Mario Queen - Tome 1 - Marian Ravasco - E-Book

Mario Queen - Tome 1 E-Book

Marian Ravasco

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Beschreibung

Mario Queen, lieutenant de police à Manhattan, se retrouve au cœur d’une enquête qui menace de détruire sa vie personnelle et professionnelle. Partagé entre son devoir et sa famille, il est contraint de faire face à la tragique mort de son père, lui aussi lieutenant, assassiné dans des circonstances mystérieuses. Plongé dans une investigation qui le mène droit vers une organisation criminelle redoutable, « Le Spectre », Mario se retrouve pris dans un tourbillon de secrets, de trahisons et de menaces. Dans ce monde sans pitié, chaque révélation pourrait bouleverser son avenir et sa famille, le forçant à affronter ses pires démons.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Marian Ravasco, auteur de romans policiers, s’inspire d’Agatha Christie pour créer des intrigues captivantes. Architecte de formation, il excelle dans l’art du détail pour construire des récits captivants où chaque indice est crucial.

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Seitenzahl: 336

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Marian Ravasco

Mario Queen

Tome I

L’ombre du Spectre

Roman

© Lys Bleu Éditions – Marian Ravasco

ISBN : 979-10-422-7129-9

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Chapitre 1

L’appel du devoir

L’été avait transformé Brooklyn en un four géant, où la chaleur semblait émaner des bâtiments eux-mêmes. Même à cette heure matinale, l’air était déjà saturé d’humidité, chargé de promesses d’une nouvelle journée de canicule.

Mario Queen se réveilla en sursaut, le cœur battant, comme s’il venait de fuir un danger invisible. Les souvenirs qui le hantaient depuis presque trois mois lui firent revivre l’épreuve où son coéquipier se fit tuer dans le braquage d’une bijouterie à Manhattan. La douleur dans son épaule gauche lui rappela que ce cauchemar était une triste vérité. Lui, avait cependant eu la chance de prendre une balle ailleurs que dans la tête.

La sueur perlait sur son corps ferme et musclé. Chaque goutte d’eau glissait le long de ses bras tatoués, soulignait les muscles saillants de son torse et de ses épaules, sculptés par des heures passées à soulever des poids et à courir sur le bitume de Brooklyn. Il se redressa dans son lit, le souffle court, cherchant à chasser les vestiges de cette vision cauchemardesque. Les lumières de la ville scintillaient à travers les rideaux, projetant des ombres dans la pièce, mais Mario, homme de caractère, se força à se concentrer sur la réalité. Les nuits comme celle-ci, bien qu’incommodantes, n’étaient qu’une petite part de la vie de celui qui, chaque jour, affrontait les ténèbres du monde extérieur.

Avec un soupir, il se leva de son lit, se frotta les yeux et se dirigea vers la salle de bains. L’eau froide qu’il laissa couler sur son corps ne parvint pas à effacer les ombres de son esprit. Il se tenait là, respirant profondément, essayant de chasser les fantômes de la nuit, lorsqu’un tintement insistant brisa le silence. Son téléphone portable sonnait sur le comptoir de la cuisine.

Le loft de Mario, situé dans un coin tranquille de Brooklyn, reflétait son goût pour la simplicité. De taille modeste, il s’ouvrait sur une grande pièce centrale aux murs de briques apparentes et aux hauts plafonds ornés de poutres en métal brut. Un canapé en cuir brun, une table basse en bois récupéré, et une étagère en métal avec des vinyles et souvenirs donnaient un caractère personnel à l’espace. La cuisine ouverte, compacte, mais bien équipée, apportait de la chaleur à l’ambiance industrielle. La chambre, séparée par une porte coulissante, était simple et fonctionnelle, avec un lit king size et une commode en bois brut. Le loft, épuré et authentique, était un refuge pour Mario, un lieu où il pouvait se ressourcer.

Il était déjà passé 6 heures du matin. Mario attrapa son téléphone et décrocha, son instinct lui disant que ce coup de fil annonçait une nouvelle épreuve. La voix familière de son supérieur résonna dans le combiné.

— Bonjour, Mario, c’est Judy. Désolé pour ce réveil bien matinal.

— Capitaine… Aucun problème j’étais déjà réveillé. Qu’est-ce que je peux faire pour toi ?

— On a un 10-54 au 778 Park avenue et 73e. J’ai besoin de toi sur les lieux.

— Je pars tout de suite, dit Mario en enfilant son jean.

— Mario…, dit Judy d’une voix plus calme.

— Oui ? Mario s’interrompit un instant.

— Je suis contente que tu sois de retour, tu nous as manqué.

Mario raccrocha, un léger sourire aux lèvres, touché par les paroles de son amie Judy Charlston. Ils avaient tissé de forts liens d’amitié dès l’académie de Police où ils se sont rencontrés. Puis, l’ambition de Judy et sa volonté d’accéder à un plus haut poste lui ont permis de devenir capitaine du commissariat de Manhattan, devenant ainsi la supérieure de Mario. Cela mit un peu de distance entre eux, mais la confiance et le respect n’ont jamais défailli.

Sa convalescence étant enfin terminée, Mario ressentait un mélange d’enthousiasme et de fébrilité à l’idée de reprendre aujourd’hui son poste de lieutenant au commissariat de Manhattan. Après plusieurs mois d’immobilité et de réhabilitation, la perspective de retrouver son équipe et de replonger dans le tumulte de la vie policière le remplissait d’une énergie renouvelée. Chaque matin passé à l’hôpital, où il observait la routine des agents de police à travers la fenêtre, avait renforcé sa détermination à revenir plus fort.

Mario se dirigea vers un tiroir de sa commode. La main tremblante à l’approche de la poignée, il dévoila son arme rangée ici depuis son retour de l’hôpital. Avec une lenteur mesurée, il saisit le holster et le souleva, sentant le poids familier du cuir usé, mais robuste entre ses doigts. Il l’ajusta d’abord sur son épaule droite, laissant les sangles glisser le long de son dos et de son torse. Puis, il le fit passer sur son épaule gauche, veillant à ce que la sangle s’aligne parfaitement sur sa clavicule, comme il en avait l’habitude. Étrangement, le poids du holster venait apaiser la douleur de la blessure. Le cuir se plaquait confortablement contre sa chemise bleu clair, épousant les contours de son corps comme une seconde peau. Mario vérifia ensuite la position du revolver, s’assurant que la crosse était à portée de main, prête à être dégainée en une fraction de seconde si besoin. Il jeta un dernier coup d’œil dans le miroir, satisfait de l’équilibre entre confort et efficacité. Ce holster, plus qu’un simple outil, représentait une part de son identité, une extension de lui-même. Mario redevenait enfin lui-même.

***

L’Upper East Side, joyau scintillant de Manhattan, respirait un charme intemporel et une sophistication délicate. Alors que Mario s’approchait de l’adresse indiquée par le capitaine, il fut enveloppé par l’atmosphère feutrée de ce quartier prestigieux. Les arbres centenaires, parés de feuilles vert émeraude, s’élevaient majestueusement le long des avenues bordées de réelles demeures en pierre de taille, témoins silencieux d’un passé révolu, où l’argent et l’influence tissaient des liens indéfectibles. Les façades des immeubles, ornées de balcons en fer forgé et de fenêtres élancées, scintillaient sous la lumière dorée du matin, mais, ce matin-là, il y eut quelque chose d’étrange dans l’air.

Mario s’arrêta un instant, tandis qu’il scrutait les détails qui l’entouraient : une mère pressée tirant son enfant par la main, des couples échappés d’un rêve de luxe, et des chiens au poil lustré gambadant joyeusement dans les parcs tout proches. Mais sous cette surface idyllique, une ombre se profila. Un immeuble en pierre, majestueux et imposant, semblait respirer une tristesse palpable, comme si chaque pierre murmurait des secrets inavouables. En franchissant le seuil, Mario sut qu’il pénétrait dans un monde où l’apparence était trompeuse, un monde où le luxe cachait des vérités terrifiantes, et il se demanda quel genre de monstre avait pu se tapir dans cette beauté.

La porte d’entrée de l’appartement était grande ouverte. Quelques collègues policiers s’activaient déjà à sécuriser les lieux, tandis que Mario enfilait gants et couvre-chaussures que lui tendait la technicienne de la police scientifique, avant de pénétrer dans la chambre où gisait une victime. La lumière tamisée peinait à dissiper les ombres qui se tapissaient dans chaque recoin. Un silence oppressant régnait, à peine troublé par le murmure feutré des policiers s’affairant autour de lui. Un agent s’approcha de Mario, son visage fermé, le carnet de notes fermement tenu entre ses mains.

— Bonjour lieutenant Queen. La victime s’appelle Vincent Lenoir, commença-t-il, baissant légèrement la voix comme si le fait de parler pouvait troubler le calme funèbre de la pièce. C’est un marchand d’art. On l’a retrouvé ici, dans son lit. Une balle dans la tête, tir à bout portant. Mais… il y a des choses étranges.

Mario semblait à peine écouter son collègue et s’avança lentement, son regard se posant sur le corps étendu sur le lit. Lenoir était allongé sur le dos, nu, une simple serviette de bain ouverte autour de la taille, son visage figé dans une expression vide, presque paisible. Mais quelque chose clochait. Ses yeux d’enquêteur, habitués à déceler les moindres anomalies, ne tardèrent pas à remarquer le détail qui perturbait l’ordre apparent de la scène.

— La police a été prévenue par un appel venant de cette maison, continua l’agent, sa voix un peu plus ferme. Le problème, c’est qu’aucune empreinte n’a été retrouvée sur le combiné. Pas la moindre trace. Il n’y a pas eu non plus d’effraction, on pense donc qu’il connaissait son assassin.

Toujours sans un mot, Mario se pencha légèrement, son regard acéré balayant les alentours du lit. Puis, il s’arrêta net, ses sourcils se fronçant légèrement. Il n’y avait pas d’éclaboussures de sang sur le lit. En dépit de la blessure évidente à la tête de Lenoir, les draps étaient presque immaculés, à peine froissés.

— Il n’a pas été tué ici, murmura Mario, ses pensées s’assemblant rapidement. Le corps a été déplacé après coup. On l’a mis dans ce lit après l’avoir abattu.

L’agent acquiesça, conscient de la gravité de cette déduction.

— C’est ce que ça laisse penser. Quelqu’un a pris soin de le mettre en scène, mais pourquoi ?

Mario ne répondit pas immédiatement, ses yeux scrutant chaque détail de la scène de crime. Ses doigts gantés frôlèrent le bord du lit, comme s’il espérait percevoir le moindre indice, le moindre signe révélateur. C’est alors qu’il déplaça légèrement les draps qu’un petit objet tomba à ses pieds. Il s’accroupit, tendant la main pour saisir ce qui brillait faiblement dans l’ombre. Ses doigts se refermèrent sur un collier délicat, partiellement dissimulé par le drap qui pendait.

Il reconnut instantanément le pendentif, objet unique, et un frisson glacial lui parcourut le corps. Mais comment diable était-il arrivé ici ?

— Quelque chose ne tourne vraiment pas rond ici, murmura Mario en se redressant, le collier fermement maintenu dans sa paume, un poids lourd de secrets qui pesait désormais sur lui. Il devait protéger cette vérité, coûte que coûte.

Alors qu’il rangeait discrètement l’objet dans la poche de son jean, il perçut un mouvement derrière lui. Il se retourna, son regard se posant sur un homme qu’il ne connaissait pas. Grand, aux épaules larges et au regard perçant d’un vert très clair, les cheveux blonds et courts impeccablement coiffés, l’inconnu portait le badge du NYPD à sa ceinture, ainsi qu’un holster usé sous son bras gauche. Portant une chemise blanche impeccable fermée par une cravate fine noire, cet inconnu avait l’air sûr de lui, presque trop pour quelqu’un que Mario n’avait jamais croisé auparavant. Le silence pesait lourd dans l’air.

L’homme, sans se présenter, s’approcha de la scène du crime d’un pas lent, mais assuré, son regard balayant rapidement la pièce avant de se poser sur Mario. Il semblait examiner chaque détail avec une attention soutenue, mais quelque chose dans sa posture trahissait une curiosité plus profonde.

— Vous avez trouvé quelque chose d’intéressant ? demanda-t-il brusquement, sa voix grave rompant le silence comme un coup de tonnerre dans un ciel clair. Le ton était neutre, mais Mario ressentit une pointe d’acuité dans la question.

Une inquiétude s’installa dans l’esprit de Mario. Ce type l’avait-il vu ranger le collier dans sa poche ? Non, c’était impossible. Il avait été discret, presque invisible. Pourtant, l’assurance avec laquelle l’homme posait la question fit naître un doute sourd en lui.

Mario croisa les bras pour dissimuler son trouble.

— Et à qui ai-je l’honneur ? répliqua-t-il, le regard fixé sur l’inconnu.

Le nouveau venu esquissa un sourire à peine perceptible, mais qui n’atteignit pas ses yeux.

— Lieutenant Mike Dabeski, police de New York.

Mario fronça les sourcils, essayant de déchiffrer les intentions derrière cette façade impénétrable. Il n’avait pas entendu parler de ce flic auparavant, et cette attitude, aussi directe qu’intrusive, l’irritait. Était-ce une tentative de le tester, de l’intimider ? Et pourquoi maintenant ?

— C’est Mario Queen, c’est bien ça ? continua l’homme, observant attentivement la réaction de Mario à l’évocation de son nom.

Mario hocha la tête, méfiant. Il n’avait pas entendu parler d’un recrutement récent. Cela ne changeait rien au fait que ce Mike Dabeski semblait déjà vouloir se mêler de tout.

— J’espère que notre collaboration sera fructueuse, lieutenant, ajouta Mike, son ton glissant vers une fausse cordialité. Ce serait dommage que des indices passent inaperçus.

Toujours sans un mot, Mario sentit le regard perçant de Mike tenter de fouiller chaque recoin de son esprit. Il déglutit, la gorge soudainement sèche, tandis que ses doigts se crispèrent légèrement autour du collier dissimulé dans sa poche.

— Si vous avez trouvé quelque chose d’intéressant, lieutenant, reprit Mike, sa voix calme, mais chargée d’une subtile insistance, ce serait peut-être bien de le partager.

Mario se força à maintenir son regard, mais il sentit le poids de la situation s’écraser sur ses épaules. Le silence s’étira entre eux, oppressant. Le temps semblait s’être arrêté, chaque seconde s’étirant comme une éternité, alors que Mario cherchait désespérément ses mots.

— Tout ce qui est ici a déjà été vu, lieutenant, répliqua-t-il finalement, sa voix tremblante d’un mélange de défi et d’appréhension. Et si vous n’y voyez pas d’inconvénient… j’ai un rapport à faire.

Il tourna les talons, mais pas avant d’avoir croisé une dernière fois le regard de Mike. Mario fit un pas, puis un autre, mais le sol semblait se dérober sous ses pieds. Il entendit le souffle de Mike derrière lui, comme une ombre menaçante, prête à tout moment à fondre sur lui. Le couloir de l’appartement s’étirait devant lui, et la distance semblait infinie. Chaque pas qu’il faisait l’éloignait de la scène de crime, mais pas de cette confrontation, pas de cette vérité qui planait désormais au-dessus de lui comme une épée de Damoclès. En franchissant la porte, il sentit une douleur dans sa poitrine. Était-ce la culpabilité ? Une chose était certaine : le doute semblait s’être insinué dans l’esprit de Mike, et Mario savait qu’il ne pourrait pas l’en détourner facilement. Et peut-être… peut-être qu’il ne le pourrait pas du tout.

Chapitre 2

Frères et secrets

Le ciel gris au-dessus du Queens était saturé de promesses de pluie, le vent chaud chassant les dernières traces des fortes chaleurs estivales. Mario Queen, le regard sombre et la mâchoire serrée, roulait en silence à travers les rues familières de son quartier d’enfance. Le trajet jusqu’à la maison de sa mère était court, mais chaque seconde passée derrière le volant lui semblait interminable. L’ombre du collier trouvé chez Lenoir pesait sur son esprit, un lien inattendu et dangereux entre sa vie professionnelle et personnelle.

Mario arrêta la voiture devant la modeste maison de briques rouges où il avait grandi, un vestige d’une époque révolue au cœur de ce quartier du Queens. Le coin de la rue était marqué par une vieille épicerie de quartier, tenue par la même famille depuis des décennies, et des enfants jouaient encore sur les trottoirs, leurs rires résonnant comme un écho lointain de son enfance. Le jardin, impeccablement entretenu par sa mère, offrait un contraste apaisant avec l’agitation intérieure qui le tourmentait. Des massifs en pleine floraison bordaient la petite allée de pierre menant à la porte d’entrée, leurs couleurs vives apportant une touche de vie à ce coin tranquille. Les arbres, vieux et noueux, formaient une canopée protectrice au-dessus de la maison, renforçant l’impression de refuge que ce lieu avait toujours représentée pour lui.

Il inspira profondément avant de sortir de la voiture, cherchant à calmer les battements frénétiques de son cœur. Le bruit lointain de la circulation sur l’avenue principale se mêlait au chant des oiseaux, mais rien de tout cela n’apaisait la tempête intérieure qui faisait rage en lui. Il n’était pas venu ici pour la douceur des retrouvailles familiales, mais pour obtenir des réponses. Chaque pas sur le chemin pavé résonnait dans sa tête, amplifiant l’anxiété qui montait en lui. Cette maison, qui avait autrefois été un sanctuaire, lui paraissait soudainement étrangement distante, comme si le poids des secrets qu’il s’apprêtait à dévoiler en avait altéré l’essence.

Alors qu’il se tenait devant la porte de la maison, Mario sentit la nervosité le paralyser. Sa main hésitait à tourner la poignée, comme si un instinct profond cherchait à le retenir, à le protéger de ce qui allait suivre. Son cœur battait à un rythme irrégulier, tambourinant dans sa poitrine avec une intensité qu’il n’avait pas ressentie depuis longtemps. Chaque fibre de son être semblait tendue à l’extrême, ses muscles crispés sous la tension latente qui l’habitait. La sueur perlait sur son front, et il dut s’essuyer les paumes moites contre son jean. Pour la première fois depuis des années, il se sentait vulnérable, conscient que la confrontation qui l’attendait pourrait bien changer à jamais la relation qu’il entretenait avec son demi-frère JC. Il inspira à nouveau profondément, essayant de rassembler son courage, mais il ne parvint pas à chasser l’impression que le sol se dérobait sous ses pieds. D’un geste rapide, presque désespéré, il tourna la poignée et franchit enfin le seuil, prêt à affronter ce qui l’attendait.

Mario fut accueilli par le parfum familier des œillets que sa mère aimait tant, une fragrance douce et envoûtante qui flottait dans l’air comme un écho du passé. Les bouquets soigneusement disposés sur la table de la salle à manger et le buffet en bois verni remplissaient la pièce d’une délicate odeur florale, imprégnant chaque recoin de la maison d’une sérénité apaisante. L’intérieur, bien qu’un peu vieilli, respirait toujours cette chaleur réconfortante qui avait marqué son enfance. Les murs, autrefois éclatants de couleurs vives, avaient légèrement pâli avec le temps, mais conservaient une certaine vivacité grâce aux innombrables cadres accrochés un peu partout. Ces cadres étaient des fenêtres vers le passé, chaque photographie racontant une histoire précieuse. Mario s’attarda sur un portrait de son défunt père, officier de police, vêtu de son uniforme impeccable, un regard fier et déterminé dans les yeux. C’était une image qui avait toujours suscité en lui un mélange de fierté et de nostalgie, rappelant les valeurs d’intégrité et de courage que son père lui avait inculquées avant de disparaître trop tôt. À côté de ce portrait, une photo de mariage, légèrement jaunie par le temps, montrait sa mère radieuse dans une robe blanche simple, serrant contre elle le père de JC, son deuxième époux. L’homme, vêtu d’un costume noir classique, affichait un sourire serein, presque timide, contrastant avec l’éclat joyeux de sa mère. Ensemble, ils paraissaient incarner un nouveau départ, une seconde chance en amour, après la perte tragique du premier mari. D’autres photos montraient des moments plus légers : Mario et JC jouant dans le jardin, leur mère tenant un gâteau d’anniversaire décoré de bougies multicolores, des vacances passées au bord de la mer, où les rires semblaient encore résonner dans l’air. Chaque image avait sa place, comme les pièces d’un puzzle complexe qui, une fois assemblées, racontaient l’histoire d’une famille recomposée, soudée par l’amour et les épreuves.

Les meubles, d’un style classique et robuste, montraient des signes d’usure ici et là, avec des coins éraflés et des coussins affaissés, mais ils dégageaient une aura d’authenticité, comme des témoins silencieux de toutes les années de vie et d’amour qui avaient défilé entre ces murs. Le tapis persan dans le salon, légèrement décoloré par le soleil, offrait toujours la même douceur sous les pieds, et la vieille horloge en bois sur le manteau de la cheminée continuait de marquer le temps avec son tic-tac rassurant.

Malgré les signes évidents du passage du temps, la maison conservait cette atmosphère enveloppante, comme un cocon de souvenirs et de tendresse, où chaque objet avait une histoire à raconter. Mario sentit ses épaules se détendre légèrement, la tension qui l’avait accompagné jusqu’ici s’effaçant peu à peu, absorbée par l’atmosphère chaleureuse de ce lieu. C’était un lieu où Mario se sentait toujours chez lui, un refuge immuable face aux tumultes du monde extérieur. Ici, entouré de ces objets familiers et baigné dans cette ambiance de tranquillité, il se surprit à respirer plus facilement, à se sentir enfin un peu plus en paix.

En pénétrant dans le salon, Mario aperçut JC assis sur le canapé, les pieds posés négligemment sur la table basse. Le jeune homme de bientôt 19 ans était plongé dans un livre d’art, absorbé dans ses études, sa silhouette détendue contrastant avec la tension qu’il ressentait encore.

JC leva ses grands yeux verts et sourit en voyant Mario entrer, mais son sourire se figea rapidement en remarquant l’expression grave sur le visage de son demi-frère.

— Mario ? Ça va, frangin ? demanda-t-il, un peu hésitant.

Mario ne perdit pas de temps en bavardages. Il était venu ici pour des réponses, et chaque seconde de silence alourdissait le fardeau sur ses épaules.

— Il faut qu’on parle, JC, dit Mario, sa voix ferme, presque dure. Maman et ton père sont là ?

JC fronça les sourcils, sentant l’atmosphère se tendre. Il referma doucement son livre et se redressa sur le canapé, prêt à écouter, mais aussi visiblement sur la défensive.

— Non, ils sont sortis faire des courses. Qu’est-ce qui se passe ? répondit-il en essayant de cacher son inquiétude.

Mario sortit lentement le collier de sa poche, le tenant devant lui comme une preuve irréfutable, un objet qui liait désormais JC à une réalité qu’il ne pouvait plus fuir.

— Ce collier… tu le reconnais, n’est-ce pas ? demanda Mario en fixant son frère droit dans les yeux.

Le visage de JC pâlit à la vue du bijou. Il porta la main à son cou et ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais aucun son n’en sortit. Il semblait paralysé, à la fois heureux de retrouver son collier et angoissé par la façon dont Mario avait pu mettre la main dessus.

— C’est celui que je t’ai offert pour tes dix-huit ans, continua Mario. Comment se fait-il que je l’aie trouvé sur une scène de crime ?

JC cligna des yeux, surpris, sa confusion se mêlant à l’inquiétude.

— Une scène de crime ? répéta-t-il, visiblement déstabilisé. Mario, qu’est-ce que tu racontes ?

Mario fronça les sourcils, perplexe. La réaction de JC semblait sincère, mais l’objet qu’il tenait dans sa main racontait une autre histoire.

— Ne fais pas l’innocent, JC. J’ai trouvé ce collier, tôt ce matin, dans un appartement de l’upper east side où un meurtre a été commis, et je veux comprendre comment il a pu s’y retrouver. Et s’il te plaît, ne me mens pas.

JC, toujours sous le choc, secoua la tête en signe de dénégation. Il se leva du canapé, puis posa ses mains sur sa tête, ses doigts s’enfonçant dans sa chevelure rousse alors qu’il essayait de reprendre ses esprits.

— Mario, j’te jure que je n’sais pas de quoi tu parles. Ce collier… je l’avais hier soir, et ce matin… je croyais l’avoir perdu ! Putain, j’comprends pas ce que tu racontes Mario… Un meurtre ?

— Où étais-tu hier soir ? demanda Mario sans quitter son frère des yeux.

— J’étais… putain, fais chier… JC avait du mal à trouver ses mots. J’étais chez un client… voilà.

Mario sentit sa frustration monter. Il devait tirer cela au clair, peu importe la difficulté.

— Un client ? Quel client ? Qu’est-ce que tu me racontes JC ? demanda-t-il, sa voix trahissant à peine l’inquiétude qui le rongeait.

JC prit une grande inspiration, essayant de rassembler son courage. Il savait que ce qu’il allait dire pourrait détruire la confiance que Mario avait en lui, mais il n’avait plus le choix.

— J’ai besoin d’argent pour payer mes études, Mario, avoua-t-il enfin, la voix basse et brisée. Alors j’ai accepté un job dont je n’suis pas vraiment fier… Maman croit que je bosse dans un fast-food, mais… je suis Escort.

Il marqua une pause, son regard se perdant dans le vide, comme s’il tentait de rassembler ses pensées. Ses doigts s’entremêlèrent dans sa chevelure rousse, et il poursuivit d’une voix tremblante :

— Tu sais, ça a commencé comme ça, par hasard. Une femme m’a abordé dans la rue, elle m’a proposé un job de mannequin. Je pensais que c’était une chance, tu comprends ? Mais pour finir, je me suis retrouvé embarqué dans ce truc, et… Je sais que j’ai fait une connerie Mario.

Rapidement la voix de JC se fit plus hésitante, une lueur de peur et de désespoir traversant ses yeux verts.

Mario pouvait voir à quel point cette révélation pesait sur lui, et il comprit que son frère se sentait piégé dans cette réalité qu’il avait choisie. Il resta cependant figé, les mots de son frère résonnant dans sa tête comme une sirène d’alarme. Un mélange de colère, d’inquiétude et de désespoir le submergea.

— Escort… répéta Mario, sa voix chargée d’une incrédulité mêlée de colère. Bordel, JC… Tu te prostitues !

JC baissa la tête, honteux.

— Non… j’accompagne des mecs blindés à des soirées, des galas… parfois plus, mais… c’est juste pour le fric, Mario, j’te jure. Et puis, apparemment j’suis doué pour ça… Les mecs me trouvent… attirant. Je pensais que je pouvais gérer, que c’était un travail comme un autre.

Mario serra les poings, la colère grondant en lui. Comment son frère avait-il pu se mettre dans une telle situation ? Et surtout, comment n’avait-il rien vu venir ? Mais au-delà de la colère, il y avait une peur grandissante, un besoin désespéré de protéger JC de ce monde sombre dans lequel il s’était enfoncé.

— Et ta petite amie, elle est au courant de tout ça ? demanda Mario, scrutant le visage de son frère à la recherche d’une réponse.

JC détourna le regard, un nuage de gêne et de culpabilité assombrissant ses traits.

— Non… non, elle ne sait rien, murmura-t-il. J’ai pas voulu lui dire. Personne n’est au courant… à part toi, maintenant.

— JC… pourquoi ne m’as-tu rien dit ? Pourquoi tu n’es pas venu me voir ? demanda Mario, sa voix se radoucissant un peu, laissant transparaître l’inquiétude derrière la colère.

JC releva les yeux, des larmes coulant sur ses joues parsemées de taches de rousseur.

— Parce que je savais que tu réagirais comme ça… Parce que j’avais peur que tu ne me regardes plus jamais de la même manière… Et aussi parce que je pensais pouvoir m’en sortir tout seul. J’voulais pas t’inquiéter, tu avais déjà tellement de choses à gérer après ce qui s’est passé… après l’hôpital.

Mario se passa une main sur le visage, tentant de digérer ces révélations. Il ressentit une vague de culpabilité l’envahir, conscient qu’il avait été absent pendant ces trois mois de convalescence, se reprochant de ne pas avoir été là pour prendre soin de JC. Le silence dans la pièce était lourd, chaque seconde étirée par la tension palpable entre les deux frères.

— Et ce collier, alors ? reprit Mario, plus calmement. Que s’est-il passé ?

JC secoua la tête, son visage trahissant une peur sincère.

— Je… je sais pas, Mario. Je l’avais sur moi quand je suis allé chez mon client hier soir.

— Ton client, comment s’appelle-t-il ? demanda Mario.

— Il s’appelle Vincent Lenoir. On s’est vus plusieurs fois… C’est quelqu’un de… compliqué, mais il ne m’a jamais fait de mal. Hier soir, on a passé la soirée ensemble. On a bu, on a parlé… Puis je suis parti. Il voulait seulement ne pas rester seul pour la soirée.

Mario resta silencieux quelques secondes, comme pour digérer les paroles de son frère.

— Vincent Lenoir a été retrouvé mort dans son lit ce matin, déclara enfin Mario d’une voix grave et bien plus solennelle.

JC prit la nouvelle comme un coup de poing en plein visage. Ses yeux s’écarquillèrent de stupéfaction, et sa bouche s’entrouvrit, incapable de produire le moindre son. Un mélange d’incrédulité et de terreur se peignit sur son visage, ses mains se crispant sur le bord du canapé. Son souffle se fit plus court, presque haletant, tandis que les mots de Mario résonnaient dans son esprit comme une cloche assourdissante.

— Quoi ? balbutia-t-il, la gorge nouée. Il chercha désespérément une explication, ses pensées se bousculant dans un chaos incompréhensible. Mort ? Non, c’est pas possible… Je… je l’ai quitté alors qu’il dormait complètement bourré… Les mots peinaient à sortir, chargés d’une panique grandissante.

— Es-tu certain de me dire toute la vérité ? reprit Mario. Comment ton collier s’est retrouvé dans son lit ?

— J’en sais rien, putain. JC était complètement paniqué. Avant que je parte, il a voulu aller plus loin en me poussant dans son lit. Mais il était trop bourré pour faire quoi que ce soit, et il s’est endormi dès qu’il s’est allongé à côté de moi. Mon collier a peut-être pu se décrocher et rester dans le lit… j’sais pas Mario.

JC était blême, son regard s’écarquillant sous le poids de l’angoisse qui l’envahissait. Son cœur battait à tout rompre, résonnant dans sa poitrine comme un tambour de guerre. Des pensées confuses tourbillonnaient dans son esprit, chaque instant de la soirée avec Lenoir se répétant en boucle, comme un film qu’il ne pouvait pas arrêter. Il s’assit, puis se leva, ses mains tremblantes s’accrochant au bord du canapé, cherchant un point d’ancrage face à la tempête d’émotions qui le submergeait. La pièce semblait se rétrécir autour de lui, les murs se rapprochant dans une étreinte étouffante. La peur d’être mêlé à quelque chose de plus sinistre le paralysait, et une sueur froide perla sur sa nuque, tandis qu’il tentait de rassembler ses pensées, noyé dans une marée de confusion et de terreur.

En voyant JC perdre pied, une vague d’inquiétude déferla sur Mario. Son cœur se serra alors qu’il observait son petit frère, à la fois vulnérable et accablé par la panique. Il voulait prendre JC dans ses bras, lui murmurer que tout irait bien, mais les mots semblaient lui échapper, prisonniers de l’angoisse qui l’étreignait. La peur de ne pas pouvoir le réconforter, de ne pas être à la hauteur face à cette tempête, le pétrifiait. Mario se sentait tiraillé entre l’instinct protecteur qui le poussait à agir, et la réalité brutale qui venait d’exploser. Chaque seconde de silence pesait lourdement, comme un poids qui l’écrasait, tandis qu’il cherchait désespérément une solution pour apaiser la tourmente qui dévorait son frère.

— JC, tu comprends que tu es maintenant un suspect dans une enquête pour meurtre ? dit Mario, la voix lourde de gravité. Tu étais chez lui la nuit où il a été tué, et ton collier a été trouvé sur place. Si quelqu’un découvre ça, tu risques gros.

JC déglutit difficilement, les yeux remplis de larmes et la voix éraillée.

— Mario… j’te jure que j’ai rien fait de mal. Je n’aurais jamais fait de mal à Lenoir. J’sais pas ce qui s’est passé, mais je t’en supplie, aide-moi.

Mario ferma les yeux, la tête lourde de pensées contradictoires. Une tempête de doutes et d’inquiétudes tourbillonnait en lui, chaque pensée se heurtant aux autres comme des vagues contre un rocher. Il se retrouvait face à un choix impossible : protéger son frère, sa famille, quitte à compromettre son devoir de policier, ou bien risquer de perdre JC, ce qui le terrifiait plus que tout. Le poids de cette décision semblait l’écraser, une pression lourde qui lui serrait la poitrine.

Il se revoyait, adolescent, prenant soin de JC lorsqu’il était blessé, se promettant de toujours le protéger. Mais aujourd’hui, ce rôle se compliquait, car JC n’était plus ce petit frère innocent, mais un homme engagé dans un monde qu’il ne comprenait pas pleinement. C’est à cet instant que Mario prit alors conscience que son petit frère avait bien grandi, qu’il était devenu un homme beau et intelligent, capable de prendre des décisions pour lui-même, même si ces choix le conduisaient sur des chemins dangereux.

Il ouvrit les yeux, la détermination se mêlant à la peur. Une chose était certaine : il ne laisserait pas son frère affronter seul cette tempête. Il devait trouver un moyen de le soutenir, de le protéger, tout en naviguant dans les eaux troubles de la justice. Une solution devait exister, mais il ne savait pas encore quelle forme elle prendrait.

— Tu pourras toujours compter sur moi, JC, murmura-t-il finalement, ouvrant les yeux pour croiser le regard implorant de son frère. Je vais t’aider, mais tu dois me dire tout ce que tu sais. Ensemble, on trouvera un moyen de te sortir de là.

JC acquiesça, les yeux brillants d’espoir, mais aussi d’une nouvelle inquiétude. Car au fond de lui, il savait que ce secret n’était peut-être que la première couche d’un labyrinthe bien plus complexe et dangereux. Et maintenant, Mario était plongé au cœur de ce labyrinthe avec lui.

Mario regarda JC, sentant qu’il était temps de connaître chaque détail de cette soirée. Il s’assit en face de son frère, prêt à écouter.

— Très bien, qu’est-ce qui s’est passé hier soir chez Vincent Lenoir ? dit Mario d’une voix ferme, mais douce. Chaque détail compte, chaque personne que tu as croisée, chaque mot échangé.

JC, encore secoué, se frotta les yeux et prit une profonde inspiration avant de commencer.

— Quand je suis arrivé chez Lenoir, tout était normal. On a discuté, comme d’habitude. Il était détendu et chaleureux. Il a sorti une bouteille de vin, et on a commencé à parler d’art. Lenoir adorait les impressionnistes. On a échangé des idées, et il m’a montré des toiles qu’il avait achetées récemment. C’était une soirée tranquille.

Mario hocha la tête, incitant JC à continuer.

— À un moment donné, il a reçu un appel, et après avoir raccroché, il m’a dit qu’il attendait quelqu’un et que je devais rester dans la chambre pour ne pas être vu. Il m’a demandé de ne faire aucun bruit.

— Et tu as pu voir qui était cette personne qui devait lui rendre visite ? demanda Mario, son regard fixé sur JC.

JC secoua la tête.

— Non, je ne l’ai pas vue. Mais j’ai entendu sa voix. C’était une femme. Elle parlait à Lenoir dans l’entrée. Je pense que c’était son assistante, elle semblait connaître ses affaires. J’ai juste entendu quelques mots… des trucs banals, sur des dossiers à régler, je crois. J’ai pas vraiment fait attention, je voulais juste que ça se termine vite.

— Et ensuite ? demanda Mario, sentant que les détails étaient cruciaux.

— À un moment, je me suis cogné le pied sur le coin du lit, continua JC, son visage se crispant au souvenir. Je m’suis retenu d’insulter ce putain de lit, mais ça a dû s’entendre, parce qu’ils se sont arrêtés net de parler. J’ai entendu des pas venir vers la chambre, et Lenoir est entré. Il m’a demandé si tout allait bien, je lui ai dit que oui, que je m’étais juste cogné le pied. La femme avait dû partir, je ne l’ai pas vue.

— Et après son départ ? demanda Mario, attentif à chaque mot.

— Après, Lenoir a continué à boire et à parler. Il semblait un peu tendu au début, mais, avec le vin, il s’est vite détendu. On a parlé de tout et de rien, de musique surtout. Il m’a fait écouter ses derniers coups de cœur, on a partagé quelques blagues. C’était une soirée normale.

JC marqua une pause, visiblement ébranlé par le souvenir.

— Après il était bien bourré, il a voulu me sauter dessus en me balançant sur le lit, mais il s’est endormi. Je l’ai laissé comme ça, tout habillé sur son lit, et je suis parti en essayant de ne pas faire de bruit. C’est tout, Mario, j’te jure. Je ne sais pas ce qui a pu se passer après.

— Tu as dit qu’il était tout habillé quand tu es parti ? demanda Mario en se levant rapidement de son fauteuil. Tu es sûr de toi ?

JC le fixa interrogatif et soucieux.

— Oui… il avait juste eu le temps de déboutonner sa chemise avant de s’écrouler sur le lit. JC se leva du canapé à son tour. Pourquoi tu me demandes ça, Mario ?

Mario resta silencieux, absorbant chaque détail. Il fit un petit sourire à son frère avant de l’attraper par les épaules.

— Tout va bien JC, tu m’as bien aidé.

Le puzzle se complétait, mais de nombreuses pièces manquaient encore.

— Maintenant, tu vas me promettre de rester bien tranquille à la maison le temps que j’éclaircisse cette affaire. Je te promets que tout ira bien, JC.

Chapitre 3

Le nouveau coéquipier

Mario Queen arriva au commissariat de Manhattan, le corps lourd sous le poids de la chaleur orageuse qui semblait envelopper la ville. L’air, chargé d’humidité, lui collait à la peau, rendant chaque pas un peu plus pénible. Mais rien ne semblait pour autant altérer son excitation, car il retrouvait ce quartier avec un sentiment de familiarité, comme s’il l’avait quitté la veille.

Le commissariat, avec ses murs de briques grisâtres et son imposante façade, se tenait devant lui, monumental et familier.

En franchissant les portes, il fut accueilli par le hall d’entrée, vaste et baigné d’une lumière tamisée qui filtrait à travers les grandes fenêtres. Ce hall, souvent animé par le va-et-vient des agents et le bourdonnement des conversations, semblait soudainement figé dans une atmosphère de respect solennel. Au centre de cet espace, un mémorial trônait fièrement, rendant hommage aux policiers tombés en service, comme un phare de mémoire au milieu du tumulte de la vie quotidienne.

Le mémorial était fait de marbre poli, gravé des noms et dates des officiers disparus. Les lettres, dorées et brillantes, capturaient la lumière, attirant le regard des visiteurs et des agents qui passaient. Autour de cette structure, des bouquets de fleurs fraîches, déposés par des collègues ou des familles en deuil, apportaient une touche de couleur et de vie, contrastant avec la sobriété du marbre. Une douce odeur de fleurs émanait de cet autel de mémoire, enveloppant l’espace d’une sérénité poignante.

Mario s’arrêta un instant, le cœur serré. Les visages souriants de ses collègues, immortalisés dans des photos accrochées aux murs adjacents, lui rappelèrent des souvenirs heureux, mais aussi des souvenirs tragiques. Ce mémorial, qu’il connaissait si bien, était un rappel poignant de sacrifices innombrables, et son regard se posa immédiatement sur le nom de son père, gravé là avec honneur. Mais aujourd’hui, un nouveau nom attirait son attention : celui de Daniel Newmann, son coéquipier, fraîchement ajouté à la liste des héros disparus.

Mario s’approcha lentement du mur, sa main tremblante effleurant les lettres gravées du nom de Daniel. Au contact du marbre froid, une vague de souvenirs l’assaillit, le projetant dans le passé. Il se revit ce jour maudit où tout avait basculé. Ils avaient été appelés en renfort pour un vol en cours dans une bijouterie de la 5e avenue. L’excitation et l’adrénaline avaient rapidement laissé place à la peur et à la confusion lorsque le braquage s’était transformé en une prise d’otage chaotique. Les cris des victimes, le fracas des balles, les pleurs des otages résonnaient encore dans sa mémoire. Mario se rappelait la panique dans les yeux de Daniel, avant que tout ne devienne un bain de sang.