Le Coquillage Magique - S.E. Smith - E-Book

Le Coquillage Magique E-Book

S.E. Smith

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Beschreibung

Ross Galloway n’attend qu’une chose, refaire sa vie loin de Yachats, dans l’Oregon. Tout ce dont il a besoin pour que ses projets se réalisent, c’est d’un peu d’argent et de beaucoup de chance. La roue tourne pour lui lorsqu’il découvre quelque chose d’extraordinaire au cours de l’une de ses plongées… une véritable sirène.
Ses plans pour tirer profit de sa découverte ne prennent pas tout à fait le chemin qu’il avait prévu. En effet, la sirène lui offre un cadeau inattendu : un coquillage magique. Emporté sous l’eau par le sort que renferme le coquillage, Ross refait surface dans un monde étrange et bizarre.
La Princesse Gem LaBreeze est une élémentale, une puissante espèce capable les éléments. Transformée en pierre pour être protégée du mal qui menace l’île des Éléments, elle est réveillée par un homme venu d’un autre monde, un étranger aussi arrogant et fruste qu’imprévisible.
Gem et Ross, forcés de s’allier dans une course contre le montre désespérée, apprennent que les contraires peuvent s’attirer et que parfois, les dehors les plus grossiers cachent les plus tendres des cœurs. Un héros improbable et une femme seule peuvent-ils survivre aux pièges tendus pour arrêter une créature étrangère destructrice déchaînée, ou l’île des Éléments retombera-t-elle dans l’océan et disparaîtra-t-elle à tout jamais sous les vagues ?
Auteur de renommée internationale, S.E. Smith propose une nouvelle histoire d’action pleine de romance et d’aventure. Débordant de l’humour qui la caractérise, de paysages éclatants et de personnages attachants, il est certain que ce livre deviendra un nouveau favori des fans !

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Seitenzahl: 428

Veröffentlichungsjahr: 2021

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Le Coquillage Magique

Un Conte des Sept Royaumes Tome 6

S.E. Smith

Remerciements

Je voudrais remercier mon mari Steve de croire en moi et d'être assez fier de moi pour me donner le courage de suivre mes rêves. J'aimerais également remercier tout particulièrement ma sœur et meilleure amie, Linda, qui non seulement m'a encouragée à écrire mais a également lu le manuscrit. Et également mes autres amis qui croient en moi : Jennifer, Jasmin, Maria, Rebecca, Gaelle, Angelique, Charlotte, Rocío, Aileen, Julie, Jackie, Lisa, Sally, Elizabeth (Beth), Laurelle, et Narelle. Les filles qui m'aident à continuer !

Et un merci tout particulier à Paul Heitsch, David Brenin, Samantha Cook, Suzanne Elise Freeman, Laura Sophie, Vincent Fallow, Amandine Vincent, et PJ Ochlan, les voix fantastiques derrière mes livres audios !

—S.E. Smith

Paranormal Romance

Le Coquillage Magique

Les Sept Royaumes Tome 6

Copyright © 2021 par Susan E. Smith

Publication E-Book en anglais décembre 2019

Publication E-Book en français février 2021

Traduit Par : Charlotte Spender

Relu Par : Gaëlle Darde

Couverture par : Melody Simmons et Montana Publishing

TOUS DROITS RÉSERVÉS :

Cette œuvre littéraire ne peut être reproduite ou transmise sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, y compris la reproduction électronique ou photographique, en tout ou en partie, sans l'autorisation écrite expresse de l'auteur.

Tous les personnages et événements de ce livre sont fictifs ou ont été utilisés de façon fictive, et ne doivent pas être interprétés comme étant réels. Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou décédées, des événements réels ou des organisations est strictement fortuite et n'est pas voulue par l'auteur.

Résumé : Un pêcheur fait la découverte de sa vie avant d’être soudainement téléporté dans un monde magique où il s’allie à une puissante princesse pour sauver non seulement son royaume, mais aussi les Sept Royaumes.

ISBN : 9781952021831 (livre de poche)

ISBN : 978-1-952021-82-4 (eBook)

Romance (amour, contenu sexuel explicite) | Fantasy Dragons & Créatures Mythiques | Contemporain | Paranormal | Action / Aventure | Fantasy

Publié par Montana Publishing, LLC

& SE Smith de Florida Inc. www.sesmithfl.com

Sommaire

Prologue

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Chapitre 24

Chapitre 25

Chapitre 26

Epilogue

Notes

Histoire des Sept Royaumes

Plus de livres et d’informations

À propos de l’auteur

Personnages

Île des Éléments :

Roi Ruger et reine Adrina LaBreeze

Gem Aurora LaBreeze, princesse des élémentaux

Wayman, haut chancelier du roi et de la reine, et cousin de Gem

Samuel, garde personnel du roi

Île des Monstres :

Impératrice Nali

Îles des Pirates :

Roi pirate Ashure Waves

Îles des Géants :

Roi Koorgan, souverain actuel des géants

Gant, bras droit et ami de Koorgan, mi-géant, mi-sorcier

Roi Samui et reine Malay, souverains originels des géants et parents de Koorgan

Île du Dragon :

Roi Drago

Île du Serpent de Mer :

Roi Orion

Magna, la sorcière des mers

Résumé

Ross Galloway n’attend qu’une chose, refaire sa vie loin de Yachats, dans l’Oregon. Tout ce dont il a besoin pour que ses projets se réalisent, c’est d’un peu d’argent et de beaucoup de chance. La roue tourne pour lui lorsqu’il découvre quelque chose d’extraordinaire au cours de l’une de ses plongées… une véritable sirène.

Ses plans pour tirer profit de sa découverte ne prennent pas tout à fait le chemin qu’il avait prévu. En effet, la sirène lui offre un cadeau inattendu : un coquillage magique. Emporté sous l’eau par le sort que renferme le coquillage, Ross refait surface dans un monde étrange et bizarre.

La Princesse Gem LaBreeze est une élémentale, une puissante espèce capable les éléments. Transformée en pierre pour être protégée du mal qui menace l’île des Éléments, elle est réveillée par un homme venu d’un autre monde, un étranger aussi arrogant et fruste qu’imprévisible.

Gem et Ross, forcés de s’allier dans une course contre le montre désespérée, apprennent que les contraires peuvent s’attirer et que parfois, les dehors les plus grossiers cachent les plus tendres des cœurs. Un héros improbable et une femme seule peuvent-ils survivre aux pièges tendus pour arrêter une créature étrangère destructrice déchaînée, ou l’île des Éléments retombera-t-elle dans l’océan et disparaîtra-t-elle à tout jamais sous les vagues ?

Prologue

Trois ans auparavant,

Îles des Éléments :

Les couloirs du palais de cristal étaient animés par les activités matinales des résidents, mais la princesse Gem Aurora LaBreeze n’avait que vaguement conscience de l’agitation qui régnait dans le magnifique couloir. Elle était préoccupée par ce qui s’était passé à la réunion à laquelle elle avait assisté la veille. Elle essayait encore de comprendre tout ce qu’elle avait vu et appris avant d’en parler à ses parents.

La partie la plus choquante de la réunion avait été de voir le roi dragon ! Aux dernières nouvelles, Drago avait recouvert toute l’île du Dragon d’un brouillard mortel après que la sorcière des mers eut transformé sa famille et tous ses sujets en pierre. Dans les années qui avaient suivi, jamais il n’avait réapparu… jusqu’à la réunion des dirigeants et des représentants qui s’était tenue la veille. Tout cela parce qu’une femme d’un autre monde était venue et avait tout changé.

Nali, l’impératrice des monstres, avait affirmé que cette femme, Carly Tate, avait déclenché une série d’événements qui allaient rassembler les royaumes pour détruire « la créature étrangère ». C’était ainsi qu’ils appelaient l’entité maléfique qui avait pris le contrôle de Magna la sorcière des mers et l’avait forcée à semer la terreur sur les Sept Royaumes.

Son libre arbitre ayant été asservi pendant des siècles, les autres participants de la réunion avaient voté pour épargner la vie de la sorcière des mers si possible. Gem avait été l’unique dissidente. Elle ne savait pas encore pourquoi ses parents avaient été si catégoriques sur le fait qu’elle devait voter pour la mort de Magna, quelles que soient les circonstances, mais elle était sûre qu’ils ne seraient pas heureux d’apprendre la décision qui avait été prise.

L’expression de Gem s’adoucit à la vue du vieux garde qui assurait la protection devant une splendide double porte. Le garde inclina la tête en signe de respect et ouvrit la porte de la salle de conférence à son approche. Les portes magnifiquement sculptées racontaient l’histoire des élémentaux. Tendant la main, elle fit glisser affectueusement ses doigts sur la surface de l’un des battants.

— Vos parents vous attendent, princesse. Je dois vous prévenir, cependant, le haut chancelier est avec eux, murmura le garde.

— Merci de m’avoir prévenue, Samuel, répondit Gem avec un sourire triste.

— Je vous en prie, Dame Gem. Je vais aussi parler aux jeunes gardes de leurs manières… encore une fois. Je pense que vous avez brisé plus d’un cœur à votre arrivée ce matin sans même vous en rendre compte, dit le garde, les yeux pétillants.

Elle jeta un coup d’œil par-dessus son épaule et vit plusieurs jeunes gardes qui la regardaient avec un sourire en coin. Elle gloussa et secoua la tête lorsque l’un des jeunes hommes rougit et lui offrit un grand sourire. Face au regard sévère que leur lança Samuel, le groupe se sauva rapidement dans différentes directions. Elle reporta son attention sur le vieux garde.

— Les nouvelles recrues… à chaque fois, c’est pareil. C’est la première fois qu’ils entrent dans le palais. Je voulais leur donner l’occasion de voir le fonctionnement quotidien, expliqua-t-il. Ils ne parleront que de vous pendant toute la journée.

Il secoua la tête, amusé et contrit à la fois.

— Je le fais juste pour te faire plaisir. Cela te donne une raison de les réprimander, plaisanta-t-elle.

Gem souriait toujours quand elle entra dans la salle de conférence. Aussi loin que remontaient ses souvenirs, Samuel avait toujours été le garde personnel de ses parents. Elle avait passé d’innombrables heures à l’interroger sur les différentes scènes représentées sur les portes et il avait passé le même nombre d’heures à la captiver avec l’histoire de l’île des Éléments. Il lui avait également appris à manier l’épée.

Son sourire mourut sur ses lèvres lorsqu’elle vit le haut chancelier parler avec ses parents. Peu lui importait que l’homme soit son cousin éloigné, elle ne l’aimait pas et ne lui faisait pas confiance. Petite déjà, elle évitait Wayman autant qu’elle le pouvait. Elle ne comprenait pas pourquoi ses parents avaient choisi de lui attribuer un poste aussi important après la mort prématurée de ses parents.

Tandis qu’elle traversait la pièce, Gem détourna le regard de Wayman et se focalisa sur la lueur amusée qui brilla dans les yeux de sa mère. La reine Adrina LaBreeze haussa un sourcil et Gem plaqua un sourire forcé sur ses lèvres pour toute réponse, adressant un signe de tête poli au haut chancelier, qui l’observait d’un air calculateur. Sans se départir de son sourire serein, elle planta nonchalamment son regard dans celui de l’homme répugnant et comme d’habitude, une étincelle de colère brilla dans les yeux de son cousin avant qu’il ne se détourne. Ce bâtard pouvait toujours attendre s’il pensait pouvoir l’intimider.

— Bienvenue à la maison, mon trésor, salua chaleureusement sa mère.

Gem s’arrêta devant sa mère et l’embrassa légèrement sur les deux joues avant de faire de même avec son père. Celui-ci retint ses bras un instant avant de la lâcher. Elle ignora Wayman. S’il y avait bien un moyen d’atteindre son cousin, c’était de lui refuser l’attention et le pouvoir qu’il désirait ardemment.

— As-tu fait bon voyage ? lui demanda doucement son père.

Gem approuva d’un signe de tête.

— C’était intéressant, répondit-elle, évasive.

Elle jeta un coup d’œil à Wayman. Elle parlerait de la réunion à ses parents plus tard. Son instinct lui disait de se montrer extrêmement prudente concernant les informations qu’elle divulguait devant son cousin. Si ses parents décidaient d’informer Wayman de l’endroit où elle s’était rendue et de ce qui avait été discuté, ce serait leur décision.

— Je ne savais pas que tu avais quitté l’île, Gem. Je crois qu’il y a encore un décret qui restreint sévèrement tous les voyages en vigueur, commenta Wayman de façon appuyée.

Elle haussa les épaules.

— Mon voyage a été autorisé par le roi et la reine, Wayman. Je ne voyais aucune raison de te faire part de mes déplacements, rétorqua-t-elle.

Son cousin plissa les yeux et pinça les lèvres avant de dire doucement :

— Comme nos Majestés le souhaitent, bien sûr.

Il inclina la tête avec déférence vers le roi Ruger et la reine Adrina. Gem regarda sa mère quand elle sentit une main sur son bras. Ce fut à ce moment seulement qu’elle prit conscience qu’elle serrait avec force la poignée de son épée. Son cousin déclenchait toujours en elle le profond désir de voir si son sang était rouge ou noir.

— Wayman, nous te retrouverons plus tard. Nous aimerions passer du temps seuls avec notre fille, déclara gracieusement sa mère.

Wayman se raidit à ce renvoi. Il salua brièvement sa mère et son père et lui lança un regard interrogateur. Gem se tourna d’un air désinvolte et le regarda se diriger silencieusement vers une sortie dissimulée derrière une grande tapisserie sur le côté gauche de la pièce.

Elle attendit d’entendre la porte s’ouvrir et se refermer avant de se retourner vers sa mère. Son père eut un petit rire et Gem souffla.

— Je ne sais pas pourquoi vous tolérez ce misérable b…, marmonna-t-elle avec un reniflement de dédain.

— Parfois, il est préférable de garder près de soi ceux en qui nous n’avons pas confiance, répondit le roi Ruger en soupirant.

Gem leva un regard surpris vers son père.

— Je ne savais pas que tu ressentais la même chose.

— Il a toujours été le fils de son père, j’en ai bien peur, dit Ruger.

Sa mère émit un reniflement inélégant avant de changer de sujet.

— Qu’as-tu découvert ? lui demanda-t-elle.

Gem regarda ses parents avec une profonde inquiétude.

— Les autres vont essayer de capturer Magna. Nali a conseillé de ne pas la tuer. Drago…

— Drago ! s’exclamèrent en chœur ses parents.

— Le roi dragon est de retour ? voulut savoir son père.

Gem acquiesça d’un signe de tête.

— Oui. Il y avait une femme avec lui. Elle n’est pas de notre monde, expliqua-t-elle.

— Pas de notre…, commença sa mère, penchant la tête avec un intérêt soudain.

— Parle-nous d’elle, lui demanda son père avec impatience.

Gem pensa à Carly Tate.

— Elle est si douce et si gentille, et elle ressemble beaucoup à quelqu’un de notre monde, bien qu’elle ne semble pas posséder de magie. Nali a dit que sa présence a déclenché une série d’événements qui sauvera notre monde… tant que Drago ne tue pas Magna.

Sa mère fronça les sourcils.

— Nali possède le Miroir de la déesse. Elle sait ce qu’il en est, reconnut-elle.

— Mais pourquoi leur dire de ne pas tuer Magna ? Si la sorcière des mers meurt, les royaumes seront à nouveau en sécurité, protesta son père.

Gem secoua la tête.

— Nali a dit que ce n’est pas vraiment Magna qui fait ces choses, mais une créature étrangère qui s’est emparée de son corps. Nali pense que Magna se bat contre la créature, confia-t-elle.

— Une créature comme…, murmura sa mère, regardant Ruger avec une expression inquiète.

— Qu’est-ce qu’il y a ? interrogea Gem.

— À quoi ressemble cette créature étrangère ? demanda doucement son père.

Gem fronça les sourcils.

— Je ne sais pas. Nali dit qu’elle est tombée du ciel et qu’elle a vu une ombre noire recouvrir Magna. Pourquoi ? Tu sais ce que c’est ?

Ses parents échangèrent un regard avant de reporter leur attention sur elle. Son père prit la main de sa mère et la serra.

— Viens avec nous, lui enjoignit-il d’une voix douce.

Gem hocha la tête et suivit silencieusement ses parents hors de la salle de conférence. Elle fut surprise lorsqu’ils franchirent la porte qui menait à l’extérieur. Elle s’arrêta et regarda derrière elle. Le sentiment tenace qu’ils étaient surveillés ne la quittait pas.

— Où allons-nous ? demanda-t-elle en se retournant vers ses parents, qui descendaient l’escalier menant aux jardins centraux.

Sa mère s’arrêta sur les marches.

— Ce serait mieux si on te montrait, répondit-elle doucement.

Intriguée par le comportement de ses parents, Gem leur emboîta le pas. Le grand jardin intérieur se composait de nombreux petits jardins à thème clos de murs couverts de lierre et qui formaient un vaste labyrinthe.

Sa mère adorait la roseraie, alors que son père préférait les cactus du désert. Quant à elle, le jardin à floraison nocturne était son préféré. Elle les suivait à travers le labyrinthe. Les hautes haies qui bordaient les chemins changeaient continuellement. Seuls les huit jardins clos étaient constants.

Des années lui avaient été nécessaires pour apprendre la moindre nuance du champ énergétique qui la guiderait à travers le labyrinthe vers n’importe lequel des jardins qu’elle voulait visiter. Elle baissa les yeux vers ses mains. Un sourire penaud se dessina sur son visage lorsqu’elle réalisa qu’elle avait inconsciemment levé les paumes pour sentir les pulsations d’énergie.

Elle ralentit en sentant alors une pulsation inhabituelle qui la menait vers la gauche. Levant les yeux, elle vit sa mère s’arrêter et lui adresser un sourire triste.

— Qu’est-ce que c’est ? On dirait presque que…

Elle secoua la tête, incapable de cerner l’émotion.

— Du chagrin, de la douleur…, déclara sa mère.

Gem la regarda, perplexe.

— Oui.

Sa mère lui tendit la main. Gem s’avança, glissa sa main dans celle de sa mère, et elles tournèrent à l’angle du labyrinthe. La stupéfaction lui coupa le souffle. Le jardin préféré de sa mère grouillait de plantes grimpantes sauvages, agitées et couvertes d’épines acérées.

— Qu’est-ce qui s’est passé ? interrogea Gem d’une voix à peine audible.

— Il vaut mieux que nous soyons à l’intérieur du jardin avant de parler de cela, répondit son père.

Adrina tendit la main et murmura quelques mots aux plantes grimpantes. L’un des stolons vint s’enrouler au bout de son doigt. La pointe tranchante d’une épine en effleura la pulpe et fit couler du sang. Lorsque la plante grimpante reconnut sa mère, elle se retira assez loin pour créer une ouverture vers la porte.

Ruger s’avança et fit un geste de la main en l’air. Une clé de cristal apparut. Il la prit et l’inséra dans la serrure. Gem ne pouvait s’empêcher de se demander ce qui était si important qu’ils devaient le protéger derrière la porte.

Elle s’arrêta et regarda son père avec inquiétude avant de suivre sa mère à l’intérieur et de balayer le jardin du regard. La dernière fois qu’elle s’y était rendue, elle n’était encore qu’une enfant.

Gem s’avança, bouche bée devant la beauté des deux arbres enroulés l’un autour de l’autre au centre du jardin. Jamais encore elle n’avait vu de tels arbres. Ils ressemblaient à deux corps enlacés. Le plus grand des deux arbres semblait protéger le plus petit. Des rosiers grimpants sauvages poussaient autour des troncs épais, mais seule une rose était éclose. La rose rouge foncé était traversée de nervures noires et était plus grande qu’une assiette. Elle s’avança pour toucher l’un des pétales. Un petit hoquet franchit ses lèvres lorsque son père saisit son poignet pour l’arrêter.

— Ne la touche pas, l’avertit-il.

— Pourquoi ? Je ne comprends pas. Pourquoi il fait si froid ici ? demanda-t-elle en se frottant les bras.

— C’est l’ombre noire dont Nali a parlé, répondit sa mère d’une voix douce.

— L’ombre noire…

Gem regarda sa mère, puis son père avant de reporter son attention sur la rose.

— Tu veux dire que la créature étrangère qui a pris le contrôle de Magna est ici ? Comment ? Depuis quand ? Pourquoi vous ne me l’avez pas dit plus tôt ?

Gem vit ses parents échanger un regard, leurs expressions reflétant une multitude d’émotions contradictoires.

— Oui, la créature étrangère est ici, mais ce n’est pas la même que celle qui a pris le contrôle de Magna, commença la reine Adrina. Peu de temps après la fin de la Grande Guerre, le roi Samui et la reine Malay de l’île des Géants sont venus nous demander de l’aide. Ils naviguaient près de l’île du Serpent de Mer quand un objet est tombé du ciel. La météorite a endommagé leur navire et il a fallu plusieurs jours pour le réparer. Alors qu’ils avaient jeté l’ancre près du lieu où la météorite était tombée, Samui en a trouvé un morceau… et il était vivant. Il s’est glissé sous sa peau et a commencé à le consumer. Malay a immédiatement demandé notre aide.

— Mais… pourquoi ? Pourquoi ne pas retourner à leur royaume ? demanda-t-elle en regardant les arbres enlacés.

— Malay est ma sœur, ta tante. Les géants doivent se marier en dehors de leur royaume. Malay est tombée amoureuse de Samui lorsqu’ils se sont rencontrés adolescents, raconta sa mère.

Gem la regarda avec surprise.

— Pourquoi tu ne m’as jamais parlé d’elle ? voulut-elle savoir.

— Tu étais très jeune quand Malay et Samui sont arrivés. La créature étrangère se développait rapidement et se répandait dans le corps de Samui. Rien de ce que nous avons fait n’a pu l’arrêter. Après quelques jours à peine, nous nous sommes rendu compte qu’elle prenait possession de son esprit, dit sa mère, la voix tremblante d’angoisse.

Ruger rejoignit Adrina et passa un bras autour de sa taille.

— Nous étions dans ce jardin et essayions différentes formes de magie pour extraire la créature de Samui, mais elle était trop puissante. Samui a commencé à se battre contre nous. Malay a essayé de l’arrêter. Quand elle l’a touché, une partie de la créature s’est répandue en elle. Ta mère et moi savions que si nous ne les arrêtions pas, ils causeraient des dégâts dévastateurs et des morts, sans parler de la possible propagation de la créature à d’autres îles. J’ai invoqué un vieux sort des Anciens et les ai transformés en arbres, expliqua-t-il.

Sa mère désigna la rose de la main.

— Récemment, les plantes grimpantes ont commencé à pousser et nous avons remarqué la propagation de la noirceur dans les pétales de la rose. Nous pensons que la créature est devenue assez forte pour chercher à s’échapper… dans un nouvel hôte.

Gem regarda la fleur. Cela ne faisait guère longtemps qu’ils discutaient, pourtant, le noir avait presque entièrement remplacé le rouge. Le mouvement des doux pétales était presque hypnotique. Elle devait serrer les poings pour résister à la tentation de les caresser.

— Pourquoi est-ce que ça ne s’est pas propagé à partir de Magna ? questionna-t-elle d’une voix distraite.

— Magna est une sorcière très puissante. La créature utilise les pouvoirs de la personne qu’elle occupe. Je pense que Magna a senti le danger et a été capable de lier la créature à elle-même pour qu’elle ne puisse pas se répandre, ce qui ressemble beaucoup à ce que Malay et Samui ont fait en utilisant leur magie combinée pour enfermer la créature en eux lorsqu’ils se sont transformés en arbres. Si nous pouvions trouver un moyen d’extraire la créature et de la contenir, nous pourrions peut-être sauver Malay et Samui, mais nous devons le faire rapidement. Sinon… sinon, nous pourrions être obligés de mettre fin à leur vie afin de la tuer, parce que nous ne pouvons pas la laisser se propager, expliqua sa mère d’une voix légèrement tremblante.

— Si une telle créature est aussi puissante que vous le dites, peut-être qu’il serait préférable de la laisser vivre.

Ils se retournèrent tous en entendant la voix grave de Wayman.

— Que fais-tu ici ? exigea de savoir Ruger.

Les lèvres de Wayman esquissèrent un sourire sardonique.

— Mon devoir de conseiller, comme je le devrais, Majesté.

Gem regarda avec un malaise croissant son cousin entrer dans le jardin. Il ne les regardait pas, ses yeux rivés sur les silhouettes transformées de Samui et de Malay. Elle s’avança devant lui, l’arrêtant net.

— On ne t’a pas demandé d’être ici, lança-t-elle sèchement.

Wayman la regarda.

— Je ne vois pourtant pas où je devrais être sinon ici.

Il avait parlé avec une certitude si sinistre que Gem se demanda si cela n’allait pas au-delà de la volonté de ne pas être tenu à l’écart. Un mouvement près de la porte du jardin détourna son attention de Wayman l’espace d’un instant.

— Je m’excuse, Vos Majestés, j’ai essayé de l’empêcher de vous suivre, mais je l’ai perdu dans le labyrinthe, déclara Samuel, à bout de souffle.

— Je m’en occupe, Samuel, assura Ruger au vieux garde.

— Wayman, ne fais pas ça ! cria Adrina.

En une fraction de seconde, le désastre se déroula sous les yeux de Gem. Wayman tendit les deux mains et saisit la rose, maintenant complètement noire. Son corps se raidit et ses yeux s’élargirent. Des tentacules noirs s’enroulèrent autour de ses bras et engloutirent rapidement son corps.

Ruger éloigna rapidement Gem et Adrina de Wayman et les poussa derrière lui.

— Transforme-le, Ruger, lui conseilla Adrina en lui saisissant le bras.

Son cousin se tourna et les regarda. Son visage était dur et ses yeux avaient maintenant la couleur d’une nuit sans lune. Ses lèvres se retroussèrent pour laisser échapper un grognement et il leva les mains vers eux.

Sa bouche de Wayman bougea, mais le son qui en sortit était éraillé, rauque, froid et étrange :

— Je suis libre !

Son père allait réagir, mais avant qu’il n’en ait le temps, de longues lances noires et pointues jaillirent des paumes de Wayman. Rapide comme l’éclair, Samuel se jeta devant son roi. Les lances transpercèrent le corps du garde bien-aimé, le soulevant du sol. Il resta un instant suspendu avant que l’alien au contrôle du corps de Wayman ne le jette sur le côté comme une poupée de chiffon.

— Non ! Samuel !

Le cri horrifié de Gem résonna autour d’eux et elle tendit la main vers son ami.

— Courez ! hurla son père.

Gem trébucha lorsque son père se tourna et les poussa, Adrina et elle, à travers la porte du jardin. Il n’était pas loin derrière, et dès qu’il en eut franchi le seuil, il claqua la porte et murmura un ordre d’une voix rauque. Alors qu’ils reculaient, ils virent les plantes grimpantes qui avaient protégé le jardin se transformer.

— Ça se propage, dit sa mère d’une voix lourde de chagrin.

Gem saisit sa main et commença à la tirer pour rebrousser chemin. La créature se répandait bel et bien et les lianes se tendaient avidement vers eux. Elle se retourna pour regarder son père quand elle s’aperçut qu’il n’était pas à leurs côtés.

— Père ? s’écria-t-elle.

Ruger recula. Adrina lui tendit la main. Il fixait ses yeux sur la masse noire croissante. Gem émit un sifflement en voyant les murs du jardin s’effondrer brusquement et Wayman s’avancer dans l’enchevêtrement de plantes grimpantes, un rictus méprisant aux lèvres.

— C’est à cela que ressemble le vrai pouvoir, Ruger. Tu aurais dû l’embrasser au lieu d’essayer de l’enfermer, siffla-t-il.

— Eau givrante, maîtrise-le, ordonna Ruger.

Gem regarda des gouttelettes d’eau se former autour du corps de son cousin avant de se transformer en glace. À l’intérieur de la glace, elle pouvait voir les tentacules noirs se tortiller. Sa main se serra sur le bras de sa mère lorsque les lianes qui se tendaient vers elles commencèrent à se retirer. L’espoir la gagna jusqu’à ce qu’elle aperçoive la lueur malveillante dans les yeux de Wayman.

— Père, attention ! cria Gem.

Elle poussa sa mère sur le côté et bondit en avant. Ses bras s’enroulèrent autour de la taille de son père, le renversant au moment où la glace se brisa et envoya des éclats tranchants vers eux. Se mettant à genoux, Gem sortit une lame de sa botte et la lança. La lame se planta profondément dans l’épaule de Wayman, le faisant reculer de plusieurs pas.

Elle se remit debout et aida son père à se relever avant de se tourner vers sa mère. Ils devaient sortir d’ici. La créature poussa un hurlement de rage strident et s’étira pour retirer la lame de l’épaule de Wayman.

— Mère ! s’exclama Gem, inquiète.

Adrina gisait sur le sol, un long éclat de glace dépassant de son flanc. Une tache de sang sombre s’étendait sur le vert clair de sa robe. Gem s’agenouilla et posa une main contre la joue de sa mère.

— Ruger, tu dois — nous devons… le sort des Anciens. C’est la seule chance de sauver notre royaume maintenant, murmura Adrina.

Ruger prit la main de sa femme et hocha la tête.

— Gem, tu dois partir demander l’aide des autres royaumes. S’ils peuvent tuer la créature qui habite Magna, ils pourront peut-être faire de même ici. Au moins, préviens-les de ce qui va arriver, l’enjoignit son père.

Gem fronça les sourcils. Son regard passa du visage pâle de sa mère à celui de son père.

— Je ne vous quitterai pas ! Samuel…, commença-t-elle.

Son père lui saisit le bras.

— Tu es notre seul espoir maintenant, Gem. Je placerai des pièges sur le chemin pour ralentir la créature si elle parvient à se libérer, mais tu ne dois pas la laisser te toucher. Vas-y ! ordonna son père d’une voix sévère.

Gem voulut protester, mais son père était déjà en train de lancer le sort. Elle se leva en voyant la brume se former autour de lui. La créature — et Wayman — tendit un tentacule vers ses parents. Elle leva instinctivement les mains et ferma le labyrinthe devant eux. Alors qu’elle reculait, elle vit son père aider sa mère à se relever. La voix de sa mère se mêla à celle de son père tandis qu’ils récitaient ensemble l’enchantement.

La peur et le chagrin la submergèrent. Les plantes grimpantes noires percèrent les haies, les arrachant du sol et les jetant sur le côté dans leur quête avide d’autres hôtes à habiter. Les traits de Wayman passaient du bois à la pierre, puis redevenaient chair.

Elle continuait à s’éloigner à reculons, craignant de tourner le dos et d’être vulnérable à une attaque de la créature. Ses yeux s’élargirent d’horreur lorsque les voix de ses parents s’estompèrent à mesure que la brume les enveloppait et que leurs corps fondaient. Même si leurs voix furent réduites au silence, cela n’arrêta pas pour autant la magie qu’ils avaient libérée. La brume s’épaissit et commença à s’étendre.

— Joins-toi à moi, Gem, et accepte ton destin, lança Wayman.

Gem secoua la tête dans un geste de refus, rendue muette par la peur. Reculant vers le premier virage du labyrinthe, elle pivota sur ses talons et s’enfuit tandis que la brume gris foncé de la magie des Anciens continuait à s’étendre, roulant telle une épaisse vague sur le sol. Le hurlement de rage de Wayman fut audible derrière elle et elle comprit que la créature luttait contre le pouvoir magique qui s’emparait lentement de l’île.

Transpercée par la peur, Gem remontait en courant le chemin menant aux hautes falaises de l’île des Éléments. Ses cris d’avertissement ne furent pas entendus. Le sort que ses parents avaient lancé enveloppait l’île par trois côtés.

Les cris stridents de la créature se firent plus forts et plus frustrés, mais Gem ne pouvait s’arrêter pour se retourner et voir ce qui se passait. Utilisant la force du vent, elle créa un tunnel devant elle et le laissa l’emporter juste avant que la brume ne cascade à l’endroit où elle s’était tenue.

Tout ce qu’elle entendait maintenant, c’était le vent qui sifflait à ses oreilles, ses cheveux tourbillonnant si violemment qu’elle pouvait à peine voir. La magie lui demandait beaucoup d’énergie. Elle ne pourrait pas la maintenir longtemps.

Le tunnel était à peine assez large pour qu’elle puisse le traverser, mais il créait un vortex qui ouvrirait un portail et l’enverrait d’un côté de l’île à l’autre. À un moment, son coude frôla la brume. Son bras la picota et commença à s’effacer. Elle serra les bras contre ses flancs, les éloignant du danger.

Un par un, les gens autour d’elle disparurent comme s’ils n’avaient jamais existé. L’ombre noire essaya de capturer les habitants, mais ses longs tentacules ne rencontraient que du vide. Le sort ancien, sous la forme d’un nuage en rouleau, effaçait tous ceux qu’elle avait connus, aimés et avec qui elle avait combattu, mais Gem ne craignait pas la magie qui balayait son île natale. Son père savait ce qu’il faisait et connaissait les conséquences de cette puissante magie ; elles étaient préférables, et de loin, à l’alternative.

Une partie de la créature se glissa dans le vortex, elle le sentit, force sombre et affamée concentrée dans un tentacule noir. Gem courut plus vite, refusant d’être submergée par sa terreur. Elle devait faire preuve d’intelligence si elle voulait sauver son peuple. Ses muscles protestaient, et chaque respiration lui coûtait. Elle ne pourrait pas courir éternellement.

Parvenant à prendre de l’avance sur la brume, elle libéra la puissance du vent, poussant un soupir de soulagement essoufflé au moment où le sort cessa de la vider de son énergie. Un arbre géant renversé lui bloquait le chemin. Elle leva un bras tremblant, paume tournée vers l’extérieur, et se concentra.

L’arbre éclata en millions de particules. Gem fendit les éclats scintillants. Dès qu’elle fut de l’autre côté, elle ferma le poing et les particules se reformèrent.

Pantelante, elle jeta un coup d’œil par-dessus son épaule en entendant le bruit de bois qui se brisait. Les serres noires de la créature brisèrent l’arbre mort en deux. Gem se retourna et repartit de plus belle.

Devant elle se dessinait une ouverture dans les arbres et la forme caractéristique d’une pierre gravée. L’espoir la gagna ; encore quelques mètres et elle pourrait s’échapper. Le bruit de sa respiration résonnait à ses oreilles et elle pouvait voir son souffle dans l’air soudain froid. Du coin de l’œil, elle suivait la brume magique qui se rapprochait d’elle. Le temps filait rapidement.

Dès qu’elle aurait atteint le bord des falaises, elle se transformerait. Il était trop dangereux de le faire si tôt. Si la magie ancienne la rattrapait, elle ne pourrait peut-être plus jamais se retransformer.

— Mienne. Viens à moi, exigea la silhouette de glace derrière elle.

Gem ignora l’ordre et repoussa ses limites, courant aussi vite qu’elle le pouvait. Autour d’elle, les arbres ployaient afin de la laisser passer avant de se redresser dans une tentative pour ralentir la créature malveillante qui la poursuivait. Les tentacules noirs se tendaient avidement vers elle, mais les quelques pas d’avance qu’elle avait lui permettait de leur échapper.

Plusieurs mètres devant elle se trouvait le belvédère de pierre qui se dressait, telle une sentinelle silencieuse au-dessus des falaises. Les pierres des Anciens lui offriraient une certaine protection contre la créature. Des larmes de soulagement coulèrent le long de ses joues à l’instant où son pied toucha la première dalle aux gravures complexes.

Les pierres brillèrent sous ses pieds. Elle était presque libre. Elle saisit le pilier de pierre et s’avança dans le refuge du belvédère, à bout de souffle. Son cœur battait la chamade lorsqu’elle se retourna et recula de plusieurs pas pour échapper aux tentacules noirs qui s’enroulaient autour du belvédère sans y pénétrer.

— Tu ne peux pas me toucher ici, créature ! Rien n’est assez puissant pour briser les sorts des Anciens, déclara Gem, espérant que ce qu’elle disait était vrai.

— Ta magie ne peut pas nous arrêter. Elle nous donnera du pouvoir. Avec le pouvoir de ton espèce et la magie de la sorcière des mers, nous pourrons prendre le contrôle de nombreux mondes, dit l’entité sur un ton hypnotique.

Gem pivota alors que la forme noire encerclait le belvédère, bloquant les seuls passages par lesquels elle pourrait s’enfuir. Une vague d’un intense chagrin déferla en elle. Il n’y avait personne pour l’aider. Son père avait caché l’île des Éléments du monde il y avait de cela fort longtemps pour protéger les autres royaumes, mais cela les avait également isolés. Si elle ne parvenait pas à quitter cette île, personne ne viendrait jamais les sauver.

— Tu ne te serviras jamais de moi, proclama Gem avec une détermination croissante.

La créature, qui encerclait toujours le belvédère, prit alors une forme familière qui lui déchira le cœur, celle de sa mère. Un chagrin incommensurable l’envahit, mais une autre émotion l’égala : la rage. Elle sortit l’épée courte du fourreau à sa taille et fit un pas en avant.

— Tant de pouvoir. Tu peux défaire ce que les autres ont fait. Je peux sentir le pouvoir en toi. Un pouvoir que tu ignores posséder, dit dans un murmure l’entité qui ressemblait tant à sa mère.

— Un pouvoir que tu ne contrôleras jamais, jura passionnément Gem.

— Oh, mais si, répondit la créature.

Gem regarda avec une horreur et une peur grandissantes la créature avancer lentement. Les pierres sous les pieds de l’alien se mirent à briller. Des flots de couleur s’élevèrent pour s’enrouler autour de son corps. La peau de la créature bouillonna et grésilla comme si elle était en train de cuire jusqu’à ce qu’une fine croûte se forme. La croûte se transforma en cendre et tomba, mais la créature semblait ne pas être affectée par les dommages et continuait à se rapprocher d’elle. Levant l’épée courte, elle trancha un tentacule quand celui-ci jaillit vers elle. La créature poussa un hurlement strident d’indignation mais ne recula pas.

Les tentacules jaillirent avidement les uns après les autres pour tenter de la capturer dans leur étreinte maléfique. Derrière la créature, Gem pouvait voir la brume magique que ses parents avaient invoquée se rapprocher toujours plus d’eux. Elle recula d’un pas vacillant au moment où la magie atteignit le belvédère.

Gem savait qu’il était trop tard ; elle ne s’échapperait pas de son île. Son peuple et elle étaient condamnés. Son dernier espoir reposait sur le fait que la bataille contre la sorcière des mers soit couronnée de succès. Si c’était le cas, il y avait une chance que Drago, Orion et les autres sachent comment vaincre l’entité que Nali avait vue dans son miroir.

Je vous en prie, Déesse, si vous entendez ma prière, envoyez quelqu’un pour aider à sauver mon peuple et les Sept Royaumes, supplia-t-elle en silence.

Miraculeusement, une voix répondit :

— Tu ne peux pas disparaître, élémentale, on a besoin de toi, jura la sorcière des mers.

Les yeux de Gem s’écarquillèrent sous l’effet du choc et elle fixa la silhouette éthérée de Magna qui apparut soudain derrière l’ombre noire. Puis elle regarda avec horreur la sorcière des mers ouvrir la main et diriger sa magie vers Gem. Par-dessus le martèlement qui résonnait dans sa tête, elle entendit le hurlement de rage de l’alien alors que le sort de Magna se répandait rapidement dans son corps, transformant sa chair en pierre.

Tout est perdu, pensa-t-elle, au désespoir, avant que le monde ne s’efface autour d’elle.

Chapitre Un

Dans le présent,

Au large de la côte de Yachats, Oregon :

Ross Galloway quitta le port à bord de son chalutier et s’engagea dans l’étroit bras de mer. Lorsqu’il fut sorti de la zone dans laquelle il était interdit de créer des remous, il poussa la manette des gaz en avant. Même à pleine vitesse, une heure minimum lui serait nécessaire pour se rendre à un bon endroit pour pêcher.

Il regarda le rivage et remarqua une femme assise sur la plage qui leva une main. Il ignorait si elle le saluait ou si elle protégeait simplement ses yeux de l’éblouissement du soleil. Il la reconnaissait ; c’était Ruth, la sœur de Mike Hallbrook. Depuis six mois, elle inondait la ville d’affiches de personne disparue, à la recherche de son frère.

La disparition de Mike avait presque scellé le destin de Ross en tant que tueur en série présumé. Seules la réapparition étrange de Mike, son affirmation selon laquelle Ross n’était pas un tueur et quelques photographies lui avaient évité de se retrouver dans le couloir de la mort. Ce n’était pas parce qu’il avait des antécédents avec la loi et qu’il connaissait toutes les personnes disparues qu’il était une sorte de tueur à la hache. Malheureusement, une fois qu’une rumeur était lancée, il était difficile d’y mettre fin.

— Elle pense probablement que je vais me débarrasser d’un autre corps, marmonna-t-il en se retournant pour regarder la mer à travers le pare-brise recouvert de taches de sel.

Il avait besoin de temps pour réfléchir. Ross détestait devoir l’admettre, mais ces derniers temps, il se sentait perdu. C’était un sentiment qui ne lui plaisait pas, d’autant plus qu’il n’était pas du genre à prendre la vie trop au sérieux.

Il tapota sa poche à la recherche de ses cigarettes avant de jurer doucement. Il avait choisi un sacré bon moment pour arrêter de fumer. S’il n’avait pas été seul sur son vieux bateau de pêche, il aurait peut-être envisagé de descendre deux bouteilles de bière, mais ce luxe allait devoir attendre qu’il revienne à quai.

Et il se contenterait de deux bières ; il avait trop peur de finir comme son paternel pour en boire plus. L’alcool avait d’étranges effets sur certaines personnes. Certains pouvaient en boire sans jamais rien ressentir. D’autres pouvaient finir sous la table après une seule bière. Et puis il y avait ceux qui devenaient plus affectueux quand ils étaient ivres. Ce genre de personnes, Ross pouvait les gérer, mais il n’aurait jamais traîné avec un autre ivrogne aussi violent que son père. Il secoua la tête et chassa son paternel de son esprit. Ce fils de pute n’était pas mort assez tôt en ce qui le concernait. Que le diable s’occupe de lui maintenant.

Un peu plus d’une heure plus tard, il se dirigea avec précaution vers l’arrière de son chalutier. Il gardait la côte rocheuse dentelée à tribord et le magnifique océan Pacifique à bâbord. Il ne prit pas la peine de jeter l’ancre, car il avait prévu de faire de la pêche à la traîne. La première chose qu’il devait faire, cependant, c’était vérifier les filets pour s’assurer qu’ils n’étaient pas emmêlés. Il leva les yeux vers le gréement et décida qu’il serait bien de monter pour vérifier également les lignes.

L’une des lignes semblait entortillée sur elle-même. Il ne voulait surtout pas risquer qu’elle se prenne dans les filets lorsqu’il les remonterait. C’était une plaie à réparer, surtout si la mer devenait agitée, comme c’était souvent le cas aux moments les plus inopportuns.

Une demi-heure plus tard, il comprit enfin quel était le problème, répara l’enrouleur et désentortilla la ligne. S’accrochant à la corde, il regarda l’eau miroitante. Un temps pareil, clair et ensoleillé, ne durerait pas. Au milieu de l’après-midi, l’air froid et humide qui émanait de l’eau rencontrait la surface plus chaude de la terre et un brouillard se déroulait telle une épaisse couverture à travers laquelle il était presque impossible de voir.

Il prit une profonde inspiration, la retint pendant plusieurs secondes, puis expira. Sa nervosité n’avait rien de surprenant, compte tenu des récents événements. Les deux dernières années avaient été le théâtre d’une série de disparitions et la plupart des gens du coin l’avaient désigné le responsable le plus probable. Les gens pensaient qu’il était comme son paternel, et même pire.

Ross connaissait Mike Hallbrook, un inspecteur du département de police de Yachats, qui avait disparu six bons mois plus tôt. Ils avaient joué au billard et bu quelques bières au pub local en de rares occasions. La région n’offrait que peu de divertissements, à part la pêche et la randonnée.

Il connaissait même Carly Tate et Jenny Ackerly. Il était difficile de ne pas connaître tout le monde quand on avait passé sa vie dans une ville de la taille de Yachats. Il était même sorti avec Carly quelques fois.

Quelle erreur, bon sang, pensa-t-il en secouant la tête.

Carly devait être la femme la plus maladroite de la planète. Elle avait failli brûler son bateau et l’émasculer, tout cela dans la même journée. Il se sentait désolé pour les types qui s’approchaient un peu trop d’elle. Elle était gentille — et mignonne —, mais elle devait se présenter avec une police d’assurance décès et mutilation.

Ross renifla. Il était amusant de voir qu’être accusé du meurtre de trois personnes faisait pâle figure par rapport à tout ce qui se passait. Sa mère était décédée un mois plus tôt. Sa mort lui avait donné l’impression d’être dans un vide alors qu’il essayait de gérer son chagrin et toute la paperasse et les détails liés à sa succession. S’occuper de toutes les factures, rencontrer l’avocat et organiser son enterrement lui avait laissé peu de temps pour faire quoi que ce soit d’autre, même pêcher.

Si la mort de son dernier parent n’avait pas suffi à lui faire remettre en question sa vie, le fait de voir une véritable sirène avait eu cet effet. Pendant un moment, il laissa son esprit dériver vers ce jour étrange quelques mois seulement auparavant, un sourire en coin se dessinant sur ses lèvres face à l’ironie de la situation. Enfant, il n’avait jamais cru aux contes de fées, et voilà qu’à trente ans, il avait rencontré une créature mythique venue d’un autre monde. C’était comme dans un vieil épisode de La Quatrième Dimension, sauf que celle-ci n’avait pas de queue de poisson. Magna la sirène était une femme exotique, une femme avec des branchies.

Secouant la tête, il mit une main dans sa poche, par habitude, à la recherche d’un bonbon qui l’aiderait à réfréner son envie de fumer une cigarette. Il fronça les sourcils lorsqu’il sentit quelque chose en plus de la monnaie qu’il avait mise dans sa poche. Ses doigts se fermèrent autour de l’objet et il le sortit pour le regarder.

Un petit rire lui échappa. Ross doutait que la sirène l’aimât beaucoup, mais elle lui avait offert ce cadeau l’autre jour, au restaurant. C’était un coquillage qu’elle avait trouvé sur la table, identique à tous les autres, mais l’expression de son visage quand elle le lui avait tendu…

« Bonne chance pour ton voyage », lui avait-elle dit, et mon Dieu, que sa voix était obsédante, comme si elle avait connu la douleur, les épreuves et les tribulations de cent vies. Oui, ce n’était qu’un stupide coquillage, mais elle le lui avait donné, et cela lui faisait penser à elle et aux mystères qui l’entouraient. Il se demandait à quoi ressemblait son monde.

À peine cette pensée se forma-t-elle dans son esprit que le monde changea soudainement autour de lui. Ross secoua la tête pour faire disparaître le bourdonnement de ses oreilles et la corde qu’il tenait disparut brusquement. Les yeux écarquillés, il vacilla et chercha désespérément quelque chose pour se retenir lorsque le chalutier se balança comme si une vague scélérate l’avait frappé par en dessous. L’espace d’un bref instant, son corps resta en apesanteur avant de passer par-dessus bord. Son grand juron fut interrompu au moment où il atterrit dans l’eau glacée avant de couler comme s’il portait sa ceinture de plongée lestée autour de la taille.

Le poids de ses vêtements trempés accéléra sa descente dans les profondeurs. Il lutta, battant des jambes pour remonter, mais malgré l’énergie qu’il y mettait, il avait l’impression que ses pieds étaient pris dans du béton. Au-dessus de lui, il pouvait voir la coque de son bateau. Il tendit le bras et écarta les doigts, espérant que par un quelconque miracle, un câble de remorquage était tombé par-dessus bord. Alors qu’il regardait fixement la coque de son bateau, la pensée fugace qu’il devait la nettoyer et la peindre lui traversa l’esprit. Puis cette pensée inepte fut remplacée par une prise de conscience plus sérieuse : il était sur le point de rejoindre la liste de personnes disparues.

Seulement, personne ne se souciera de ma disparition. Ah, je ne veux pas mourir comme ça, bon sang, pensa Ross en se débattant, tandis qu’il s’enfonçait dans les ténèbres.

Chapitre Deux

Dans le présent,

Les Sept Royaumes, Îles des Géants :

— Es-tu sûr de vouloir voyager seul ? demanda le roi Koorgan pour la troisième fois.

Son bras droit, Gant, qui attachait son sac, leva les yeux et fronça les sourcils.

— Tu n’as pas quelqu’un d’autre à aller déranger ? Et dame Ruth, tu ne lui manques pas ? Vous n’êtes mariés que depuis un jour. Vous ne devriez pas être enfermés dans votre chambre à consommer votre heureuse union ? demanda-t-il sèchement.

— Je lui ai dit que tu étais un grand garçon et que tu pouvais gérer cela sans son aide, commenta Ruth depuis l’entrée du bureau de Koorgan.

Gant se redressa et sourit.

— Sachant que c’est généralement lui qui se perd et a besoin d’être secouru, je pense que cette observation est juste, dit-il avec un petit rire.

Koorgan prit un air renfrogné exagéré. Son regard fit des va-et-vient entre Gant et Ruth.

— Vous savez que je vous entends, n’est-ce pas ? répliqua-t-il sèchement.

— Bien sûr, le taquina Ruth en glissant un bras autour de sa taille.

— Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour retrouver tes parents, Koorgan, promit Gant.

Le roi des géants hocha la tête d’un air grave.

— Je le sais. Le miroir n’a rien montré la dernière fois que nous avons essayé, mais cela ne fera peut-être pas de mal d’essayer de le récupérer, suggéra-t-il.

Gant sourit.

— Si j’en avais l’occasion, je le ferais juste pour montrer à Ashure que les pirates ne sont pas les seuls à pouvoir voler.

Ruth secoua la tête.

— Fais attention, Gant. Koorgan m’a dit ce qui est arrivé à LaBluff, rappela-t-elle.

L’expression de Koorgan devint sinistre.

— Oui. Il est si irritant qu’il est facile d’oublier… mais peut-être serait-il mieux de donner un peu d’espace à Ashure, mon ami, le mit-il en garde.

— Je promets d’être prudent.

— Je devrais t’accompagner, dit Koorgan.

— Non, tu ne devrais pas. Le royaume a besoin de toi et Ruth a besoin de toi. Et puis, je suis un meilleur traqueur que toi… et bien plus charmant quand il s’agit d’obtenir des informations, rétorqua Gant.

— Ah oui ? Marina est toujours aussi ravie que tu aies utilisé tes colliers dorés, rappela Ruth à Gant d’une voix moqueuse.

Ce sarcasme pas si subtil eut le don de faire blêmir le géant.

— J’ai fait ce que j’avais à faire pour que vous redeveniez normale. Je recommencerais pour vous protéger, ma Reine, et Koorgan et le royaume, déclara-t-il obstinément.

— Et on te remercie tous les deux pour ton aide malgré la méthode que tu as utilisée pour y parvenir, reconnut-elle.

Ruth s’approcha de lui et posa une main contre sa joue avant d’embrasser légèrement son autre joue. Il fut amusé d’entendre le grognement désapprobateur de Koorgan. Il sourit à son roi.

— Tu peux embrasser l’autre joue si cela t’aide à te sentir mieux, plaisanta Gant.

Koorgan émit un petit rire et enroula un bras autour de la taille de Ruth.

— Vas-y. Préviens-moi dès que tu découvriras quelque chose, demanda-t-il.

— Je le ferai.

Gant mit son sac à son épaule et inclina la tête avant de se diriger vers la porte. Le fait de savoir que le roi Samui et la reine Malay des géants étaient encore de ce monde l’emplit d’espoir. Il ne lui restait plus qu’à trouver l’île des Éléments cachée et à découvrir ce qui se passait.

Quoi qu’il en soit, ça ne doit pas être plus difficile que de tenir Koorgan à l’écart des ennuis, pensa-t-il en riant.

Ross luttait désespérément pour se libérer de ce qui l’attirait vers le fond. Une image des panneaux de danger à la plage lui revint à l’esprit : il y avait des courants d’arrachement. Tous les experts conseillaient de ne pas lutter contre le courant, mais plutôt de nager en parallèle jusqu’à en être sorti.

Se forçant à se détendre, il commença donc à nager parallèlement au courant, ignorant le poids de ses vêtements et de ses bottes. Il en avait besoin pour retenir autant de chaleur que possible. Il ne voulait surtout pas mourir de froid avant d’atteindre le rivage. Mais dans un coin de son esprit, il prit conscience que le froid ne le dérangeait pas autant qu’il aurait dû. Étrange. Il avait presque chaud ! La seule explication qui lui venait, c’était que l’hypothermie le gagnait déjà et qu’il ne l’assimilait tout simplement pas.

Finalement, il sentit la traction du courant s’atténuer assez pour qu’il puisse se libérer. Il regarda la colonne de petites bulles d’air qui s’échappait de sa bouche. Ses poumons le brûlaient et il savait que s’il ne remontait pas bientôt à la surface, il allait se noyer. Il battit des pieds pour suivre les bulles. Il s’estimait heureux d’avoir gardé la forme, même s’il fumait. La pêche était dure pour le corps si vous n’étiez pas en forme. Cette précieuse leçon, il l’avait apprise en regardant son père lutter pour faire les choses les plus simples avant de mourir d’une crise cardiaque à quarante-neuf ans.

Il vit un éclat de lumière à la surface de l’océan et cela renouvela sa détermination à continuer, alimentée par l’adrénaline.