Le rêve à l’envers - Noëlle Xavier - E-Book

Le rêve à l’envers E-Book

Noëlle Xavier

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Beschreibung

Le rêve à l’envers est un dialogue amusant et provocateur entre deux amies qui souhaitent conquérir le cœur de Christophe, un célèbre artiste très convoité par la gent féminine. Afin de réussir ce pari fou, elles vont utiliser alors une méthode surprenante : suivre toutes les indications, les astuces et les conseils que leur soufflera le monde invisible. Toutefois, comment les entendre ? les comprendre ? Et surtout, comment les appliquer dans leur quotidien ? C’est en traversant bien des situations cocasses qu’elles découvriront tous les outils offerts par l’univers et deviendront ainsi les magiciennes de leur vie.


À PROPOS DE L'AUTEURE


Enfant de diplomate, Noëlle Xavier a grandi dans des univers différents, uniques et magiques, où chaque pays lui a offert ses mots, ses sons, sa voix, ses couleurs, ses odeurs et son âme. C’est ce petit supplément d'âme, emporté dans ses valises, qu’elle a souhaité nous offrir dans Le rêve à l’envers.

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Seitenzahl: 184

Veröffentlichungsjahr: 2022

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Noëlle Xavier

Le rêve à l’envers

Roman

© Lys Bleu Éditions – Noëlle Xavier

ISBN :979-10-377-6587-1

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Aux enfants de la nouvelle Terre

qui construisent le monde de demain,

et plus particulièrement à Diego,

Kenzo-Tsen et Vel-Naël, avec tout mon amour.

Prologue

En face de moi, une dame jolie et un peu ronde. Elle ressemble à Obélix, en femme. Ce n’est pas l’image que je me faisais des anges. Elle m’a l’air gentille mais ferme, voire même un peu autoritaire. Elle a la gentillesse de madame Irma ou de madame Doubtfire. Je pensais que les anges étaient minces, blonds avec des ailes.

Par conséquent je ne sais que penser quand elle me dit en souriant :

— Je m’appelle Noëlle, je suis un ange et je vais m’occuper de toi.

Je n’ai pas besoin que l’on s’occupe de moi. J’ai cinquante ans et ce n’est pas cette gamine de trente ans qui peut s’occuper de moi. De plus, à sa tenue vestimentaire, j’entraperçois que nous ne venons pas du même monde ; je ne comprends pas cette façon de s’habiller que je trouve sans style. Tout de même, si c’est un ange, elle devrait avoir un peu plus de classe et plus de crédibilité physique. Elle a le visage un peu niais.

Et puis comment une gamine de trente ans pourrait-elle m’aider ?

— Bonjour, je m’appelle Sylvie mais je crois que vous vous trompez, c’est en fait moi qui dois vous aider.

Elle me regarde avec beaucoup d’indulgence mais toujours avec ce petit air idiot. Je comprends immédiatement qu’avec cette première phrase d’introduction je suis passée à côté d’une relation simple. Il va falloir que je lui prouve que je suis plus intelligente qu’elle et que je connais mieux la vie qu’elle.

Elle me sourit et me dit gentiment :

— Nous nous aiderons mutuellement mais pour l’heure j’ai un questionnaire à vous soumettre avant de vous orienter dans la vie.

J’ai envie de l’envoyer bouler mais je reste calme. Ces petits jeunes de trente ans qui pensent avoir tout compris du monde alors qu’ils commencent à peine à vivre…

— Asseyez-vous.
— Nom, prénom, adresse ? demandais-je.
— Non, je vous connais, dit-elle en rigolant mais quelle adresse mettons-nous maintenant que vous êtes morte ?

Morte ? Mais je ne suis pas morte ! Est-on dans un asile de fous ou un hôpital psychiatrique ? Tout semble normal. Une table, deux chaises, pas de décor sur les murs blancs. Un petit bouquet de fleurs sur son bureau. Et elle. Incroyablement commune. Pas de signe distinctif. À part le fait qu’elle soit un peu ronde, niaise et certainement folle.

Elle pourrait être folle mais je ne le suis pas. Où est la faille ? Je ne crois pas que ce soit un rêve car j’ai une technique infaillible pour sortir des rêves : je me pince ou me mords légèrement. Mais là, même en me pinçant discrètement, je m’aperçois que je suis dans la vraie vie… une seule issue, jouer le jeu pour sortir de ce lieu bizarre.

— Alors qu’avez-vous décidé ? me demande-t-elle. Quelle est votre adresse ?

Elle est rigolote. Si elle connaît mon nom et mon prénom, elle devrait connaître mon adresse.

— 66 rue des Fleurs.
— Oui, c’est bien cela, c’est votre dernière adresse enregistrée quand vous aviez cinquante ans mais maintenant, à quelle adresse allez-vous habiter ?
— En Chine ou au Japon, répondis-je, histoire de la faire réagir.
— Nous n’allons pas faire dans la provocation, le temps presse et nous devons tout préparer. Alors aidez-moi.

Je ne comprends rien. Me préparer à quoi ?

— Bon, nous reviendrons sur cette question plus tard. Quels seront vos nouveaux parents ? Avez-vous une préférence ?

Décidément, je la trouve vraiment stupide. Je crois que ce sont ces kilos en trop qui lui donnent une allure idiote. Mais je dois faire ma bonne action de la journée : j’essaie de me concentrer et elle voit ma bonne volonté.

Je lui réponds :

— Depuis toute petite, je suis persuadée que je suis née pour être heureuse. Je veux donc des parents heureux, une vie heureuse, un foyer heureux.

Elle sourit. J’ai l’impression d’être devant le père Noël. Je me souviens de mes lettres d’enfant : « Bonjour, père Noël. Alors, je te promets, cette année, j’ai été très sage et je te demande donc de m’apporter pour Noël une dînette, une jolie poupée qui marche toute seule, et une guitare. »

Elle me sort de mes rêves.

— Au fait, je ne me suis pas présentée : je m’appelle Noëlle. Ce serait mieux si on se tutoyait. Nous allons passer un petit moment ensemble.

Je la regarde et souris. Elle m’a déjà dit comment elle s’appelait et je ne suis pas sénile. Je me fais la réflexion que nous sourions beaucoup. Peut-être pour cacher un mal-être ou alors par gentillesse.

À ce moment précis, j’ai la certitude que cela ne peut être qu’un rêve et que je finirai bien par me réveiller. Je n’imagine pas une seule seconde que cela puisse être la réalité.

— Bon, revenons à notre questionnaire : quelle adresse ?
— Buckingham Palace ?
— Non, ce n’est pas dans la liste des possibilités, continue à chercher.

Je lui dis :

— Bon dans ce cas, restons en France, mais dans un quartier chic.
— Bien. Capitale, grandes villes ou campagne ?
— Capitale.
— Homme, femme ?

Je ne comprends pas la question.

— Oui, vous voulez revenir sous la forme d’un homme, d’une femme ?
— Euh, restons comme je suis, femme brune.
— Vous ne prenez pas trop de risques, me dit-elle en souriant.
— De quoi parlez-vous ? De quels risques s’agit-il ?
— Avançons, me répète-t-elle. Enfant légitime, illégitime ?
— Légitime.
— Enfant biologique ou adopté ?
— Je ne sais pas, choisis.

Je ne sais pas ce qu’elle écrit sur sa feuille mais je m’en fiche. Elle est pleine de contradictions. Elle me propose de me tutoyer et en fait elle me vouvoie. Je pense que nous sommes en présence d’une folle mais il faut jouer le jeu.

— Blanche ou de couleur.
— De couleur.
— Jolie, normale, différente ?
— Jolie.
— Vos parents ?
— Ils sont morts. Donc on n’en parle pas.
— D’accord, je ne vais pas insister alors, passons à la question suivante : qu’avez-vous raté dans votre précédente vie et que vous souhaitez rattraper dans celle-ci ?

Là, je commence à comprendre. Elle est folle et s’imagine être un ange qui va m’aider dans ma réincarnation. Elle est très sérieuse et je n’ose pas faire de petites blagues.

— J’ai raté l’amour.

Elle me regarde avec plein d’amour et d’humour. J’ai presque honte de ma réponse. Je voulais juste l’énerver un peu.

— Donc tu ne sais pas ce que c’est l’Amour ?

Tiens, elle s’est remise à me tutoyer.

— Non.
— Bien, je sais maintenant où tu pourrais aller.

Je souris. Elle a trouvé quelque chose d’intéressant dans ma réponse, je ne sais pas quoi exactement, mais elle a l’air contente. Moi, je la regarde, soulagée de la voir partir. Ma réponse a l’air de la satisfaire. Noëlle est devenue même presque jolie.

Je me précipite hors du fauteuil où j’étais assise pour sortir de ce lieu improbable. Je cherche mon sac à main mais je ne le trouve pas. Il est rouge, il devrait se repérer facilement mais mes yeux ne le trouvent pas.

— Tant pis, je pars sans.
— Tut tut tut, où allez-vous comme cela ? L’entretien n’est pas achevé.

Un vieux monsieur est entré dans la pièce, il ressemble au père Fourard ou au druide d’Astérix. Une longue barbe blanche mais propre. Il a l’air intelligent, autoritaire. Décidément, ils sont tous autoritaires ici, mais avec beaucoup de douceur. Je ne sais pas comment on peut être autoritaire et doux à la fois, mais c’est ce qu’il dégage. Je ne sais si c’est un autre fou. Je ne sais pas qui c’est.

— Oui, j’ai encore quelques questions à vous poser pour bien comprendre ce que vous voulez.
— Euh, c’est-à-dire que je ne veux rien. Je suis un peu pressée, on peut peut-être reprendre une prochaine fois, demain si vous voulez.
— Non, non, non vous n’irez nulle part. D’ailleurs sans la finalisation de ce questionnaire vous ne pourrez aller nulle part, vous serez bloquée ici.
— Bah, je ne comprends pas trop, c’est-à-dire que je n’ai rien préparé et que pour vous répondre, cela me semble un peu compliqué.
— Bon, asseyez-vous et reprenons. Vous avez mentionné avoir raté l’amour. C’est intéressant mais ça ne veut rien dire. Ça veut dire quoi « rater l’amour » ?
— Si vous préférez on peut passer à autre chose, je peux changer et trouver autre chose si cela ne vous convient pas.
— Non, ce n’est pas ce que je vous demande. Vous avez répondu spontanément tout à l’heure à Noëlle, sans réfléchir. C’est donc intéressant. La sincérité de la réponse vient de la spontanéité. C’est très bien. Dites-moi maintenant ce que vous entendez par « rater l’amour ».
— Je ne sais pas trop comment expliquer cela. Disons que je n’ai pas aimé comme j’aurais souhaité le faire et je n’ai pas été aimée non plus comme je l’aurais souhaité.
— Bien bien bien.

Il passe délicatement une main sur sa longue barbe

— Vous avez au moins une idée de ce qu’est l’amour ?
— Oui, quand même, j’ai cinquante ans. J’ai vécu, vous savez.

Je suis vexée par sa question. Pense-t-il que je suis vierge ou trop moche pour ne pas avoir connu ou entre-aperçu l’amour ?

— Arrêtez de penser en même temps que je pense, me dit-il de façon autoritaire.

Là, c’est sûr on est chez les fous.

— Non, on n’est pas chez les fous mais j’entends votre pensée qui est très forte. D’habitude elle est en sourdine chez les morts mais chez vous, votre pensée s’entend.

Je suis d’abord surprise. Est-ce vrai qu’il m’entend ? Mais j’ai toujours eu le sens de la répartie.

— Bon et bien si vous entendez ma pensée, vous devez savoir que je souhaite partir d’ici. Je suis attendue pour dîner.
— Vous n’irez nulle part tant que nous n’aurons pas trouvé votre destination.
— Ma destination ?
— Oui, soyez logique, si vous avez raté l’amour, il faut maintenant que je vous envoie dans un lieu où vous trouverez l’amour.
— J’avais proposé Buckingham Palace à votre assistante mais elle a répondu que ce n’était pas dans la liste.
— Non, les places sont chères et puis le prince Charles a déjà trouvé Camilla.
— Ah oui, mais en plus le prince Charles, ce n’est pas du tout mon genre.
— Vous ne m’avez pas facilité la tâche en répondant que vous souhaitiez être une femme de couleur, jolie et heureuse. Pourquoi avoir ajouté heureuse ? Je ne sais pas comment vous proposer votre nouvelle mission de vie. Enfin, je sais que je vais trouver, mais vous avouerez que ce n’est pas facile.
— Et si je n’avais pas de mission de vie ? C’est utile cette mission ?
— C’est la chose la plus stupide que j’ai entendue ! Ne pas avoir de mission de vie ! mais où va-t-on ? Vous n’êtes pas un peu débile ? Je ne vais pas vous renvoyer sur terre sans mission de vie !
— Calmez-vous, monsieur dont je ne connais pas le nom, je vais vous aider.

Tout d’un coup son visage s’illumine.

— C’est ça, j’ai trouvé, ce sera parfait.
— Qu’est-ce qui est parfait ? Dites-moi ? Monsieur, monsieur, dites-moi ce que vous avez trouvé pour moi ? C’est quoi ma mission ?

Il se lève bruyamment sans me répondre mais une fois devant la porte se retourne vers moi et me dit avec puissance une phrase de Steve Jobs que je connais par cœur « votre temps est limité, ne le gâchez pas par une existence qui n’est pas la vôtre ».

Je m’apprête à partir quand un bel homme entre dans cette pièce précipitamment et me dit :

— Dépêchez-vous, il se fait tard, suivez-moi. Mon nom est Christophe mais vous pouvez m’appeler Chris.

C’est bizarre, je l’ai déjà vu. Je crois le connaître. Je ne vais tout de même pas lui demander s’il me connaît, puisqu’il a l’air de me connaître mais c’est la première fois que je le vois dans ce lieu improbable.

— Où sommes-nous exactement ?
— Dans le saas.
— Le saas ? C’est quoi ?
— C’est juste l’endroit où vous décidez ce que vous voulez faire sur terre. Après, vous avez toujours le choix de ne pas revenir sur terre, c’est à vous de voir. Vous avez votre libre arbitre mais moi, je vous conseille de refaire un tour, surtout si vous avez raté l’amour.
— Qui vous a dit ça ?
— C’est ce que vous avez déclaré non ?
— Oui, mais parce que je pense que Noëlle et le vieux barbu sont fous et que ça m’a amusé de leur répondre ainsi.

Christophe ne dit rien. Il reste pensif. Il ressemble comme deux gouttes d’eau au batteur de Calogero qui s’appelle également Christophe. Il est tellement beau que je suis intimidée par cette beauté à laquelle vient se mélanger une forte sensualité. Il est le genre d’homme à qui on a envie de plaire. Celui dont on accroche le poster dans notre chambre quand on a quinze ans et qui plus tard vient hanter nos pensées dès qu’on pense à soi et à notre vie idéale ou notre idéal de vie.

Christophe n’est absolument pas gêné par cet arrêt sur image que je fais sur lui. Il est patient et me laisse le temps de l’admirer. J’apprécie cette délicatesse qui lui donne encore plus de charme. Il doit certainement avoir entre quarante-cinq et cinquante ans.

Je fais tout pour paraître plus grande, plus jolie, plus jeune, plus intelligente en prenant un air sérieux pour lui poser ma question.

— Nous nous dépêchons pour quoi au juste ? Je suis dans un saas et je peux y rester, non ?
— Non, car vous n’avez pas de coma et vous êtes censée retourner sur terre.
— Je suis donc au paradis. ? Ou presque au paradis ? Et pourquoi voulez-vous que je retourne sur terre ?
— Mais je vous l’ai dit, vous avez déclaré avoir raté l’amour. Il faudra revenir après avoir réussi l’amour.
— Mais c’est idiot ce que vous dites ! on fait comment pour réussir l’amour, et puis zut, je m’en vais, vous êtes aussi fou que les autres !

Puis soudain, avant de partir je lui lance cette petite phrase avec une pointe d’espièglerie :

— Vous ne voulez pas m’accompagner ?
— Où ?
— Et bien sur terre !

Le grand druide entre à nouveau dans la pièce. Zut, j’aurais dû partir plus tôt au lieu de me laisser séduire par la beauté de ce Christophe.

— Tut tut tut, vous n’irez nulle part. il faut que nous finissions le questionnaire pour vous envoyer quelque part.

Je me rassois, un peu dépitée. Je sais que je dois être chez les fous mais je ne peux pas le brusquer car il risquerait d’être violent avec moi.

— Il vous plaît ?
— Qui ?
— Mais Christophe voyons ! j’ai bien observé comment vous le regardiez !
— Je ne savais pas qu’il y avait des caméras dans la pièce.
— Mais il n’y en a pas ! arrêtez d’être aussi basique et ne passez pas pour plus bête que vous n’en avez l’air.

Oups, prends ça dans la figure. Il ne fait pas dans la dentelle !

— Télépathie ?
— Non je sais me rendre visible et invisible. Revenons à vous ; il vous faudra développer votre sens de l’intuition.
— Ah bon ? Je ne vois pas le rapport entre le visible et l’invisible.
— Le principe même de l’intuition est d’accepter qu’il existe un monde parallèle ou invisible qui peut vous venir en aide.

Alors, reprenons notre questionnaire. Quel talent unique souhaitez-vous avoir ?

— Talent unique ?
— Eh bien oui, quelle qualité unique souhaitez-vous avoir et qui vous aidera toute votre vie ?
— Écoutez, je suis invitée à dîner, vous ne voulez pas qu’on remette notre conversation à plus tard ? J’aurai ainsi le temps de réfléchir, et puis je vais vraiment être en retard.
— Et moi je vais vraiment être en colère.
— Ah bon, je pensais que dans un saas les druides n’étaient pas en colère.
— Cessez de penser, ce sera mieux. D’ailleurs c’était votre gros défaut, toujours tout vouloir ramener au mental. Et puis, je vous signale que je ne suis pas un druide comme dans Astérix et Obélix, je m’appelle AngieOui.
— C’est sympa comme nom mais pas très sérieux. Je rajouterai bien Druide AngieOui si vous n’y voyez pas d’inconvénient.
— Cessez d’être insolente. Et puis je ne suis pas druide. Revenons-en au questionnaire : Talent unique ? Quel talent unique aimeriez-vous avoir ?
— Je ne sais pas, c’est trop dur. Inventeur ?
— Inventeur de quoi ?
— Je ne sais pas.
— Douée pour les affaires ? Généreuse ?
— Mais si je vous dis que je ne sais pas, c’est que je ne sais pas.
— Allons, donc il faut trouver un talent qui vous permettra de « réussir l’amour ».
— Belle, belle belle comme le soleil. Ce n’est pas un talent ?
— Oui peut-être, si ça peut se transformer en qualité, car la beauté du cœur est un talent. Avec cela vous pourriez « réussir l’amour ».

À ce propos, je tiens tout de même à vous rappeler que « réussir l’amour » signifie ici donner de l’amour à tout le monde et en recevoir. Quand je dis tout le monde, c’est tout le monde. Donc êtes-vous certaine que la beauté seule puisse être votre talent unique ou souhaitez-vous une autre qualité ?

Je vous rappelle également la règle du jeu. Cette qualité vous devrez la chercher, la trouver et l’offrir au monde.

— Je suis un peu perplexe par cette règle du jeu. Je préférerais dans ce cas être magicienne. Avoir toutes les qualités d’une magicienne.
— Donc vous voulez être comme David Copperfield ?
— Euh, non.
— Je vous laisse cinq minutes et je vais revenir. Ce devrait être suffisant pour que vous puissiez décider.
— Je pensais que le temps n’existait pas dans votre saas.

Il ne prend pas la peine de répondre mais dit juste très calmement cette fois-ci :

— Cinq minutes.

Je cherche la sortie mais je ne vois plus de porte. En revanche, je retrouve mon sac rouge. J’essaie de trouver mon portable. Qui appeler ? Mon frère ? Non, il ne répond jamais sur le moment, toujours occupé avec les enfants. Ma sœur ? Non, si elle est au bureau elle ne consultera sa messagerie que le soir.

Mon autre sœur, mais elle n’a pas de portable, donc inutile de songer à elle maintenant. Elle doit être dans le bus. Je ne sais pas quelle heure il est très exactement. Mes yeux se penchent un peu plus sur l’heure mais l’heure ne s’affiche pas. Je recherche le numéro de mon frère mais rien. Aucune heure et aucun numéro ne s’affiche pourtant le portable fonctionne. Tous les numéros et messages ont disparu à l’exception de ceux que je m’envoie pour ne pas oublier. Ce sont surtout des phrases ou des citations qui m’ont amusée ou émue. Je tombe sur l’une d’entre elles et qui avait retenu mon attention. Elle était écrite devant l’entrée d’une église. « Il est possible qu’en entrant dans cette église vous entendiez l’appel de DIEU, en revanche, il est peu probable qu’il vous contacte par téléphone. Merci d’éteindre vos téléphones ». Qui appeler au secours ? Il me faut une idée de génie pour sortir d’ici.

Le druide AngieOui revient, très calme.

— Vous avez trouvé ? Je pense que oui car vous avez eu largement le temps. Il ne devait y avoir qu’une seule pensée dans votre tête.

Oui bien sûr, ma seule pensée était de sortir d’ici, il a donc raison sur le principe.

— Oui, j’ai trouvé ce que je veux faire. J’ai trouvé ma mission de vie.
— Pas trop difficile j’espère, me dit le druide.
— Non, pas pour moi.
— Alors ?
— Influenceuse de bonheur.
— Influenceuse de bonheur ? ça veut dire quoi ?
— Tout comme il existe des blogueuses de mode, des influenceuses ou des personnes inspirantes, je souhaite que ma mission de vie soit influenceuse de bonheur. En fait je veux amener les gens vers le succès.
— Bon, mais en un mot, vous leur direz quoi ?
— « Le succès est quelque chose que vous décidez, alors n’attendez pas ».

AngieOui marque un temps d’arrêt et me dit en riant :

— Génial, vous avez trouvé ça en cinq minutes ! bravo.

Influenceuse de bonheur pour « réussir l’amour ». Pas facile mais je vous fais confiance. C’est prétentieux voire ambitieux comme programme mais Chris, Noëlle et votre famille vous donneront un petit coup de main si vous avez besoin.

Alors là, je n’en reviens pas. Il me laisse la possibilité de partir uniquement parce que j’ai réussi à ,le bluffer ! De plus, mon idée est complètement farfelue. En cinq minutes. Cinq minutes, comme quoi il vaut mieux être spontanée dans la vie, ça paie. Cinq minutes pour me sauver, pour sauver ma vie. Je me précipite vers la sortie avec mon sac.

Je vérifie rapidement que ma carte bleue est toujours là ainsi que les dix euros. On est bien chez les fous, sinon il y a belle lurette qu’ils auraient pris ma carte bleue et mon argent.

Dehors, un immense jardin fleuri. Je ne me souviens pas l’avoir traversé.

— Taxi, taxi.

Je m’engouffre dans un taxi qui surgit de nulle part.

— Ouf, faites vite s’il vous plaît. Nous allons au 66 rue des fleurs.

En me retournant j’aperçois Noëlle avec une lourde valise rouge qui crie « attendez-moi, attendez-moi ». AngieOui arrive derrière elle, essoufflé.

— Revenez, je me suis trompé de parents !

Je ne comprends rien à ce qu’il dit mais peu importe, je suis déjà loin.