Le Folk-Lore du Baugeois - Camille Fraysse - E-Book

Le Folk-Lore du Baugeois E-Book

Camille Fraysse

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Extrait : "Un jour, un pauvre paysan assis dans le coin de sa cheminée, appela tristement sa femme. "La mère, lui dit-il, Carnaval arrive ; on se réjouit au village dans l'espoir de rompre le jeûne du Carême, et nous, nous n'aurons rien à manger ce jour-là. – Tu rêves, mon bonhomme, lui répondit la vieille ; ne possédons-nous pas un chat, un jars, un coq, un bélier et un âne ?"

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• Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin.
• Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Seitenzahl: 216

Veröffentlichungsjahr: 2016

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Préface

Je n’ai pas la prétention de vouloir présenter au lecteur, dans ce modeste recueil, tout ce que le folk-lore baugeois peut offrir d’intéressant ; je suis même persuadé que des recherches dans cette voie seraient encore très fertiles. J’ai eu l’unique souci en abordant ce travail, de donner un aperçu de ce que le traditionnisme offre à l’heure actuelle, dans chacune de ses branches, de passionnant pour la curiosité du chercheur.

C’est ainsi que l’on peut se pénétrer de la physionomie morale d’un pays, que la plupart ne soupçonnent pas, et il serait à désirer qu’un semblable effort fût tenté de toutes parts, afin d’immobiliser, en un vaste plan, les vestiges d’un passé qui fuit avec rapidité, et qui sera bientôt hors de la portée de nos investigations.

C. FRAYSSE.

Introduction

L’ensemble des traditions populaires d’un pays constitue ce que l’on appelle le Folk-Lore ; ce mot semble barbare, mais, une fois connu, il a l’avantage de tout embrasser : contes, chansons, légendes, cérémonies, institutions, coutumes et superstitions, toutes pratiques et toutes croyances qui se sont perpétuées par la parole ou l’exemple.

Cette science nouvelle, à laquelle il faut accorder enfin la place qui lui revient, est depuis longtemps en faveur dans les pays étrangers ; elle occupe une chaire dans les Universités d’Helsingfors et de Christiania ; mais c’est à peine encore si chez nous le grand public en soupçonne l’existence.

Les populations rurales sont très superstitieuses, et l’on retrouve chez elles les restes du paganisme romain et de la mythologie germanique ; elles tiennent à ce passé de croyances par mille racines enchevêtrées dans leur âme, que les siècles n’ont pu extirper. Partout dans les campagnes, nous observons encore vivaces, de poétiques souvenirs de ces époques arriérées. Celui qui daigne s’abaisser jusqu’à explorer le champ fertile du folk-lore y fait des trouvailles inattendues, et l’étonnement redouble en face de ce trésor si riche que nous ne connaissons pas, car, en cela aussi, notre pays est la terre des merveilles.

Ces pratiques, légendes et croyances ne sont pas uniformes ; elles se retrouvent par endroits avec des variantes, mais l’on peut dire qu’elles émanent d’une tradition-type initiale qui s’est altérée à travers les siècles dans les différents milieux où elle a été colportée.

Ne ridiculisons pas trop ces vestiges ; tant de choses occultes et inexpliquées nous environnent, qu’il serait présomptueux de vouloir en tirer une conclusion hâtive.

Pourquoi certains êtres humains ont-ils le pouvoir merveilleux de lire les pages closes ? N’est-ce pas l’indice d’une voie que nous ne connaissons pas, et dans laquelle nos sens affinés et perfectionnés nous permettront, espérons-le, d’entrer un jour ?

Eh ! ne revient-on pas constamment à des croyances que l’on rejetait naguère comme étant sans contrôle et comme appartenant au domaine de la fantaisie !

Ces traditions séculaires sont cependant menacées par le courant de scepticisme qui entraîne notre génération ; aussi doit-on, pendant qu’il en est temps encore, recueillir jalousement ces joyaux du passé, et les mettre à l’abri de l’Oubli irréparable !

PREMIÈRE PARTIELittérature orale
CHAPITRE PREMIERContes et légendes de la veillée
Contes
IComment le chat, le jars, le coq, le bélier et l’âne mangèrent ensemble les rilleaux des voleurs

Un jour, un pauvre paysan assis dans le coin de sa cheminée, appela tristement sa femme. « La mère, lui dit-il, Carnaval arrive ; on se réjouit au village dans l’espoir de rompre le jeûne du Carême, et nous, nous n’aurons rien à manger ce jour-là. – Tu rêves, mon bonhomme, lui répondit la vieille ; ne possédons-nous pas un chat, un jars, un coq, un bélier et un âne ? Nous n’aurons qu’à les mettre à mort, et nous aurons de cette façon, des victuailles pour célébrer cette fête. – Tu as là une excellente idée, reprit le paysan ; c’est une affaire entendue, nous tuerons nos animaux pour Carnaval. » Là-dessus, nos deux bonnes gens regaillardies partirent se coucher.

Le chat, caché dans un coin de la cheminée, avait, non sans horreur, entendu ce dialogue. Quand ses maîtres furent partis, il alla dans l’étable raconter à ses amis quelle cruelle décision avait été prise à leur égard. « Comment sais-tu cela, lui demandèrent ceux-ci ? – Ce sont nos maîtres qui viennent de le dire ; j’étais caché auprès du feu, et j’ai tout entendu. Je suis malheureusement bien sûr de ce que j’avance. – Eh bien, dit l’âne, il ne faut pas que nous nous laissions manger ; fuyons sans retard des maîtres aussi sanguinaires. » Cet avis les rallia tous, et ils quittèrent sur l’heure la maison.

Après avoir traversé de nombreux champs et de nombreux prés, nos animaux arrivèrent dans une immense forêt où ils s’égarèrent bientôt. « Il faut cependant que nous puissions sortir d’ici, dit le bélier au coq ; vole jusque sur la branche de cet arbre, et, si tu vois une lumière, nous nous dirigerons de son côté, dans l’espoir d’y rencontrer un abri. » Le coq, d’un coup d’aile, fut bientôt rendu sur la branche, mais il ne put rien découvrir. « À mon tour, dit le chat, je vais chercher à apercevoir quelque chose, » et il grimpa en effet très haut sur l’arbre, d’où il distingua une petite lumière lointaine. Nos compagnons prirent tout aussitôt la direction de la petite lueur signalée. Après avoir marché longtemps dans l’obscurité de la forêt, ils arrivèrent enfin auprès d’une cabane d’où filtrait de la lumière ; ils en firent le tour, mais ne purent rencontrer aucune ouverture pour y pénétrer. Le chat déclara que cela sentait bon les rilleaux. En effet, les locataires de cette cabane n’étaient autres que des voleurs qui avaient dérobé du lard et en faisaient des rilleaux.

« Si j’enfonçais la porte ? » dit tout à coup le bélier. Et, se reculant de deux ou trois pas, notre animal donna un formidable coup de tête dans la porte, qui, sous la violence de ce choc, s’arracha de ses gonds et s’écroula dans la pièce, au milieu des voleurs. Ceux-ci, effrayés, s’enfuirent immédiatement sans avoir pu reconnaître les auteurs de cet exploit.

« Nous allons donc pouvoir nous reposer de nos fatigues, dit le chat ; pour ma part, je vais me blottir dans le coin du foyer. – Moi, dit le coq, je vais me percher dans la cheminée. » Le bélier se coucha, lui, sous la table ; le jars, ami de l’humidité, se cacha dans l’évier, et l’âne resta au-dehors à brouter des ronces.

Pendant ce temps, les voleurs avaient gagné la forêt. « Nous sommes bien peu avisés, dit l’un, nous ne savons même pas qui nous a tant effrayés. – Je ne retournerais dans tous les cas, pas même pour un empire, à la cabane, dit l’autre. – Je suis plus courageux que vous, dit le troisième, je vais y retourner de ce pas. »

Arrivé à l’habitation, notre voleur se dirigea vers la cheminée, au milieu de l’obscurité ; mais le chat, qui était couché au coin de l’âtre, lui donna un coup de griffe et lui déchira la main. Le voleur voulut regarder dans la cheminée, mais le coq lui lâcha tout aussitôt une incongruité dans la bouche ; ennuyé de tous ces insuccès, il voulut aller laver sa main ensanglantée à l’évier, mais le jars le cribla de coups de bec. Le tapage avait réveillé le bélier qui, en se levant, renversa la table et donna à l’intrus un grand coup de tête dans le dos. Notre voleur n’eut plus que la ressource de fuir, mais, au passage, l’âne lui détacha plusieurs ruades brutales. Il détala avec prestesse et s’enfuit rejoindre ses camarades dans la forêt, auxquels il raconta que la maison était pleine de démons qui l’avaient roué de coups. Tous jurèrent alors de ne jamais remettre les pieds dans un lieu aussi terrible, et hanté par de si méchants esprits.

Après cette scène, nos cinq amis se réunirent autour de la table dans la cabane, et mangèrent ensemble les excellents rilleaux que les voleurs avaient préparés et abandonnés dans leur précipitation à s’enfuir.

IILa fée et les bonnes gens

Un jour un bonhomme et sa bonne femme, très pauvres, bien âgés et éprouvés par la misère, allaient ramasser du bois mort pour se chauffer et faire cuire leurs aliments. Arrivés dans la forêt, ils virent surgir tout à coup devant eux une dame vêtue de blanc et richement habillée, qui n’était autre qu’une fée bienfaisante, et qui leur dit : « Mes pauvres amis, vous êtes bien vieux et dignes de pitié. Eh bien ! je veux faire quelque chose pour vous : je vous permets de formuler trois souhaits, et, quels qu’ils soient, je les exaucerai sur l’heure. » Le bonhomme émit alors les trois vœux suivants : « Je désire que mon coffre soit plein d’argent, mon grenier plein de blé et ma cour pleine de bois. – Allez-vous-en, dit la Fée, vos souhaits sont exaucés. » Arrivés chez eux, nos deux vieillards virent que ce qu’ils avaient demandé leur était accordé : leur coffre était plein d’argent, leur grenier regorgeait de blé et enfin leur cour était toute garnie de bois.

Or, un ménage voisin, pauvre également, s’était aperçu de l’aisance dans laquelle vivaient les bonnes gens en question, et ayant appris l’origine de leur fortune, résolut de s’adresser lui aussi à la Fée généreuse. S’étant rendus dans ce but au centre de la forêt, ils rencontrèrent la même belle dame, qui leur permit pareillement de formuler trois souhaits. L’homme voulut prendre la parole, mais sa femme lui dit tout aussitôt avec acrimonie : « Laisse-moi parler ; toi, tu ne sais pas souhaiter ! » Alors la femme dit : « Je désire que ma marmite, qui n’a que deux pieds, en possède trois. » – Votre vœu est exaucé, dit la Fée. – Quelle sotte, reprit le mari courroucé à sa femme en l’entendant formuler un vœu aussi mesquin ; ta marmite, eh bien ! puisses-tu l’avoir dans le derrière toute rouge ! – Votre souhait est exaucé, dit la Fée, à la suite de ce désir inconsidérément exprimé par le mari. Mais la femme, que la marmite brûlait et torturait, se hâta de formuler un troisième vœu : « Et, dit-elle, que la marmite me débarrasse à l’instant ? – Votre troisième souhait est exaucé, » repartit encore la Fée.

Ce qui fit que, par la sottise de la femme, ces deux bonnes gens s’en retournèrent chez elles aussi pauvres que devant.

IIILe marché du diable

À la suite d’un marché passé entre une personne et le diable, celui-ci avait construit un pont en très peu de temps ; le prix du travail était l’abandon à l’Être malin du premier être vivant qui passerait sur ce pont.

La personne en question, qui avait flairé le piège du diable, prit un chat, le lâcha sur le pont et lança son chien à sa poursuite.

Le diable, furieux, dut se contenter du chat, et le pont resta intact.

IVSaint Pierre et les deux maris

Un jour, deux pauvres diables se présentaient ensemble à la porte du Paradis et sollicitaient la faveur d’être admis dans le séjour des bienheureux. Saint-Pierre, s’adressant au premier, lui demanda : « Qu’as-tu fait sur la terre ? Comment t’es-tu acquitté de tes devoirs ? » – Le pauvre homme répondit : « J’ai beaucoup travaillé, j’ai gagné ma vie à la sueur de mon front, car je n’avais pas de fortune ; je suis devenu père de nombreux enfants. Ma femme est morte encore jeune, et je suis resté seul pour subvenir aux besoins des miens ; c’est vous dire que je n’ai pas été heureux, jusqu’au moment où mes enfants ont pu se suffire à eux-mêmes. – Cela est très bien, reprit saint Pierre ; ta conduite mérite récompense ; aussi entre au ciel et prends possession de la place à laquelle tu as droit. » Puis, se retournant vers le second : « Et toi, quels sont les mérites que tu as à faire valoir ? » – Mon histoire, répondit celui-ci, est à peu près la même que celle de mon camarade ; seulement, ne pouvant me tirer d’embarras dans mon veuvage, je me suis remarié, et j’ai ainsi gravi deux fois le calvaire au lieu d’une. Aussi, j’ose espérer que vous me réserverez une place meilleure que celle de mon camarade, puisque j’ai doublement souffert. Saint Pierre lui répondit alors avec courroux : « C’est ce qui prouve que tu n’es qu’un imbécile, car chat échaudé craint l’eau froide. Pour une fois, je pardonne, mais la seconde fois que l’on se remarie, cela ne passe pas… Je ne reçois pas d’idiots de ta trempe. Va au feu éternel. »

VLa bossue et les fées

Une pauvre vieille femme, qui était affligée d’une énorme bosse dans le dos, maudissait constamment le Destin de l’avoir ainsi contrefaite. Or, une nuit, comme elle arrivait à un carrefour, au milieu de la campagne, elle vit une troupe de fées qui y dansaient une ronde au clair de la lune, en chantant pour s’accompagner : « Samedi, Dimanche ». La misérable bossue, payant d’audace, prit place dans la ronde, et, remarquant que la chanson des fées était peu entraînante et manquait de cadence, elle se mit elle-même à diriger la danse, en chantant : « Samedi, Dimanche et Lundi. » Les fées, satisfaites de ce rythme plus parfait et de cette mesure plus vive, récompensèrent la bonne femme en lui enlevant sa bosse.

Mais une femme, bossue également, ayant appris comment l’infirmité de sa voisine lui avait été enlevée, résolut d’employer à son profit le même stratagème qui avait réussi à cette dernière, et, une belle nuit, elle prit place, elle aussi, dans la ronde des fées. Toutefois, au lieu de s’en tenir aux trois mots « Samedi, Dimanche et Lundi » employés par sa voisine, elle voulut faire mieux, et renchérissant, elle se mit à chanter : « Samedi, Dimanche, Lundi et Mardi… » Cette nouvelle chanson, qui manquait d’entraînement et de cadence, ne fut pas du goût des fées, car, courroucées, elles chassèrent l’imprudente, et, au lieu de la débarrasser de sa bosse, ainsi qu’elle s’y attendait, elles lui ajoutèrent par devant celle qu’elles avaient enlevée à sa plus chanceuse voisine.

Pourquoi les lièvres males engendrent

Lorsque Noé eut recueilli dans son arche un couple de chacun des animaux, un trou malencontreux se produisit dans une paroi du bâtiment. Pour le boucher rapidement, Noé, qui n’avait sous la main aucun objet convenable, coupa une patte de l’hase, mais celle-ci mourut presqu’aussitôt des suites de cette opération. Lorsque le Déluge eut pris fin, et que Noé ouvrit la porte de l’Arche aux animaux, il ne restait donc plus du couple de lièvres que le mâle. Mais, pour lui permettre de perpétuer son espèce, et par permission divine, il fut accordé à celui-ci la faculté de mettre au monde un levraut femelle. On dit, dans les campagnes, que depuis cette époque, chaque bouquin met au monde, au mois de février, tous les ans, un petit femelle, qui est très reconnaissable, car il est marqué en tête d’une étoile blanche caractéristique.

Légendes
Les monuments mégalithiques

Les monuments paléolithiques présentent un champ d’études inépuisable : les circonstances dans lesquelles ils ont été dressés, les populations qui ont présidé à leur édification, leur objet même, sont autant d’énigmes qui n’ont pas jusqu’à ce jour été résolues d’une manière unanime ; ces mêmes monuments ne sont pas moins intéressants à approfondir au point de vue des légendes dont ils sont généralement entourés. Les légendes, filles de la superstition de nos ancêtres, prennent leur source mystérieuse dans les origines mêmes des peuples ; elles se sont perpétuées presqu’intactes de génération en génération jusqu’à nos jours, favorisées, dans leur éclosion d’abord, et dans leur évolution ensuite, par l’ignorance et la crédulité des populations.

Ces vestiges moraux d’un âge qui disparaît, doivent être recueillis religieusement comme des fleurs énigmatiques du passé, et être rangés dans un musée symbolique spécial comme des anachronismes de l’intelligence, qui étonneront dans les siècles futurs le scepticisme de notre descendance.

Les mégalithes devaient inévitablement frapper l’observation des peuples et donner naissance à de nombreuses fictions. Ne voit-on pas d’ailleurs les légendes les plus diverses et les plus étonnantes se dégager des Livres Sacrés ?

Voici les quelques légendes, spéciales à des mégalithes de l’arrondissement de Baugé, qu’il m’a été possible de recueillir.

Dolmen de Pontigné – D’après la croyance populaire, il suffisait à un cultivateur qui avait un soc de charrue à aiguiser, de déposer une nuit cet instrument sous la pierre couverte, avec une pièce d’argent pour la rémunération du travail ; le lendemain, le soc se trouvait au même emplacement, en état, et parfaitement aiguisé. Si la somme déposée était trop faible, le soc restait intact ; dans le cas contraire, si cette somme excédait le prix du travail, le cultivateur retrouvait son soc affilé, et le Génie mystérieux poussait la conscience jusqu’à remettre le surplus de la somme sur l’outil ( !).

Une autre légende, applicable au même dolmen, dit que les laissées des animaux disparaissaient autrefois de la lande, enlevées chaque nuit par les fées.

Le menhir de Lorière, à Chigné. – D’après la légende locale, le peulvan de Lorière « sonne midi » ( ?).

Le dolmen de Lorière, à Chigné. – Sur ce dolmen on immolait des victimes, qui étaient le plus souvent des jeunes filles.

Le dolmen de la Planche ou du Gué-de-Poirier, à Broc. – Ce dolmen était la forge des fées ; c’était sur cette pierre qu’elles venaient façonner et aiguiser leurs outils.

Le dolmen de Pierre Couverte, ou de la Lande, à Broc. – Ce dolmen est, dit une légende locale, éclairé toutes les nuits par une petite chandelle.

Dolmen de la Pidoucière, à Corzé. – Ce monument affecte la forme de deux dolmens de taille sensiblement différente, juxtaposés. D’après la légende, des sacrifices humains y étaient accomplis ; les victimes étaient égorgées sur la table du petit dolmen, qui forme antichambre au monument. L’on montre encore un trou creusé dans la pierre, teinté d’une matière rouge, où les habitants croient voir encore le sang des victimes sacrifiées par les Druides ( !).

D’après une autre tradition, le dolmen de la Pidoucière, dont la grande table est cassée et affaissée en son milieu, aurait été frappé par la foudre à une époque inconnue, ce qui aurait amené la rupture de la pierre en deux parties.

Peulvan d’Échemiré. – Ce mégalithe, du genre Stonhatched (pierre verticale percée d’un trou), tourne dit-on, sur lui-même chaque fois qu’il entend chanter le coq, aussi le nomme-t-on la Pierre du coq.

Peulvan de St Martin-d’Arcé. – D’après la légende, il tourne sur lui-même au coup de minuit.

Peulvan de la Lande-Chasles. – Une légende circule sur ce monolithe, signalée par M. le Dr Boëll, de Baugé, dans son étude sur le Préhistorique de l’arrondissement de Baugé. La voici telle qu’elle y est rapportée :

Au premier siècle de l’ère chrétienne, deux troupes gauloises se battaient sur la Butte de la Tonnelle. Une de ces troupes était commandée par M. de Beauregard. Sa femme, madame Jeanne, montée sur un beau cheval, voulut aller à la bataille. À la vue du sang qui coule, elle est prise de pitié et essaie de faire la paix. Elle monte sur cette pierre, qui était horizontale à cette époque et supplie les chefs de cesser le combat. On l’écoute, on l’admire, les colères tombent, et on fait la paix. Pendant ce temps son cheval était toujours sur la pierre et par permission divine, l’empreinte de son fer resta gravée sur la pierre. Pour perpétuer le souvenir de cette journée, on releva la pierre, qui n’a pas été détériorée depuis l’époque.

– Un petit peulvan, enfoncé très profondément en terre, situé au lieu dit la Cache, commune de Bocé, dans une pièce de terre dépendant de la ferme de ce nom, tourne sur lui-même, dit la légende, à minuit. Une deuxième légende dit que ce même mégalithe fait trois fois le tour du champ à l’angélus de midi ( ?) Ce peulvan, dont le caractère d’authenticité est, il faut le reconnaître, discutable, semble cependant être un monument paléolithique ; il n’a pas été décrit jusqu’ici, et a été omis intentionnellement dans l’étude susvisée de M. le Dr Boëll.

Il est bon de signaler, en passant, que, dans le Baugeois, les peulvans ou menhirs sont appelés généralement « pierre frite », altération évidente de pierre fiche, et, suivant une légende à peu près unique, tournent sur eux-mêmes pendant la nuit, à une heure déterminée. Dans d’autres régions du département, ces monolithes portent le nom significatif de « pierre vire. » Dans le Maine, ces mêmes monuments sont appelés « pierre frite » ou « pierre fite ».

La Pierre à Jallais, à Seiches. – Le nom donné à ce monolithe, qui est un vestige du dolmen des Lisieux, vient de ce qu’un « bonhomme Jallais » de Matheflon se noya une nuit dans une mare située à un carrefour voisin de l’endroit.

Dolmen de la Pierre-aux-Loups, à Seiches. – Un notaire nommé Joly, de Pellouailles, ayant relevé dans un acte de son étude daté de 1806 qu’un individu avait été enterré dans des circonstances particulières auprès du dolmen de la Pierre-aux-Loups, voulut s’assurer du fait, dit la tradition, et il fit exécuter des fouilles dans l’endroit indiqué, qui restèrent tout d’abord infructueuses. Mais, en effectuant ses recherches, il s’aperçut qu’une pierre de support du monument avait une inclinaison anormale, ce qui l’incita à poursuivre ses investigations sous le dolmen lui-même. Il y retrouva en effet des ossements, accompagnés de deux pierres rondes. À qui appartenaient ces restes ? Étaient-ce ceux de la personne signalée en 1806 comme inhumée sous le dolmen ?

Une femme de mauvaise vie, dit encore la légende, se retirait vers 1830 sous le dolmen, dont elle avait fait son habitation. Une dame fort pieuse des environs voulut mettre un terme à l’agitation malsaine causée par les débordements de cette femme, et, pour la chasser de son refuge, elle fit abattre les deux pierres qui fermaient le dolmen. Mais la croyance populaire est que quiconque touche aux dolmens pour les détruire ou les détériorer profane ainsi l’œuvre et la mémoire des Druides et s’expose à des malheurs. Aussi la dame en question fut-elle punie de son action par une paralysie qui ne tarda pas à la frapper aux jambes, la rendant complètement impotente.

Une autre tradition rapporte, à l’appui de cette croyance, qu’un propriétaire de la commune limitrophe de Corzé, sur le sol duquel existait un dolmen auprès des bords du Loir, ayant abattu ce monument, mourut subitement quelques jours après, en punition de son acte de destruction.

En ce qui concerne les dolmens de l’arrondissement, une légende générale dit que des puissances invisibles, des femmes mystérieuses qui sous le nom de fées exerçaient un si merveilleux empire, se réfugiaient sous ces monuments, qui étaient à ce titre l’objet des superstitions et des respects du peuple des campagnes.

Disons enfin qu’aucune légende sur les tumuli ou tertres factices n’a pu être recueillie ; les populations passent indifférentes à côté, et les considèrent comme étant des accidents naturels du sol, malgré leur configuration régulière et leur évidente symétrie.

Légendes historiques
La bataille du Vieil-Baugé

L’histoire rapporte que, le 22 mars 1421, une poignée de partisans angevins de la région baugeoise, sous le commandement du chevalier Guérin des Fontaines, unis aux Écossais du comte de Boukan et à une petite troupe de combattants sous les ordres du maréchal Gilbert de La Fayette, anéantirent les bandes anglaises, commandées par le duc de Clarence, frère du roi d’Angleterre Henri V, qui occupaient et dévastaient le pays. Cet épisode fut d’autant plus saillant et glorieux, qu’il inaugura toute une série de revers pour l’envahisseur.

Un évènement aussi important devait donc laisser de profondes empreintes dans la contrée, parmi les populations locales, aussi ai-je sans trop de difficultés recueilli les légendes ci-après, qui ont encore cours sur le brillant fait d’armes des troupes françaises. Ces légendes, dans lesquelles les faits ont été amplifiés ou dénaturés par l’imagination populaire, sont inévitablement en contradiction sur bien des points avec l’histoire elle-même ; elles n’en sont pas moins intéressantes et dignes de retenir l’attention.

I.– D’après une première légende, les Anglais, venant du Mans, et passant à Sainte-Colombe (La Flèche) au commencement de l’année 1421, renversèrent le clocher de l’église dans le Loir ; la cloche a fait entendre longtemps, à la suite de ce sacrilège, ses sonneries du fond de l’eau, à chaque grande fête religieuse.

Les Anglais, dont les déprédations et les crimes étaient sans nombre sur leur passage, firent ensuite brûler vive une jeune fille, au même endroit, mais de la fumée du bûcher s’éleva tout à coup une colombe, qui leur dit : « Vous mourrez tous, de par ordre divin, entre deux paroisses qui portent le même nom. » Arrivés à Baugé, les Anglais s’enquirent du nom de la ville, Baugé, et de celui de la localité avoisinante, le Vieil-Baugé. La prédiction qui leur avait été faite peu de temps avant leur revint à la mémoire, et ils se dirent : « C’est donc ici que nous devons mourir ? » L’évènement justifia en effet cette prédiction, car ils furent presque tous anéantis, le 22 mars de cette année, à la bataille qui eut lieu sur le coteau, entre Baugé et le Vieil-Baugé.

II.– La tradition rapporte que les troupes françaises arrêtèrent les Anglais, sur le flanc du coteau du Vieil-Baugé, à l’endroit où eut lieu l’action, en abattant de nombreuses truisses (têtards) d’ormeaux qui bordaient le chemin, et dont ils édifièrent une barricade.