Les clous du cercueil - Julien Marot - E-Book

Les clous du cercueil E-Book

Julien Marot

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Beschreibung

Le punk est mort. Son cadavre est étendu dans une flaque de bière et d’urine, sur le plancher minable de son préfabriqué crasseux. Manque de pot : c’est moi qui découvre le corps en premier, ou à ce qu’il semble. C’est con. Pour une fois qu’je venais prendre de ses nouvelles. Faut dire qu’on n’entend plus tellement parler d’lui. J’avais bien failli l’oublier, jusqu’à ce que j’me remémore quelques souvenirs de jeunesse. Donc me voilà devant sa porte que j’ai dû défoncer parce qu’i’ répondait pas, que ça puait en diable et surtout qu’elle était fermée. Or il la fermait jamais, sa porte, et sa gueule non plus d’ailleurs. J’ai flairé l’entourloupe. J’suis rentré. J’aurais dû m’casser.


À PROPOS DE L'AUTEUR

Julien Marot est originaire d’Écaussinnes. C’est dans ce microcosme de la musique alternative qu’il a découvert l’enivrement des concerts. Il a beaucoup traîné devant MTV et YouTube mais a par ailleurs étudié les lettres romanes.

Et aujourd’hui, il se demande s’il était si mauvais punk parce qu’il étudiait ses cours ou s’il était si mauvais étudiant parce qu’il passait ses journées à écouter du punk.

Il a précédemment publié le récit "Seize quartiers de noblesse", sur l’héritage familial.



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Seitenzahl: 54

Veröffentlichungsjahr: 2024

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Toute reproduction, adaptation et traduction, intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur ou ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Ces représentations ou reproductions, par quelque procédé que ce soit, constitueraient donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

Tous droits réservés.

© Les Éditions Panthère 2023 – CC asbl – Liège/Belgique

www.editions-panthere.com

 

 

Dépôt légal : D/2023/14.540/24

ISBN : 978-2-931212-12-7

Couverture : Philippe Sombreval   

Julien MAROT

 

 

 

 

 

 

 

LES CLOUS DU CERCUEIL

 

Nouvelle

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Éditions Panthère

 

 

 

 

 

 

À l’équipe du Streetlive Festival, et parmi eux Nico, grâce à qui la musique a fait irruption dans ma vie.

Aux animateurs pio, et parmi eux Graig,

qui a allié pour toujours dans mes souvenirs

soleil et disto.

Aux membres d’Arc-en-Musique, et parmi eux Piet, qui est parvenu à faire venir les plus audacieux

des musiciens jusque dans nos campagnes.

 

 

 

 

Hep !

Cette nouvelle sur la musique

est à lire sur de la musique !

 

En scannant le QR code ci-dessous,

tu trouveras sur la chaîne YouTube

des Éditions Panthère une vidéo

dans laquelle tu auras accès à une playlist

qui reprend le meilleur des groupes cités ici,

dans leur ordre d'apparition.

 

Son nom : les clous du cercueil, évidemment.

 

 

 

Avril

 

Le punk est mort. Son cadavre est étendu dans une flaque de bière et d’urine, sur le plancher minable de son préfabriqué crasseux. Manque de pot : c’est moi qui découvre le corps en premier, ou à ce qu’il semble. C’est con. Pour une fois qu’je venais prendre de ses nouvelles. J’vais voir ma grand-mère plus souvent. Faut dire qu’on n’entend plus tellement parler d’lui. J’avais bien failli l’oublier, jusqu’à ce que j’me remémore quelques souvenirs de jeunesse. Donc me voilà devant sa porte, que j’ai dû défoncer parce qu’i’répondait pas, que ça puait en diable et surtout qu’elle était fermée. Or il la fermait jamais, sa porte, et sa gueule non plus d’ailleurs. J’ai flairé l’entourloupe. J’suis rentré. J’aurais dû m’casser. Suspect numéro un, voilà c’qu’est écrit sur ma tronche maintenant. Me reste plus qu’à trouver le responsable avant qu’on m’tombe dessus. J’ai ma p’tite idée. J’fonce voir une connaissance.

Dans la voiture, j’repense à cette belle enflure, ma première piste pour débusquer le coupable. Blondasse comme un ange, jean troué et sourire mordant. Une beauté comme c’est pas permis. Moi, la beauté, c’est comme la clope et l’alcool, ça m’a toujours fasciné. Du coup, j’m’en méfie… jamais assez. Le punk a eu plusieurs aventures avec des gonzesses mais celle-là était contre nature. On aurait cru un papy du rock avec sa midinette.

Moi, je préférais les anciennes, de vraies gonzesses avec des couilles bien accrochées. Je pense à Brody Dalle, emblème des Distillers. Violente, certes, sauvage et probablement revancharde, elle aimait trop le punk pour le laisser pourrir dans sa pisse. Si elle l’avait tué, elle aurait mutilé son corps ensuite, par respect.

Dans la série des nonnettes du punk, y avait aussi Liz, la bombe d’énergie de Deadline, punkette élevée au rang de sainte dans les milieux skin. Elle ne pouvait pas non plus être suspectée : dans l’incivilité, l’intégrité même. Aucune chance qu’elle porte atteinte à un antisocial comme le punk.

Il y avait aussi eu des folles furieuses, qui auraient pu se laisser aller à une haine dévastatrice, portées par l’esprit de groupe. Parmi elles, en meilleure place, Fabulous Disaster, mais il n’était pas envisageable qu’elles aient commis ce crime : beaucoup trop gentilles derrière leur grosse voix et leur grosse disto. Nan, moi, j’avais en tête un vrai danger pour ce vieux punk, une louve dans des habits de louve, elle s’appelait Avril et arrivait avec son armée de producteurs.

Les potes de Weezer avaient pourtant prévenu : monter à Beverly Hills, c’était une déchéance. La foule, le succès, les cocktails dans les piscines, c’était pas pour lui.

Avant de connaître cette garce, le punk, c’était le mouvement des marginaux. Loosers de tous pays, unissez-vous ! Ç’a évidemment commencé avec les Pistols; parmi les ratés, l’élite. Depuis, la défaite, c’était toujours resté une valeur commune, partagée par tous les camps et toutes les générations. Le mouvement a vite pris une ampleur politique là où il était né, porté par tous les derniers de classe : les groupes punks, c’étaient les héros des moins que rien, comme les Clash qui représentaient leur quartier, ses misères, ses injustices, ses descentes de flics. Aux States, la mouvance populaire était assumée par les Ramones. Mais même plus tard, quand le punk s’est mêlé à la jeunesse bourgeoise, il a gardé son caractère rebelle, son mépris hautain pour le succès. On se souvient du froid dédain de Nada Surf pour les héros du stade et leurs groupies, ces populaires qui écrasent les nerds à l’école.

Autant dire qu’avec tous ces soutiens apportés à une jeunesse en mal de représentativité et d’espoir, le punk aurait dû être le grand mouvement contestataire, internationaliste qui marquerait la fin du XXe. Dans cette fièvre, les majors de la musique ne faisaient pas peur au punk. Avril, cette poupée de cire, ne semblait qu’une disciple de plus à rejoindre les copains. Ce fut un petit pas pour l’industrie du disque, un grand saut dans le vide pour le punk. La première chanson de la jeune fille laissait plutôt présager une belle collaboration entre elle et le punk. Il l’a adoptée. Il ne s’est pas assez méfié.

Je suis devant la baraque d’Avril, loin du trou redneck où pourrit maintenant le corps du punk dans sa veste en cuir. Je sonne au portail d’entrée. J’me tiens du mieux qu’je peux parce que j’suis surveillé par une batterie d’caméras. Je r’pense à la suite de l’histoire. Le single suivant de la p’tite, c’était à propos d’un skateur. Le clip surfait sur la mythologie punk : des figures en skate, une manif, une voiture vandalisée sur laquelle sautait la chanteuse, tout cela était beau comme un no future