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Un homme, décorateur dans le Nord, est poursuivi depuis son enfance par une poisse incroyable. Épuisé, il exprime son ras-le-bol sur les réseaux sociaux. Alors qu’il ne s’y attend pas, un ami lui dit connaître la cause de sa guigne. Entre expédition, passé et présent se déroule alors une aventure saisissante ponctuée par de surprenantes confessions.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Jérôme Paviot a vécu plusieurs faits saisissants. Fort de ces multiples expériences, avec Le Choucabu, il signe leur recensé.
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Seitenzahl: 253
Veröffentlichungsjahr: 2022
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Jérôme Paviot
Le Choucabu
Roman
© Lys Bleu Éditions – Jérôme Paviot
ISBN : 979-10-377-7394-4
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
17 h 52, ce dimanche 14 mai 2017 dans le quartier ouvrier du Blanc seau à Tourcoing dans le Nord, Jérôme Chancerelle se pose quelques minutes devant son PC pendant que sa femme, Aline, s’affaire au repas et que leur petite fille Maryline met la table. La veille, ils se sont rendus à Londres pour un premier petit voyage ensemble depuis très longtemps. Le voyage ne fut pas de tout repos, la petite fut malade dès les premiers kilomètres de bus, ils ont oublié que la petite avait besoin d’une carte d’identité et ont bien failli rester à la frontière anglaise… sans oublier une panne de Shuttle… Jérôme va sur les réseaux sociaux… Il publie cette phrase : « vivre c’est pour les autres… » puis il aide sa fille pour la table.
La famille prend son repas. Maryline, qui a fêté ses 7 ans il y a quelques mois, monte se coucher une fois le dessert pris. Sa maman l’accompagne comme chaque soir. Jérôme retourne vite fait sur les réseaux et voit un commentaire d’un ami qui lui demande ce qu’il se passe. Il lui répond qu’une nouvelle fois il a enduré un week-end de « poissard ». La poisse, c’était une coutume pour Jérôme… Son ami Fabien tombe des nues en apprenant tout cela, mais cette poisse qui ne lâche pas Jérôme finit toujours bien, comme s’il était perpétuellement puni de quelque chose… Fabien lui explique alors qu’il connaît peut-être les causes de cette malchance. En effet, les deux amis, qui vivent aujourd’hui dans le Nord, sont originaires d’une autre région et se sont retrouvés au milieu des supporters lors d’un match de football opposant une équipe locale à l’ancien club qu’ils supportaient étant enfants : Sedan dans les Ardennes. Depuis quelques mois, ils échangent sur les réseaux.
Fabien, désormais commercial dans une entreprise, lui explique que dans le quartier où ils vivaient en bordure de forêt Ardennaise, il existerait un homme vivant dans un cabanon et que ce personnage à la tête un peu bizarre pratiquait des rituels vaudou et autres. Il pense qu’il peut être lié à la malchance de son ami. Jérôme lui avoue qu’il ne croit pas à ces sornettes et les deux amis se souhaitent bonne nuit.
Artisan en décoration en bois et gravure sur verre, Jérôme prépare les choses à travailler pour le lendemain le soir au calme, car son travail demande une concentration extrême. Sa femme l’aide, elle peint la nuit également les décorations en bois puis prépare les envois aux clients le matin. C’est une vie difficile mais cette vie leur permet de voir grandir leur petite fille tous les jours !
À la base, Jérôme travaillait en industrie. Il y a passé quinze années, d’abord dans les Ardennes puis un peu en Bretagne lorsqu’il a divorcé dix ans auparavant. Sa première femme partie avec les enfants dans cette région, il avait suivi pour se rapprocher d’eux. Seulement, acculé par les dettes qu’un papa doit souvent endurer dans ce cas de figure, il a pensé repartir en Ardennes. Très esseulé et ne voyant ses deux premiers enfants qu’un week-end sur deux, la situation devenait intenable et, un soir, sur un site de rencontre, il a connu une certaine Aline et, comble du hasard, elle était aussi Ardennaise. Jérôme avait remarqué qu’Aline avait aussi deux enfants et avait commenté la photo en disant : « Ils sont beaux les petits gars du Nord ». Quelques jours plus tard, Aline est revenue en lui disant qu’un des deux garçons était Ardennais ainsi qu’elle-même.
La relation démarra et, expliquant sa situation, Jérôme n’arrivait même plus à manger alors qu’il travaillait et ne dépensait pas plus que ça, Aline lui fit parvenir cent euros. Cette gentillesse toucha Jérôme. Cette fille, inconnue quelques jours auparavant, venait de l’aider… Un soir, dans son petit appartement, il réfléchit : payer une partie des factures avec cet argent ou bien tenter de rejoindre sa belle inconnue. Il s’empressa de faire le plein de sa Renault 19 bien usagée et fit toute la distance de soir et une partie de la nuit.
Il arriva dans le Nord au milieu de la nuit, le décor fut bien différent de celui de Bretagne, des maisons en briques rouges partout. Des rues qui se ressemblent et des villes collées les unes aux autres. Tant bien que mal, Jérôme finit par trouver la rue de son coup de cœur Ardennais…
Arrivé devant la porte d’Aline, il frappa discrètement au milieu de la nuit, mais personne. Il colla quelques mots de patois Ardennais sur la porte et attendit dans sa voiture puis il y retourna quelques minutes plus tard et les mots n’y étaient plus. Aline était revenue d’une soirée avec des amis. Un peu indécis sur le choix du jour pour repartir, Aline le convainquit de rester chez elle. Il abandonna donc son logement Breton puis y retourna une soirée plus tard pour récupérer des choses… Il démarrait donc une nouvelle vie dans le Nord avec un poids de facture de sa première vie mais également Aline qui de son côté vivait la même situation. Ils avaient tous les deux un dossier de surendettement… Deux enfants dont les conjoints n’ont pas réfléchi concernant les gardes… Jérôme ne voyait donc plus ses deux premiers enfants, Adam, un garçon handicapé né à six mois de grossesse et Clara, sa petite fille… Aline perdit la garde de Samuel et William, préférant aller chez le papa…
Jérôme commença à retravailler en industrie à droite à gauche mais le cœur n’y était plus… Bien que pauvre, une petite fille vit le jour en juillet 2010, Maryline. L’enfant de l’espoir, celui qui lui redonna l’envie d’être à nouveau papa avec simplement le manque des premiers sur les épaules. Les deux parents décidèrent de décorer la chambre de leur petite fille, le papa décida de réaliser des lettres en bois pour son prénom. Il regarda un peu partout comment faire puis acheta une scie à chantourner. Le travail, bien que grossier au départ, était quand même correct. Très bricoleur, Jérôme décida d’en créer et d’en vendre…
C’est ainsi qu’en 2012 naquit leur entreprise : Les créations en bois de Maryline. Avec son travail en industrie d’ameublement plus son entreprise, Jérôme faillit craquer nerveusement et physiquement à plusieurs reprises… Le contrat finit dans l’industrie, il se consacra entièrement à son entreprise qui grandit un peu plus chaque jour. Cette entreprise lui permit de continuer à voir sa petite fille chaque midi quand la petite entra à l’école… Il faisait également toutes les sorties scolaires… Mais la poisse qui poursuivait Jérôme n’était jamais bien loin.
C’est ainsi qu’un jour, voyant le temps s’effilocher en rentrant d’un magasin de bricolage, il eut peur d’arriver en retard à l’école et, malheureusement, un véhicule devant ralentissait si fort que Jérôme s’énerva. Il prit une route sur la gauche pour pouvoir aller plus vite, n’oubliant pas de faire un doigt d’honneur à la voiture qui le bloquait. Arrivé dans la rue perpendiculaire à un feu rouge, un homme le sortit vivement de son véhicule puis il mit son brassard de Police en haut de son bras… « Alors comme cela on insulte la police ! » Jérôme se justifia par le fait qu’ils l’empêchaient de pouvoir rejoindre l’école de sa fille et qu’il ignorait qu’ils étaient policiers. Après vérification de tous les papiers et autres, ils le laissèrent repartir.
Jérôme n’en revenait pas. Il était sonné par cette poisse finissant toujours en une « petite chance ». Les années passèrent ainsi. Avec les commandes qui arrivaient, la famille n’était pas du tout riche mais elle avait pris une habitude de vie, de travail qui convenait à tout le monde.
Mais la maison située dans un quartier assez calme de cette ville n’offrait pas un confort exceptionnel. Il n’était pas exclu de subir des dégâts à la moindre intempérie… Que ce soit des fuites d’eau au niveau du toit ou bien une inondation régulière de la cuisine suite à une malfaçon causée par le propriétaire. De l’humidité sur les murs, bref le sentiment de ne jamais voir la « fin des travaux ».
Il subissait également des problèmes de voisinage dus aux tapages ou encore aux problèmes de stationnement.
Après avoir passé un lundi à se poser des questions sur les dires de Fabien, à ruminer, il décida qu’il fallait aller à la rencontre de cet homme dans les Ardennes. La journée s’est passée normalement et, après avoir récupéré sa fille à l’école, il écrit un message à Fabien lui demandant s’il serait partant pour un « retour vers le futur » Ardennais.
Fabien accepta et les deux amis décidèrent de partir le week-end du 27 mai. Ayant un véhicule très abîmé, Jérôme proposa à Fabien de prendre le sien et de lui payer une partie des frais d’essence.
Jérôme, sa femme et sa petite fille rejoignirent Fabien à la gare de Lille. Auparavant, il avait fait en sorte de sécuriser la maison au cas où. Dans sa vie, il valait mieux prévoir. Fabien arriva et Jérôme lui présenta sa petite famille. Chacun prit place dans la voiture, qui prit donc la route des Ardennes.
Jérôme avoua à son ami que ce périple était une sorte de soulagement, qu’il fallait qu’il trouve réponse à ses questions. Fabien commença la discussion par lui avouer qu’il vivait seul et que, contrairement à Jérôme, il n’avait pas de familles. Il lui restait les parents dans les Ardennes mais que niveau cœur cela n’avait pas été terrible. Il avait privilégié le travail puis ses allers-retours dans les Ardennes. Jérôme regarda Maryline à l’arrière de la voiture et se dit que c’était quand même une chance d’avoir cette petite fille et cette femme. Cette toute petite famille mais extrêmement grande par le cœur lui faisait un bien fou malgré tout, c’est ce qui le faisait tenir dans sa vie très agitée où les journées sont rythmées par le travail à la maison, l’envoi des colis, les courses alimentaires et professionnelles, les allers-retours à l’école… dans sa vie, il n’avait pas « le temps d’être malade ».
Il vit les yeux de Maryline briller à la vue de la nature à la sortie de la métropole Lilloise, la petite n’avait que très peu l’occasion de voir du « vert ». Ce mini voyage prenait donc des allures de vacances.
Fabien n’avait pas beaucoup changé physiquement. À croire que cet ami avait toujours été chauve. Ils se sont connus en enfance puis avaient travaillé un peu dans la même entreprise qui fabriquait du revêtement de sol, de la moquette. C’était un homme bien dégarni sur le dessus avec des petites lunettes, un langage avec un accent bien Ardennais, avec pas mal de patois. C’était un pêcheur de sandre, de brochet. Une véritable passion puisqu’il avait même réalisé un étang derrière chez ses parents. Jérôme avait aussi pêché la truite plus jeune, comme son grand-père, dans un ruisseau proche de la ville de Sedan.
Physiquement, Jérôme, lui, avait quand même changé un peu… Il avait pris un peu de poids mais aussi des rides commençaient à apparaître. Les cheveux étaient quasiment tous blancs mais Fabien était habitué. Déjà à 15 ans, Jérôme avait eu ses premiers cheveux blancs. La quarantaine s’approchait pour les deux amis et ils étaient vraiment heureux de se retrouver dans une sorte de nouvelle aventure.
Aline était ravie que son mari puisse partager un peu de sa vie avec un ami, un proche.
Elle expliqua à Fabien que pendant que nos deux loustics faisaient des barrages dans un ruisseau, elle était chez son papi de l’autre côté de la forêt. Que le monde est petit, parfois magique ! Jérôme et Aline étaient tous deux rêveurs, ils avaient puisé leur force dans leur jeunesse, leur enfance au milieu de cette nature Ardennaise. En étant proche des grands-parents principalement.
Des grands-pères qui se ressemblaient fortement, pleins d’amour, de respect, des gens qui avaient connu la guerre dans cette terre meurtrie.
Pas forcément proches de leurs parents, qui avaient tendance à les mettre de côté, ils ont grandi comme cela. Et surtout, ils ont pris le meilleur des anciens et surtout l’ont gardé. Le droit de s’amuser, de faire des erreurs, de travailler, bref, de vivre mais toujours avec un œil bienveillant. Que ce soit pour la famille ou encore des amis, mais aussi des inconnus.
Fabien commença par la simple question que tout le monde se pose au début d’une discussion : « alors comment ça va depuis l’temps », avec son accent Ardennais bien prononcé. Jérôme esquissa un sourire et lui répondit que la route serait longue et qu’il pensait ne pas avoir assez de distance pour tout lui raconter. Il lui expliqua tout d’abord l’évènement le plus marquant de sa première partie de vie, son divorce qui a tout chamboulé dans sa vie et son esprit. Jérôme avait passé la quasi totalité de son parcours professionnel en industrie mais surtout avec des contrats intérimaires. Ce qui pouvait rendre les choses difficiles notamment pour obtenir des crédits afin d’effectuer des achats plus conséquents. Ses vacances étaient donc inexistantes mais il l’acceptait car cela permettait à sa famille de grandir et de se protéger. Par contre, cela n’a pas été accepté par son ex-femme qui, encouragée par ses parents à partir en Bretagne, finit par y aller afin de se rapprocher de son frère et de sa sœur partis aussi là-bas. Mais le futur dira qu’elle était également partie avec un autre homme… Travaillant en 2007 dans une entreprise de fabrication de panneaux de bois, Jérôme était resté dans les Ardennes pendant que son ex-femme passait quinze jours de vacances en Bretagne avec les petits.
Il en profita pour, une fois ses heures d’usine effectuées, redécorer la chambre de son petit pour son anniversaire. C’était beaucoup de travail mais l’envie de voir son petit avec les yeux qui brillent l’encourageait. Il avait choisi un thème super héros, Spiderman. La chambre était très bien décorée et hyper sécurisée. Le petit, handicapé suite à une naissance prématurée, pouvait se mettre en danger notamment avec les portes des meubles ou fenêtres…
La maman et les enfants revinrent de Bretagne et, lorsque Jérôme rentra du travail, la première image du retour de ses enfants c’était de voir les deux petits jouer avec des punaises dans la chambre non terminée pendant que la maman était sur internet. Jérôme lui fit la réflexion et d’un coup elle prit ses affaires et partit précipitamment comme ça…
Jérôme n’en croyait pas ses yeux mais il était assez intelligent pour avoir senti le coup venir. Il a de suite compris qu’il y avait quelqu’un d’autre derrière. Il essaya plusieurs coups de fil chez ses anciens beaux-parents qui ne répondaient plus. Il eut envie d’en finir, n’hésita pas à installer une corde dans la petite remise en bas de l’immeuble mais il changea d’avis et, comme bon Ardennais, décida de se battre.
Un coup de fil de la gendarmerie retentit. Il devait s’y rendre le plus rapidement possible. Les gendarmes lui ont appris que sa femme voulait porter plainte pour menaces. Jérôme, lors du départ de son ex-femme, lui demanda de se calmer. Il avait en main un couteau avec lequel il grattait de la peinture sur les étagères de la future chambre de son fils. Celle-ci raconta aux gendarmes qu’il l’avait menacée avec ce couteau et que, de plus, il voulait se suicider. Les gendarmes ont quand même cru Jérôme qui, quelques années auparavant, avait effectué une partie de son service militaire dans cette même caserne.
Fabien n’en revenait pas ! Les deux amis avaient aussi travaillé ensemble dans une entreprise de fabrication de moquettes, Jérôme lui faisait part des disputes avec son ex-femme mais sans jamais imaginer un tel scénario.
Jérôme voulut repartir de la gendarmerie mais ceux-ci n’ont pas voulu qu’il reparte seul. Pire, ils ont indiqué à Jérôme qu’ils allaient l’emmener dans un centre de santé mentale. Jérôme refusa mais il n’avait pas le choix. Il monta donc dans le véhicule qui prit la direction du centre psychologique. Arrivé là-bas, Jérôme fut pris en charge par les infirmières qui le voyait donc comme un fou. Il a pris le repas au milieu de tous ces malades se demandant parfois si ce n’était pas une caméra cachée. Les comportements de certains effrayaient Jérôme qui restait prostré dans le couloir. Il reconnut néanmoins une personne qui habitait son quartier lorsqu’il était enfant. C’était un ancien banquier tombé dans l’alcoolisme et la dépression à la suite du départ de sa femme. Et la dernière fois que Jérôme avait aperçu ce voisin, il était pourchassé par les forces de l’ordre ! Il encouragea malgré ses faiblesses Jérôme à partir d’ici le plus vite possible.
De nouveau dans le couloir, un individu s’approcha de lui et lui demanda s’il était nouveau. Jérôme lui avoua que oui et l’autre répondit à Jérôme qu’il allait bientôt recevoir ses médicaments. Cauchemardesque… Heureusement, il n’en était rien, Jérôme devant voir le médecin le lendemain même.
Il passa une nuit bien stressante où les infirmières indiquèrent qu’il fallait dormir avec une ceinture sur soi car parfois certains se faisaient étrangler avec la nuit !
Au réveil, Jérôme allait voir le médecin, il savait que c’était sa finale de coupe du monde à lui. Pas le droit à l’erreur ! Le médecin arriva, Jérôme lui expliqua toute la situation. Le médecin lui répondit qu’il n’avait pas de problèmes de santé mentale mais des problèmes de couple tout simplement. Il le laissa repartir. Jérôme dut rentrer en train chez lui.
De retour dans son appartement, il vit les derniers outils trainer dans la chambre de son petit, vit la chambre de sa fille vide et triste. Plus un bruit dans l’appartement.
Il se mit devant son ordinateur et commença par envoyer des candidatures pour du travail en Bretagne et se mit à la recherche d’un appartement. Ce travail fut long, très long, il n’avait pas le soutien espéré de ses parents. Un jour, il disjoncta et décida de retrouver son vrai père, resté en Normandie. Son papa était parti quand Jérôme avait deux ans. Il n’avait jamais revu son fils. Élagueur de profession, il avait consacré sa vie à son entreprise. Il avait essayé de revoir son fils mais la situation était tendue avec les grands-parents maternels de Jérôme, il abandonna donc… Jérôme partit dans le village où vivait encore sa grand-mère qu’il n’avait jamais connue. Sans oublier une nouvelle péripétie, à savoir une marche arrière sur le périphérique Parisien après avoir pris une mauvaise sortie… Heureusement, sans gravité. Il arriva le soir dans le village et frappa à la porte mais personne ne répondit. Il décida de dormir sur la place du village. C’était un très beau village normand, il s’agissait de Saint-Pierre-sur-Dives.
Le matin, il retourna à la maison mais personne. Il repartit donc en essayant de contacter son père sur le téléphone après avoir fait des recherches sur internet. Celui-ci répondit qu’il aurait un peu de temps en fin de matinée et qu’il pourrait venir voir Jérôme sur une aire d’autoroute. Cette réponse agaça encore plus Jérôme qui l’envoya balader ouvertement. De retour en Ardennes, Jérôme refusa un premier CDI qui s’offrait à lui car il savait qu’il quitterait le département.
Il eut quelques réponses positives, notamment pour le travail. Il fallait organiser un week-end en Bretagne, il demanda de l’aide aux anciens beaux-parents. Ceux-ci acceptèrent de l’aider. Il partirait avec l’ancien beau-père et l’ancienne belle-sœur. Mais, avant, il eut une réponse de son père qui lui proposa de se revoir dans la ville Ardennaise de Charleville.
Jérôme se retrouva donc un midi à la gare et vit son père arriver, après vingt-huit ans d’absence. C’était un homme trapu un peu voûté. Il décida d’emmener Jérôme dans un restaurant sur la place Ducale de Charleville et lui expliqua sa séparation avec sa mère. Sa version n’était pas la même que celle entendue depuis des années par sa mère mais il s’en fichait.
L’essentiel était ailleurs. Ces retrouvailles, c’était comme une page qui se tournait. Une page Ardennaise pleine de joie et souvenirs mais aussi avec de la tristesse et rester ici n’aurait fait qu’amplifier la souffrance de Jérôme. Les amis ou la famille ne lui parlant que de son divorce et des problèmes, il n’aurait pas supporté. Il partit donc un week-end près de Douarnenez en Finistère dans un mobil home qu’il avait loué en fin de saison. Son ancien beau-père l’accompagnait dans des visites de logement. Le premier se situait pas loin du port mais juste derrière l’usine Connétable. L’odeur de poisson allait surement devenir insupportable pour Jérôme.
Toutefois, la personne qui faisait visiter le petit appartement de type F2 était la fille du propriétaire. Elle-même était une femme divorcée avec une petite fille. Jérôme et elle ont sympathisé. L’ancien beau-père fut étonné que son ancien gendre eût l’approche aussi facile avec les gens mais Jérôme était une personne d’un naturel gentil. Sans trouver d’appartement, le retour en Ardennes fut obligatoire. Quelques semaines plus tard, Jérôme y retourna puis décida de revoir la fameuse Angélique, la fille de l’appartement. Elle le reçut chez elle devant un café et lui raconta qu’en face de chez elle une vieille personne louait un petit appartement. Ils sont allés voir le propriétaire présent sur les lieux pour des travaux de finition et Jérôme loua l’appartement. Le lien avec Angélique devint fort et Jérôme déboula quelques jours plus tard avec son camion de déménagement. Il dut déménager seul. Son amie d’en face l’aida donc avec en plus une autre voisine et sa fille. Une belle solidarité qui fit le plus grand bien à Jérôme.
Le lien avec Angélique était fort mais ne déboucha pas sur une relation amoureuse. Jérôme trouva un travail dans une entreprise qui fabriquait des batteries pour voitures électriques, le tout début de ce type de véhicule, une grande fierté pour lui. Mais les salaires étaient assez bas et son ex-femme demandait les pensions alimentaires pour les enfants. Elle avait osé demander sept cents euros pour les pensions des enfants et une aide pour elle alors que Jérôme gagnait mille deux cents euros. Le tribunal avait très bien compris le manège et ne demanda que cent quatre-vingts euros pour les deux enfants. Mais le temps fut long, Jérôme n’ayant qu’un week-end sur deux de gardes.
Il en profita pour ressortir avec un ami de l’entreprise avec lequel il travaillait mais il était plus jeune que lui et Jérôme malgré le fait qu’il soit encore jeune ne retrouva pas le second souffle des sorties en discothèques. Peut-être était-il trop sorti étant plus jeune ou bien avait-il trouvé le calme d’une famille et qu’il voulait le retrouver...
Il rencontra des filles par le biais d’internet mais pas forcément de relations sérieuses. Il osa des choses comme un jour en voyant une affiche pour la vente d’un véhicule apposée sur le véhicule il envoya un message à la femme qui vendait le véhicule. Il lui avoua qu’il ne la contactait pas pour la voiture mais que si cela dérangeait qu’il s’excusait. Et une relation démarra, la personne était veuve âgée de dix ans de plus que lui. Mais cette relation ne fonctionna pas. Le train de vie de la femme et la mentalité de celle-ci faisait obstacle à quelque chose de stable. Ou encore une autre fille plus jeune mais trop agitée, volubile, et qui se laissa draguer un soir par les amis de Jérôme, celui-ci alcoolisé partit à pied pour retourner chez lui en colère, il marcha quatorze kilomètres sur l’autoroute, un énorme danger, certainement signe d’un profond mal être. Ses amis le retrouvèrent puis la relation s’arrêta donc. Il a également rencontré une fille de dix ans plus jeune. Il l’avait connue lorsqu’il était encore en Ardennes, ils avaient longtemps discuté sur internet et s’étaient vu en Bretagne dès le premier jour de la venue de Jérôme. Cette personne était une fille d’une profonde gentillesse mais jeune pour Jérôme qui voulait retrouver une certaine stabilité et qui comprit très vite que non seulement cela pouvait s’arrêter très vite mais surtout il ne voulait pas gâcher le futur de cette gentille personne.
Bref une vie difficile mais Jérôme avait aussi en partie peut être peur d’être seul. Mais il aimait beaucoup la vie de famille et à la trentaine il se sentait encore l’âme d’un papa. Capable de relever le défi d’une nouvelle famille tout en continuant à voir ses enfants.
Ces « exploits » féminins Bretons n’étaient pas un plaisir à entendre ou ré-entendre pour Aline mais elle savait très bien que Jérôme et Fabien s’étaient manqués l’un à l’autre et que cela passait par raconter leurs parcours de vie. Jérôme avait besoin de raconter ce cheminement car au milieu de toute cette aventure il y avait toujours la poisse. La poisse qui finit toujours très bien.
Par exemple, un soir où Jérôme aida son ami à déménager dans Quimper. Les deux amis finirent le déménagement par un repas et une ou deux bouteilles de vin. Quelques verres plus tard, Jérôme reprit la route pour Douarnenez, il avait un peu bu. Son ami voulait qu’il dorme chez lui pour aller au travail ensemble le lendemain. Jérôme parti et le long des quais de l’Odet, il faillit prendre un petit pont en sens interdit, il redressa le véhicule et prit le pont suivant. Mais au premier pont en perpendiculaire, il y avait un véhicule de police au feu rouge qui décida de contrôler notre poissard. Se sentant condamné à cause de l’alcool, il décida de ne pas s’arrêter, la police continua la poursuite puis Jérôme finit par abandonner.
« Bonsoir, Monsieur, Police Nationale, alors vous n’aviez pas vu le sens interdit ? »
« Beh si justement c’est pour cela que je ne l’ai pas pris ! »
« Vous avez bu. »
« Beh on est en Bretagne, il est une heure du matin oui j’ai bu. »
Test positif, alors un agent décida de traverser le petit pont à pied avec Jérôme afin de connaître exactement le taux d’alcoolémie au commissariat. Ah les méfaits de l’alcool avec cette petite voix qui vous dit : « Pousse-le dans l’eau et sauve-toi ! »
Il ne tenta pas le diable et arriva au commissariat où certains policiers croyaient à un taux record voyant la tête de Jérôme mais celui-ci était exténué de sa journée de déménagement. Il souffla et le taux était tout juste en dessous. Il ressortit libre et décida de fêter cela en discothèque. Il ne trouvait pas de places de stationnement aux abords de la boîte dans laquelle il voulait aller, tourna un peu et retomba sur le véhicule de police. Il finit donc par rentrer, il valait mieux… Quelques kilomètres en direction de Douarnenez, le voyant de la batterie s’alluma. Le lendemain, son ami lui rechargea le véhicule à l’aide de pinces mais plusieurs jours plus tard cela recommença.
En fait, l’alternateur du véhicule était HS. Ne pouvant régler une belle somme de garagiste, il acheta un alternateur d’occasion dans une casse automobile. Cela fonctionna plusieurs mois puis relâcha de nouveau. La voisine de Jérôme lui donna un coup de main un matin en lui proposant d’utiliser les pinces, le véhicule démarra et Jérôme partit au travail mais la petite Twingo de la voisine tomba en panne.
Des histoires et des péripéties racontées ici avec des envies d’y glisser des émojis…
Fabien était mort de rire. Jérôme lui avoua qu’il y avait encore d’autres choses.
Une petite pause s’imposa à mi-chemin vers les Ardennes. Celle-ci s’effectua sur une aire d’autoroute en bordure de forêt. Cet air frais faisait du bien à la famille. Maryline était ravie, comme détendue, cela se lisait sur son visage. Aline également. Elle qui passait son temps à surtout protéger sa famille et sa fille des besoins chaque jour et surtout chaque nuit dans sa peinture. Jérôme expliqua que déjà au même endroit depuis longtemps à Tourcoing, il souhaitait déménager histoire d’avoir peut-être un peu de terrain pour sa famille et de mettre du changement dans sa vie. Ce n’était pas chose aisée, les quartiers chics et agréables de la métropole Lilloise coûtaient cher. Et pour une location dans sa ville de Tourcoing, les propriétaires étaient très très exigeants. Cette situation de « surplace » était parfois angoissante, l’impression de ne plus avancer. Vous avez les études, l’armée puis le travail, la vie de famille et d’un coup il n’y a plus qu’à vieillir…
Mais malgré la force de caractère de Jérôme, les années commençaient à se faire sentir… Il avait travaillé très jeune en forêt Ardennaise. Son père était bûcheron puis devint élagueur professionnel, son beau-père également bûcheron.
Vers dix ans, il fallait rentrer le bois pour l’hiver dans une « remise ». Un tracteur prêté ou loué par les grands-parents arrivait dans ce petit quartier du Fond de Givonne à Sedan. Le grand-père faisait la police devant la porte pour garder un stationnement pour le tracteur. Tout le bois était expédié à la main par-dessus une grille dans une cour en pavé. Une fois que tout était déchargé (cela représentait parfois vingt mètres cubes). Il fallait reprendre ce bois et le ranger dans une remise au fond de la cour juste sous les appartements de l’immeuble. C’était un travail de titan mais cela plaisait à Jérôme car c’était quelque chose de partagé en famille. Et petit à petit il impressionnait déjà le grand-père car il était déjà fort physiquement et allant parfois encore plus rapidement que les adultes.
Il aimait ce quartier, là où il avait grandi, tous ces souvenirs étaient ici. Déjà enfant, il lui était arrivé des péripéties. Il parla (ou reparla pour Fabien) de ces histoires avec son pote et Aline sur l’aire d’autoroute. Il avait un souvenir très ancien, un souvenir où il était d’ailleurs très jeune… vers deux ou trois ans, il était allé en famille faire les courses dans le centre-ville. À l’époque, les grands centres commerciaux n’existaient pas. Il avait repéré dans un bazar un joli tracteur. Ce bazar c’était son repère. Plein de petits jouets dans des cartons partout. Les ptits soldats, les billes… Revenant à la maison, il exprima sa colère, le grand-père se posa des questions et lui demanda pourquoi il agissait ainsi. Le petit répondit qu’il voulait son tracteur puis éclata en sanglots et en colère. Le grand-père demanda à ses deux filles de retourner acheter le tracteur, il donna l’argent.