Le bourreau des femmes seules - Valérien Mulangu Tshishi - E-Book

Le bourreau des femmes seules E-Book

Valérien Mulangu Tshishi

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Beschreibung

Mario n’avait d’yeux que pour les femmes d’un certain âge. Entre la douce Mony et Tatiana la tigresse, il jonglait avec ses deux conquêtes, bien qu'il ait parfois été voir ailleurs. Dans cet univers sensuel, il se considérait comme le maître des lieux, jusqu'à ce qu'une rencontre fortuite vienne tout chambouler.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Valérien Mulangu Tshishi a parcouru divers pays, dont la République Démocratique du Congo, la Belgique et la France, puisant l’inspiration de ses expériences pour créer des histoires variées et captivantes. Il est auteur de deux ouvrages publiés chez Edilivre : "Histoires étonnantes du Congo en 2020" et "Le village qui n’existait pas en 2022".

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Valérien Mulangu Tshishi

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le bourreau des femmes seules

Roman

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

© Lys Bleu Éditions – Valérien Mulangu Tshishi

ISBN : 979-10-422-1094-6

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les désirs de l’homme dépassent toujours les dons que vous lui faites.

Madame de Staël

 

 

 

 

 

Mario Kassa se réveillait à l’instant même avec une gueule de bois comme à l’accoutumée lorsqu’il revenait de boîte.

La veille, il avait passé la soirée en compagnie de l’une de ses conquêtes. Cette dernière se chargea de tous les frais : le droit d’entrée, la boisson et les plats, sans compter le transport.

Il était presque midi. La dame s’éclipsa bien assez tôt, après leurs ébats, laissant Mario roupiller à son aise.

Il décida enfin de se lever et entreprit de prendre un petit déjeuner avant son bain. Il lui fallait un café bien assez fort pour s’éclaircir les idées.

Il sortit du frigidaire sa baguette qu’il laissa de côté comme elle était encore froide. Il faillit se brûler les lèvres en s’empressant de boire son café.

Le trentenaire alluma ensuite son écran plat pour suivre l’actualité du jour. Dégoûté du manque de nouveauté, il bascula sur YouTube afin de se pencher sur les émissions congolaises à caractère polémique. Là il se retrouvait !

Son téléphone sonna brusquement tout à coup. Il s’agissait d’un SMS qu’il lisait en ricanant : « Tu ne t’en tireras pas comme ça ! ».

Le message venait d’une ancienne concubine qui n’avait guère apprécié leur rupture.

Elle semblait vouloir encore bénéficier des « services » de Mario.

Lui, avait grandi à Kinshasa dans une fratrie composée uniquement de garçons : quatre au total.

Arrivé en France en 2013, il galéra un bon nombre d’années avant d’obtenir ses papiers en bonne et due forme.

Depuis, il se permettait pas mal de folies. Son plus gros défaut consistait à profiter des femmes délaissées ou en manque d’affection.

En général, ses proies demeuraient les femmes plus ou moins mûres et ayant des enfants à charge.

À trente-sept ans, son avenir ne semblait pratiquement pas assuré. Il travaillait quand il le pouvait ; inscrit dans une boîte d’intérim il ne voulait aucunement être engagé à durée indéterminée.

Il n’avait pas cette force morale et encore moins physique pour ce faire.

L’homme profitait donc de ces dames lorsque son compte bancaire virait au rouge.

Installé depuis trois années dans son studio du dixième arrondissement de Paris, il ne payait que très rarement son loyer. La plupart des fois, ses conquêtes s’occupaient de le faire à sa place.

Mario s’était juré de ne plus s’enticher de jeunes filles à cause d’une douloureuse séparation. Cet événement le marqua considérablement.

En effet, la jeune Cathy lui brisa tellement le cœur qu’il prit un temps fou avant de se remettre.

C’est au cours d’une veillée mortuaire qu’il fit la connaissance d’une femme d’âge mûr.

Cette dernière l’entendit se plaindre des femmes et du bonheur éphémère de l’amour.

Elle le réconforta avec de précieux conseils. Ils eurent alors le temps de mieux se connaître et de s’apprécier l’un et l’autre.

C’est de là que son goût pour ce type de femmes naquit.

Cette dame le dorlotait et le chérissait comme un bébé. Elle savait s’y prendre avec les hommes plus jeunes qu’elle. Mario ne l’aimait point comme il avait pu tomber amoureux de sa Cathy, mais il se retrouvait dans cette idylle dans laquelle il s’épanouissait en tout et pour tout.

Il passa deux belles années avec cette quarantenaire. Son voyage pour les USA les sépara en définitive. Ils continuèrent malgré tout à s’appeler et à échanger des mails jusqu’au jour où elle apprit qu’il s’était mis en couple avec une de ses amies.

Elle regretta amèrement tous les mandats qu’elle avait pu lui destiner entre-temps.

L’amie reprenait bel et bien le relais de la relation si bien qu’elle s’occupait à son tour de Mario comme il se devait, n’en déplaise à sa copine expatriée dans le New Jersey.

 

Alors qu’il se dirigeait vers sa salle de bain, on sonna à la porte. Il ouvrit à son ami Alain Kazadi.

— Salut Mario !
— Bonjour Alain !
— Alors cette virée en boîte ?
— Très chouette !
— Je vois ça !
— Quoi de neuf sinon ?
— Rien de spécial !
— Tu viens au « terrain »1 ?
— Où donc ?
— À Villeneuve-Saint-Georges.
— Non, c’est trop loin !
— Allons à Pierrefitte dans ce cas !
— Ouais, c’est mieux !
— Tu as de quoi assurer la journée ?
— Je croyais que c’était toi qui invitais.
— Ah yo pe, boni Boye2 !
— Mais oui !
— Je n’ai pas grand-chose !
— Et ta copine d’hier ?
— Elle n’est pas dispo aujourd’hui. Elle avait prévu de sortir ses gosses ce dimanche.

Je vais plutôt faire appel à Mony ; non seulement elle sera dispo, mais en plus elle assurera tout !

— Mony c’est laquelle encore ?
— Celle d’Ermont, toi aussi !
— Ah oui !

Alain Kazadi laissa ensuite son ami Mario aller se doucher tranquillement pendant qu’il regardait des clips vidéo sur YouTube.

Il se servit au préalable une canette de bière qu’il trouva dans le frigo de chambre.

Il habitait une commune avoisinante de Paris. Il suivait son ami dans toutes ses frasques et ne le conseillait guère, sauf peut-être lorsqu’il délaissait une conquête pour une autre.

Lui, demeurait en couple avec Leyla, une Française d’origine marocaine. Ils vivaient en parfaite harmonie en dépit de la différence de religion.

Elle tentait, malgré tout, de le convertir à l’Islam, chose qu’Alain ne voulait en aucun cas entendre.

L’amour l’emportait et c’était l’essentiel. Deux enfants naquirent de leur union.

Sa compagne comprenait ses sorties à la congolaise, mais n’appréciait guère son amitié pour Mario qu’elle jugeait néfaste.

Certes, elle considérait qu’il vivait comme un chien errant, sans attache et sans projet d’avenir. Pourtant Alain Kazadi ne copiait jamais les faits et gestes de son ami de longue date même s’il ne le conseillait pas dans ses aventures sans lendemain.

Il aimait assez Leyla pour cela.

Cette amitié datait de l’école primaire à Kinshasa. Ils avaient fait les quatre cents coups ensemble et se sont retrouvés en France.

Alain Kazadi, après avoir obtenu son bac, entreprit de s’expatrier en Europe. Il passa d’abord par la Belgique avant d’atterrir à Paris.

Il faisait carrière dans la restauration rapide. Aujourd’hui Manager près de Stalingrad, sa situation professionnelle paraissait stable.

Mario avait regagné Paris dix ans après lui. Il accueillit joyeusement son ami et l’aida dans ses démarches administratives. Il l’hébergea durant une année avant de lui conseiller d’aller à Nantes pour avoir plus de possibilités d’obtenir ses papiers, la région parisienne étant débordée.

Heureusement que sa tante y habitait.

Mario suivit à la lettre ce conseil et régularisa de ce fait sa situation. Il retourna dans la capitale depuis.

Alain l’aida ensuite à trouver le logement qu’il occupait à ce jour.

Enfin prêt, Mario finissait d’appliquer de la crème sur son visage. Habillé tel un véritable Congolais avec ses baskets et son t-shirt multicolores ainsi que son pantalon jean déchiré au niveau des genoux, il était paré pour une nouvelle sortie.

— Dis donc, tu te prends pour un musicien ?
— Tu n’aimes pas mon look ?
— Un peu extravagant tout de même !
— Je suis Congolais non ?
— Pour sûr !

Les deux compères entrèrent dans la Peugeot 206 rouge bordeaux d’Alain Kazadi.

Ils allaient récupérer Mony à la gare du Nord.

— Tu es sûr qu’elle sera à l’heure ?
— Oui t’inquiète, son train arrive d’ici peu, m’a-t-elle dit au téléphone.
— Parce que moi je ne pourrais pas me garer là-bas, il faudra juste s’arrêter deux secondes !
— Ne t’en fais pas Alain, elle est habituellement ponctuelle !
— Je l’espère bien !

Il ne leur fallait pas plus de cinq minutes pour atteindre la gare du Nord.

Heureusement, aucun bouchon ne bloquait la circulation.

— Ah tu vois, la voilà !

Mony était une très belle femme aux courbes parfaites et à la peau noire d’ébène. Beaucoup de Congolais pensaient qu’une peau claire demeurait un critère de beauté, raison pour laquelle de nombreuses personnes se blanchissaient la peau.

Mais Mario ne s’en souciait peu. Seules les formes comptaient pour lui et un visage plutôt abordable.

Mony se maintenait parfaitement malgré ses trois enfants.

Divorcée depuis peu, elle avait rencontré Mario dans un supermarché.

Il l’avait aidée à attraper un article qu’elle n’arrivait pas à atteindre dans un rayon. Une conversation s’en était suivie et ils échangèrent leurs numéros de portable au final. Elle habitait Ermont dans le Val-d’Oise et travaillait dans une résidence pour personnes âgées en tant qu’Aide-Soignante.

Mario lui apportait un certain réconfort après son divorce. Elle fut mariée à un homme très peu présent à la maison et qui passait son temps dans les bars et cafés à jouer aux courses.

Endetté à cause des paris, Mony ne le supportait plus.

Avec Mario, elle se sentait rajeunie et se réjouissait du fait qu’elle pouvait encore séduire, elle qui approchait la cinquantaine.

Outrageusement maquillée et vêtue d’une mini robe verte qui allait de pair avec un gros sac tout aussi vert, elle traversait la rue avec ses hauts talons noirs. Elle portait un parfum digne d’une bourgeoise.

Les deux hommes la regardaient arriver vers eux avec admiration.

— Bonjour chéri ! dit-elle à Mario.
— Bonjour bébé !

Elle adorait qu’il l’appelle ainsi, car elle revivait une seconde jeunesse. Elle voulait être choyée comme jamais. Ce que son ex-mari n’eut pas le loisir de réaliser.

— Où allons-nous exactement ? demanda-t-elle ensuite.
— À Pierrefitte ma chérie !
— Qu’est-ce qu’il y a là-bas ?
— Comment, tu n’y es jamais allée ? questionna Alain Kazadi.
— Euh… non !
— Mais c’est le coin des Congolais, c’est incontournable !
— Oh laisse-la tranquille, Alain !

Bon nombre de voitures étaient garées devant l’entrée de l’endroit. Aucune place de libre n’était disponible.

Alain demanda à Mony et Mario de descendre le temps de trouver une place plus loin.

Ils entrèrent donc et remarquèrent également la foule de personnes à l’intérieur.

Heureusement, une serveuse leur trouva une table assez bien placée.

Mario commanda tout de suite une Pelforth brune pour lui et une Leffe blonde pour son ami, connaissant déjà son goût, tandis que Mony préféra du vin rouge plutôt que de la bière.

— Ce n’est pas mal comme endroit ! dit-elle.
— Oui, on y vient souvent !
— Avec qui donc ?
— Mais entre potes !
— Vraiment ?
— Sérieux !
— Oh je te taquine !
— J’espère bien, car la jalousie mal placée est insupportable.
— Oh tu exagères tout de même !
— Parlons d’autres choses !
— Où étais-tu hier soir, je t’ai appelé plusieurs fois ?
— Euh… j’étais dans un deuil à Saint-Denis et c’était très bruyant.
— Ah bon, qui est mort ?
— La tante d’un ami.
— Tu aurais dû me rappeler quand même !
— Mais c’est ce que j’ai fait tout à l’heure !
— Après tout ce temps !

Alain arriva et coupa la discussion des deux amants.

— Alors, n’est-ce pas que c’est cool ici hein ?
— Oui, c’est assez décontractant.

Mais c’est le rendez-vous de tous les Congolais du milieu ici !

— Ah ma chère, l’Europe nous asphyxie tellement avec tout ce qu’on abat comme boulot que l’on a besoin de prendre de temps en temps de l’air !
— C’est pas faux.
— Alors, buvons à la santé des Congolais et Africains qui se battent pour survivre en Europe ! dit soudain Mario.

Ils rirent ensuite tous gaiement avant de siroter leurs boissons. Mony semblait ne pas être habituée à pareille ambiance. Son mariage était pratiquement un désastre.

En effet, elle fut carrément obligée par sa famille d’accepter l’offre de ce mikiliste3 qui allait assurer son avenir. C’était une sorte de mariage par commission comme cela se faisait régulièrement dans la communauté congolaise expatriée.

Car à l’époque les femmes se comptaient par les bouts des doigts. Et lorsque l’une d’entre elles arrivait d’Afrique, tous les mâles jetaient leur dévolu sur elle.

Aujourd’hui ce type de mariage était de moins en moins fréquent du fait de la multitude d’offres présentes sur place. Certes, les couples formés avaient mis au monde des filles qui étaient disponibles dans la génération actuelle.

Quelques réticents préféraient encore et toujours « s’approvisionner » à la source de peur d’avoir des épouses ayant des mentalités de Blanche.

Et pourtant, ces femmes mariées au pays changeaient complètement d’attitude par la suite après avoir pris connaissance de leurs réels droits, et après avoir goûté aux allocations familiales. Elles obtenaient beaucoup plus de pouvoir et arrivaient désormais à tenir tête à leurs hommes.

Mony paraissait avoir connu une situation analogue. Non pas qu’elle s’était rebellée à cause des allocations, mais plutôt qu’elle savait de quels droits elle pouvait jouir face à un mari irresponsable.

Son sacrifice pour sa famille demeurait le leitmotiv de cette acceptation. Cet époux possédait ce que toute femme désirait dans la mesure du possible : un foyer ayant de bonnes finances. Le côté matériel ne souffrait d’aucune critique jusqu’au jour où l’entreprise qu’il monta fit faillite. Presque en dépression, il plongea dans les paris plutôt que dans la boisson.

Trois enfants virent le jour de cette union sans réel amour : une fille et deux garçons.

Mony n’aimait pas son homme, et réciproquement, son conjoint ne l’avait choisie que pour être la mère de ses enfants.

Attaché à un souvenir inoubliable, il ne retrouvait pas en Mony cet amour d’antan.

Ainsi donc, la courageuse femme se plaisait d’être là assise à côté de son jeune amant. Elle n’eut pas l’occasion de profiter de dîners ou de sorties en compagnie d’un homme aimant.

Elle ne se reprochait donc de rien. Ni du fait de son âge et encore moins du fait d’être mère.

Elle se rattrapait de ce que le temps lui avait pris.

Elle tenait à profiter dorénavant ; le temps lui devait bien cela.

Alors, elle buvait goulûment ce doux vin rouge et écoutait passionnément « Ma meilleure chemise » du chanteur Ferre Gola. La vie valait la peine d’être vécue.

L’hôtesse qui leur servit la boisson revint leur demander s’ils allaient commander à manger, car ça se bousculait dans les cuisines.

— Un plat de ntaba 4pour moi, dit Mario.
— Moi je préfère le ngulu5, dit à son tour Alain Kazadi.
— Vous avez du poisson ? questionna Mony.
— Oui, bien sûr !

— On a du malangwa6 précisément.

— Alors pour moi ça sera du malangwa et mettez-nous deux chikwangues 7également.
— Entendu madame !
— J’espère que ça ne va pas prendre du temps ! s’exclamait Alain.
— Au fait, pourquoi tu n’es pas venue avec ta copine ?
— La mère de ses enfants tu veux dire ?
— Oui et alors ?
— Tout d’abord parce qu’elle est Marocaine et ensuite parce qu’elle n’aurait pas supporté le voir en train de se goinfrer de porc !
— Très drôle !
— C’est un peu ça non ?
— Laisse-moi tranquille !
— C’est dommage, j’aurais voulu la rencontrer !
— Elle n’est pas trop fan de notre milieu.
— Mais pourtant elle vit avec toi !
— Oui, mais là c’est différent Mony !
— Nos délires à la congolaise c’est pas trop son truc.
— Ok !

L’ambiance de ces lieux ressemblait parfaitement à celle des Kinois. La bière coulait à flots et la musique battait son plein. Les grillades n’échappaient pas à cette gaieté de vivre.

L’endroit semblait être une sorte d’entrepôt en plein air dans lequel étaient montés des sortes de chapiteaux pour parer aux intempéries.

Il différait des espaces verts que les Congolais utilisaient généralement pour organiser leurs barbecues et beuveries. L’essentiel consistait en la présence des trois éléments clés : boisson, grillades et musique. Le lieu importait peu.

Mario se souvenait qu’il avait participé, il y avait de cela cinq ans passés, à une fête congolaise dans le hall d’un immeuble à Aulnay-Sous-Bois dans le département du 93 en région parisienne.

Les invités qui ne trouvaient plus de place à l’intérieur de l’appartement étaient amenés à s’installer tout le long du palier.

Les voisins consentaient à cette organisation, étant invités d’office.

Ce fut plutôt le voisinage lointain qui n’apprécia aucunement cette folle soirée à cause, principalement, de la forte musique qui jouait pour l’occasion.

La police descendit donc sur les lieux. Quelle fut leur surprise de constater pareil dispositif pour festoyer !

Ils applaudirent ironiquement : « Vous les Congolais vous êtes trop forts, vous avez gagné, car on n’avait jamais vu ça ! » dirent les policiers très étonnés.

Passer du bon temps à Pierrefitte réjouissait parfaitement Mony. Elle s’était organisée pour qu’il n’y ait aucun souci avec ses enfants restés à la maison.

Son aînée était déjà majeure et les deux autres ne poseraient aucun problème non plus.

Elle leur fila juste un peu d’argent leur permettant de se trouver une distraction.

Les plats étaient enfin servis. Mario se jetait sur ses morceaux de chèvre tandis que Alain s’occupait de son assiette de cochon grillé. Mony souriait face au poisson bien braisé qui se présentait sous ses yeux. Elle prit un morceau de citron qu’elle pressa aussitôt sur son malangwa. Elle goûtait premièrement aux petits oignons et à la salade entourant le plat.

Tous les trois plongeaient leurs morceaux de chikwangue dans le piment fort, mis à leur disposition.

Après le repas, Alain fit une deuxième commande de boissons. D’autres personnes arrivaient et se mélangeaient à l’ambiance.

Ils se plaisaient tous dans cet univers au rythme des débats et discussions endiablés jusqu’à ce qu’une femme s’approchât de la table des trois joyeux.

— Ah tu es là ! dit-elle.
— Euh… oui qu’est-ce qu’il y a ?
— Tu le sais très bien !
— Tu ne vois pas que je suis occupé ?
— Qui est cette dame, Mario ? demanda Mony.
— Je suis sa copine !
— Erreur, nous ne sommes plus ensemble, Mado !
— Tu dis ça aujourd’hui parce que tu as eu ce que tu voulais !
— Écoute, ce n’est pas le moment ni le lieu pour parler de ça !
— C’est quand le moment ? Tu ne réponds pas à mes messages !
— Madame, excusez-nous, nous sommes occupés là ! répliqua Mony.
— Vous, on ne vous a pas sonnée !
— De quel droit vous me parlez de la sorte ?
— Je vous parle comme je veux ; votre tour de dégager viendra aussi quand il aura fini avec vous !
— Oui, mais en attendant je suis là !
— Pas pour longtemps ma chère !

Alain Kazadi se leva et prit la dame par le bras pour aller discuter plus loin.

Son irruption glaça l’ambiance. Mario marmonnait des mots pas très catholiques entre ses dents. Curieusement, Mony laissait apparaître un sourire en coin. On aurait dit que cette altercation la satisfaisait.

Elle donnait cette réelle impression, car elle se sentait encore une fois rajeunir comme on la disputait pour un homme.

Mado était cette femme qui envoya le SMS à Mario quelques heures plus tôt. Manque de pot, elle se trouvait aussi sur les lieux. Et pourtant, elle occupait une place parmi cinq autres personnes attablées vers le fond de cet espace.

Un homme se leva justement de là et vint à sa rencontre.

— Qu’y a-t-il Mado ?
— Non rassure-toi, je règle un problème de dette Jimmy !
— Ah ok, faits vite, nous t’attendons !

Alain essaya quelque peu de la raisonner, mais elle insistait pour avoir une entrevue avec Mario. Il lui promit de tout tenter pour organiser une rencontre avec son ami, mais que pour l’heure il était question de calmer les esprits.

Elle se contenta de ces dernières paroles puis retourna à leur table après avoir émis un long « tchip » en passant à côté de Mony.

— D’où vient cette sauvage ?
— Ne fais pas attention à elle !

 

Il était l’heure pour eux de s’en aller lorsque Alain sortit son portefeuille afin de payer son écot. Mario ne bougea pas le petit doigt, mais Mony ouvrait également son sac à main pour régler la plus grosse part.

— La journée était très chouette ! déclara Mony.
— En effet oui, répondit Alain.
— Pour avancer vers Saint-Denis, il me faudra prendre un train à la gare de Pierrefitte-Stains.
— Mais non Mony je vais t’accompagner, ne t’en fais pas !
— Ah merci beaucoup, c’est gentil à toi Alain !

 

Il était 21 h 30 lorsque la voiture se gara devant l’immeuble de Mony à Ermont.

Elle embrassa Mario tendrement avant de s’éclipser.

— Elle est très sympa ta Mony, dis donc !
— Euh… ouais !
— Comment ça « ouais » ?
— Mais que veux-tu que je te dise, elle est sympa c’est vrai !
— Toi alors !

— J’aimerais savoir ce que tu recherches dans l’amour ?

— Qu’est-ce qui te prend aujourd’hui ?
— Non, mais tu vas continuer comme ça longtemps ?
— Écoute Alain, je n’ai pas encore fait de choix comme toi, alors laisse-moi vivre cette vie jusqu’au jour où je trouverai mon âme sœur !
— Tu n’as plus vingt ans mon ami !

La discussion s’arrêta là ; ils furent silencieux pour le reste du temps. Alain mit un peu de musique pour égayer l’ambiance.

Mario ne semblait point troublé par les conseils de son ami. Il s’octroyait le droit de vivre cette vie étant donné sa douloureuse séparation d’avec Cathy.

Il pensait un jour au mariage ou à se mettre définitivement en couple, mais ce n’était pas à l’ordre du jour.

Arrivé à destination, Mario descendit de la 206 et monta dans son appartement situé au deuxième étage de la rue Alexandre Parodi dans le dixième arrondissement de Paris.

En dépit du fait qu’il s’était gavé de viande de chèvre et de chikwangue, il réchauffa dans son micro-ondes un plat qui traînait dans son frigo depuis deux jours.

Après s’être enfin rassasié, il prit la télécommande de la télé lorsque tout à coup son téléphone sonna. Tatiana, la femme de la sortie en boîte, le rappelait.

— Allô ?
— Bonsoir chéri !
— Bonsoir Tatiana !
— Qu’as-tu fait de ta journée ?
— Oh, j’étais avec Alain à Pierrefitte !

— Et toi et les enfants, c’était bien ?

— Oui, ils ont aimé la piscine à Aqua boulevard !

— Tu fais quoi en ce moment ?

— J’allais regarder la télévision quand tu m’as appelé.
— Ah d’accord !

— Au fait, j’ai envie de passer demain comme je finis plus tôt.

— Demain ?
— Ben oui ! qu’est-ce qu’il y a ? Tu es toujours au chômage non ?
— Je ne t’ai pas dit que je travaillais.
— Je passe ou non ?
— Si, si !
— Je serai là vers 15 h dans ce cas !
— D’accord chérie ; d’autant plus que j’aurai besoin d’un petit massage !
— Moi aussi j’ai envie d’une faveur.
— Laquelle ?
— J’aimerais que tu défasses mes tresses.
— Quoi ?
— Tu as bien entendu.
— T’inquiète ça ne sera pas compliqué, je t’expliquerai !

Ils passèrent pratiquement une bonne heure au téléphone. Le reste du temps, les deux amants s’échangèrent des mots plus que sensuels.

À un moment donné, Mario fut pris d’excitation. Curieux de savoir comment elle était vêtue, il demanda par conséquent que Tatiana lui fasse un appel vidéo par WhatsApp. Elle s’exécuta sans broncher.

— Waouh, qu’est-ce que tu portes en dessous ? demanda-t-il.

Elle retira sa nuisette rose et laissa apparaître de superbes sous-vêtements rouges qui se mariaient admirablement avec sa peau noire.

Jamais le rouge et le noir n’avaient été autant liés comme dans le roman de Stendhal.

Son soutien-gorge retenait parfaitement sa grosse poitrine et sa petite culotte en dentelle en forme de v moulait généreusement son arrière-train.

Mario faillit lui demander de passer encore une fois la nuit avec lui, mais il stoppa net cette idée. En attendant, il voulait faire plaisir à ses yeux.

— Danse pour moi !
— Comme ça, sans musique ?
— Oui comme ça, sans musique !

Elle obéissait encore et toujours. Telle une danseuse orientale, Tatiana se trémoussait sans gêne. Seul le regard admiratif de son amant comptait.

Elle avait un peu de ventre, mais cela ne la dérangeait aucunement. Mario la désirait tant bien que mal. Elle était tout de même mère de deux grandes filles et en dépit de ce fait, son corps attirait les hommes.

Elle vivait mélancoliquement le début de son veuvage, mais les conseils d’une amie lui firent changer de cap.

Depuis, elle apprit à revivre en tant que femme sans se soucier des qu’en dira-t-on.

Les yeux de Mario faillirent s’arracher à la vue de ses fesses galbées qui dandinaient.

Soudain, elle arrêta net ses mouvements.

— Mais pourquoi tu t’arrêtes ?