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Au fil des siècles, le Port de Bassou, ancré au cœur de la Basse-Bourgogne, se dresse en témoin discret des drames et des instants de bonheur d’une communauté intimement liée à la rivière. De l’époque où Joséphine, hôtesse du Port, accueillait voyageurs et mariniers des coches d’eau, jusqu’aux épreuves bouleversantes de la famille Vallée, chaque génération tisse son vécu, mêlant courage, pertes et résilience. Entre les tragédies familiales, les légendes locales et les souvenirs d’un passé plus lumineux, le Port incarne un patrimoine, façonné par le travail et l’espoir. Cette figure, chargée de récits poignants, offre une réflexion profonde sur la fragilité et la persistance de l’existence humaine face aux forces immuables de la nature et aux tourments de l’Histoire.
À PROPOS DE L'AUTRICE
Depuis sa jeunesse,
Sylvie Valet trouve dans l’écriture un moyen d’explorer et de partager ses émotions, un désir devenu essentiel à son expression artistique. Sa nouvelle, "Le Port de Bassou – Histoire, conte, passion", prend vie dans un décor qui lui est cher : un village niché au cœur de la vallée de l’Yonne, où chaque pierre et chaque méandre de la rivière murmurent des récits empreints de poésie et de nostalgie.
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Seitenzahl: 57
Veröffentlichungsjahr: 2025
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Sylvie Valet
Le Port de Bassou
Histoire, conte, passion
Nouvelle
© Lys Bleu Éditions – Sylvie Valet
ISBN : 9791042259334
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À la mémoire de Roger,
le seul maître du Port qu’il m’ait été donné de connaître ;
de Pierre et de Françoise, mes parents,
et de Patrick, mon frère.
Il était une fois une bâtisse à la façade altière construite au bord d’une rivière. Sa partie centrale et son aile droite dataient des derniers temps du règne de Louis XVI ; son aile gauche aux hautes fenêtres cintrées des années 1850.
C’est l’histoire de cette bâtisse qui va être contée, de ses arbres centenaires, de la rivière, qui depuis plus de deux siècles, lui renvoie son image.
Un port fluvial de l’ancienne France
Le coche d’eau
Sous l’Ancien Régime, on se déplace essentiellement par voie d’eau : les fleuves et les rivières, les vastes océans charrient les hommes, les bêtes, les marchandises les plus inattendues. Peu de routes sillonnent alors le royaume de France, mais des petits chemins pierreux, qui au hasard des villages et des bourgs s’arrêtent parfois net, comme par caprice.
Le coche d’eau, qui en quelques jours de périlleux voyage relie Auxerre à Paris, fait régulièrement escale au Port de Bassou. En ce jour de mai 1785, il est à l’approche. Les hommes de peine du Port, qui aident au débarquement, le voient éviter le banc de sable sur lequel échouent parfois les barges étrangères, et piquer droit vers eux. Le chaland ne faisant que commencer sa course, ses passagers sont encore sur le pont. Il y a parmi eux une lourde femme flanquée de deux plus jeunes, toutes trois de tenue fort vulgaire. Elles regagnent sans doute un triste et sale lupanar – la capitale en compte de nombreux –. Un commerçant cossu se tient à bonne distance des malheureuses, une malle de cuir brillante, des bons soins qui lui sont prodigués, pend à sa main droite. À ses côtés, un religieux qui s’en va enseigner le latin et le grec au collège de Bicêtre. Un paysan avec des poules qu’il espère vendre bien, sur le marché de Joigny, les incommode à l’évidence. Au contraire de Nicolas Rétif. L’auteur est déchiré entre la ferme familiale de La Bretonne, et Paris, le lieu de toutes ses perditions. Il met, le premier, pied à terre, lestement, et se dirige vers l’aile gauche du Port, où Joséphine, une vieille toute menue, tient porte et table ouvertes pour les voyageurs.
Nicolas et Marguerite, l’auteur et la fille de la rivière
Dans la pièce du Port, la plus proche de l’Yonne, une vaste cheminée abrite, suspendue à la crémaillère, une lourde marmite dans laquelle la soupe de Joséphine bouillonne calmement. C’est un composé de céréales, de légumes et d’herbes du jardin, d’un peu de lard, de quelques œufs enfin, incorporés en fin de cuisson.
Nicolas n’a que faire de la soupe de Joséphine. Ce qui l’attire irrésistiblement, c’est un tendron1 Marguerite, la fille de l’hôtesse. Elle n’a que vingt ans, de beaux yeux, et un pied tout menu auquel notre homme ne résiste jamais. La jeune femme navigue avec aisance entre les tables et les bancs de bois. Sa mère l’a promise à Jean, un portefaix, qui trime au Port depuis l’enfance. Il décharge les fardeaux des cales humides des barges et les entrepose dans les hangars poussiéreux du Port et vide les hangars poussiéreux du Port de fardeaux qu’il dépose dans les cales humides des barges. Il pue la sueur, le mauvais vin. Mais elle ne fait pas la difficile, Marguerite, pas plus avec Jean, avec Nicolas qu’avec les autres hommes qui lui sont déposés par la rivière comme le limon l’est en son lit. Son corps est ferme, et sa vie débordante. Marguerite cueille le jour. C’est à l’étage de l’entrepôt qu’elle se laisse trousser dans la paille grisonnante, puis, apaisée, repart à la besogne.
Nicolas s’imaginera qu’il est le père de l’enfant qui la fera mourir en couches, quelque neuf mois plus tard. La matrone est impuissante à éviter le drame, à l’époque ordinaire puisque de nombreuses femmes meurent en donnant la vie. Bassou n’a pas reçu la visite de Madame du Coudray qui, missionnée par Louis XV, parcourt le Royaume. Madame du Coudray a fabriqué un mannequin afin d’enseigner aux femmes la connaissance de leur corps. À chaque escale au Port, Nicolas scrute le visage de la petite Violette, croyant y déceler ses propres traits, son nez busqué, son regard sombre.
Nicolas est un ingrat. Il n’a pas tissé autour de Marguerite, une seule nouvelle de ses Contemporaines. Il n’a pas même inscrit, la nuit, sur le pont de l’île Saint-Louis, son nom : Marguerite. Pas le moindre hommage gravé dans la pierre, après tant d’hommages fulgurants rendus à la chair.
Première mort suspecte au Port : Crimes et châtiments à l’époque des Lumières
L’affaire est ténébreuse. C’était par un matin d’automne, une brume grise recouvrait la rivière. Un seul bateau s’est présenté au Port ce matin-là. Le marinier a passé le porche, la bride de ses chevaux tenue ferme à la main – ce sont les bêtes, et parfois même les hommes, qui hâlent les barges le long des petits chemins collés à la rivière –. L’homme défait ses bêtes, et emplit la mangeoire de paille. Il se dirige vers le puits dont il faut longuement actionner la roue avant qu’il ne consente à arracher l’eau des entrailles de la terre. Les chevaux ne manquent de rien ; l’homme les flatte au collet, et avant de décharger des tonneaux et des ballots, s’en va voir Joséphine à l’autre bout du Port.