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Bestseller de la liste USA Today !
Les dragons jumeaux ont été craints plus que tout autre métamorphe dragon à cause de Barrack et Brogan, les premiers dragons jumeaux, devenus fous et meurtriers. Leur nouvelle histoire commence avec leur mort.
Barrack et Brogan se souviennent de leur mort — et elle n’était pas douce. Lorsque la déesse Aikaterina leur donne une seconde chance de vivre — et de trouver leur âme sœur —, ils sont prêts à tout pour changer leur destinée. Ils ne s’attendaient cependant pas à ce que ce soit si difficile ! Il s’avère que leur compagne est une Humaine, une espèce sur laquelle ils ont des connaissances limitées qui vient d’une planète qu’ils n’ont jamais visitée ! Le temps presse et ils ne mettent pas longtemps à se rendre compte que remporter cette bataille va sans doute nécessiter toutes leurs compétences.
Delilah Rosewater est hantée pas des rêves de sa mort. Elle ignore pourquoi ils lui semblent si réels ou comment elle sait que le temps lui est compté. Sa frustration se renforce alors qu’elle cherche la seule personne qui, elle le sent, pourrait comprendre sa panique croissante : Sara Wilson. Elle est choquée quand, au lieu de trouver Sara, elle se retrouve face à deux hommes agaçants qui prétendent venir d’un autre monde !
Piégée dans une tempête de neige inattendue dans les Appalaches, Delilah ne sait pas quoi penser des deux hommes et de leurs grands discours à propos d’une puissante déesse, de mondes extraterrestres et de nouvelles destinées…
Auteur de renommée internationale, S.E. Smith propose une nouvelle histoire d’action qui transportera les lecteurs dans un autre monde ! Débordant de l’humour qui la caractérise, de paysages éclatants et de personnages attachants, il est certain que ce livre deviendra un nouveau favori des fans !
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Seitenzahl: 364
Veröffentlichungsjahr: 2020
Je voudrais remercier mon mari Steve de croire en moi et d'être assez fier de moi pour me donner le courage de suivre mes rêves. J'aimerais également remercier tout particulièrement ma sœur et meilleure amie, Linda, qui non seulement m'a encouragée à écrire mais a également lu le manuscrit. Et également mes autres amis qui croient en moi : Jennifer, Jasmin, Maria, Rebecca, Gaelle, Angelique, Charlotte, Rocío, Aileen, Julie, Jackie, Lisa, Sally, Elizabeth (Beth), Laurelle, et Narelle. Les filles qui m'aident à continuer !
Et un merci tout particulier à Paul Heitsch, David Brenin, Samantha Cook, Suzanne Elise Freeman, Laura Sophie, Vincent Fallow, Amandine Vincent, et PJ Ochlan, les voix fantastiques derrière mes livres audios !
—S.E. Smith
La Destinée des Dragons Jumeaux
La série Les Seigneurs Dragons de Valdier Tome 11
Copyright © 2020 par Susan E. Smith
Publication E-Book en anglais avril 2018
Publication E-Book en français juin 2020
Traduit Par : Charlotte Spender
Relu Par : Gaëlle Darde
Couverture par : Melody Simmons et Montana Publishing
TOUS DROITS RÉSERVÉS :
Cette œuvre littéraire ne peut être reproduite ou transmise sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, y compris la reproduction électronique ou photographique, en tout ou en partie, sans l'autorisation écrite expresse de l'auteur.
Tous les personnages et événements de ce livre sont fictifs ou ont été utilisés de façon fictive, et ne doivent pas être interprétés comme étant réels. Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou décédées, des événements réels ou des organisations est strictement fortuite et n'est pas voulue par l'auteur.
Résumé : Les guerriers dragons jumeaux ont une seconde chance de vivre, mais même les secondes chances ont une durée limitée. Le temps presse.
ISBN : 9781952021312 (livre de poche)
ISBN : 9781952021305 (eBook)
Romance (amour, contenu sexuel explicite) | Science-Fiction (Extraterrestres) | Contemporain | Paranormal | Action/Aventure | Fantasy
Publié par Montana Publishing, LLC
& SE Smith de Florida Inc. www.sesmithfl.com
Prologue
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Épilogue
Notes
Plus de livres et d’informations
À propos de l’auteur
Bestseller de la liste USA Today !
Les dragons jumeaux ont été craints plus que tout autre métamorphe dragon à cause de Barrack et Brogan, les premiers dragons jumeaux, devenus fous et meurtriers. Leur nouvelle histoire commence avec leur mort.
Barrack et Brogan se souviennent de leur mort — et elle n’était pas douce. Lorsque la déesse Aikaterina leur donne une seconde chance de vivre — et de trouver leur âme sœur —, ils sont prêts à tout pour changer leur destinée. Ils ne s’attendaient cependant pas à ce que ce soit si difficile ! Il s’avère que leur compagne est une Humaine, une espèce sur laquelle ils ont des connaissances limitées qui vient d’une planète qu’ils n’ont jamais visitée ! Le temps presse et ils ne mettent pas longtemps à se rendre compte que remporter cette bataille va sans doute nécessiter toutes leurs compétences.
Delilah Rosewater est hantée pas des rêves de sa mort. Elle ignore pourquoi ils lui semblent si réels ou comment elle sait que le temps lui est compté. Sa frustration se renforce alors qu’elle cherche la seule personne qui, elle le sent, pourrait comprendre sa panique croissante : Sara Wilson. Elle est choquée quand, au lieu de trouver Sara, elle se retrouve face à deux hommes agaçants qui prétendent venir d’un autre monde !
Piégée dans une tempête de neige inattendue dans les Appalaches, Delilah ne sait pas quoi penser des deux hommes et de leurs grands discours à propos d’une puissante déesse, de mondes extraterrestres et de nouvelles destinées…
Auteur de renommée internationale, S.E. Smith propose une nouvelle histoire d’action qui transportera les lecteurs dans un autre monde ! Débordant de l’humour qui la caractérise, de paysages éclatants et de personnages attachants, il est certain que ce livre deviendra un nouveau favori des fans !
Pour ceux qui n’ont pas encore lu la série des Seigneurs Dragons de Valdier, voici un petit récapitulatif.
Les Valdiers sont des métamorphes dragons. Seuls les Valdiers et leurs compagnes peuvent se lier avec les mystérieux et puissants symbiotes dorés qui sont, oui, des créatures symbiotiques ; et ces personnages se démarquent avec des personnalités uniques ! Chaque Valdier se compose de trois parties : le dragon, l’homme/la femme et leur compagnon symbiotique. Ils sont amis avec les Curizans (une espèce capable de maîtriser l’énergie qui les entoure) et les Sarafins (une espèce de métamorphes chats).
Voici un guide des personnages pour ceux qui découvrent la série :
Liste des personnages :
Delilah Rosewater : Humaine
Barrack : l’un des premiers dragons jumeaux
Brogan : l’un des premiers dragons jumeaux
Symbiote de Barrack : Whisky
Symbiote de Brogan : Gin
Rottweilers de Delilah : Moonshine et Rhum
Amber Delilah Rosewater : mère de Delilah
Daniel Alvin Rosewater : père de Delilah
Bane accouplé à Lesann (parents de Barrack et Brogan)
Merck : frère cadet de Barrack et Brogan
Zoran Reykill, dirigeant de Valdier, âme sœur de Abby Tanner :
un fils : Zohar
Mandra Reykill, âme sœur de Ariel Hamm :
un fils : Jabir
Kelan Reykill, âme sœur de Trisha Grove (fille de Paul Grove) :
un fils : Bálint
Trelon Reykill, âme sœur de Cara Truman :
des jumelles : Amber et Jade
un fils : James
Creon Reykill, âme sœur de Carmen Walker :
des jumelles : Spring et Phoenix
Paul Grove, marié àEvelyn :
une fille : Trisha
Evelyn est morte d’un anévrisme cérébral à l’âge de 19 ans.
Morian, accouplée à Jalo Reykill :
cinq fils : Zoran, Mandra, Kelan, Trelon et Creon
Jalo est mort sous une soudaine avalanche de rochers lors d’une expédition de chasse avec son frère.
Paul Grove, âme sœur de Morian Reykill :
une fille : Morah
Cree et Calo Aryeh, âmes sœurs de Melina Franklin :
une fille : Hope
Asim Kemark, âme sœur de Pearl St. Claire
Ha’ven Ha’darra, prince des Curizans, accouplé à Emma Watson :
une fille : Alice
Adalard Ha’darra, prince des Curizans (frère cadet de Ha’ven), accouplé à Samara Lee
Jaguin, traqueur valdier, âme sœur de Sara Wilson
Olie ‘Ray’ Lister, magnat de l’immobilier, marié à Mabel Lister
Earl Helman : frère de Mabel Lister
DeWayne Davis, avocat
Bubba Joe (ami de Delilah)
Rudy (cousin de DeWayne)
Mason Andrew, manager du ranch de Paul Grove, marié à Ann Marie
Aikaterina : espèce inconnue ; considérée comme une déesse par les Valdiers, elle est la plus âgée et la plus puissante de son espèce.
Arilla et Arosa : espèce inconnue ; encore jeunes pour leur espèce, elles sont jumelles et considérées comme des déesses.
Des siècles auparavant :
Aikaterina était assise au bord de la rivière d’or, ses doigts caressant les symbiotes qui grandissaient et formeraient un jour un compagnon vivant pour un guerrier dragon. Elle en tirait de la force, sachant que l’essence de son sang protégerait les dragons de Valdier pendant de nombreux siècles à venir.
Les Valdiers la considéraient comme une « déesse », mais elle n’en était pas une. Les membres de son espèce étaient des vagabonds sans autre foyer que l’univers. Ils vivaient de l’énergie qui les entourait. C’était l’essence de la vie pour eux et sans, ils périraient.
À vrai dire, son espèce dépendait probablement plus des Valdiers que le peuple de métamorphes dragons dépendait d’eux. Après tout, la première fois qu’elle était venue sur cette planète, c’était pour mourir. Le courage et l’esprit des Valdiers lui avaient donné une nouvelle vie et en échange, elle leur avait offert un soupçon de son essence : les symbiotes d’or vivant. Au fil du temps, elle avait trouvé d’autres membres de son espèce qui, comme elle, étaient faibles et mourants ; elle les avait alors amenés ici pour qu’ils guérissent.
Un sourire se dessina sur ses lèvres lorsqu’elle vit Arosa et Arilla s’ébattre dans le ruisseau. Bien que les jumelles soient âgées de milliers d’années, elle les voyait toujours comme de très jeunes enfants. Elles lui faisaient penser aux étoiles jeunes. Ayant été témoin de la création de nombreux corps célestes, elle trouvait toujours aussi fascinant d’observer la naissance d’une étoile. Elle avait découvert Arosa et Arilla dans le cosmos des siècles auparavant, leurs vies ne tenant qu’à un fil.
Arilla leva la tête, les sourcils froncés, et bougea lentement sa main pour tester l’air. La confusion assombrit les yeux dorés de la jeune déesse. Elle la regarda et pencha la tête.
— Qu’est-ce, ce que je sens, Aikaterina ?
Cette dernière leva la tête, ressentant elle aussi la perturbation. Elle ferma les yeux et se concentra sur le flot d’énergie qui coulait dans la rivière. Une grande tristesse l’envahit lorsqu’elle reçut une vision de la mort de rares dragons jumeaux, les premiers à être nés. Elle ressentit l’intense douleur de leurs symbiotes qui assistaient à la mort des hommes et des dragons. Ils auraient besoin d’elle à présent. Les symbiotes ne pouvaient survivre là-bas sans leurs dragons.
Elle baissa la tête et laissa la vague de chagrin la transpercer avant d’appeler les symbiotes orphelins. Elle se leva et ouvrit un portail afin qu’ils rentrent auprès elle. Derrière eux, elle vit les décombres fumants d’un village et entendit les cris de douleur. Deux dragons identiques gisaient morts au milieu du carnage.
Son regard passa d’eux aux deux jeunes garçons pressés contre le flanc d’une des huttes. Leurs paroles la hanteraient à jamais car en son for intérieur, elle savait que c’était la conséquence de son interférence. C’était elle qui avait fait don des jumeaux au village afin qu’ils en assurent la protection, peu de temps après avoir amené Arilla et Arosa dans ce monde avec elle.
— Est-ce que tu penses que… ? murmura le jeune garçon du nom de Calo en fixant la dépouille fumante du dragon vert et blanc.
— Non. Tu l’as entendu. Nous mourrons au combat, comme des guerriers, avant qu’on laisse ça nous arriver. Nous ferons ce qu’il faut avant de blesser quelqu’un, répondit Cree, son frère jumeau, les lèvres pincées par la détermination.
— Nous mourrons au combat, approuva Calo en regardant le symbiote de leur père le guérir. Ou on mettra fin à nos jours avant de blesser quelqu’un.
Les symbiotes de Brogan et Barrack, les premiers dragons jumeaux, tombèrent faiblement à travers le portail, invisibles aux yeux des mortels du village. Aikaterina les caressa pour tenter de leur apporter du réconfort. La forme qu’elle avait prise scintilla et s’effaça partiellement en réaction au pur chagrin que les symbiotes partagèrent avec elle.
C’était une nouvelle sensation pour elle, celle d’une douleur et d’une angoisse atroces. La recherche constante de l’espoir, seulement pour se le voir arracher à maintes reprises… et la solitude suffocante de savoir qu’ils ne sentiraient jamais la tendre caresse de la main de leur compagne. Elle n’avait jusqu’alors jamais compris la solitude que les hommes et leurs dragons ressentaient.
— Qu’y a-t-il, Aikaterina ? demanda Arosa, venant vers elle en flottant. Que leur arrive-t-il ?
— Sont-ils malades ? demanda Arilla, inquiète.
Aikaterina ordonna aux symbiotes de retourner dans la rivière. Elle fut choquée quand ils résistèrent. Ils connaîtraient une mort certaine s’ils n’y retournaient pas. Elle pouvait déjà voir leur couleur s’estomper à tel point qu’ils étaient presque translucides. Elle réitéra son ordre, un peu plus fermement cette fois. Les créatures se détournèrent d’elle, mais ne retournèrent tout de même pas dans la rivière. Elle les regarda d’un air perplexe reculer dans un coin sombre de la caverne et se blottir l’un contre l’autre.
— Les hommes qui leur avaient été donnés sont morts, murmura Aikaterina.
— Ne pouvais-tu pas les sauver comme tu nous a sauvées ? demanda Arilla.
Aikaterina pouvait comprendre ce qu’Arilla ressentait. Il était difficile de comprendre et d’accepter pourquoi les membres de l’espèce qui leur donnait la vie et qui rendait leur monde intéressant devaient mourir.
— Je crains qu’ils n’aient péris à cause de quelque chose que j’ai fait, avoua Aikaterina, se tournant et flottant vers les deux symbiotes.
Elle les caressa doucement, leur donnant une grande quantité de son essence. Ils tentèrent de résister, mais elle refusa de les laisser disparaître. Elle les encouragea plutôt à partager tout ce qu’ils avaient vécu aux côtés de Brogan et Barrack avec elle. Plus elle en voyait, plus sa certitude d’être responsable de la dévastation se renforçait.
Finalement, elle fit la seule chose qu’elle pouvait afin de soulager leur détresse : elle les plaça dans un sommeil profond. Elle s’éleva dans les airs et traversa la magnifique caverne vers la plate-forme sur laquelle elle avait créé un portail vers l’univers.
— Pouvons-nous t’accompagner, Aikaterina ? demanda Arosa avec une expression d’espoir.
— Pas cette fois, Arosa. Je dois entreprendre ce voyage seule, répondit-elle en franchissant l’ouverture.
Aikaterina traversa le village en feu, le temps remontant à mesure qu’elle avançait. Ce qu’elle faisait ne serait pas accompli sans que cela ne lui en coûte. À partir de ce moment, l’énergie nécessaire pour maintenir ce fil du futur lui pèserait lourdement.
Son voyage initial avait été vers le futur afin qu’elle voie s’il était possible d’annuler les dommages qu’elle avait involontairement créés. Elle allait devoir se montrer extrêmement prudente. La possibilité d’influer sur la trame du temps dans l’univers et la destinée de ceux qui y résidaient était l’une des raisons pour lesquelles les membres de son espèce restaient de simples observateurs.
Son espèce était née en même temps que l’univers et ses membres avaient été disséminés par l’explosion des premiers atomes. Au cours des millénaires, ils avaient acquis assez de force pour créer des mondes et les détruire. Cependant, malgré cette puissance, ils étaient également très vulnérables. Ils vivaient de l’essence positive de toutes créatures. La plupart des planètes étaient dépourvues de vie, ainsi, les membres de son espèce s’étaient éteints au fil du temps jusqu’à ce qu’il n’en reste plus que quelques-uns.
Aikaterina regarda Brogan se battre avec un vieux guerrier à la porte d’une petite maison pittoresque. Son regard était rivé sur une jeune fille apeurée à côté de sa mère. Plusieurs autres hommes du village se ruèrent pour aider le guerrier à protéger sa fragile famille.
Aikaterina leva une main et ordonna aux symbiotes des dragons jumeaux de maîtriser les frères. Le choc se répandit sur les visages de tous les guerriers quand les symbiotes s’élancèrent soudain pour enrouler de puissantes bandes autour des dragons jumeaux.
— Libère-moi, ordonna Brogan en luttant contre son symbiote qui le retenait.
Barrack se transforma en un dragon vert clair et blanc brillant. Il s’efforça de se débarrasser de son symbiote et rugit de rage, essayant de rejoindre son frère.
— Barrack, Brogan, arrêtez, supplia leur père, ses yeux emplis de chagrin. Je vous en conjure, mes fils, ne nous forcez pas à vous tuer.
— Il est trop tard, Bane, dit l’un des guerriers. La folie s’est emparée de leurs dragons. Ils ne peuvent plus les contrôler. Creja, respecte ta promesse. Tue-les avant que leurs symbiotes ne les libèrent ou se retournent contre nous, exigea-t-il.
— Ils ont raison, Bane, déclara Creja d’une vois dure.
— Regarde mes fils, Creja, mais pense à tes jumeaux. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’ils n’en arrivent là. Il n’y a pas d’âme sœur pour eux. C’est peut-être mieux de les tuer que de les laisser vivre en sachant qu’il n’y a aucun espoir, mais en serais-tu capable ? répondit Bane d’une voix torturée.
— C’est notre âme sœur ! C’est elle qui est venue nous parler, grogna Brogan sans cesser de se battre contre son symbiote.
Creja secoua la tête.
— Regarde en toi, Brogan. Aucun de vous, ton dragon, ton symbiote ou toi, ne désire la fille comme âme sœur. Il en va de même pour ton frère. Mula n’est pas votre élue. Tu essaies de convaincre ton dragon qu’elle est votre compagne pour l’apaiser, argumenta-t-il en tirant son épée.
— Nos dragons ont besoin d’elle, Creja. La solitude est insupportable. Avec une compagne, nous nous battrons pour protéger les Valdiers. Je dois la prendre. Je n’ai plus le choix, protesta Brogan.
Aikaterina leva une main afin d’arrêter le temps. Elle savait déjà ce qui allait s’ensuivre. Elle reconnaissait l’émotion dans la voix de Brogan grâce à ce que leurs symbiotes lui avaient montré. Sa compréhension de ces émotions avait cru au fil du temps et était l’une des choses qui l’avait attirée vers ce monde.
Les Valdiers étaient une espèce farouche, fière et passionnée, mais pour trouver leur âme sœur, les trois parties de qui ils étaient devaient être d’accord et se connecter pour ne faire qu’un avec le partenaire qui leur était destiné. C’était une précaution qu’elle avait prise pour les empêcher de se croire tout-puissants avec les symbiotes à leurs côtés. C’était peut-être un autre défaut de sa part, mais elle ne le regrettait pas car il donnait la vie à son espèce d’une façon différente.
Elle s’arrêta entre les deux guerriers. Leurs symbiotes scintillaient de couleur, conscients de sa présence. Elle parcourut chacun des jumeaux du regard.
— Lâchez-les, murmura-t-elle aux symbiotes.
Les corps dorés se liquéfièrent et se reformèrent en tigres-garous. Les deux symbiotes s’assirent à côté de leurs hommes dans une attitude protectrice. Aikaterina se transforma et se solidifia. Bien que la forme qu’elle prît soit celle d’une jeune fille valdier, elle n’avait aucune intention de prétendre être autre chose que ce qu’elle était réellement : une déesse parmi les Valdiers et la créatrice des symbiotes.
— Réveillez-vous, guerriers, ordonna-t-elle avec un geste de la main.
Brogan trébucha en avant tandis que le dragon de Barrack pivotait gracieusement à la recherche d’assaillants. L’homme et le dragon se figèrent tous deux à sa vue. La stupeur les tira temporairement des griffes de la folie qui les habitait.
— Qu’est-ce que… ? commença à grogner Brogan, sa voix mourant lorsqu’il réalisa que tout autour de lui était suspendu en plein mouvement.
Aikaterina regarda Barrack se transformer en sa forme bipède, son regard méfiant suivant celui de son frère. Ils regardèrent autour d’eux, remarquant plusieurs dragons figés en plein vol tandis qu’au sol, des hommes, des femmes, des enfants et des animaux étaient immobilisés dans différentes positions. Elle étudia leurs visages lorsque les deux hommes braquèrent leurs regards méfiants sur elle.
— Venez avec moi, ordonna-t-elle en tournant les talons.
Barrack regarda son frère quand il sentit son dragon battre en retraite, soumis, chose qu’il ne se rappelait pas être déjà arrivée. La ferveur de sa folie naissante avait laissé place à la confusion.
— Est-ce que tu le sens aussi ? demanda Brogan entre ses dents.
Il hocha brièvement la tête puis parcourut du regard la silhouette féminine qui s’éloignait d’eux. Leurs symbiotes marchaient docilement de chaque côté d’elle.
Barrack lui emboîta le pas, suivant la femme à une courte distance de sécurité. Ses yeux étaient rivés sur son dos tandis qu’il essayait de comprendre la raison de la déférence de son dragon pour elle. Brogan l’imita, venant à son niveau.
Ils promenaient un regard intense autour d’eux à mesure qu’ils progressaient. Barrack fut envahi de remords à la vue de la terreur sur les visages de ceux qu’il avait toujours respectés. Les femmes et les enfants avaient trouvé refuge et les visages de tous les guerriers exprimaient la peur. Leur présence avait clairement eu un effet cataclysmique sur le village.
— C’est moi qui ai fait ça, commenta Brogan d’une voix dure et rauque.
Ses yeux se posèrent sur l’expression angoissée de leur mère alors qu’elle arrivait en courant, une main tendue vers Creja, père de deux jeunes dragons jumeaux.
— J’ai déshonoré ma famille.
— Nous avons tous les deux déshonoré notre famille, convint Barrack, le cœur lourd.
Il pouvait sentir Brogan essayer de s’éloigner de lui afin qu’il ne puisse pas ressentir ses émotions. C’était impossible, évidemment. L’exclure serait comme essayer de se couper en deux pour son frère.
Qu’importaient leurs efforts pour tenter de se protéger l’un l’autre, leur lien était trop fort. C’était ce lien qui les avait menés à leur perte ce jour-là. La solitude qu’ils ressentaient avait été amplifiée par celle de leurs dragons. Leurs symbiotes se nourrissaient de leurs émotions combinées et étaient devenus dépressifs et apathiques au cours des derniers mois, à tel point que rien de ce qu’ils avaient fait n’avait pu aider les créatures.
La honte envahit Barrack. Il savait que la jeune fille sur laquelle Brogan avait jeté son dévolu n’était pas leur âme sœur. Il n’était même pas attiré physiquement par la fille, ni son dragon ni son symbiote ne l’étaient d’ailleurs. Il savait que Brogan ne l’était pas réellement non plus. Cependant, il avait fermé les yeux. Il avait espéré que si leurs dragons étaient convaincus qu’elle était leur compagne, cela leur permettrait de tromper le vide incessant qui les rongeait et leur laisserait le temps de fouiller d’autres villages et d’autres villes à la recherche de leur âme sœur.
Brogan était le plus instable et, bien qu’il puisse le nier, le plus émotif des deux frères. Son dragon l’avait poussé à revendiquer une femelle, n’importe laquelle, pour combattre la folie. Malheureusement, c’était Mula qui avait croisé le chemin de Brogan plusieurs mois auparavant. La jeune fille avait flirté avec eux, inconsciente que le dragon de Brogan considérerait son invitation innocente, quoique flagrante, comme sérieuse. Ce n’était que lorsque la jeune fille avait compris que flirter avec l’un des jumeaux signifiait recevoir les attentions intenses des deux — en même temps — qu’elle avait battu en retraite, paniquée.
Barrack n’en voulait pas à la fille d’avoir eu peur ni de ne pas avoir eu conscience de ce que son comportement insouciant provoquerait. Brogan et lui reconnaissaient l’impossibilité de trouver une âme sœur. Ils comprenaient tous deux que gérer un guerrier dragon était déjà assez difficile. Jamais encore avait-on entendu parler d’une femme capable d’en avoir deux pour compagnons. En fin de compte, le mieux qu’ils pouvaient espérer était de mourir au combat avant de perdre complètement le contrôle. Ce jour-là avait prouvé que leur espoir avait été vain. Leur pire cauchemar était devenu réalité.
Il se focalisa sur la femme devant lui et serra les poings. Elle était peut-être ici pour abréger leurs souffrances. Si c’était le cas, pourquoi ne pas simplement le faire et en finir ? Après avoir vu la peine qu’il provoquait, il savait que ni Brogan ni lui ne résisteraient.
— Qui êtes-vous et comment avez-vous fait ça ? finit par demander Brogan en s’arrêtant à un peu plus d’un mètre de la femme lorsqu’elle marqua une pause sur le pont qui enjambait la rivière.
Les yeux de Barrack suivirent le geste de la main de son frère. Le village semblait surréaliste, figé ainsi dans le temps. Il déglutit, incapable d’appréhender la puissance qu’une telle prouesse demanderait. Dans un coin de son esprit, il se demanda si son frère et lui n’étaient pas déjà morts.
— Tu ne l’es pas, murmura la femme, son regard suivant la rivière.
— Je ne suis pas quoi ? demanda Barrack.
— Mort. Tu ne l’es pas… encore, répondit-elle d’une voix sereine.
— Qui êtes-vous ? interrogea Barrack, sa voix rendue rauque par la stupeur lorsqu’il réalisa que qui que cet être fût, elle pouvait lire dans ses pensées.
— Je me fais appeler Aikaterina par votre peuple, répondit-elle en se tournant pour les regarder avant de tendre une main pour caresser tendrement la tête de chacun des symbiotes. Je vous ai donné une partie de moi pour aider à vous protéger.
— Pour nous maudire, vous voulez dire, rétorqua Brogan, ses yeux s’assombrissant de colère.
— Brogan, l’avertit Barrack avant de se tourner pour la regarder. Est-ce que vous êtes en train de nous dire que vous êtes la déesse Aikaterina ?
Cette dernière inclina la tête.
— Oui. Ton frère a raison. Les cadeaux que je vous ai faits sont devenus une malédiction, répondit-elle, ses mains quittant le cou des symbiotes. Il n’est pas aisé de manipuler les fils du temps pour une bonne raison. Modifier le temps, c’est modifier le destin de l’avenir. Ces chemins se croisent parfois et se rectifient d’eux-mêmes, créant ainsi un avenir qui continuera en étant relativement peu déformé. Mais il arrive aussi que les fils s’emmêlent ou se rompent. Si cela devait arriver, les changements pourraient avoir des conséquences inattendues.
Barrack fronça les sourcils, essayant de comprendre ce que la femme leur disait. Brogan grommela qu’elle s’exprimait en énigmes. Il tendit la main et empoigna le bras de son frère lorsqu’il commença à tourner les talons. Quelque chose lui disait qu’ils n’auraient pas d’autre chance.
— Quel genre de conséquences inattendues ? Des mauvaises ? demanda Barrack, le regard rivé sur le visage de la femme.
Celle-ci esquissa un sourire.
— Peut-être.
— Peut-être ? Je croyais que vous étiez toute-puissante. Quiconque capable de faire ça doit savoir ce qui va se passer, lança Brogan d’un ton impatient.
Elle planta son regard intense sur lui.
— Même la personne la plus puissante ne peut prédire ce que les membres d’une espèce possédant le libre arbitre vont décider de faire si l’on leur donne une seconde chance.
Son regard se porta sur le village.
— Si vous saviez qu’il existe une âme sœur pour vous quelque part dans l’univers, l’attendriez-vous ?
— Oui !
Barrack fut surpris lorsqu’il entendit la réponse stridente de Brogan.
— Oui, dit-il, faisant écho à la réponse de son frère d’un ton plus doux. Si une telle femme existe, ajouta-t-il.
— Elle existe… mais…, sa voix mourut et son regard se perdit dans le lointain.
— Je le savais. Elle nous donne juste de faux espoirs, Barrack. Il n’y aura jamais de femelle capable de nous gérer, encore moins nos deux dragons et nos symbiotes. Cette âme sœur imaginaire devrait être acceptée par nous tous, et tous nous accepter en retour, grogna Brogan, frustré.
— Tu te trompes, guerrier. Elle existera, mais elle aussi est destinée à mourir jeune, répondit-elle en tendant une main pour toucher de nouveau les symbiotes.
— Mourir ? Comment ? Où est-elle ? exigea de savoir Barrack en s’approchant d’elle.
— Je peux modifier votre destin, ce qui modifiera le sien, mais comme pour tout, il n’y a aucune garantie, expliqua Aikaterina.
— Ce qui signifie quoi, exactement ? demanda Brogan d’une voix dure.
Barrack frissonna lorsqu’Aikaterina se tourna pour regarder son frère. Il vit la tête de Brogan partir en arrière comme s’il s’était fait frapper. Le sifflement de son frère transperça l’air avant qu’il ne chancelle en arrière sur plusieurs pas. Barrack tendit machinalement la main pour stabiliser Brogan quand son dos heurta le mur de pierre qui longeait le pont.
Grâce au lien qu’il partageait avec son frère, Barrack sentit le profond choc de Brogan, un choc bien plus grand que ce à quoi il se serait attendu d’une claque sans contact de la part d’un être capable de figer un village entier. Il regarda entre eux et se concentra, mais il fut seulement capable de saisir l’impressions ténue qu’Aikaterina avait montré quelque chose à Brogan. Il se retourna vers la déesse et plissa les yeux.
— Tu vas devoir attendre longtemps, guerrier. J’espère que tu apprendras à te calmer avant de trouver ta compagne ou elle pourrait bien te calmer elle-même, le prévint Aikaterina.
Barrack s’était attendu à ce que l’avertissement soit teinté d’une pointe de colère ou même d’une légère remontrance, mais jamais qu’il soit accompagné d’un petit sourire satisfait. Espérait-elle que Brogan échoue à se calmer ? Pourquoi ?
— Qu’est-ce qu’on fait, maintenant ? demanda Barrack.
Aikaterina regarda le village. Il suivit son regard. Elle regardait leur mère et leur père.
— Vous devez quitter Valdier, déclara-t-elle doucement.
— Vous avez dit… qu’on allait devoir attendre longtemps ? demanda Brogan d’une voix étonnamment calme.
Elle se tourna pour les regarder tous les deux. Barrack la vit caresser de nouveau les symbiotes d’une main douce. Les deux tigres-garous ronronnaient et se frottaient contre elle.
— Oui, votre compagne n’est pas encore née. Vos symbiotes sauront quand le temps sera venu. Cherchez un guerrier du nom de Jaguin. Sa compagne Sara saura où vous pouvez trouver la vôtre, leur promit-elle en souriant.
Barrack était sur le point de lui demander comment, mais les mots moururent sur ses lèvres quand Aikaterina se transforma. Son apparence de jeune fille valdier avait laissé place à quelque chose de bien plus éthéré. La couleur de son corps était la même que celle des symbiotes, mais il pouvait voir à travers. Elle s’élevait lentement du pont.
— Partez, guerriers, avant que votre village ne se réveille, ordonna-t-elle doucement. S’ils vous voient, alors votre destin restera inchangé, tout comme celui de votre âme sœur.
— Transforme-toi, Brogan, dit Barrack, sentant l’urgence de son dragon qui poussait contre lui.
Brogan hocha la tête. En quelques secondes, les deux guerriers s’étaient transformés en leurs dragons. Ils décollèrent et survolèrent le village, partant vers le nord. Leurs symbiotes fusionnèrent pour se transformer en un grand vaisseau spatial doré et rejoignirent les dragons en quelques secondes.
Barrack sentit le symbiote envelopper son dragon et l’attirer à l’intérieur du vaisseau spatial. Un instant plus tard, Brogan était à ses côtés. Ils se retransformèrent tous les deux, ne sachant pas vraiment où aller. Tout ce qu’ils savaient, c’était que tant qu’ils restaient dans leur monde natal, ils seraient en danger, tout comme leur future âme sœur.
— Il y a des spatioports rarement fréquentés par ceux de notre espèce à la périphérie de la galaxie. On pourrait y proposer nos services, suggéra Brogan.
Barrack acquiesça avant de s’asseoir sur le siège formé par son symbiote.
— On va s’arrêter et récupérer les objets qu’on avait stockés puis on partira ni vu ni connu, approuva-t-il.
Cela faisait à présent plusieurs années qu’ils vivaient au cœur des montagnes. Ils s’y étaient installés lorsqu’ils avaient senti les premiers signes de la folie s’abattre sur eux.
Quelques minutes plus tard, ils atterrirent à l’extérieur de la petite maison rudimentaire qu’ils avaient construite au pied de la montagne près d’une large rivière. Ils prirent leurs vêtements, leur nourriture, leurs outils et leurs armes avant de retourner au vaisseau spatial symbiotique.
Barrack baissa les yeux tandis que leur vaisseau symbiotique s’élevait. Il se frotta le torse. C’était le seul foyer qu’ils avaient jamais connu. Ils avaient vécu, travaillé et combattu ici. Il ne savait pas s’ils reverraient un jour Valdier ou leurs parents.
— On reviendra, dit Brogan en baissant les yeux vers la forêt où ils avaient établi leur foyer.
— Comment est-ce que tu peux en être certain ? demanda Barrack en regardant son frère.
Brogan croisa son regard. Barrack fut choqué de voir l’expression tourmentée dans les yeux de son frère. Il tenta de se connecter mentalement à lui, choqué une fois encore en sentant un mur inconnu l’empêcher de voir les pensées de Brogan. Il le regarda avec une expression perplexe.
— Qu’est-ce qu’Aikaterina t’a montré, Brogan ?
Celui-ci cligna des yeux et tourna la tête pour regarder par le hublot tandis qu’ils accéléraient dans l’espace. Alors qu’ils s’éloignaient de Valdier, Barrack attendit, se demandant si Brogan allait lui répondre ou simplement continuer à fixer l’immensité de l’espace.
— Elle m’a montré notre compagne, finit-il par répondre avant de se lever.
Barrack se tourna et suivit Brogan du regard tandis que son frère disparaissait par la porte. L’espace d’un instant, la jalousie le dévora. Il voulait voir leur compagne. Il se demanda pourquoi Aikaterina n’avait pas partagé l’image avec lui. Puis l’instant s’avanouit lorsqu’il se rappela l’expression tourmentée dans les yeux de Brogan. Son frère lui taisait quelque chose, quelque chose d’important.
Il se leva et fixa l’espace en fronçant les sourcils. C’était la première fois qu’ils ne partageaient pas un secret. Pour une raison qui lui échappait, Aikaterina devait avoir décidé que seul Brogan devrait apprendre quelque chose sur leur âme sœur.
— On la trouvera, murmura-t-il.
J’attends. Déesse dit qu’elle a besoin de nous, répondit son dragon.
Barrack cligna des yeux, surpris, en sentant une chaleur et un enthousiasme que son dragon n’avait pas ressentis depuis des décennies.
— Oui, notre compagne aura besoin de nous, convint-il, un sourire satisfait se dessinant sur ses lèvres.
Aikaterina surveillait le village. Les villageois se souviendraient d’avoir tué les dragons jumeaux. Leurs souvenirs seraient fragmentés, flous, mais une chose serait certaine : les dragons jumeaux étaient morts. Il y aurait de la douleur et elle allait devoir prêter une attention particulière aux jeunes jumeaux, au cas où, mais elle avait vu leur compagne et savait qu’ils seraient assez forts jusqu’à ce qu’ils la rencontrent enfin.
La destinée des premiers dragons jumeaux n’était pas encore définie. Ils devraient encore attendre des siècles avant que leur âme sœur naisse. Elle allait devoir aider les fils de leurs vies à se croiser.
Malheureusement, le croisement qu’elle pouvait créer serait de très courte durée. Les fils du temps seraient rétablis et l’incident qui aurait eu lieu ce jour-là dans le village deviendrait leur réalité si les dragons jumeaux ne parvenaient pas à convaincre leur âme sœur qu’ils étaient faits les uns pour les autres durant ce laps de temps — et si elle ne les acceptait pas de façon inconditionnelle et de son plein gré. S’ils tentaient de forcer Delilah et d’aller contre sa volonté, la progression naturelle de leur union créerait des répercussions qui pourraient avoir des effets dévastateurs. Si cela venait à se produire, elle serait forcée de lâcher les fils du temps et permettre à l’histoire de reprendre son cours naturel.
Aikaterina s’éleva dans les airs, laissant la douce brise la porter. Elle devait retourner à la Ruche, le foyer qu’elle avait créé dans la caverne au large, et se reposer. C’était un poids de retenir la trame du temps. Pour elle, le temps n’avait aucune importance lorsqu’il était calculé en années. Elle ressentirait néanmoins ce poids jusqu’à la naissance de la compagne des dragons jumeaux. Elle espérait seulement qu’ils survivraient aussi longtemps, en particulier Brogan.
À la périphérie de Valdier :
Des siècles plus tard
— Tu es sûr qu’on était censés revenir ici ? demanda Barrack en faisant les cent pas dans la salle des machines de leur vaisseau spatial.
— Tu as senti l’appel comme moi. Nos symbiotes ont dit que c’était là qu’on devait aller, répondit sèchement Brogan d’une voix étouffée et irritée. Passe-moi l’épisseur.
Barrack grimaça et parcourut la panoplie d’outils étalés sur le sol. Actuellement, seule la moitié du corps de son frère était visible. Son buste se trouvait sous la console d’alimentation qui contrôlait les moteurs principaux.
— Je croyais que tu avais déjà réparé ça, commenta Barrack en tendant l’épisseur à Brogan.
— C’est le cas. La fichue pièce que cet hypocrite de Tiliqua m’a vendue était défectueuse. Je savais que j’aurais dû chercher ailleurs. Ces bâtards à deux têtes cherchent toujours à se faire des crédits faciles, grommela Brogan.
— Je te l’avais…, commença Barrack avant de pincer fermement les lèvres lorsque son frère glissa de dessous la console et lui lança un regard noir.
— Pas un mot ou je te laisse te charger de la réparation cette fois, menaça Brogan.
Barrack lança un regard amer à son frère.
— Tu sais que je déteste travailler sur les moteurs. Ils me le rendent bien, rétorqua-t-il.
Brogan renifla.
— Je dirais que parler de haine est un euphémisme pour décrire tes relations avec tout ce qui touche à ce vaisseau spatial, répondit-il avant de se tirer de nouveau en-dessous de la console.
— Je n’arrive pas à croire qu’on va enfin rencontrer notre âme sœur après tout ce temps, dit Barrack en se baissant jusqu’à être assis par terre à côté de son frère.
— Ce que tu veux dire, c’est que tu n’arrives pas à croire que mon dragon et moi avons tenu aussi longtemps sans perdre la tête, répondit Brogan.
Barrack émit un petit rire.
— Oui, aussi, reconnut-il en adossant sa tête. Comment elle est, d’après toi ? Est-ce qu’elle vient de notre village ou de la ville ? Tu penses vraiment qu’elle peut nous gérer tous les deux ? Par la déesse ! Rien que de penser à elle entre nous me fait bander.
Brogan écouta son frère aîné de quelques minutes seulement spéculer sur leur âme sœur. Il comprenait l’enthousiasme de Barrack. Si le dragon de son frère sautillait en lui comme le faisait le sien, alors c’était incroyable qu’ils ne se soient pas transformés et n’aient pas détruit le vaisseau.
L’image qu’il gardait tout contre son cœur faillit l’étouffer. En dépit du passage du temps, l’image et les noms murmurés de ceux qui les guideraient, son frère et lui, vers leur âme sœur, étaient aussi clairs que lorsqu’il les avait reçus. C’était les seules choses qui lui avaient permis de ne pas sombrer dans la folie.
Même si je n’étais déjà pas tout à fait sain d’esprit à la base, se dit-il, pensant aux longues cicatrices qui descendaient le long de son visage et dans son cou.
Il les avait volontairement gardées pour se rappeler les dangers auxquels son frère et lui seraient confrontés s’ils ne faisaient pas attention.
Les cicatrices étaient le résultat d’une bagarre avec un groupe de jeunes du village. Ils l’avaient séparé de son frère et de son symbiote dans l’espoir de le tuer. Les jeunes avaient écouté les peurs de leurs parents. À l’époque, il n’avait pas compris que son tempérament parfois instable avait nourri leur peur.
Il s’était libéré et enfui, mais pas avant de se faire blesser. Leur père avait préféré ne pas punir les jeunes, craignant que cela provoque d’autres agressions. Il s’était contenté de conseiller à Brogan et Barrack de ne plus jamais se faire piéger seuls ou sans leurs symbiotes.
Grâce à elle, Brogan avait désormais une meilleure maîtrise de son sang-froid. Il se concentrait sur son image mentale des yeux de leur compagne, de sa peau bronzée et veloutée couleur café au lait, de ses lèvres pleines et de ses cheveux brun foncé striés d’or qui lui arrivaient aux épaules. Il s’était accroché à cette image au fils des ans plutôt qu’à l’autre image que la déesse lui avait montrée : celle de leur compagne allongée paisiblement sur de la soie d’un blanc immaculé dans une petite boîte, sa vie brisée nette alors qu’elle venait tout juste de commencer. Deux fils de vie révélés : celui où Delilah était plus âgée et celui où elle était enfant. Eux seuls avaient le pouvoir de changer la voie qu’elle emprunterait.
— Elle est magnifique.
— Raconte-moi encore, ordonna Barrack.
Amusé, Brogan esquissa un sourire en coin. S’il avait reçu un crédit à chaque fois que Barrack avait prononcé cette phrase, ils auraient pu s’offrir une flotte de véhicules. Il avait essayé de partager l’image avec lui, mais rien n’avait fonctionné. C’était étrange. Il pouvait tout partager avec Barrack excepté ceci.
— Elle a une peau bronzée de la couleur des arbres les plus robustes de la forêt, mais pourtant aussi douce que la plus fine des soies, commença-t-il.
— Ce qui veut dire qu’elle peut affronter les tempêtes les plus violentes, dit Barrack.
— Oui. Ses cheveux arrivent juste en-dessous de ses douces épaules, là où des mèches dorées se mêlent aux mèches sombres, continua Brogan, sachant ce qu’allait dire son frère.
— La touche de la déesse pour nous guider à elle et pour nous faire savoir qu’elle est nôtre, répondit Barrack en soupirant.
Brogan émit un petit rire.
— Oui, convint-il.
Il ravala un autre petit rire en sentant Barrack lui mettre un petit coup dans le pied. Ils avaient déjà eu cette discussion un million de fois, pourtant, Barrack se comportait comme si c’était la première fois. Il grimaça lorsqu’il le frappa à la jambe.
— Aïe ! Attention, j’ai encore mal à la jambe, déclara-t-il.
Barrack grogna.
— Tu n’aurais plus mal si tu laissais ton symbiote s’occuper à nouveau de toi. Tu aurais dû savoir qu’il y aurait un autre mercenaire caché derrière le comptoir, déclara-t-il.
— Il est toujours fâché contre moi parce que j’ai refusé de porter mon armure. C’est pour ça que tu m’as laissé passer en premier, pour que je prenne le coup de couteau à la cuisse à ta place ? interrogea Brogan, grimaçant lorsqu’il s’écorcha les jointures sur le bord de la console. Pourquoi est-ce qu’ils font ces maudits panneaux si petits ? Est-ce qu’ils croient que seuls les Tiliquas travaillent sur ces trucs ?
— Probablement… Parle-moi de ses lèvres, dit Barrack.
Brogan finit d’épisser les câbles et se tira de dessous la console. Il s’assit et posa l’épisseur à côté de ses autres outils. Il adressa un sourire contrit à son symbiote lorsque la créature dorée entra dans la pièce en trottant.
Il leva sa main ensanglantée. Le symbiote renâcla mais se liquéfia. De la chaleur enveloppa sa main, guérissant sa nouvelle coupure avant de remonter le long de son bras et de descendre le long de son corps, réparant les ecchymoses et la profonde entaille à sa cuisse, qu’il avait refermée du mieux qu’il avait pu à l’aide d’un kit médical portable.
— Ses lèvres ont été faites pour nous. Elles sont pleines et pulpeuses tandis que ses yeux sont sombres et engageants. Ils brillent de détermination et d’amusement. Elle adore rire, dit Brogan en adossant sa tête à la console avant de pousser un soupir de soulagement alors que la douleur lancinante à sa cuisse s’estompait. Ses seins…
— Ses seins ont été faits pour tenir dans nos mains, finit Barrack en levant les mains pour étudier ses paumes. Je me demande si ça va la gêner que mes mains soient calleuses.
Brogan haussa un sourcil en entendant ce commentaire.
— Ne joue pas au prince avec moi. Je doute que notre compagne s’attende à rencontrer de la noblesse, déclara-t-il sèchement.
Barrack lui lança un regard exaspéré puis se releva avant de secouer la tête, faisant sourire Brogan.
— Ne t’inquiète pas, je ne pense pas qu’on pourra un jour croire que tu es de la noblesse, déclara Barrack, mais nous avons bâti notre fortune par nos propres moyens. On aura assez pour construire une maison à notre compagne où elle le désire et on lui achètera des robes — qu’on arrachera bien sûr de son délicieux corps — et ensuite on lui achètera d’autres robes et tout ce qu’elle désire.
— Pourquoi lui acheter des robes pour les déchirer alors qu’on pourrait juste lui demander de vivre nue ? demanda Brogan en se levant avant de ramasser ses outils. Mon dragon serait heureux si elle restait sous sa forme de dragon pendant au moins un siècle !
— On pourrait lui demander, convint Barrack en souriant. Elle pourrait soit rester nue soit sous sa forme de dragon. L’un ou l’autre serait acceptable.
— Je me demande si…, commença Brogan avant de secouer la tête.
— Tu te demandes quoi ? demanda Barrack, aidant son frère à ranger les outils dans le petit placard.
Brogan marqua une pause et regarda son jumeau.
— Je me demande comment elle réagira quand elle nous rencontrera.
— Elle va avoir le coup de foudre, dit Barrack avec confiance avant de rire et de mettre une tape sur l’épaule de Brogan, lui rappelant un autre bleu qu’il avait oublié.