Le troisième monde - Jeff St Pierre - E-Book

Le troisième monde E-Book

Jeff St Pierre

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Beschreibung

Un écrivain, brisé par la perte de l’amour de sa vie, abandonne l’écriture, incapable de retrouver l’inspiration. Pourtant, le jour où il décide de reprendre la plume, une aventure singulière et troublante s’amorce : le personnage principal de son roman semble s’animer sous ses mots et l’entraîne dans une dimension mystérieuse. Mais s’agit-il réellement d’un autre monde ? Qui est cet étrange personnage qui, peu à peu, lui ressemble comme un reflet ? Et quelles sont ses véritables intentions ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Jeff St Pierre est doté d’une imagination foisonnante qu’il exprime à travers une variété de styles littéraires, tels que le roman, la poésie ou l’humour. Ses écrits se distinguent par une tendresse singulière et une philosophie de vie simple et positive, toujours porteurs d’un message. Il a forgé son expérience de l’écriture en réalisant des mémoires et une thèse de doctorat.

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Seitenzahl: 184

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Jeff St Pierre

Le Troisième monde

Roman

© Lys Bleu Éditions – Jeff St Pierre

ISBN : 979-10-422-6211-2

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

La disparition

Automne 1998

Elle était le seul bonheur de ma vie, ma lumière, mon île, ma consolation suprême. Emmy s’est éteinte, au bout d’une nuit sans étoiles, dans un dernier souffle, un dernier murmure. « Je serai toujours près de toi, Paul, mon amour, rien ne pourra jamais nous séparer ».

Ce furent ses derniers mots alors que, désespéré, je la tenais dans mes bras, tentant en vain de retenir la vie qui s’échappait de son corps affaibli. Depuis des mois, son cœur battait à peine, juste pour ne pas mourir. Pourquoi ? Elle était si jeune. Elle aimait de tout son être, bien au-delà de ses forces. L’amour l’avait porté et ce matin-là, l’amour me l’avait emporté.

Et, je ne sais combien de temps, j’ai serré ce corps, pleurant et priant, essayant de toute mon âme de lui insuffler ma vie, mes forces, mon être tout entier.

Emmy est partie. Je n’entendrai plus sa voix chantante, ses mots d’amour qui me transportaient. Deux jours auparavant, elle semblait aller mieux, mais elle craignait de perdre ses dernières forces. Elle m’avait pris la main et se souvenait des poèmes qu’elle écrivait :

Amour, j’ai le cœur en peine

Nos ivresses sont si lointaines.

Irons-nous une fois dernière

Par les bois et la clairière,

Entendrons-nous encore, cher ange psalmodier la douce mésange.

Si jeune et pur est notre amour,

Un siècle serait bien trop court…

Je ne sentirai plus son parfum dans notre maison. Je ne verrai plus son corps gracieux de ballerine, je ne sentirai plus sa peau sur la mienne et son souffle sur mon visage. Hélas, non, mon amour, nous n’irons plus par les sentiers ombragés où fleurit le chèvrefeuille. Nous n’irons plus main dans la main par les prés délicieux cueillir des fleurs belles comme des souvenirs. Nous ne resterons plus le soir, au chant des grillons, à guetter l’étoile filante.

Je me souviens de ce soir où elle me demandait :

— Paul, m’aimeras-tu encore lorsque le temps m’aura emporté là-haut, vers ces horizons d’où l’on ne revient pas, lorsque je ne serai qu’un souffle dans ta vie…

Il y avait dans ses yeux la douceur des étoiles, dans son âme, la blancheur d’une voile. Elle semait dans son sillage le doux parfum de son existence. Elle m’était le bien le plus précieux qu’il me fût donné de connaître.

Emmy, ce soir-là, s’est éteinte de l’amour qu’elle m’avait donné. J’allais errer, solitaire, l’âme douloureuse et le cœur dévasté, n’ayant comme destinée que des ciels pâles et gris. Aurais-je la force, mon Dieu de porter tant de peine ?

Hiver 1998

Quelques mois sont passés. Je restais désespéré. L’image d’Emmy était toujours aussi présente devant mes yeux. Son absence la rendait encore plus belle. Son visage était comme un beau paysage qui avait le charme des saisons et le mystère des horizons lointains. Ses yeux avaient la couleur des cieux d’automne. Et la blondeur de ses longs cheveux rappelait la couleur chatoyante des blés bercés par les brises tièdes des étés. Emmy m’avait donné deux printemps de sa vie et, avec elle, partaient l’été et l’automne. Il ne me restait que l’hiver froid et défleuri avec son silence sépulcral et ses oiseaux trop tristes pour chanter. J’avais perdu ma gaieté, mes espérances. Emmy était partie, emportant ma vie et mon âme tout entière. Elle était mon soleil, ma lumière, et réalisant de plus en plus son absence, ce soleil pâlissait chaque jour davantage. Je passais des heures à regarder ce ciel autrefois bleu et lumineux et qui aujourd’hui était blanc de mélancolie. J’avais le sentiment de ne plus appartenir à ce monde qui m’entourait et qui m’était devenu étranger. Je flottais dans un univers étrange où rêve et réalité se mêlaient étroitement. Ma tristesse se perdait, infinie, éternelle, dans les fonds froids et nus d’un abîme géant. Je finissais par douter de mes souvenirs, de cette journée merveilleuse où j’avais compris que je ne pourrais plus jamais passer un jour sans la sentir à mes côtés. Ce premier jour où je l’avais prise dans mes bras tremblante et délicate.

C’était sur le banc d’une allée. L’allée d’un parc où nous nous étions donné rendez-vous. Qu’elle était belle dans sa petite robe blanche. Elle ressemblait à une danseuse, légère et gracieuse, virevoltante et riant pour un rien. Oui, elle riait tout le temps. Je pensais qu’elle se moquait de ma timidité et je prenais une moue contrariée. Elle en était à la fois charmée et désolée. Pour se faire pardonner, elle m’avait déposé un baiser sur le front. Et elle riait encore, me prenant la main et m’entraînant à travers les jardins du parc. Il y avait des fleurs partout. C’était un dimanche de mai, chaud et ensoleillé. Les oiseaux chantaient à tue-tête. Emmy courait sans cesse, m’entraînant par la main. Puis, son cœur s’est mis à battre très fort. Elle était essoufflée d’avoir tant couru. Alors, nous nous sommes assis un moment sur un banc pour qu’elle se repose, toujours la main dans la main. C’était elle qui avait tout fait pour que je l’embrasse. Elle me sentait incapable de me décider. J’étais si maladroit, d’une timidité presque maladive. Elle s’était approchée et sans me quitter des yeux, s’était serrée contre moi. Ses yeux brillaient d’une lueur intense. Elle resplendissait. Puis, son cœur s’était mis à battre moins fort, presque normalement. Elle n’était plus essoufflée. Elle m’avait tendu ses lèvres et je lui déposai un court baiser brûlant de désir. Je l’avais embrassée, d’abord du bout des lèvres, comme si je voulais m’assurer qu’elle le voulait vraiment. Ensuite, avec passion, dans un long baiser que j’aurais voulu sans fin.

Ce premier baiser, je ne l’avais jamais oublié. Et aujourd’hui, le souvenir était aussi fort que s’il se fût agi de la veille. Je n’avais pu dormir de toute la nuit qui avait suivi.

Je me rappelais aussi les moments délicieux que nous passions ensemble à lire ou à écouter les œuvres pour piano de Chopin. Elle adorait cet instrument dont elle avait commencé l’étude quelques années auparavant. Certains soirs, nous lisions, chacun de notre côté. Chaque fois qu’elle tournait une page, elle levait légèrement la tête pour voir si je la regardais, et lorsque nos regards se croisaient, nous riions ensemble comme deux enfants qui s’amusaient à se surprendre. Elle venait alors doucement près de mon fauteuil, mettait les bras autour de mon cou et posait sa joue tiède contre la mienne. Je posais mon livre et fermais les yeux en lui murmurant des mots tendres.

L’évocation de ces souvenirs m’était douloureuse, mais elle me permettait de continuer à vivre et à garder une folle espérance, celle de la revoir et de la serrer entre mes bras. Je savais cela bien impossible et pourtant rien ne pouvait m’ôter ce rêve irréalisable. Au plus profond de mon être, une petite flamme continuait de briller et de me guider. Il me semblait parfois la sentir près de moi. Elle m’entourait d’un amour ineffable. Elle vivait dans un autre monde, à la fois très proche et très éloigné, mais aussi tellement irréel et inaccessible. Au fond, je connaissais très peu de sa vie. Elle n’en parlait pas, semblant même éviter tout ce qui la concernait. Elle me disait qu’elle était fille unique et qu’elle n’avait plus de famille depuis la perte de ses parents dans un accident d’avion. Je n’ai jamais osé lui demander plus de détails, car son visage s’assombrissait à chaque fois. Il y avait un mystère qui l’entourait, mystère que j’attribuais à son charme et à sa personnalité. Mais, je l’aimais de toutes mes forces et le reste m’était égal. Et les mois passant, je vivais malgré tout des moments de paix intérieure qui, hélas, duraient peu, car la prendre dans mes bras et la garder tout contre moi me manquait affreusement.

Les jours, puis les semaines se sont succédé, mornes et solitaires. Je désirais rester seul avec ma peine. Je ne voyais personne. À peine donnais-je quelques nouvelles brèves ici ou là, à quelques parents ou amis. Dans la petite maison que nous habitions depuis à peine deux ans, je n’osais toucher aucune de ses affaires. Le livre qu’elle lisait était resté ouvert à la même page. Je me souviens d’ailleurs d’une enveloppe qui dépassait des pages de ce livre. Je l’avais prise entre mes mains, mais il m’était alors impossible de la décacheter et de l’ouvrir. Ma peine était ce jour-là à fleur de peau. Sur l’enveloppe, de sa belle écriture, était écrit « Paul, mon amour pour l’éternité ». Je la serrai contre mon cœur et comme la chose la plus précieuse venant d’elle, je la rangeai dans le tiroir de mon bureau, en attendant d’avoir la force de l’ouvrir et de lire ce qui devait être sans doute ses dernières pensées. Il m’était de même devenu impossible d’entendre le moindre morceau de musique que nous écoutions ensemble, ou de relire un de ses petits mots tendres qu’elle m’écrivait et que je pouvais retrouver ici ou là, sur un meuble ou entre les pages d’un livre.

Le jardin qui entourait la maison paraissait triste et abandonné. C’était surtout elle qui s’occupait avec une passion toujours renouvelée, de toutes ces fleurs dont elle aimait employer les noms en latin pour m’amuser et m’étonner. J’étais toujours étonné de voir à quel point les fleurs poussaient rapidement et avec une parfaite harmonie. Elle avait un étrange pouvoir sur les fleurs et les plantes. J’étais émerveillé de toutes ces couleurs qui paraissaient irréelles, tant elles étaient ravissantes.

Mystérieuse présence

Huit années se sont écoulées depuis la disparition d’Emmy. Son absence m’est toujours aussi douloureuse, mais je me suis peu à peu habitué à ce cruel état. Aujourd’hui, plus que jamais, je la sens à mes côtés, comme un souffle impalpable qui me console et ne me quitte pas. J’y trouve une sorte de bonheur empreint à la fois de tristesse et d’espoir. J’arrive même à sourire comme avant, m’imaginant que son désir est la paix de mon âme et mon bonheur. Mon amour pour elle, bien loin de faiblir, n’a fait que grandir. Il me semble confusément faire partie de sa vie autant qu’elle peut faire partie de la mienne. Je souris à cette idée que nous puissions, sans nous en rendre vraiment compte, vivre ensemble, mais chacun de nous dans un monde différent, et que cet amour intemporel qui nous lie a réuni à jamais nos deux âmes.

Au fil des ans, je me suis raccroché à cette pensée comme le naufragé à sa planche de salut. Il ne me restait qu’à espérer et croire comme un fou que ce radeau de fortune me conduirait vers l’île de ma bien-aimée. J’attendais je ne sais quoi du temps qui passait. J’allais puiser mes forces dans les forêts qui étaient tout près de notre maison. La nature me consolait de mon infortune. Je prenais les chemins que nous parcourions ensemble. C’est alors que je me souvenais. Nous marchions en nous tenant par la main dans ces sentiers fleuris d’aubépines et de romarins sauvages. Au bout de quelques minutes de marche, elle s’essoufflait. Alors nous avions pris l’habitude de nous reposer à chaque fois sous le même pin, afin qu’elle se repose. Elle était heureuse. Son cœur était faible, mais elle respirait la vie. Elle voulait vivre chaque seconde, avoir tous ses sens en éveil. Si une mésange ou un rouge-gorge venait se poser tout près d’elle, elle ne la quittait pas des yeux et retenait son souffle afin qu’elle ne s’envolât pas. Si elle percevait le chant d’une fauvette ou d’un merle, elle les cherchait avec un air émerveillé d’enfant. Pendant ce temps, je la regardais, charmé. Je ne voyais qu’elle. Mon cœur était empli de sa présence, de sa voix, de son visage, de son souffle. J’étais imprégné de toute sa grâce. Je ne savais plus si je devenais elle, ou si elle devenait moi, car il me semblait que mon cœur abritait cette âme fragile tout en essayant de la retenir afin qu’elle ne s’envolât pas. Parfois, il lui arrivait de frissonner lorsqu’un nuage venait cacher les rayons du soleil. Je venais alors tout près d’elle pour qu’elle ne prenne pas froid. Elle posait sa tête sur mon épaule et fermait les yeux. J’avais le sentiment d’avoir recueilli un ange descendu du ciel. Un être pur dans toute son innocence et sa sincérité.

Elle était venue dans ma vie comme un don inespéré. Et aujourd’hui, elle n’était plus. L’avais-je trop aimé pour que le ciel me l’enlève après avoir connu la félicité suprême. Peut-être simplement n’avais-je pas compris qu’elle n’était pas de ce monde, ne faisant que passer, et ne laissant derrière elle que le souvenir de ces instants chéris que je cherchais à retenir désespérément.

Mais je me rendais compte à d’autres moments que je refusais de voir qu’elle était partie à jamais, tout au moins dans ce monde d’ici-bas. J’avais toujours senti sa présence à mes côtés. Mais, dans de tristes moments de lucidité, je n’excluais pas que ce fût un effet de mon imagination pour compenser l’immense vide qu’elle avait laissé dans mon être en me quittant. Même au bout de tant d’années, je l’imaginais toujours marchant à mes côtés lorsque j’allais dans nos bois par ces petits sentiers connus de nous seuls. Le soir, je contemplais l’azur et ses nuages bordés d’un ourlet vermeil, pendant que la brise chantait ses airs sans cesse renouvelés dans les branches des vieux pins. Je contemplais les dernières lueurs qui dansaient entre les ombres discrètes et charmantes des jeunes pins. Il y avait ces soirs-là des transparences roses et bleutées et des voiles nacrées qui auréolaient cette nature sacrée. Ces secrètes solitudes avaient quelque chose de divin qui pénétrait mon cœur et mon âme. J’aimais croire en sa présence auprès de moi, indicible et bienveillante. Je lui parlais parfois comme pour m’en convaincre. J’imaginais ses réponses, et ce bonheur illusoire me consolait. Je n’acceptais pas sa disparition, ou que l’on me parle d’elle à l’imparfait. Elle était toujours là. Elle n’était jamais partie, elle allait revenir, car elle ne pouvait pas m’avoir abandonné.

Des moments étaient encore plus tristes, lorsque je croyais entendre sa voix dans la maison. Un bruit familier me faisait penser que je pouvais la trouver à l’autre bout de la maison. Je ne pus pendant longtemps me promener dans notre jardin sans avoir l’impression que je la trouverais en train de cueillir les roses qu’elle adorait, ou parler à notre voisine par-dessus la haie. Mais quand je prenais conscience que ce n’était qu’une illusion et que je ne la reverrai plus jamais, j’étais abattu. Je ne pouvais retenir mes larmes. Je levais les yeux, interrogeant le ciel. Pourquoi tant de douleur ? Le temps aurait pu l’adoucir au fil des mois. J’aurais pu, au fil des ans, laisser faire le temps afin de retrouver un peu de sérénité. Mais je ne voulais pas l’oublier. J’aurais été infidèle à notre amour, à ces instants sacrés de vie qu’elle m’avait donnés au prix de la sienne. J’essayais au contraire de retenir dans mes songes ces exquises tendresses que le temps nous avait données. Il me fallait me souvenir à chaque fois pour parcourir avec elle les chemins de nos amours. Si le temps m’avait ôté le bien le plus précieux, il ne pouvait m’empêcher de me rappeler encore et encore. C’était ma seule consolation et elle me permettait de continuer à vivre sur cette terre.

L’apparition

Peu à peu, j’avais repris ma plume et m’étais remis au travail. Mais je ne voulais plus écrire d’histoires tristes, celles que l’on voit dans la vie de tous les jours. Je les voulais simples et légères afin de me consoler de la mienne, des romances où l’amour serait toujours présent. Une histoire qui aurait pu être la mienne avec ses soucis et surtout ses bonheurs. Les écrire me réchaufferait le cœur et me ferait oublier le temps passé à attendre je ne sais quoi, mais quelque chose qui comblerait mon cœur et mon fol espoir.

Deux années s’étaient encore écoulées. Je venais de terminer un roman et je manquais d’inspiration. Le soleil radieux qui entrait par la fenêtre en ces premiers jours de printemps devait y être pour beaucoup. Mais je résistais à l’envie d’aller me promener dans le jardin et je griffonnais nerveusement sur ma feuille quelques idées qui me passaient par la tête.

Et ce jour-là, il me vient à l’idée d’écrire une sorte de conte, une nouvelle histoire d’amour, peut-être. En réalité, je ne savais pas trop encore, mais je pensais que les idées me viendraient une à une dans ma tête, comme cela se produit souvent lorsque je commence à écrire. Mais j’étais loin de m’imaginer que l’écriture de ce conte ou roman allait complètement transformer ma vie.

Je commençais donc mon récit de la façon la plus simple possible. L’inspiration n’était toujours pas au rendez-vous. Mais je connaissais déjà les traits de caractère de mon personnage principal ainsi que son allure physique.

Ce jour-là, sans doute grâce à ce soleil, je ressentais une douce paix dans le cœur. J’avais envie que les personnages de ce roman soient heureux et ne rencontrent pas trop de malheur dans leur histoire. Ce sera l’histoire toute simple d’un amour sincère entre un homme très fleur bleue et une femme idéaliste qui, l’un comme l’autre, auront du mal à se faire à la vie de couple.

Cet homme, c’est Noan, et tout commence bien pour lui. Assez beau garçon, il est brun aux yeux verts, et de taille moyenne. Il est architecte dans un bureau d’études d’une ville moyenne du sud-est. Il a une trentaine d’années. Il a eu une enfance sans histoires, choyé et aimé par des parents dont le seul défaut était de le surprotéger. Après de brillantes études, il est immédiatement embauché. Ses collègues sont aimables et son patron est satisfait de son travail. Comme je l’ai dit plus haut, ce jour-là, je n’ai aucune envie de créer des soucis à mon personnage. Cela peut faire rire certains, mais je suis toujours ennuyé de devoir créer des problèmes à mes personnages. Et ce jour-là encore moins que d’habitude.

Et pourtant, la vie est malheureusement une suite de soucis, de contrariétés diverses, de peines et de douleurs. Il faut bien que cette histoire colle un peu à la réalité de la vie. Et surtout, si tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes, l’histoire tournerait court, inévitablement, hélas ! Alors, j’essaie dans ce cas que ce soit le moins douloureux pour mes personnages. Pour cela, j’évite les personnages méchants, hargneux, ou louches. Et qui sait, peut-être viendraient-ils hanter mes rêves, s’ils prenaient trop forme dans mon esprit ! Et personnellement, j’aime bien dormir tranquille, du sommeil du juste, comme l’on dit parfois.

Évidemment, je me trouve limité dans mon imagination. Je dis : « Non, vraiment, pauvre hère, je ne peux pas lui faire ça ! Il serait malheureux ». Pour moi, la vie est suffisamment pesante pour que j’y rajoute trop de malheur ou de graves ennuis.

Je reviens donc à Noan. Il est heureux et j’en étais heureux pour lui. Il a même rencontré l’amour. C’est une jolie blonde. Elle s’appelle Lila. Ils sont nés le même jour de la même année. C’était pour eux un signe du destin. Trois mois plus tard, ils étaient mariés. Un beau mariage. Tous ses parents et amis étaient là. La mariée était rayonnante et Noan en était fou amoureux.

Tout leur souriait et la vie aurait pu continuer ainsi. En m’attardant davantage sur les détails, j’aurais pu en écrire encore un peu plus, mais cela ne m’aurait pas amené bien loin. Il fallait donc que quelque chose vienne gâcher ce bonheur qui s’annonçait sans nuages. Mais rien de trop grave, quelque chose qui puisse s’arranger sans trop de mal ! Qui allait être le fauteur de trouble ?

Après réflexion, je désignais Noan. C’est lui qui allait compromettre la bonne entente du couple. Un autre jour, cela aurait pu être Lila, mais, cette fois, c’était le mari. Il va succomber aux charmes d’une femme envoûtante et se trouver emmêlé dans un fatras de mensonges, avant que Lila finisse par avoir des doutes, etc.

J’imagine le décor, garde en tête une trame, et je me lance… L’histoire se passe en partie sur la Côte d’Azur. Oui, après tout pourquoi aller dans des régions froides, alors que la seule description de ce délicieux endroit où j’ai passé presque toute ma vie me ravit l’esprit et l’imagination. Ainsi j’écrivais :