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Le dénonciateur est le témoignage d’une carrière de 45 ans d’un médecin généraliste libéral qui a toujours travaillé dans le service public. À travers son expérience et celle de son épouse face à une maladie neurodégénérative, il dénonce la manipulation des chiffres par les dirigeants politiques pour justifier leur gestion. Le livre remet en question les clichés médiatisés concernant les EHPAD et les soignants, tout en soulignant la nécessité de préserver les valeurs humanistes dans les soins en fin de vie malgré les contraintes économiques.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Au cours de sa carrière, le docteur Christian Pineau a contribué de manière significative à la médecine et à la santé des patients, tant en exerçant en libéral qu’en occupant des postes de responsabilité dans des établissements hospitaliers. Son dévouement et son expertise ont indéniablement marqué le domaine médical.
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Seitenzahl: 184
Veröffentlichungsjahr: 2023
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Christian Pineau
Le dénonciateur
© Lys Bleu Éditions – Christian Pineau
ISBN : 979-10-422-0260-6
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Préface
Écriture
Pris entre « le moi est haïssable » des « Pensées » de Blaise Pascal et l’hédonisme transparent des Essais de Montaigne, j’ai du mal à me situer.
Mon éducation stoïcienne, et ma profession altruiste de médecin obligeaient à un stoïcisme « de performance » : seul le résultat compte !
Mais je me demande si le vieillissement n’incline pas à devenir hédoniste, voire épicurien, avec l’espérance du « souverain bien » à la retraite, sacrifié à la primauté de la performance impliquant l’ascenseur social, qu’elle soit sportive ou professionnelle. André Comte-Sponville, comme d’autres, reconnaît cette différence de pensée de Montaigne entre ses Essais I et III « mes reins ont duré un âge, sans altération ; il y en a tantôt un autre, qu’ils ont changé d’état », écrit-il. Pour le médecin, cette citation peut avoir un double sens :
L’insuffisance rénale, dont l’asthénie est le maître symptôme, peut compliquer la maladie de la pierre dont il était atteint, alors que la lithotritie n’existait pas.
L’asthénie peut-être la cause première de la lutte contre quelque maladie que ce soit, surtout si elle est douloureuse, et surtout depuis longtemps qu’on lutte en la négligeant, pour une performance désormais acquise. Sachant qu’il ajoute : « Tu ne meurs pas de ce que tu es malade, tu meurs de ce que tu es vivant ».
Dans un cas il s’agit de la conséquence, et dans l’autre de la cause… le tome III des Essais a été écrit en 1588, quatre ans avant la fin d’une vie douloureuse ayant duré seulement 59 ans ! et je constate tous les jours de discussions avec les « Tamalous » de mon âge, qu’il devient de plus en plus difficile au fur et à mesure du vieillissement, les douleurs s’ajoutant et les projets s’estompant, de sacrifier aux règles du stoïcisme !
J’écris un peu comme Montaigne ; pour « occuper le temps », entre deux douleurs, l’une physique et l’autre psychique, pour éviter qu’elles ne prennent l’ascendant, l’une ou l’autre, sur le désir de vivre. L’écriture devient une thérapeutique plus qu’un moyen d’expression, pour quelqu’un qui n’aspire plus à la reconnaissance, ni même à une fin de vie rendue triste par ailleurs ! Et lorsque je dis « j’écris comme Montaigne », c’est seulement en identité de circonstances. Et j’ose penser que vous ne comprendriez pas que je m’identifie à son style littéraire ni sa profondeur de pensée, ni même à sa réussite sociale exceptionnelle.
Introduction
Nul n’est parfait ! je le sais bien…
La vérité n’existe pas ! je le sais bien…
La certitude est l’apanage des imbéciles et de leur immobilité, alors que d’autres doutent pour entreprendre ! je le sais aussi…
Je suis issu d’un milieu de petits bourgeois, issus eux-mêmes d’un milieu ouvrier dont ils ont réussi à s’extraire à force de travail. J’ai été élevé dans les valeurs judéo-chrétiennes que j’ai failli épouser au moment de l’adolescence, comme un choix de vie. Ce choix de vie purement spirituelle fut détourné par la rationalité cartésienne de mon père, faisant valoir que la nécessité altruiste que je ressentais à cette époque serait peut-être plus productive et socialement plus efficace, en me tournant vers la faculté de médecine plutôt que vers le petit séminaire ! Choix assumé, heureusement à la réflexion… mais choix qui me pousse actuellement à refuser de perdre mon équilibre spirituel individuel durement élaboré, ma liberté en quelque sorte, et me retrouver à la merci d’une administration toute puissante, dirigée par les technocrates et les bureaucrates. Ces institutions parviennent même à étouffer une démocratie représentative dont nos représentants, élus pour défendre les droits des citoyens, ne pensent plus qu’à leur pouvoir acquis, leurs propres droits et privilèges, et veulent nous imposer leur idéologie… alors que nous ne leur demandons que d’assurer notre « vivre ensemble », et gérer des budgets à l’équilibre.
Médecin de famille « Hippocratique », c’est-à-dire médecin du malade plutôt que de la maladie, j’ai eu la chance, en plus de quarante-cinq ans de pratique professionnelle, de ne jamais quitter l’hôpital public où je suis resté en qualité d’attaché à un service de rhumatologie et médecine interne après mon internat, puis de praticien hospitalier d’un hôpital gériatrique, après l’arrêt de mon activité libérale. Outre la formation médicale continue de qualité favorisée par ces responsabilités hospitalières, et facilitée par imprégnation auprès de chefs de service exceptionnels et des différentes promotions d’externes, je pense avoir acquis, à l’issue de cette pratique professionnelle, une bonne connaissance de ces deux modes d’exercice d’un même métier, pour pouvoir en témoigner et dénoncer les déclarations radicales de certains de mes confrères. Quelques praticiens libéraux affirmant que leurs confrères du public « ne foutaient rien » comme celles de quelques praticiens du public affirmant, de leur côté, que leurs confrères libéraux « ne pensaient qu’au pognon ».
Ma vie de praticien hospitalier pendant 15 années (2002 à 2017) s’est déroulée dans un hôpital gériatrique, avec la participation à la construction, en tant que Président de CME (Commission Médicale d’Établissement), de l’hôpital gériatrique intercommunal de Neuville/Fontaines sur Saône inauguré en 2013, en collaboration étroite avec le directeur du projet d’établissement qui m’a enseigné les arcanes administratives du service de santé français, qui ne font pas partie de l’enseignement pour obtenir son diplôme de docteur en médecine. De 2013 à 2016, le succès de cette entreprise m’a fait appeler à Bagé le Chatel pour essayer de reproduire ce concept de réunion de deux établissements médico-sociaux (Bagé le Chatel et Feillens) avant que je ne sois rattrapé par la dégradation de l’état de santé de mon épouse. J’estime que cette emprise administrative, qui représente près de 50 % de la masse salariale des établissements sanitaires et médicosociaux, est à l’origine du déclin de ce service de santé français, considéré comme l’un des meilleurs il y a une vingtaine d’années. Cette déchéance est liée aux incohérences technocratiques et bureaucratiques dénoncées depuis une vingtaine d’années par les différents médecins chefs de service, et nombre de directeurs administratifs.
Devenu utilisateur de l’EHPAD de ce même hôpital par l’intermédiaire de mon épouse qui y est décédée récemment après l’évolution terminale de sa maladie neurodégénérative, j’ai acquis par là même, un complément d’expérience lié à l’utilisation des services proposés qui n’est pas acquise à tous les médecins, même si je m’en serais volontiers dispensé… Je vais même, à la suite de soucis de santé personnels négligés dans les circonstances prioritaires de la fin de vie de mon épouse, explorer moi-même les soins dispensés en SSR (Soins de Suite et Rééducation) dans le même établissement, et pouvoir comparer les modalités de prise en charge à la fois sanitaires et médico-sociales. Je bénéficie donc d’une expérience irremplaçable d’ingénieur, de gestionnaire et d’utilisateur de plusieurs établissements de santé…
J’ai décidé de profiter de cette connaissance holistique du fonctionnement d’un établissement public à but non lucratif qu’est l’EHPAD de Neuville, pour le partager avec le public. Et j’ai l’opportunité actuelle d’une obligation d’immobilisation du chirurgien qui a reconstruit mon tendon d’Achille explosé et négligé, d’écrire cet ouvrage qui occupera mon temps d’une part, et pourra transcrire cette expérience acquise « de l’intérieur » avec mes différentes casquettes, en opposition aux différents ouvrages écrits sur les EHPAD par des enquêtes journalistiques « de l’extérieur ». J’espère que cela devrait participer à démythifier « les EHPAD mouroirs » et dénoncer l’accusation des médecins de leur responsabilité dans ces dysfonctionnements, comme de celle du « trou de la sécu ». À cette motivation première s’ajoute l’opportunité actuelle de la Convention Citoyenne réunie en vue de la modification parlementaire de la loi Claeys-Leonetti de 2016, pour une loi sur « l’aide active à mourir » qui semble, contradictoirement, ne pas savoir s’appliquer dans un EHPAD où sont concentrées les personnes en fin de vie.
Et peut-être raconterai-je un peu notre histoire de couple et celle de la construction d’une famille dont mon épouse Nany était si fière et heureuse, et l’histoire malheureuse de l’évolution de sa maladie tant à domicile qu’à l’EHPAD.
Je suis en colère !
Je suis en colère parce que je viens de lire le livre best-seller de Victor Castanet « Les fossoyeurs », à la demande de quelques-uns de mes amis qui savaient mon implication en hôpital gériatrique. Ils l’ont probablement fait en connaissance de mon sentiment que la solution des problèmes de nos anciens était plus dans le concept d’EHPAD pour lequel j’ai travaillé et milité, dont je recommandais l’alternative au maintien à domicile. Ma colère n’est pas contre le livre de Mr Castanet, que j’ai lu dans sa deuxième édition du 25/01/2023. Son objectif et sa lecture attentive doivent faire distinguer deux parties : le dossier du lanceur d’alerte des irrégularités de gestion de certains EHPAD privés, objectif principal avoué, mais qui implique aussi, les dysfonctionnements des services de l’État. Mais pour ceux qui savent lire entre les lignes de son objectif principal, cet ouvrage fait également l’éloge du dévouement des personnels soignants, privés par ces faits délictueux de moyens pour subvenir aux besoins de leurs patients. Je n’en veux pour preuve que la constitution du dossier de ce livre qui n’aurait pas existé sans la dénonciation et les preuves apportées par les soignants, ultérieurement confirmées par quelques spécialistes de la gestion éthique. Ma colère vient de la déviation de l’intention de ce livre par mes amis qui me l’ont indiqué en premier, pour dénoncer mes recommandations personnelles en faveur de l’EHPAD. Et ma colère est confortée lorsque je constate qu’il n’existe pas une seule enquête des différents médias en faveur d’une fin de vie heureuse au sein d’un EHPAD ! On ne parle, dans les différents reportages à grande diffusion médiatique, que « d’EHPAD mouroirs », aux conditions de vie indignes et inhumaines, soit du fait d’une gestion délictueuse, soit du fait de comportements déviants de quelques exceptionnels soignants maltraitants, qui font le buzz. Il est évident qu’il existe quelques déviants dans ces professions, comme dans toutes les activités humaines, mais dans un pourcentage qui n’est pas plus élevé que dans les autres professions ! voire plutôt moins, à mon humble avis, dans les professions de soignants du fait même de la vocation altruiste et empathique nécessaire à exercer un métier difficile qui ne voit pas le meilleur côté de l’humain… Mais les médias ont la particularité de mettre en exergue quelques minorités déviantes et spectaculaires, que l’opinion publique, ignorante et avide de sensationnel, prend pour majoritaire, par cette répétition médiatique. Ce livre « Les Fossoyeurs » est compris, généralisé et utilisé, CONTRE le projet d’entrée en EHPAD pour une fin de vie heureuse, alors qu’il n’a l’intention à mon avis (et je ne connais pas personnellement Mr Victor Castanet…) que de dénoncer certaines méthodes délictueuses et rares de gestion, en excluant la prise en charge spécifique de la perte d’autonomie liée au vieillissement.
Ce constat du pouvoir de manipulation des médias est dépendant de deux facteurs, dont les médias eux-mêmes ne sont pas forcément responsables : l’un est lié à la perte de l’esprit d’analyse critique des lecteurs ou spectateurs, et l’autre au fait que les entreprises médiatiques obéissent elles aussi, comme les gérants d’EHPAD ou de toute autre entreprise, à une obligation de rentabilité de leur production ou commerce. Mais il existe, à mon avis, un autre facteur aggravant, plus subjectif et sournois : je pense que ce dénigrement systématique des maisons de retraite et EHPAD projette et interroge chacun de nous sur les conditions de sa propre fin de vie. Je suis certain que cette vision inhumaine de la fin de vie d’autrui impacte et entretient l’angoisse de sa propre fin de vie et de sa propre mort, quelles que soient les croyances religieuses ou philosophiques dans lesquelles on se réfugie, en complément de la conscience phylogénique de la balance entre notre finitude et notre instinct de survie.
Et pourtant, cette injonction de maintien à domicile préférée par notre gouvernement n’existe que pour cacher ses propres carences en moyens, et son incurie en matière d’organisation des soins. D’ailleurs, les statistiques sont têtues, qui montrent en 2020 (INSEE) que 51 % des personnes décèdent à l’hôpital, contre seulement 24 % à domicile, et 15 % en EHPAD, les 10 % restants concernant les décès accidentels sur la voie publique, malgré les incitations gouvernementales. Et ce constat d’échec risque de ne pas s’améliorer à l’avenir…
Il suffit de jeter un œil sur les statistiques et prévisions des instituts officiels en France : Institut National des Statistiques et des Études Économiques (INSEE), Institut National des Études Démographiques (INED), Conseil National de l’Information Statistique (CNIS). La longévité moyenne en France a pratiquement doublé depuis le Moyen Âge :
Par une meilleure organisation sociale qui a vu l’apparition de prises en charge initialement caritatives au Moyen Âge, devenir corporatistes avec l’avènement de l’ère industrielle, avant de devenir institutionnelle au sein de l’État avec la Sécurité Sociale.
Par un progrès exponentiel depuis cette ère industrielle (il y a seulement deux siècles…) des connaissances scientifiques et des biotechnologies qui ont permis, non seulement de mieux soigner les pathologies, mais d’empêcher les malades d’en mourir et même, quelques fois, d’en faciliter leur reproduction.
Cette double conjoncture de la meilleure prise en charge sociale et des progrès technologiques a fait que depuis 1945, notre longévité moyenne augmente de trois mois chaque année qui passe… en agissant sur les deux extrémités de vie : diminuant la mortalité infantile, et prolongeant la vie des malades. De la même manière que le constat du baby-boom à la fin de la guerre 1939/45 rendait obligatoires des mesures préventives du papy-boom prévisible des années 2000, même sans compter les facteurs favorisants de l’amélioration aléatoire des biotechnologies, aucun plan d’augmentation du nombre des EHPAD publics n’a été proposé. Nous avons même remplacé la PSD (Prestation Spécifique de Dépendance) par la création de l’APA (Allocation Personnalisée à l’Autonomie) le 20 juillet 2001, dont l’objectif statutaire prioritaire est bien de permettre à des personnes de plus de 65 ans de rester à domicile, et dont le nombre et le montant des subventions sont dépendants de l’état de la trésorerie des Conseils Départementaux. Il existe à côté de l’APA d’autres aides financières comme l’ASPA (Allocation de Solidarité aux Personnes Âgées) spécifique des patients atteints de neurodégénérescence dont on a pu constater l’augmentation du nombre de cas avec la majoration de la longévité, et quelques « plans cancer » quinquennaux initialisés en 2004 et remis à jour en 2014 et 2019, curieusement (ou pécuniairement ?) destinés au cancer des jeunes qui ne représentent que 1 à 2 % de la population cancéreuse dont la fréquence augmente aussi en fonction de l’âge. Mais toujours pas de plan d’investissement pour la CRÉATION d’EHPAD… hors l’opportunité de fermeture de certains Hôpitaux de proximité transformés en EHPAD ou en lits d’aval, pour faciliter et multiplier les actes ambulatoires induits par l’introduction de la gestion T2A (Tarification A l’Activité) qui démontre bien, au-delà du Service public, l’obligation de rentabilité dénoncée du privé. Ce faisant, l’État est non seulement responsable, mais initiateur de la désertification médicale. Sous prétexte avoué de réorganisation des territoires de soin au profit d’une concentration des moyens réalisant des économies d’échelle, et de meilleure répartition de l’égalité des chances, on masque plutôt la volonté de concentration des pouvoirs… Cette réorganisation des Territoires de Santé issue de la loi HPST (Hôpital, Patient, Santé, Territoire) du 21 juillet 2009 supprime le statut « Hôpital Local » qui permettait une gestion efficace de la continuité des soins, voire de leur permanence, par les médecins généralistes et spécialistes locaux, aidés par un directeur administratif, dans un réseau de proximité connaissant bien les particularités locales d’habitation et d’aides sociales, permettant une gestion médico-sociale efficace et, accessoirement à ce confort apporté aux patients, des emplois disponibles pour les familles de la commune.
Cette loi HPST est issue du rapport Larcher datant de 1996, qui s’intitulait initialement PHST (Patient, Hôpital, Santé, Territoire). Il avait pour mission de rendre au Patient une meilleure qualité des soins en réorganisant l’Hôpital Public sur un modèle de concentration employé par l’hospitalisation privée. Ce rapport soucieux du trajet du Patient dont l’initiale P était placée en tête est devenu la loi HPST en cédant sa première place à l’initiale H représentant l’Hôpital… Premier signe prémonitoire de la préséance de l’Administration sur les soignants dont la représentativité, comme celle des élus locaux, est rétrogradée de certaines instances placées sous l’autorité du directeur administratif, lui-même responsable devant l’ARS (Agence Régionale de Santé) et le CNP (Conseil National de Pilotage) qui donne aux ARS les directives nécessaires à la mise en œuvre de la politique de santé émanant de la HAS (Haute Autorité de Santé) dont le directeur est nommé par le ministre lui-même, et révocable selon l’humeur politique changeante ! Au-delà d’introduire de nouvelles strates administratives qui ralentissent les décisions et diluent les responsabilités, cela constitue bien une volonté d’affaiblissement du pouvoir décisionnel des élus locaux et des médecins, pouvoir dont certains mandarins ont peut-être abusé en leur temps… mais cette volonté de réorganisation des soins prouve bien qu’il existait quelques dysfonctionnements déjà il y a plus de vingt ans d’une part, et constitue d’autre part un progrès par rapport à d’autres initiatives politiques ; et parmi elles, celui du MICA (Mécanisme d’Incitation à la Cessation d’Activité), proposé aux médecins français par notre ministre de la santé Jacques Barrot en 1988, qui pensait que limiter le nombre des médecins limiterait le nombre de malades… Quoiqu’il en soit, à cette époque-là déjà, les médecins s’étaient insurgés d’une réforme annoncée médicale, déviée comme une réforme uniquement comptable, avec un envahissement de l’hôpital par une administration pléthorique prenant le pas sur la compétence médicale et le confort des malades…
Pour en revenir à la nécessité de prévoir des EHPAD, revenons à cette longévité galopante qui modifie totalement la structure de nos sociétés à venir, d’autant qu’elle intéresse également, à un degré moindre, mais déjà sensible, les pays émergents. Les instituts de statistiques français annoncent pourtant quelques chiffres qui devraient être pris en compte par nos dirigeants :
Selon l’INED (Institut National d’Études Démographiques) : 100 centenaires en l’année 1900, 3760 dénombrés en 1990, 27 500 fin 2021, dont l’extrapolation des courbes permet de prédire un chiffre de 192 500 centenaires (x 7) en 2060…
INSEE (sur le site Sante.gouv) prévoit 108 000 seniors supplémentaires en EHPAD en 2030…
Quand le CNIS (Conseil National de l’Information Statistique) annonce l’arrivée de supercentenaires (âge supérieur à 110 ans) avec les progrès des NBIC (Nanotechnologies, Biotechnologies, Informatique, sciences Cognitives), alors que les mêmes instituts statistiques annoncent une baisse de natalité dans tous les pays industrialisés.
INSEE : si la médiane de longévité à 85,3 ans pour les femmes et 79,3 ans pour les hommes en 2021 croit toujours à raison de 3 mois de vie par année, l’Espoir de Vie (EV) croit également en fonction des progrès des biotechnologies, malgré une légère baisse en 2021 imputée à la pandémie de Covid19, mais l’Espoir de Vie en Bonne Santé (EVBS) ne croit pas de la même façon, et semblerait même stagner à 64,1 ans pour les femmes, et 62,7 ans pour les hommes. On peut donc espérer une vie autonome sans handicap, ou un handicap facilement compensé permettant la vie à domicile, jusqu’à l’âge de 65 ans. Mais que fait-on du reste à vivre moyen restant annoncé par la même INSEE, à 12,1 ans pour les femmes et 10,6 ans pour les hommes par rapport à la médiane de survie après ces 65 ans ?? Et lorsque l’INSEE annonce que la Sécurité Sociale prend en charge une moyenne de 7 pathologies différentes pour 70 % des femmes et des hommes de plus de 75 ans, que le nombre de personnes de plus de 65 ans aura doublé en 2030, celui des plus de 75 ans aura triplé à la même date, et celui des plus de 85 ans aura quintuplé, avant l’arrivée des super centenaires !! On comprend bien que l’on n’est pas près de voir l’un de nos seniors sur les podiums Olympiques, et ce, malgré les progrès de la technologie… et il est prévisible dès à présent que le maintien à domicile finira par devenir impossible, comme les statistiques du lieu du décès le montrent, et comme j’ai pu le constater de ma propre épouse.
Que font donc nos dirigeants politiques ? Gouverner est synonyme de « prévoir », ai-je retenu…