Erhalten Sie Zugang zu diesem und mehr als 300000 Büchern ab EUR 5,99 monatlich.
Dans la forêt mystérieuse de Tomikoro, un village paisible aux maisons rondes, vivaient un chasseur, sa femme Masossa et leurs deux fils, Doso Mando et Doso Tabga. L’harmonie familiale fut perturbée lorsque Doso Mando, le fils préféré de sa mère, s’écarta de son chemin. Avide de richesse, il chercha l’aide d’une sorcière pour obtenir un talisman magique, censé lui assurer le succès lors des épreuves d’initiation et lui permettre de succéder à son père. Quel sort attend Doso Mando à l’issue de cette quête ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
N’da Lemissa Kouame a publié son premier ouvrage, "Du jour au lendemain", en 2016. En 2018, il a fondé NKL COMPANY dont il est aujourd’hui président-directeur Général. Son objectif est de transformer la mentalité de la jeunesse africaine pour construire une Afrique forte et unie. "Le chasseur de Tomikoro" est son deuxième livre.
Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:
Seitenzahl: 129
Veröffentlichungsjahr: 2025
Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:
N’da Lemissa Kouame
Le chasseur de Tomikoro
Conte
© Lys Bleu Éditions – N’da Lemissa Kouame
ISBN : 979-10-422-4588-7
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L. 122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.
Depuis des lustres de temps immémoriaux, au cœur de l’immense et mystérieuse forêt de Mballa, se dressait le paisible village de Tomikoro, aux cases rondes, où vivait une humble famille. Le père, nommé Doso Djibril, était un chasseur accompli, ayant hérité des secrets ancestraux de cet art de son père, qui les tenait lui-même de son aïeule. Ainsi, par cette chaîne de transmission, Doso Djibril était devenu un pisteur d’une rare dextérité. Son épouse, Masossa, était quant à elle une guérisseuse respectée, soignant les maux du village à l’aide de plantes aux vertus insoupçonnées. Ensemble, ils élevaient leurs deux fils, Doso Mando et Doso Tabga, ainsi que leur unique fille, Macagbé, dans cette oasis de paix au cœur des bois.
En la sainte présence de sa génitrice, Macagbé recueillait avec dévotion les enseignements de la médecine ancestrale et les secrets des arts culinaires, aspirant à devenir, en un avenir proche, une mère accomplie. Tandis que Mando et Tabga, voués corps et âme aux enseignements paternels, s’initiaient avec ferveur aux arcanes mystiques de la chasse et aux rudiments sacrés de l’agriculture, parachevant ainsi la gloire de cette famille épanouie. Car le seigneur Doso chérissait en ces deux fils, ses plus précieuses richesses, qu’il entendait façonner en chasseurs aguerris, dignes successeurs de sa propre maîtrise inégalée, lui qui avait su affronter et terrasser les bêtes les plus redoutables de la sylve du Mballa, domaine que nul amateur de la vénerie n’osait défier, sous peine d’y trouver une mort certaine. Le père Doso, tel un fils de la forêt, la fréquentait comme s’il s’agissait de sa propre chambre. Sur la façade, parmi les trophées qui s’y alignaient fièrement, se trouvait la cache jalousement gardée où reposait le costume de chasse de l’homme, ouvrage délicat d’un artisan réputé du village. Aux côtés de ces glorieuses dépouilles – cornes de fée du buffle, squelette de la mâchoire de Tito le lion, tête aride de Bobo le python, crâne du boa géant, défenses de Baloba l’éléphant – s’enroulait la corde de liane qui en ornait l’entrée. Les squelettes desséchés des bêtes, ayant été soumis aux ardeurs impitoyables du soleil, étaient religieusement préservés sous la vigilance du père, chasseur émérite. Djibril, d’un ton ferme, interdisait formellement à sa famille de s’approcher de sa case secrète, sous peine de devenir aveugle ou infirme, car en son sein reposaient des gris-gris dont la vue et le toucher étaient proscrits pour les femmes et les enfants. Les descendants du grand chasseur se pliaient à cette règle, demeurant à distance de la case de Djibril, loin du malheur qui pourrait les frapper.
Mando, l’aîné de la lignée, était le dépositaire des espérances aveuglées de son père qui voyait en lui le successeur destiné, celui par qui son héritage serait transmis, un jour, au cadet. Ce dessein n’était point un simple songe, mais le plan longuement mûri par le père Doso, afin de l’ériger en rempart contre les affres du crépuscule de sa vie. Il s’appliqua donc à initier ses deux progénitures aux arcanes de la chasse et des travaux des champs, instruisant plus avant l’aîné Mando que le puîné, afin que la succession s’opère du frère aîné au cadet. Les jeunes gens, distants de sept années, ne pouvaient se voir initiés aux arcanes trop obscurs que leur âge respectif ne leur permettait. La plus jeune ne pouvait être mêlée à la chasse, car certains talismans ne devaient point se dévoiler à son regard de vierge, sous peine de la dépouiller du pouvoir de l’enfantement, tandis que Mando seul pouvait recevoir l’enseignement des mystères cynégétiques auprès du père Djibril Doso. Ce jeune garçon, dénué de toute retenue envers lui-même, l’était a fortiori vis-à-vis de sa génitrice. Quand son père est parti, dans la forêt de la mort, pour une partie de chasse, il dormait jusqu’à une heure qui l’enchantait, avant de replier cette peau de buffle qui lui servait de couche, sans nul effort. Tandis que Macagbé et Tagba s’affairaient à piler le riz afin d’en préparer le repas de midi, il saisit une sacoche et une machette, comme s’il s’apprêtait à débroussailler le champ d’ignames situé non loin du village, n’étant là qu’un subterfuge pour tromper la vigilance de sa pitoyable mère. Lorsqu’il franchissait les portes de l’établissement, un sourire triomphant ornait son visage alors qu’il rejoignait ses compagnons pour se baigner dans les eaux de ce fleuve que les villageois avaient surnommé le « fleuve maudit », « N’zuébatê ». C’était là que les enfants du village venaient s’ébattre, tels de gracieux poissons. Telle était la coutume de Mando, et sa mère, bien qu’elle n’ignorât point le manque de considération de son fils, préférait laisser son cœur maternel prendre le pas sur les réprimandes. Cette onde tumultueuse était formellement proscrite aux plus jeunes, mais Mando, à l’instar de ses pairs, n’ajoutait guère foi à cette interdiction, présumant que ses géniteurs n’avaient fait là qu’un prétexte pour semer la terreur dans leurs cœurs tendres.
La mère de Mando, pour dissimuler les frasques de son impétueux rejeton, convoquait de jeunes manœuvres pour débroussailler le lopin que son incorrigible fils aurait dû entretenir en l’absence de son père.
De la sorte, son père ne le jugeait aucunement nonchalant et lui confiait les arcanes de la chasse. La mère de Mando le chérissait d’un amour sans égal que nul ne saurait estimer ; son enfant bien-aimé était ce Mando qui faisait la joie de sa mère, bien qu’il ne reflétât point une image sans défaut. La nature, en son injustice, ne traita point avec indulgence la mère de Mando, que l’enfant qu’elle admirait entre tous les siens fût un si pitoyable vaurien, si paresseux qu’il n’égalait même pas le gros boa ayant englouti une proie.
Lorsque le paresseux venait réclamer auprès d’elle la satiété de sa bouche gourmande, elle se résignait à son devoir, car la faim lui remémorait l’imminence de l’heure de sa pitance. En ce moment, il présentait sa tête entre les pagnes de sa mère ; le corps couvert de sable, elle ne le grondait d’aucune parole courroucée susceptible de l’offusquer, et sortait la portion servie, qu’il dévorait assis à même le sol, avant de retourner à ses jeux sans même daigner se laver les mains, et ce, tant avant qu’après le repas. Le jeune Mando, d’une laideur repoussante, demeurait crasseux et malodorant, pouvant s’abstenir de bain pendant plusieurs journées, en l’absence prolongée de son père dans la forêt interdite.
Sa mère avait beau parler, il restait sourd, mère Masossa s’attriste, regarde le ciel, les larmes sous ses paupières, et prie le grand « Allah ».
« Allah », c’est toi qui m’as fait grâce d’être une femme féconde. Et c’est toi qui m’as donné un fils à ma première grossesse, c’est à toi « Allah » que je m’adresse, donne le courage à Mando, fils aîné de son père, pour qu’il me rende joyeuse comme son père a rendu joyeuse sa grande mère en devenant une renommée du village de Tomikoro. Quand finissait cet appel à « Allah », elle sentait son cœur, meurtrie soulagée, avant la prochaine bêtise de Mando ; qui allait lui donner un farouche pincement cardiaque ? Mère Mosossa ne trouvait aucun remède à l’insanité de son fils, même si elle était la plus grande guérisseuse de Tomikoro, transformer le cœur d’un enfant paresseux en celui d’un enfant courageux était quasiment impossible à ses yeux. Les tentatives sous les conseils de certaines de ses amies avec lesquelles elle partageait, sa peine, avaient été vaines, mettre des médicaments dans le repas de son fils pour qu’il devienne un enfant respectueux et sage avait échoué. Au fur et à mesure qu’elle lui donnait en cachette cette recette que lui avait conseillée une collègue et amie guérisseuse, son enfant devenait des plus paresseux. Il dormait beaucoup, ronflait comme une cruche, ne prenait pas son bain. La noble mère Mosossa se voyait avec chagrin confrontée à cette affligeante situation, qui portait ombrage à sa renommée de mère accomplie, car un enfant mal élevé est tel un glaive planté dans le dos paternel. Il peut à tout moment et en tout lieu s’abattre sur les membres de sa famille, amputant la sérénité de leur existence. Mère Mosossa craignait avec angoisse que, au sein de sa prestigieuse maisonnée, objet d’envie pour tout le village, ne se trouve un canard boiteux. Elle ne savait comment agir lorsque celui-ci traversait les rues, suscitant les chuchotements : « Voici la mère de Mando, le rejetant, qui passe ». Cette effroyable image jetait peu à peu un voile pesant sur sa renommée de grande guérisseuse. Malgré cette peine accablante, la mère de Mando n’entendait point que le père Doso Djibril prenne connaissance des afflictions que son fils engendrait. Bien que son abord fût affable, le père Doso ne saurait tolérer les écarts de conduite de ses enfants qui s’éloignaient des bienséances. En la présence de son géniteur, il avait coutume d’adopter une contenance relativement convenable, de sorte qu’un observateur novice le jugerait fort bien élevé. Mais c’était là l’une de ses malices, à savoir abuser de la vigilance de ses semblables.
L’honorable père Doso, ayant regagné le domicile familial après maints jours passés hors des sentiers battus, s’était à nouveau illustré par sa dextérité innée et ramené une opulente provision de venaison.
Les enfants et les femmes du village de Tomikro se sont rassemblés pour la répartition de la chasse. La découpe de la viande avait lieu devant la demeure de Doso Djibril, après que le père Djibril avait prélevé la portion réservée à la consommation domestique. Pendant ce moment, Mando ne cessait de garder un œil sur les personnes âgées venues pour prendre leur part de la viande. Lorsqu’une personne âgée était servie d’un morceau de viande particulièrement savoureux, Mando se portait spontanément volontaire pour l’assister. Ceux qui le connaissaient déclinaient poliment son offre, tandis que d’autres acceptaient son aide avec reconnaissance, comme c’était le cas pour les personnes en situation de handicap. La vieille veuve du village, que tous appelaient d’une seule voix « la sorcière », s’était rendue pour prendre de la viande. Aveugle et peinant à marcher, les enfants du village la redoutaient et se réfugiaient auprès de leurs mères dès qu’ils l’entendaient approcher. Malgré son apparence repoussante due à la cicatrice brûlante qui défigurait son visage, Mando n’avait pas peur de cette vieille femme. Sa peau était horriblement hideuse et ravagée par les séquelles de son accident. Retirée du monde dans une cabane éloignée du village, elle vivait dans l’indifférence générale, les morts énigmatiques du village étant attribuées à ses actes. Parmi tous les enfants, Mando était le seul à avoir demandé à suivre Mangui, la femme que l’on désignait comme « la sorcière ». Seule Mangui réussissait à faire cesser les pleurs interminables des enfants du village, et seule elle parvenait à faire peur à un enfant grossier comme Mando. La mère de Mando était surprise, car c’était la première action bienveillante que Mando avait accomplie depuis sa naissance, en accompagnant une vieille femme lépreuse et portant un bagage jusque chez elle. L’accompagnement n’était pas un exploit exceptionnel, mais le fait de surmonter les rumeurs négatives et de s’engager sans crainte était en soi remarquable. De son côté, Mando nourrissait une petite idée secrète. Il avait entendu de la bouche de N’dêba, la commère, que Mangui était une grande créatrice d’amulettes magiques, dotée de pouvoirs surnaturels. Il voulait se procurer de ces amulettes pour combler sa paresse et réussir sans effort. C’est de la même bouche de N’dêba qu’il avait su que Mangui qui ne connaissait ni énervement ni frustration, car depuis sa brûlure, elle était devenue amie à ces deux-là. Par curiosité, Mando a décidé de vérifier les dires de N’dêba en essayant d’énerver Mangui en lui posant des questions qui susciteraient sa colère et se manifesteraient sur son visage sinistre.
— Pourquoi les enfants te craignent-ils tellement ? sollicita l’ordre.
— Ils se contentent de juger mon physique sans se soucier de ce que je suis intérieurement, a rétorqué Mangui.
— Qu’as-tu donc en ton for intérieur ? questionna Mando.
— Ma beauté ne se résume pas à l’apparence, mon enfant. La véritable beauté d’une personne se trouve dans sa profondeur intérieure.
Mando a commencé à railler avec beaucoup de véhémence.
Dans le but d’exaspérer Mangui jusqu’à la fureur, mais il s’était lancé dans une tirade grandiloquente sans but.
Mangui demeura toujours de bonne humeur, il la titillait encore, en lui posant une question imprudente.
— Es-tu véritablement une sorcière ?
— Je ne suis pas une sorcière, a répondu la vieille femme.
— Le mal n’a jamais admis être du mal, rétorqua Mando.
— Mon enfant, quelle est la raison de tous ces questionnements ? Que souhaites-tu comprendre ?
— Je ne cherche qu’à explorer ton essence, sans autre prétention.
— Ô, fils de veneur, ta drôlerie est manifeste ; et la femme, lorsqu’elle est jeune, n’est que superficie, mais une fois devenue adulte, sa profondeur s’accroît dix fois, puis cent fois lorsque les ans ont fait leur œuvre. Hélas, il est impossible pour l’homme de sonder les abysses de l’âme féminine, car le visage de la femme n’est que le tableau mouvant, où elle trace et efface les expressions qui lui conviennent, multipliant ainsi les facettes de son être. Pour me découvrir, il te faudra percer chacune de ces mille faces.
— L’atteinte de la condition féminine n’est point à présent mon souci le plus pressant, ô mon ami. Bien plus pesante est l’inquiétude qui me tient, que le grand Dieu de nos ancêtres ne puisse apporter la résolution à mon tourment.
— Mon âme brûle du désir de connaître les tenants et aboutissants de cette affaire, dans le but de vous prêter mon aide bienveillante.
— Mon cœur se refuse à te dévoiler ses secrets, ô toi qui hantes mes rêves les plus ardents.
— Jeune enfant, confie-moi tes angoisses, car un souci est un mal qui ronge le cœur, et ton âge tendre est à même de supporter un si lourd fardeau. Partage avec moi ton tourment, même si tu juges que je ne suis pas une oreille accueillante. Celui qui a la diarrhée ne craint point l’obscurité, et pour éteindre un feu, l’eau limpide n’est point nécessaire. Ainsi, épanche-moi ton chagrin.
Il m’eût convenu que tu m’accordes cette faveur, sans qu’autrui n’en fût informé par ton entremise.
— Ô grâce divine ! Moi, pauvre vieille femme retranchée du monde, délaissée de tous, qui n’aura personne pour humecter ma gorge asséchée lorsque viendra cette silhouette obscure pour me ravir le souffle de vie, je t’implore à genoux ! Laisse-moi jouir encore quelques instants des joies de ce bas monde.
Que je t’assiste, ô Mangui la magicienne ! Je m’en ébahis mille fois.