent la patience. Au contraire, ils nous mentent et nous laissent dans le flou. Combien peuvent affirmer au premier jour de leur mariage qu’ils sont voués à en faire une période unique, éternelle ? Combien peuvent être certains d’avoir encore de beaux jours devant eux ?

Aucun. Jeune, vieux, malade, en bonne santé… aucun. Seule supposer est l’action permise par un premier jour. Seul espérer est autorisé un premier jour. Car oui, la vie est courte, mais avant tout, incertaine, prometteuse, traîtresse et c’est ce qui rend la vie libre. Et c’est ce qui fait de nous, des êtres libres. Libres de travestir la vie comme si sa durée était certaine. Libres de maltraiter le temps qu’il nous reste, avec haine. Mais le temps aussi est incertain, je dirai même assassin puisqu’il place sans cesse derrière les premiers jours, les derniers, ceux qui annoncent la fin. Parce qu’il emporte les êtres qui nous sont chers, les bons moments. Et c’est précisément là qu’on réalise la valeur de ce reste qui suit les premiers jours. Ce reste délaissé, oublié, à s’ignorer, se négliger les uns les autres et ne trouver aucun avantage au temps que l’on vit.

En clair, l’éternelle fuite du temps nous rappelle les plaisirs simples. Et que faire de tous ceux qui n’ont pas conscience de cela ? Ceux-là mêmes qui ruinent leur temps comme s’il était éternel, aujourd’hui comprennent-ils, au bord du précipice, la richesse de leur quotidien tant négligé ? C’est en ayant vécu si longtemps avec l’ennemi insaisissable qu’était la toxicité et le vice de mon ancien compagnon, c’est quand j’ai décidé de lui faire face alors que personne ne voulait voir sa lueur aveuglante dans l’obscurité calme, c’est quand je me suis rebellée, coûte que coûte, au-delà de toute morale, que j’ai résisté, que je me suis sentie libre.

Je parle là d’ennemi insaisissable, mais c’était un leurre. Il m’a fallu plus d’une année pour lever le voile sur cette mascarade, cette emprise et ces chantages affectifs déguisés en amour sincère. Et après tout, qu’est-ce que l’amour s’il n’est pas sincère ? N’est-ce pas l’essence de l’estime qu’on porte à l’autre, la sincérité ? Peut-on qualifier une relation d’amoureuse si elle n’est que la projection d’une maltraitance physique, psychologique, affective ? Qu’est-ce qu’une photographie envoyée du haut d’un pont montrant une vue plongeante sur une masse de véhicules allant à toute vitesse, si ce n’est une façon de faire culpabiliser sa proie ? Car, nous le savons, les véritables monstres, ceux dénués de respect et de sentiments humains, seront toujours les derniers à penser à se supprimer. « Arrête ton cinéma » avais-je répondu à Bastien lorsqu’un soir d’été à trois heures du matin, il m’avait envoyé cette photo des véhicules roulants à toute vitesse sur le périphérique, apparaissant tels des points lumineux, avec une légende bien choisie pour me faire un chantage au suicide sans aucune finesse. Dommage pour lui, je le connaissais mieux que personne. S’il faisait ça, c’était parce que ses chantages ne fonctionnaient plus et que lentement mais sûrement, il perdait l’emprise qu’il avait sur moi. Ce soir-là n’était qu’un soir parmi tous les autres où je quittais l’appartement en pleine nuit pour le fuir, des bleus sur le corps et des bleus à l’âme. Il avait mal calculé son coup en m’envoyant une photo aussi spectaculaire et surtout venant de celui qui s’aimait trop pour se faire mal. Alors forcément, je n’aurais jamais pensé, tant j’ai de l’empathie envers mon prochain que je dirais ça un jour : « Arrête ton cinéma, je ne te crois pas. J’appelle ta mère pour lui raconter ? » Cela avait fonctionné. Tant mieux. Je ne me faisais pas une joie de converser avec une quadragénaire sans discernement au sujet de sa progéniture. Ça n’aurait été d’aucune utilité sachant qu’il était vingt et un ans trop tard pour lui parler de contraception. Puis, je ne voulais pas sympathiser avec celle qui finit plus tard par m’envoyer des messages remplis d’insultes comme le ferait une collégienne et me suggérer voire m’ordonner, alors que je n’avais que dix-neuf ans, d’aller me suicider, ce que je ne fis pas car même si c’était pas l’envie qui manquait, j’avais pas l’intention d’obéir à une personne aussi méprisable. Telle mère, tel fils et vu leur relation de proximité malsaine, ça valait encore plus. J’étais une souris, il était un chat. Voilà à quoi se résumait notre histoire. Rien de plus, aucun mot n’est à ajouter. J’étais une souris, il était un chat. Un chat qui se jouait de moi et ne me portait nul autre intérêt. Voilà maintenant l’instant T où j’ai pu décrire cette fausse romance en une phrase.

C’était un lundi et la météo était à se tirer une balle dans la tempe. Je me sentais bizarre, mais bon, je me sentais toujours bizarre ces temps-ci. Certainement l’habitude qu’un orage me tombe dessus quand monsieur avait ses humeurs. Je ne le saurai que bien plus tard, mais de cette relation je développerai une hypervigilance et une anxiété intense qui resteront accrochées de toutes leurs forces à chaque parcelle de mon corps.

Cela, je le devais à cet homme qui m’avait fait peur chaque jour durant ces deux ans.

À cette époque, je ne pouvais être au repos tant j’étais dans l’attente incessante et piquante d’une nouvelle attaque. Mais cette fois, ce lundi 2 mars 2020, je savais ce qu’il allait dire, et j’étais fière de savoir, sans hésiter, ce que j’allais lui répondre.

Il était cinq heures de l’après-midi et la lumière du jour s’évanouissait déjà dans la grisaille. Il nous restait deux heures de cours où l’on jouerait nos saynètes devant M. Jon.

L’autre considérait ce cours comme une option et pensait sans nul doute que je me laisserais prendre à son chantage affectif. À d’autres ! Je savais déjà ce qu’il avait en tête et ce jour-là, j’avais cessé de penser spontanément. Quelque chose en moi me guidait, comme si lassée d’être humaine, faillible et guidée par mes émotions, j’étais devenue un simple algorithme. Je le savais ; je n’avais plus qu’à suivre cette main intangible qui m’était tendue et m’exécuter.

C’était comme si une entité s’était installée en moi-même et m’avait dit une semaine plus tôt : « Écoute, c’est terminé les conneries. On a fait une réunion dans ta tête durant laquelle on a parlé de ton état et ça ne va pas du tout. Tu détruis ta santé, tu laisses ce monstre gouverner ta vie et la détruire, et toi avec. Je ne peux plus te laisser faire. Dorénavant, c’est moi qui tiens les rênes et je vais m’occuper de toi. Tu ne fais plus rien, et tu me laisses faire. Maintenant, c’est moi qui prends les décisions et tu n’interviens pas. » Suivant cette magie qui émanait de cette réelle prise de conscience, je n’ai en conséquence pas répondu à ses smileys « cœur » et ses messages des derniers jours me disant : « Ta présence me manque. » Ou bien encore celui que je n’attendais plus : « On se voit demain soir ? » Ça paraît toujours sincère quand on est comme moi, une personne qui n’emploie pas le champ lexical du sentiment sans véracité.

Il me paraissait toujours impensable d’aimer jouer avec une personne, car j’avais toujours eu en tête que certains mots ne peuvent être maquillés d’artifices, et c’était là ma faiblesse face à ce genre d’individus vicieux et mauvais. Assurément, j’en oubliais que certains avaient un langage et une pensée dont les phrases étaient dénuées de leur essence et d’une vérité propre à chaque mot. En somme, une pensée qui n’existait que dans la finalité de prédation de son hôte.

Je posais mon manteau sur la chaise lorsque je le vis près de la porte. Bastien semblait m’attendre, prêt à partir, manteau et sac sur le dos. Le regard mauvais et un faux air pressé, il me lança sans m’étouffer de gentillesse : « Tu fais quoi ? » Mais que répondre à cela ? Et comment se surpassait-il toujours plus pour me faire me questionner ? J’admirais l’effort, mais c’était superflu. Il était cerné. Qu’est-ce que je fais ? Nous avons un cours, qui même s’il est tard n’est pas une option, il m’a vu poser mon manteau sur la chaise avec la ferme intention d’y faire part. La réponse à ce « Tu fais quoi ? » paraissait sans équivoque. Il avait donc, cette fois-ci, lamentablement échoué à me faire cogiter et ma réponse fut simplement « Bah, on a cours. » Si j’avais su avant l’effet de cette réponse, cela fait nul doute, je l’aurai fait bien plus tôt ! Un hochement de tête, puis un autre, suivi d’une onomatopée se voulant culpabilisante avant de partir d’un pas décidé. En répondant logiquement, simplement, sans une once de malveillance et en faisant fi de son attitude perverse, j’avais apparemment visé dans le mille. Il avait brandi son arc et j’avais arrêté la flèche d’un revers gracieux. Il en avait pris conscience, je n’étais plus un jouet. La nature avait repris ses droits et son pouvoir sur moi s’était définitivement éteint. Je n’avais pas anéanti ce virus, mais j’en étais immunisée.

Cette anecdote confirme la réflexion selon laquelle les premiers jours ne nous donnent aucune information fiable et ne définissent ni une relation ni une situation. Les premiers jours ne sont que l’emballage qui donne envie d’aller découvrir un corps qui est la réalité, celle des autres jours.

On était début janvier deux mille vingt lorsque la nouvelle d’un virus mortel venu tout droit de Chine fit la une des médias français. Bastien essayait encore tant bien que mal d’exercer une emprise sur moi, mais je savais que c’était terminé. Je me demandais juste quand j’en serais enfin débarrassée et quand il comprendrait qu’il faut lâcher l’affaire. La solution s’était présentée à moi sur un plateau.

Le mal par le mal. Qui eût cru qu’on pouvait se débarrasser d’un virus grâce à un autre ? J’étais loin de me douter que je remercierais longtemps cette pandémie, qui me garda ce parasite à distance assez longtemps pour qu’il soit tellement dans le flou qu’il ne réalise pas que si j’avais encore voulu le fréquenter c’est pas une pandémie qui m’aurait arrêté.

Le début de cette crise avait vécu tout comme moi, une loi du silence. C’était dans un groupe d’anciens étudiants de l’école de médecine, sur l’application de messagerie WeChat, qu’un médecin ophtalmologue officiant à l’hôpital central de Wuhan, foyer de l’épidémie situé dans le centre de la Chine, avait témoigné pour la première fois de la propagation dangereuse du virus, le trente décembre 2019. Li Wenliang, avait avec bravoure, tenté d’alerter le monde sur la catastrophe qui arrivait malgré les risques qui en découlaient. La vie étant rarement tendre avec les braves, l’homme de trente-quatre ans avait fini par se révéler lui-même positif au SARS-CoV-2 auquel il succomba le sept février deux mille vingt, devenant héros national à titre posthume. C’était en Chine dans une colère silencieuse que la pandémie sonna le début d’une mise à l’épreuve de l’humanité à l’échelle mondiale.

On ne sait jamais à quoi s’attendre, de la même manière que la vérité pure ne nous est jamais donnée du premier coup et cela démontre à quel point les premiers jours ne sont là que pour nous tester et nous préparer à adhérer à une situation.

Pour comprendre encore mieux cela, il suffisait d’écouter les stratégies de communication maladroites des chefs d’État concernant la gestion de la pandémie de Covid-19. C’est ainsi que l’on observa la capacité des premiers jours à travestir la réalité qui les suit, et parfois sans enjoliver, bien au contraire.