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Qu’est-ce qui peut bien réunir un vendeur de spiritueux désabusé, une responsable de maison close déçue et un scientifique idéaliste dans une France qui se reconstruit après quatre longues années catastrophiques ? Afin de répondre à cette question atypique, ce roman devra s’engouffrer dans une multitude de thèmes d’actualité sans jamais se démoder. Entre les souvenirs douloureux, les fuites en avant et la mauvaise foi, suivez les parcours de ces trois protagonistes qui n’avaient pas du tout envie de se retrouver !
À PROPOS DE L'AUTEUR
Valentin Clément s’inspire d’une réflexion autour de l’engagement pour une cause et de la certitude d’avoir raison. Selon lui, lorsqu’on milite pour une cause, on est certain d’être dans le « bon camp » et on a tendance à voir le monde comme on aimerait qu’il soit. Par le biais de cet ouvrage, l’auteur veut pousser cette logique à son paroxysme.
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Seitenzahl: 345
Veröffentlichungsjahr: 2023
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Valentin Clément
Le verger songe encore
Roman
© Lys Bleu Éditions – Valentin Clément
ISBN : 979-10-422-0972-8
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Il existe des journées où l’on est heureux d’être exactement là où nous sommes. Certes, ça ne dure jamais très longtemps, mais on en raffole dès qu’ils apparaissent. Ce petit bonheur, c’est la sensation de considérerquenotremondeindividuelatrouvé,pendantuntemps,un beléquilibre.Cetéquilibrejoyeuxpermetd’embrasseravecconfiance lerestedumondeetespérerunretourpositifdesapart.Cettejournée, c’est aujourd’hui en plein milieu d’un magnifique mois de juin et Lucien Vabre est en train de la vivre ! Bien installé dans sa boutique
«L’Ezpirit» dans la rue Massena, une rue refaite à neuf à Rueil-Malmaison a 15 minutes de son domicile, il échange avec un client :
«Donc, comme je vous l’ai expliqué, Monsieur Dubacq, le cointreau est un triple sec. Le triple sec est un nom générique tandis quelecointreauestunemarque,unetrèsbonnemarque.Alors,sivous souhaitezréaliserdescocktailsavecdelaliqueurd’orange,jevousle conseille. »
Monsieur Dubacq consultait la bouteille entre ses mains. Il ne cachaitpassonignorancedanslesliqueursetlesspiritueuxetcomme cela fait plusieurs mois qu’il voulait se lancer dans la réalisation des cocktails, il souhaitait se fournir chez les professionnels.
«Trèsbien…Jevousfaisconfiance,c’estvousleprofessionnel.» Il posa la bouteille sur le comptoir du vendeur puis ressortit de sa pochedroiteunepetitefeuille.«Ensuite…ilmefaudraitdurhum.J’ai vu que vous en avez. »
«Toutàfait,jevouslesmontre!»Luciensedirigeaverslerayon rhum «Alors, comme vous commencez dans la pratique, je vous conseillecettebouteille,c’estdurhumblanc.Avecça,vouspourrez concocterdespinacoladas,desdaiquiris…Etellen’estpastrèschère. Ça ne sert à rien de taper dans la haute qualité dès le début. »
«Voilà un vendeur qui sait conseiller. » Monsieur Dubacq laissa échapper un sourire qui secollait parfaitement à la météo du jour.Ce sourireagréableetjoyeux,venant d’un jeunesexagénaire,blond, aux yeuxverts,àl’allureélégante,indiquesonplaisirsincèred’êtreprésent dans cette boutique.
«Auriez-vousbesoind’autrechose?»
«Ehbien…oui,ilmefaudraitaussiducuraçaobleu.»
«J’en ai aussi!» Aussitôt, Lucien tendit une bouteille bleue au client. Une belle bouteille qui ne pouvait faire douter de son composant.«Cetteliqueuresttrèspriséeparlesamateursdecocktails, elle donne une couleur bleue très attrayante, une couleur qui nous transporte dans un lieu branché.» Il percevait chez son client un certain plaisir à écouter.
«Çavamerappelermadoucejeunesse.»
«Voussortiezbeaucoup?»
«Toutletemps!Maintenantquejeperçoislesdernièresannéesde ma carrière, que je commence à entrevoir le début de la fin, j’ai à nouveau du temps et je peux reprendre ma passion de jeunesse : la beuverie ! »
«L’abusd’alcooldoitsefaireavecmodération.»
«J’ypenseraisàmoncinquièmecocktail!»
«Je n’en doute pas.» Lucien laissa son sourire s’élargir. «Vous festoyiez beaucoup durant votre jeunesse ? »
«Ahça,j’aitentéd’enprofiter.Quandj’avaisdixans,nousavions connu les ravages d’une pandémie, puis les crises à l’international… Et enfin la Déflagration… Quand j’ai débuté ma vingtaine, je savais quelafaussepériodedecalmequenousconnaissionsnedureraitpas. Je suis donc sorti, sorti, sorti… À n’en plus finir ! Entre mes études, mon boulot alimentaire, mes soirées… J’en ai profité.» Il marqua un moment de pause «Et puis, quand tout commença à exploser, je me suis réfugié avec ma femme et ma fille de trois ans dans le sud de la région, à Samois sur Seine. Là, je fus milicien pendant deux ans. Et puisnousysommesrestéespendanttouteladécennie.Pourêtre honnête, on a déménagé pour se rapprocher de Paris et ça fait quatre mois que je vis à Rueil-Malmaison. »
«Etcelavousplaît?»
«Plutôt, j’aime bien le coin. C’est vivant. » Lucien mit les trois bouteilles dans un sac.
«Tenez,jevousoffrelecuraçao.»
«Ah…Mercibeaucoup!»
«Avecplaisir.»
Aprèsavoirpayé,leclientpartitetLucienseretrouvaseuldanssa boutique. Cette jolie boutique branchée de trente mètres carrés qu’il tient depuis presque trois ans. Lorsque les clients entrent pour la première fois dans «L’Ezpirit», ils sont toujours traversés par un léger doute: sont-ils dans une boutique ou dans un club de nuit ? Effectivement,àpeinelaportefranchie,ilsatterrissentdansunesalle illuminée par une lumière bleuâtre légèrement tamisée et ambiancée par de la deep house, à l’image des bars de métropole. Entre deux étagères, les murs sont décorés par des petits cadres illustrant des cocktails de couleurs différentes et des jeunes en train de danser. Enfin, au fond de la salle, se trouvait le comptoir de couleur noire où le boutiquier tenait la caisse. En plus de cet appareil, il y avait un ordinateur et un petit drapeau français ! Bien que le choix de cet agencement soit naturellement lié aux produits en vitrine, il est aussi lié au passé de Lucien. Clubber frustré, Lucien souhaitait recréer une atmosphère de boîte de nuit qu’il n’a que trop peu connue. Enfin, derrière l’image festive du lieu, le propriétaire n’a rien oublié des années sombres. Pour assurer sa sécurité, il planqua sous le comptoir un Glock17 et installa au plafond, au fond à droite une petite caméra dissimulée.Ilregardasesrayonsetdèsqu’ilvitlerayondesbouteilles d’absinthe, le même petit pincement au cœur le toucha. Elles ne se vendent pas très bien. Pourtant, il pourrait prodiguer de nombreux conseils, mais, à part quelques habitués, les clients ne s’y intéressent pas. Absinthe Bourgeois, Muse Verte, le Vieux Pontarlier, la Pontissalienne,laJade1901…sabrigadedeféeverteétaitenplusune de ses fiertés qu’il mettait en avant dans sa vitrine. En effet, sur sa vitrine,onpouvaityvoiruneafficherougeavecunerangéedefées vertes et une inscription dessus: «Absinthe pour tous». Se voulant être un homme de culture, il ne voulait pas d’une affiche beauf, mais raffinéequiprésentedesféesvertesélégantes.Unnouveaucliententra danslemagasin,ilétaitgrand,mince,ilportaitunevestebleumarine, ses cheveux étaient roux, bien coiffés. Il possédait une montre à son poignet droitqui ne laisse guèreplaner de doute sur sabelle situation sociale. Lucien vint vert lui :
«Bonjour Monsieur, que puis-je pour vous?» Avec élégance, ce dernier répondit :
«Bonjour, jerecherche une bouteille derhum blanc et de sirop de sucre de cannes, en avez-vous? Ainsi que des bouteilles de jus d’orange et de pamplemousse.
PourLucien,çasentlePunch:
«Alors les deux premiers, bien évidemment, mais pas les bouteilles de jus. »
«Alorssoit,j’achètevosdeuxbouteilles.»
«Souhaitez-vousunrhumlambdaoudequalitésupérieure?»
«C’est-à-dire?»
«Pour obtenir un goût correct, je vous invite à prendre cette bouteille, la Fleur de Cannes. »
Leclientpritlabouteille,latourna…«Combien?»
«27».
«Vendu.Etlesiropdesucredecanne?»
«10».
Le client sortit son portefeuille, et tira des billets à l’effigie d’un capitaine.
«Commentaviez-vousdevinéquej’allaisfairedupunch?»
«Jeconnaismonmétier.»
«Jevaisàunmariage,onm’ademandéd’assurerleshostilités.»
«Ahoui?»
«Oui, mon neveu se marie avec une jolie Bretonne à Brest. Il est mécanicien pour mobilité électrique et il s’est installé au bout de la Bretagne. La demande y est très forte. Ce sera une occasion pour découvrir la ville, car je n’y suis jamais allé ! »
Lucien est toujours surpris par ces clients qui racontent leur vie sans qu’on leur ait demandé. Cela étant, il annonça :
«Depuis les grands travaux, je vous le conseille, désormais, c’est l’une des villes les plus modernes de France. On la surnomme même le“Pékinbreton”,mêmesileniveauesttrèsloind’égalerlapremière villemondiale.Avecmafemme,justeavantd’avoirnotrefille,nousy avons séjourné une semaine. Un excellent souvenir. »
«Est-il vrai que l’on peut la qualifier comme la capitale de l’architecture archéofuturiste ? »
Lucienréponditavecenthousiasme:
«Ah oui totalement, c’est une véritable merveille! On se croirait dansleBrestduXVIIesiècle,maisaveclatechnologiedeCoruscant. Le boulevard Gambetta est joyau de modernité avec une série d’immeubles interconnectés tout en diffusant l’esprit du terroir. On a l’impression de naviguer entre deux époques superposées, c’est vraimentmagnifique!Parisetlesautresvillesdupaysn’ontpasréussi à se développer de cette façon. »
«Etavez-vousprislefameuxBreizh-Express?»
«Alors, non, mais j’ai pu visiter la gare et je confirme que c’est plutôt sympathique. Sinon, votre neveu y vit depuis combien de temps ? »
«Cela va faire trois ans. À la base, il ne savait pas quoi faire et puis… il s’est trouvé une copine. Il a trouvé un intérêt pour les nouvelles mobilités urbaines. Depuis un an sa boutique tourne plutôt correctement… il essaie de profiter au maximum de sa jeunesse. »
«Encequimeconcerne,j’auraisaiméenprofiter.»
Leclientleregarda,envoyantlestraitsdesonvisage,l’étatdeses mainsetsafaçondesetenir,ildonnaitauboutiquierlapetitetrentaine.
«J’imagine que vous avez dû servir sous le drapeau à votre vingtaine. »
«J’ai rejoint les troupes quand le gouvernement nous a appelés, maisjevoulaism’yengagerdetoutefaçon.Vulamenacequiplanait, il m’était difficile de rester les bras croisés. »
«J’aiservimoiaussi…Maismajeunesseétaitenpartiepassée.Vu votre visage, la Déflagration a dû commencer à votre vingtaine. Mon fils est un peu plus jeune, il a vingt-trois ans. Mais il n’a pas fait d’études, il a arrêté très tôt, ça ne l’intéressait pas ! »
«Effectivement, ça a commencé dès ma vingtaine et j’aurais préféréquecetteguerrecivilen’eûtpaslieu.Cequejeconstate,c’est que dix ans plus tard, tout le monde en parle plus librement. C’était encore un sujet lourd à évoquer il y a trois-quatre ans, mais maintenant…Vousêtesledeuxièmeclientàmentionnercetteépoque aujourd’hui. »
Leclientrépondit:
«Jepensesurtoutquecelaestliéaulivredel’HistorienPierreMilt “Chronique catastrophique”, vous devez en avoir entendu parler, il revient sur cet horrible chapitre, mais il met en lumière certains faits qui sont passés inaperçus au sein de l’opinion. L’avez-vous lu ? »
«J’enaientenduparler,jesaisquec’estlelivredumoment…mais je ne préfère pas pour être honnête. »
«Jepeuxcomprendre.Personnellement,tousceuxquilelisentont pour point commun de parler de la Déflagration plus facilement. Même si le livre pointe de nombreuses zones d’ombre, c’est bien de pouvoir comprendre ce qui s’est passé. Je suis de ceux qui en ont besoin pour avancer», il s’arrêta un instant. Lucien était dubitatif par rapportàcelivre.Troisdecesamisluienontparléetmanifestement, il n’éclaircit pas autant les points d’ombre qui sont restés suspendus.
«En tout cas, profitez du temps que vous avez. Le mariage où je vais sera un nouveau bon souvenir. »
«Etc’esttoutlebienquejevoussouhaite.»
L’échange de sourire s’effaça doucement quand lesdeux hommes entendirentdubruitdehors.Cela…sepassaitàproximitédumagasin, justeàcôté!Danslaboutique,ilsneparvenaientpasàsavoircequ’il se passait alors ils sortirent et… et virent un homme pris à parti par deuxjeunes.Lucienetleclientintervinrentetparvinrentàlesséparer. Le jeune homme agressé, qui est parvenu à prendre ses distances, ne devait même pas avoir vingt-cinq ans. Ses yeux exorbités, sa forte respiration indiquèrent qu’il ne comprenait pas ce qu’il venait de lui arriver et qu’il n’était pas du touthabituéà la situation. Lucien et son client maintenaient à distance les deux agresseurs et tentèrent de les calmer, mais se prirent des insultes. À la fin, ils en étaient à se faire euxaussiagresser,maislesmâtèrent!Aprèsunéchangedecoupde poingquiallarapidementendéfaveurdesvoyous,cesderniersfurent à terre et un peu sonnés. Lucien en profita pour savoir de qui il s’agissait. Quand il vit leur look, leur allure et leur visage… il n’en revint pas! Il n’en avait plus vu depuis… Combien d’années déjà ? Longtemps! Face à lui se présentaient de mauvais ectoplasmes, revenusd’untristepasséqu’ilvoulaitrévoluetenferméàdoubletour. Il n’avait pas réalisé dans le feu de l’action, mais là, il est devant ce fait, à la fois ahurissant et malaisant. Ils venaient de se battre contre deux «orientaux». Ces deux derniers, se relevant difficilement, se prirent à nouveau des coups violents de Lucien. Il reprenait de vieux réflexes qu’il avait cru oubliés depuis longtemps.
Illeurdemanda:
«Pourquoil’avez-vousattaqué?»Unluirépondit:
«Niquetamère!»
Lucienréponditparunviolentcoupdepiedsurleventreetun:
«Répondconnard!»
«Vatefairefoutre!»
Encore deux coups de pied. Le deuxième agresseur se levait et lança un « Fils de pute ». La victime lança :
«Jenelesconnaispas,jenesaispascequ’ilsveulent.»Lucienlui répondit :
«Ilsnevousveulentrien!Ilsvoulaientjusteagresser.»
Unmomentdesilencetombasurlascène.Lavictime,bouleversée, ne parvenait pas à comprendre qu’il a été victime d’une agression gratuite. Se pourrait-il que ces deux cinglés ne voulussent même pas de son argent? Qu’ils l’ont agressé juste parce qu’il existait ? Juste parcequ’ilestpasséaumauvaisendroitaumauvaismoment?Jamais il n’avait vu ces deux jeunes et cela fait quatre ans qu’il a quitté sa Bourgogne natale pour travailler en tant que vendeur de vêtements dans les Hauts-de-Seine. À quel moment, un individu peut se dire :
«Eh vient, on va attaquer quelqu’un ?» Quel intérêt y a-t-il? Les annéesdeguerres’éloignantprogressivement,ilatoutfaitpourvivre dansunenvironnementlemoinsviolentpossible.Ilaçaenhorreuret soudain, tel un châtiment ironique, il vient d’être la cible d’une embuscadegratuite,animéepar laseule volontéde nuire,d’humilier, de détruire. Ces deux agresseurs sont là, mis à terre par deux autres inconnus qui ont su répondre efficacement. Quel diable pouvait contrôler ces deux démons sans doute à peine plus jeunes que lui ? Quelle est leur motivation profonde ?
Les deux racailles se relevèrent, mais l’envie d’en découdre leur était totalement passée. Encore sonnés, ils titubaient et s’en allèrent. Quant à Lucien, il demanda à son client d’appeler la police pour les suivre. Il n’en revenait toujours pas. Leur visage haineux, leurs vêtements beaucoup trop larges, leur dégaine patibulaire… d’où sortent-ils? Des énergumènes de ce type avaient totalement disparu de son quotidien! Par quel sinistre miracle est-il à nouveau possible de les rencontrer à nouveau? Les flics de Rueil-Malmaison n’en reviendrontpascarledépartementestréputécalmedepuislongtemps déjà. En les voyant s’éloigner, Lucien regardait son client échanger avec la police par téléphone… Une patrouille est mobilisée, ils vont lesretrouveretlavictimedevraporterplainte.Lesdeuxtémoinsseront contactés plus tard pour expliquer leur vision de la scène.
Lechocayantfaitsontemps,Lucienetsonclientrevinrentàleurs affaires. Si les sourires s’étaient un peu effacés, cette belle journée et l’ensembledeséchangesnepouvaientêtredurablementtachésparun duo de sauvages. La transaction alcool-argent se fit sous une discussion agréable et Lucien se retrouva à nouveau seul dans son magasin. Avec le soleil qui continuait d’illuminer naturellement la pièce, la musique d’ambiance continuait à accompagner cette après- midi. Il décida de se prendre un café, son dernier de la journée s’il souhaitait pouvoir dormir plus de quatre heures cette nuit. En savourant son péché mignon, il jeta encore un œil au magasin… Pas besoindepasserleménage,toutestencoreproprepourl’instant.Une fois sa tasse vide, il regarda la porte du magasin s’ouvrir et accueillit de l’œil un nouveau client.
Han…hannn…haaannn…Derniercoupdehanche!
Sarah s’arrêta doucement… et reprit progressivement son souffle. Elle regarda chaleureusement Mokhtar Latri avec qui elle venait de termineruneséanceandromaque.Ilétaitbien,ilsouriaitetcontemplait sa partenaire sexuelle. Sarah sortit du lit avec élégance et se dirigea verslatableaufonddelasallequiluiservaitdebureaudetravail.Elle pritplusieurspapiersposésdessus.Mokhtaraffichaunsourireaucoin, ilsavaitcequ’elleallaitluidemander.Ilnepouvaitdétachersesyeux de cette femme magnifique. Son corps fin, musclé, ses fesses rondes, sa belle poitrine… elle revint vers lui avec les
papiersetunstyloetavecunsourireluiinjecta:
«Fautsigner!»
Mokhtarpritlesfeuilles,lessignapuislesrendit.
«Ettevoilàtranquillepourlesquatreprochainsmois.»
«Mercibeaucoup.»
Sarah caressalevisagedeMokhtar,detouslespoliciersdelaFoi, c’étaitundestrèsraresàentretenirsabarbeenlagardantfine.C’était un beau mec: crâne rasé, visage carré, musclé, il avait cette allure orientalequiattirelesregardsetlescœurs.Mêmesielleétaitdel’autre côtédelabarricade,Sarahcultivaitunelégèresympathieàsonégard. ElleserhabillaetMokhtarfitdemême.Elleenfilaunepetitejupenoire encuir,uncrop-topdelamêmecouleurlaissantenévidencesapoitrine et des sandales croisées, tout aussi noires. Pour lui, un uniforme vert mixant un style taliban avec une veste et des rangers qui rappelle les arméesoccidentales.Ilmitsonrubansurlatêteet,surtout,sonbrassard à son bras droit. Ce brassard vert, sur lequel est dessiné un grand croissantdeluneaccompagnédedeuxsabrescroisésetl’inscription «Brigade»enarabe,decouleurblanc,estportéparlespoliciersdela FoidukhalifatduNord.IlsaluaSarahetquittalachambreparlaporte dederrière,cellesqueprennentlesnotablesafindenepasêtrereconnus par le public. Il faut dire qu’en tant que commissaire d’une ville du khalifatduNord,ildoitgarderuneréputationintacte.L’adultèreesttrès sévèrement puni. Une fois dans la rue, il marcha d’un pas très rapide aveclatêtebaissée.Cen’estqu’unefoisqu’ilfutsuffisammentéloigné dubâtimentdeperdition,qu’ilsouffla…Lemoindrefauxpasetc’est fini! Le Très Bon Khalife AbdlülmecidIII a déclaré récemment, du hautdeses100kilos,qu’unepurgedel’administrationauralieupourse débarrasserdesmauvaisbergers.Engros,celuiquinepratiquepasles loisreligieusescommeilsedoitseraéjecté…etpasserauntrèsmauvais moment!Etlaquestionn’estpasdesavoirquirespectelesrègles,car laréponseestzéro,maisjusqu’oùiralatoléranceduCommandeur?Et là,c’estunezonesombre.DepuisqueleKhalifatduNordexiste,laloi adûêtrerigoureusementrespectéependant…septmois.Parlasuite,la société, trop impactée par la décadence occidentale, est revenue à ses démons. Même lui n’a pas réussi à s’en débarrasser. Les musulmans exemplaires sont constamment mis en avant, mais le succès est très limité. Le Khalife lui-même n’est pas le meilleur des pratiquants. Depuiscetteannonce,uneambianceabominables’estinstalléeausein del’administration,toutlemondes’espionnepourrécupérerlepostede l’autre.Çadevientsérieusementpénible…etcettesituationvaencore durerdesmois!Laseulebonnenouvelle,c’estqueletravaildemaintien de l’ordre avance plus efficacement. Chacun veut montrer qu’il est indispensableaurégimeetilyatroisjours,lesautoritésontdécouvert 400litres d’alcool, passés clandestinement au sein du territoire. Une telle prise ne s’était plus vue depuis les toutes premières années du khalifat. Il y a eu aussi des arrestations immenses d’un groupe de voleurs. Mokhtar tente aussi defaire du zèle dans ses enquêtes !
Sarahestsortieparl’autreporte,cellequimèneàsonétablissement. Elledescenditlesescaliersenpiteuxétatd’oùelleentendaitunedouce musiqueorientaleaccompagnéederiresdiscretsetautresjouissances. Arrivéeenbas,ellepoussalaporteetentradanslegrandsalon.Ils’agit de la salle centrale où se réunissent les convives et ses filles. Il y a plusieurs canapés, occupés par des couples, le long des murs, l’ambianceesttrèstamisée,destableaux érotiquessontaccrochéssur lesmurs.Enfin,unbarsituéaufonddelasalledistribuedescocktails alcoolisés. Bienvenue à «L’Oasis», la maison close de Sarah! Elle tenait le lieu d’une main de fer et le faisait savoir! À peine arrivée, Yasmine,sonéterneletfidèlebrasdroit,unetrèsbellefemmedetrente et un an aux longs cheveux noirs, vient la voir. Sarah lui passa les papiers signés par Mokhtar qui assurait à l’établissement sa légalité. Pourfairesimple,cespapiersfontde«L’Oasis»unsalondemassage certifié«licite».Decefait,lesautoritésnepeuventpaslefermermême si elles savent parfaitement ce qu’il s’y passe! Mais cette légalité découle directement des parties de jambe en l’air entre Sarah et les représentantsdelaloi,commeMokhtarLatri,cequilacondamneàune constanteprécarité.«Passe-moitacuisse,j’oublieraitespéchés»,voici la véritable devise de ce régime. Elle naviguait entre les couples adultères, les alcoolisés et les droguésdansune ambiance enfumée et mélodieuse en direction d’une porte qui mène au sous-sol… À son passage,leshommessetenaientàcarreau,lesemployéesenajoutaient une couche et les serveurs accéléraient, elle était la reine en son bâtiment.Elleouvrelaporte,descendlesescaliers etfutraviedevoir un homme amoché attaché à une chaise! Les trois employées qui maniaientdesoutilsdetortureseredressèrentetluifirentfacecomme des soldats face à leur colonel. Elle jeta un coup d’œil au type en question: un pull troué, une grosse et longue barbe, une dégaine patibulaire,devieillescicatricesauvisage…Unquidam!Ilareçudes coups sur la tronche, mais manifestement, il ne lâche pas le morceau facilement.
«A-t-ilavoué?»demandaSarah.
«Non!»réponditunedesfilles.
Elle s’approcha tranquillement de la table où étaient posés les joujoux de torture. Entre une paire de ciseaux, un fil très fin, un revolver et un tournevis, elle prit le fil très fin. Ensuite, en se mettant trèscalmementderrièreleprisonnier,ellepassalefilautourdeson cou, le serra et lui fit une simulation d’étranglement. Le prisonnier essayait de se débattre, mais sans succès. Il essayait, essayait, puis, touts’arrêta…IlvitSarahdevantlui!Elleavaitsatêtetrèsprèsdela sienne comme si elle allait l’embrasser. À son oreille droite, elle lui murmura une question :
«Où…as-tu…planqué…monfric?»Ilréponditviolemment:
«Vachier!»
Pasplusvexéequeça,ellereprit:
«Turisquestaviepourdublé?»
«Ettoi,chienne,turisquesl’enfer!»
«… L’argent que tu as pris est illicite. » Elle approcha sa bouche de son oreille et lui chuchota « Tu me rejoindras si tu le gardes. »
«Vachier!»
Elle lui mit une énorme gifle puis, se mis à nouveau derrière. Une nouvelleséanced’étranglementreprit.Pendantuntemps,leprisonnier étaitpersuadéquececoupluiserafataleetenunflash,ilrevittoutesa vie,sajeunessedevoyouàIvry,sesraresvacancesenAlgérie,sesdeals de drogue, ses cambriolages, son passage rapide en prison, la guerre civile,puisleretouraubanditisme.Auxportesdelamort,ilréalisequ’il n’ajamaisréussiàs’intégrerdanslesdeuxsociétésqu’ilaconnueset qu’iln’auraitjamais25ans.Soudain,touts’arrête!Sarahétaitdevant lui et comptait à nouveau le cuisiner, mais une autre femme entra bruyamment.C’étaitInès,unedesplusanciennesemployéesdeSarah: un peu en surpoids, cheveux bouclés, teint très mat :
«Sarah?»
Cettedernièreseretourna.
«OuiInès?»
«On a retrouvé le magot, il était dans un entrepôt à 20 minutes à pied d’ici, le sac était à côté d’une petite pile de cannabis. Il semblait abandonné. » Elle lui présenta un gros sac marron rempli de billets.
Sarahregardalesbilletspuisànouveaulejeunevoyouattaché.
«Tuasfaittoncouptoutseul?»
«Yessalope.»
Sarahétaitstupéfaite.Commentcetabrutiaréussiàtrouverlafaille dans sa forteresse ?
«Tun’as…aucuncomplice?»
«Nan!Jesuismonseulpatron!»
Sarahregardaànouveaulesacavecsonargentetallaverslatable à jouet pour poser son outil. Elle s’exclama joyeusement :
«Bon,ehbien,voiciuneaffairederéglée!»
Ensuite,elle pritleflingue,lechargeaetmituneballedansla tête du malfrat.
BLAM!
Ellelereposadélicatement,sortitdelasalletranquillementsousle regard admiratif de ses employées et retourna dansle salon. La scène du sous-sol ne semblait pas avoir été entendue par les convives car l’ambianceétaitsimilaireàcelledetoutàl’heure,c’est-à-dire,bonne pourlesaffaires.Entrelesmafieux,leshautsfonctionnaires;certains policiers…sesemployéesavaientdequoibossertoutelanuit.Ellese posaaubaretdemandauncocktailAzraq,unesortedeBlueLagonde piètre qualité, mais qui attaquait bien, puis surveillait le bon déroulement du business. Dès qu’une de ses employées passa devant elle, celle-ci leva la main droite en disant «Madame», c’était un protocole dont Sarah est extrêmement sourcilleuse, car le moindre relâche provoquera la chute de la maison. La stricte obéissance des règles est une des clés de survie dans son milieu. Elle y est connue pour être dure, mais de nombreuses personnes comptent sur elle pour subvenir à leurs besoins, elle ne peut pas faire preuve de laxisme, les conséquencesseraientdramatiquespourdenombreusespersonnes.La présence de certains clients appartenant à la haute société en train de se la couler douce avec ses filles renforça sa rancœur envers le khalifat!Àsesyeux,cettehypocrisieestuneabominationabsolue.En les écartant de leur prétendu «droit chemin», Sarah espère secrètement voire l’édifice s’écrouler sur lui-même. Elle aimerait se dire qu’elle fut une artisane de la mort de cette tyrannie soi-disant religieuse.Sespenséesluirappelèrentunerumeurpersistante:leTrès Bon Khalife serait malade et n’en aurait plus pour longtemps. Si elle n’ycroitpasbeaucoup,elleesttoutdemêmeinquièteparl’éventualité de le voir remplacer par le Grand Vizir, Abdallah Elbat, un type particulièrementcruel,sadiqueet,surtout,illuminé…Encore,avecle khalifeAbdülmecidIII,unsemblantd’ordreestmaintenu,ilyaune pseudo-entente entre les gardiens de l’ordre et le monde illégal. Mais aveccetElbat,rienneseraplussûr.Ilferapreuved’unislamismeultra rigoriste, mettra au sommet tous les cinglés de service et voudra étendre le Khalifat en provoquant le reste de la France. Alors, certes, ce sera la fin du Khalifat du Nord, mais au prix de combien de vies ? Etsurtout,commentsafuturepolitiquestrictesurleplandelamorale s’appliquera? Elle, elle finira pendue, ainsi que toutes ses pauvres employées,celanefaitaucundoute.Tousceuxquivoudrontracheter leurs torts ne feront pas dans la dentelle… Ces pensées l’inquiétaient et elle n’était plus concentrée. La musique orientale et l’ambiance tamisée la guidaient vers le pays de songes, le seul endroit où elle pouvait encore s’évader. Elle demanda à Yasmine d’assurer la fin de la soirée puis elle monta dans sa chambre. Cette pièce de 11mètres carrés, située au dernier étage de l’immeuble, était le seul endroit où elle se sentait vraiment bien. Il y avait une petite fenêtre, un lit, deux places et un placard. Sous son lit se trouvait un fusil à pompe et un coffreavecdel’argentaucasoù...Enplusdesesaffaires,sonplacard cachait un petit coffre avec une multitude de faux papiers. Son but secret, si jamais elle y arrive, est de disposer de documents suffisammentsolidespourquitterleKhalifatduNord.Cesdocuments coûtent cher, mais pour la liberté, il faut savoir y mettre le prix !
Elle se réveilla le lendemain et sa chambre était inondée par le soleil.Chaquematin,ellerêvassaitdanssonlitd’uneviequin’estpas la sienne, des erreurs qu’elle n’aurait pas dû commettre, des autres solutions qu’elle avait eues devant elle… puis elle se lève, fait sa toilette, s’habille légèrement, elle regarde l’heure, 11 h 22, c’est dans ses habitudes, puis sort de sa chambre. Elle se dirige d’un pas léger vers la cuisine commune, une vaste salle équipée d’une cuisine des années2020. Elle a toujours voulu que les repas se fassent en communautéafindeconsoliderlegroupe.Lesrepassontfrugauxdans sa maison. Effectivement, la nourriture n’est pas toujours abondante au sein du Khalifat et il faut assouvir les visiteurs, il est donc nécessairepourSarahdesavoirquiconsommequoi.À«L’Oasis»,la journéecommenceengénéralà11hdumatin :lesemployéesse réveillent, un brunch léger est préparé, Sarah leur résume les événements d’hier soir, adresse les bons et les mauvais points à ses employées,donnelesdernièresactualitésdelamaisonetdukhalifat… quand elle en reçoit, des nouvelles qui, évidemment, sont toutes non officielles.Petitàpetit,lesemployéesviennentàlacuisine.Cettesalle esttoujoursnettoyéeavantlafermeturedeslieux,c’est-à-direà4heures du matin. La propreté est fondamentale, aussi bien pour les employées que pour les clients. Une fois que les filles sont présentes, qu’elles ont devant elles leur café, thé, lait, deux-trois fruits et un biscuit, Sarah finit par prendre la parole. Elle compte les effectifs, 1, 2, 3… 11, il manque trois filles… tant pis pour elles, les autres leur résumeront le speech. Les paroles de Sarah brisaient le silence des employées. C’était le sermon matinal.
«Bonjouràtoutes,pourcommencer,nousavonsfaitdubontravail hiersoir,aucunsignalementparticulier,lesclientssontsatisfaits,vous êtestoutesefficaces,franchement,c’estdupropre!Commecertaines ontpulevoir,lecommissaireMokhtarLatriarenouveléla“légalité”de notreétablissement.Donc,dececôtéaussi,noussommesdanslevert. Sinon, une maison concurrente, “Orientalia” pour ne pas la nommer, vientdefairefaillite!Leurbusinessnemarchaitplus,lamaisonaperdu sa “légalité”,les employées serontflagelléespuis mariéesàdespoliciers et la patronne, Aya, sera pendue dans trois jours, on peut se réjouir», lesemployéesapplaudirent.«Sinon,jen’airiend’autreàvousdireen particulier, on continue comme ça et on esquive les erreurs. Vous pourrez rapporter tout ça à Aziza, Douria et Leila. »
Unsilencegênéapparuauseindel’équipe.Sarahréagit:
«…Hum,oui?»
Aucuneréponse.Sarahregardaunedesrarespersonnesenquielle a totalement confiance.
«Yasmine,crachelemorceau!»
Enavalantsasalive,encherchantlesmotsjustes,cettedernièrese dandinait.
«Hum… Sarah, je voulais t’en parler hier soir… Mais entre Mokhtar,levoleuretmonclient…Jen’aipaspu.Aziza,Douriaet Leilasontintrouvablesdepuishier.Ellesontdisparudesradarshierà 16 heures, c’était la dernière fois qu’on les a vues. »
«QUOI? Mais où sont-elles? Enfin… quelqu’un a une idée ?» Yasmine prit une inspiration.
«Alors…hum…non,onn’ensaitrien!»Sarahluijetaunregard sévère!Ellecontinuasuruntonplusbas:«Onn’estvraimentpassûr… On apensé… àunemaison concurrente, maiscen’est pas certain.»
Farah,unedesemployéesdeSarah,levalamain.Sarahluilança:
«Jet’écoute!»
«C… ça n’a peut-être rien à voir, mais j’ai vu Iliah, de la maison deSalmaSaab,traînerdanslequartierdepuisunesemaine.Jenesais pas ce qu’elle faisait là… peut-être… les a-t-elle convaincus de les rejoindre ? Mais vraiment, il n’y a aucune preuv… »
«AHOUAIS,mais çame semblelescénarioleplusprobable !Je vais aller les voir direct et je ramènerais ces trois déserteuses à coup de pompe au cul ! Cette pute de Salma va me rendre illico mes employées! Mais pour qui elle se prend putain? Qui est-elle? Une salope de première! Une ramasse-merde qui n’a pas été capable de garder son mari, planquée dans son appartement pendant la guerre à préparer les casse-croûte, pendant que j’étais en train de tirer sur la police avec ma kalach ! Une poubelle sur patte ! »
Sarah était furieuse! La fidélité, la communauté et la loyauté étaient des socles fondamentaux pour survivre dans ce monde extrêmement hostile, il n’y avait donc pas de place pour la trahison. Faceàcetemportementtrèssoudain,lesautresemployéesnedisaient rien,quandellepartaitdanssafureur,l’instinctdesurvieencourageait à ne surtout pas intervenir. Au bout de quelques années, elles étaient habituéesàcegenredescène. Farahavaitpourtantbien mentionnéle faitquerienn’étaitsûr,quecen’étaitqu’unscénario.MaisSarahdoit gérer beaucoup d’affaires et cette immense pression engendrée la pousse parfois à réagir au quart de tour ! Elle retourna dans sa chambre,s’habilla,pritdeuxarmesavecelleetallavoirsaplusgrande rivale !
«19h, vous êtes bien sur InterOeil, la radio de demain, bonsoir à tous! Ce soir, nous allons vous parler d’une multitude de sujets passionnants. Pour commencer, nous allons parler du treelove avec MC01, l’amour arboricolequi devient deplus en plus à la mode dans lasociété.Ensuite,nousallonsnousintéresserEternaeFestif,ceprojet gouvernementalquiconsisteàfinancerdesindividuspourfairelafête sansarrêtet,enfin,nousallonsavoirunsuperdébatentreleprofesseur Xonasetleconseillerd’Arianne,BOox,surl’immortalité.Ilest 19 h 02, vous êtes bien sûr InterOeil. »
«EtnousaccueillonsMC01,MC01bonsoir!»
«BonsoirV3I!»
«Ce soir, tuvas nous parler de cettenouvelle mode qui touche un nombre important de jeunes, le treelove, alors MC01, qu’est-ce que c’est ? »
«C’est une nouvelle pratique sexuelle! Pour commencer, cette mode consistait à faire l’amour exclusivement sur les arbres, comme au temps de nos ancêtres les singes. Le but de cette pratique était de revenir en communion avec la nature et c’est pour cela que la population touchée était exclusivement urbaine. Et puis, au fur à mesure, ces relations sexuelles, qui se pratiquaient à deux pour rester en équilibre sur les branches, ont évolué en plan à trois. »
«Etcommenttrouvent-ilsl’équilibre?»
«C’esttrèssimple,latroisièmepersonne,c’estl’arbre!Enfait,les treelovers ontréaliséque leurpratiquesexuelle arboricoleétaitliéeà leur attirance aux arbres. Donc, maintenant, ils revendiquent que les arbres sont des personnes et qu’il est possible d’en être attiré sexuellement. »
«Etquelestl’objectifdecettepratiquemoderne?»
«Renouer corps et âme avec la nature! En s’accouplant dans les arbresetaveclesarbres,lestreelovers veulentannoncerleuramourà DameNature.Ilsveulenttémoignerleurattachementàlaplanète.Pour certains, déclarer leur amour aux arbres permettrait de fusionner leur âme avec eux. »
«EhbienmerciMC01pourcesinformations,nousallonsmarquer une pause en écoutant la nouvelle musique du chanteur Sssissé,
«Ramènelaliqueur».
La musique qui passa à la radio appartient à un genre musical à la mode depuis deux ans. Il faut imaginer deux instruments : un instrumentclassique(violon,piano,trompette…)etunsonproduitpar uneintelligenceartificiellequi,ensemble,créentunsonsourd,longet un peu monotone. Et une seule phrase est répétée pendant deux minutes. Dans ce morceau, la phrase est «Ramène la liqueur», d’où le titre. La finalité de ce genre est de diffuser la sensation d’un écoulement du temps plus lent, que tout l’univers marche au ralenti.
«Et vous êtes bien sûr InterOeil, la radio de demain qui garde un œil sans interruption sur le monde moderne. Après avoir échangé sur lestreelovers,nousallonsparlerdecettenouvelleprofessionsoutenue parlegouvernement:EternaeFestif.Etc’estFuo77iquivas’ycoller, Fuo77i, bonsoir. »
«BonsoirV3I!»
«Tu vas nous parler d’Eternae Festif qui est un projet gouvernemental pour renforcer le bien-être des citoyens. L’idée de baseestdecréerdeszonesoùlafêtenes’arrêtejamais,Fuo77i,peux-tu nous en dire plus ? »
«C’est un vieux projet qui est devenu réalité. Notre bien-aimée Arianne a identifiéque certaines personnesn’arrivaientpasà trouver dutravail.Soitparcequ’ilssesontopposésàlaviequelesIAleuront tracée à leur naissance, soit parce qu’ils ont connu une erreur de parcours,soitparcequ’ilsn’étaientpasassezcompétentspourleposte quileurétaitdestiné.Donc,pournepasleslaissererrerdanslenéant, ils ont été embauchés par l’État en tant que festivaliers. »
«Etquelestcemétier?»
«Il s’agit de faire la fête sans arrêt! Ils obtiennentdes contrats de 45h par semaine, dans un établissement et à des horaires très variables.L’objectifestdemettreenplaceauseindesvillesdeszones Good Vibes en continu pour les autres forces de production de la société. »
«C’est fantastique, on arrive à placer les normes en liant travail, plaisir et utilité. »
«Exactement, ces zones permettent aux forces de production de trouver une zone festive à n’importe quelle heure, à n’importe quel endroit pour se vider la tête, oublier le monde et ne faire plus qu’un avec la masse. »
«Ehbien,merciFuo77idenousrappelerl’incalculableingéniosité d’Arianneetlacompétencedugouvernementpourmettreenplaceses décisions. Et maintenant, nous allons passer à l’Échange cordial du soir, il 19 h 27, vous êtes sur InterOeil ! »
«Et maintenant, nous allons échanger sur une question de plus en plus bouillante dans notre société: l’immortalité! Effectivement, le conseilscientifiqueestquasimentsûrd’avoirtrouvélesélémentspour retarder indéfiniment les organes pourrissants des hommes et de les renouveler à chaque fois. À terme, il sera possible pour les individus devivre400,600voire1000ansouplus.Pourdisposerd’unéchange bienveillant, nous avons le professeur émérite, Xonas, bonsoir Professeur. »
«BonsoirV3I!Mercipourvotreinvitation.»
«Et nous avons BOox, un conseiller d’Arianne qui siège au parlement depuis le début de la République Progressiste française. Bonsoir Conseiller. »
«Bonsoir!»
«Alors, pour nos auditeurs et téléspectateurs, nous allons vous présenter très rapidement, Professeur Xonas, vous faites partie du Conseil Scientifique de la République Progressiste française, vous informez fréquemment Arianne et le gouvernement sur l’actualité scientifiquedumondeetlesopportunitésqu’ellepeutapporterpourle progrès.Vousavezécrittrois