Méandres - Robert Tello-Bermejo - E-Book

Méandres E-Book

Robert Tello-Bermejo

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Beschreibung

Julien Morel, un barman français, est retrouvé sauvagement assassiné sur une plage isolée près de Malaga, en Andalousie. La scène de crime, marquée par des mutilations sinistres et une mise en scène glaçante, rappelle étrangement trois meurtres récents commis en France. Alerté par ces similitudes troublantes, le commissaire Luis Cordoba quitte Paris pour l’Andalousie, bien décidé à lever le voile sur cette série macabre. Une enquête haletante commence, sur une terre où se mêlent ses souvenirs d’enfance, ses racines… et désormais le sang. Les meurtres ont-ils une même main ? Ou s’agit-il d’un jeu d’ombres bien plus dangereux qu’il n’y paraît ?

 À PROPOS DE L'AUTEUR

Robert Tello-Bermejo est auteur-compositeur-interprète et sociétaire de la SACEM depuis près de quarante ans. Tout au long de sa carrière, il a collaboré avec de nombreux artistes et participé à des projets musicaux variés. Parallèlement à son parcours musical, il a développé une œuvre littéraire riche, composée de huit romans, d’une pièce de théâtre, d’un opéra rock et d’une centaine de chansons.

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Seitenzahl: 301

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Robert Tello-Bermejo

Méandres

Une enquête du commissaire

Luis Cordoba

Roman

© Lys Bleu Éditions – Robert Tello-Bermejo

ISBN : 979-10-422-7523-5

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

1

Luis était d’une humeur de chien. Le vol Paris-Malaga via Toulouse et Madrid lui avait semblé interminable. Il détestait l’avion, cette carcasse d’acier dans laquelle il se sentait vulnérable et où il ne maîtrisait rien. Il s’en défendait, mais en vrai, c’était de la trouille. Il suivit les passagers qui empruntaient la passerelle de débarquement, et se retrouva dans le hall des arrivées de l’aéroport Malaga Costa del Sol grouillant d’une foule considérable. De l’autre côté du sas de sécurité, des gens brandissaient des pancartes où étaient inscrits des noms. Il repéra le sien et après avoir franchi le contrôle, se dirigea vers le grand type costaud, d’une quarantaine d’années, au visage buriné, qui avait été choisi pour venir le récupérer.

— Salut, je suis celui que vous attendez !

Le grand type costaud lui sourit et lui tendit sa main énorme.

— Et moi je suis l’inspecteur Carlos Montoya, bienvenue en Andalousie commissaire. J’ai été désigné pour vous assister parce que je me débrouille pas mal en français.

Il avait débité sa phrase dans la langue de Molière. Sa bonne volonté pour être compris était pas mal compromise par un accent espagnol bien prononcé.

— Bonjour inspecteur. Vous avez lu le nom sur l’écriteau que vous tenez à la main ?

— Oui commissaire, Luis Cordoba c’est écrit !

— C’est bien ça, et donc ?

— Et donc, vous êtes de Cordoba !

— Non, mais mon grand-père, le père de mon père, est né à Mojacar, pas très loin, vous connaissez ?

— Oui, c’est un peu plus au sud, un superbe village en haut d’une colline qui surplombe la mer, là où les maisons sont toutes blanches et où les bougainvilliers sont flamboyants !

Sans le vouloir, purement instinctivement, Montoya avait répondu en espagnol. Il réalisa sa méprise et s’excusa dans son français approximatif.

— Désolé, je…

— Tout va bien, je comprends et je parle couramment la langue de mes ancêtres ! C’est une des raisons qui m’ont aidé à obtenir ce que je voulais. Allez, on va retirer mes bagages et vous me conduisez à l’hôtel, vous le connaissez ?

— El Mirador, oui, c’est pas le grand luxe, mais c’est tranquille.

***

Ce que Cordoba avait demandé, et obtenu, était son détachement pour une durée indéterminée au sein de la police criminelle de Malaga. Quand le directeur de la crim’ parisienne, informé par l’ambassade, l’avait convoqué dans son bureau et avait étalé devant lui des photos horribles, où on voyait un homme nu, affreusement mutilé, retrouvé mort trois jours plus tôt sur une plage de Rincon de la Frontera, à quelques kilomètres de Malaga, il avait tout de suite compris que le meurtre avait un rapport avec l’enquête qu’il dirigeait à Paris depuis plusieurs mois. D’autant que la victime, un certain Julien Morel, était un ressortissant français.

— Vous voulez pas me répondre ?

Assis côté passager dans la Seat banalisée que Montoya faufilait habilement dans la circulation bien chargée, Cordoba, tout embrouillé dans ses réflexions, sursauta légèrement.

— Désolé… je… c’était quoi la question ?

— Je vous demandais si après l’hôtel vous voulez qu’on mange ensemble. Il est déjà une heure et demie, je commence à avoir faim !

— OK, on déjeune ensemble avant d’aller voir vos chefs.

— Bien, on va chez Ramon, c’est ma cantine, pas un truc à touristes !

La cantine comme disait Montoya s’avéra un resto sympa, typiquement Andalou. Le gaspacho maison et les albondigas (boulettes de veau et porc) en sauce tomate légèrement piquante, étaient excellents. Cordoba remercia son cicerone espagnol.

— Bonne adresse, pas loin de mon hôtel, je reviendrai.

— Ramon, c’est mon beau-frère.

— T’es marié avec sa sœur ?

Machinalement il était passé au tutoiement.

— Non, c’est lui qui est marié avec la mienne ! Moi je suis divorcé depuis six ans, et je vis seul. Et vous ?

— Pas marié, j’ai failli une fois, mais elle est… non, le mariage c’est pas très compatible avec mon boulot. Quelques histoires quand même. Et tu peux me tutoyer, on va faire équipe si j’ai bien compris.

— Oui et je suis content d’avoir été choisi pour bosser avec v… toi. Tu es sûrement un super flic pour être déjà commissaire !

— Je fais plus jeune que mon âge ! Allez, emmène-moi au central, je veux voir le patron et étudier le dossier.

***

Le siège de la police de Malaga était un grand bâtiment jaune et blanc de cinq étages. On accédait au parking, situé derrière, en passant sous un large porche. La Seat bien garée, les deux hommes pénétrèrent dans le hall et Luis suivit Carlos dans l’ascenseur qui les propulsa en moins de dix secondes au niveau quatre, là où était installée la brigade criminelle. Les lieux étaient clairs, spacieux, agréables. Au bout d’un long couloir, Carlos stoppa, imité par Luis, devant une porte entrouverte sur laquelle était fixée une plaque gravée au nom de Marino Miguel Alcazar. En les apercevant, un homme d’une soixantaine d’années, rondouillard, pas très grand, bien habillé, quitta le bureau où il était assis et s’avança vers eux.

— Enfin vous voilà !

Il avait parlé en français, presque sans accent. Agacé.

— Désolé Monsieur, j’ai demandé à Montoya de passer d’abord à mon hôtel pour déposer mes bagages, ensuite je lui ai dit que j’avais faim alors nous nous sommes arrêtés dans un restaurant.

— Chez Ramon évidemment !

— Oui Monsieur, très bonne adresse.

Le visage du patron tranchait d’avec son aspect physique un peu lourdaud. Ses yeux d’un bleu acier, son menton carré, ses cheveux poivre et sel taillés en brosse, tout dans ce visage disait que cet homme était un vrai chef, un flic redoutable. Il tendit la main.

— Bonjour commissaire, bienvenue à Malaga. Je vous attendais un peu plus tôt c’est vrai, excusez mon accueil. Mais vous avez raison, Ramon est une bonne adresse, n’est-ce pas Montoya ? Bien, on oublie ça, le dossier est sur mon bureau, on peut se mettre au boulot. Comme vous le savez, la victime est française, Julien Morel, trente-huit ans, il était en Espagne depuis plusieurs mois et travaillait comme serveur au Lorca, un bar de nuit branché sur l’avenue du port. On l’a trouvé au matin sur le sable d’une petite crique, à une dizaine de mètres en contrebas de la corniche qui longe la mer. Il était nu et mutilé. Le légiste est formel, les mutilations sont post-mortem. Ce qui l’a tué c’est une balle de gros calibre en plein cœur, et il situe la mort environ trois heures avant qu’on découvre le cadavre, donc en pleine nuit, vers quatre heures.

— Je voudrais voir le corps avant qu’il soit rapatrié en France.

— Pas la peine, j’ai le rapport d’autopsie et les photos sont…

— Je préfère voir le cadavre, je réfléchis mieux en vrai !

— OK, Montoya va vous conduire à l’IML, c’est au sous-sol. Après vous remontez, réunion avec toute la brigade dans trente minutes.

Dans l’ascenseur, Luis surprit Carlos qui le regardait bizarrement.

— Un problème ?

— Non, juste te remercier d’avoir dit que c’était toi qui avais faim.

— On est une équipe non ?

Il faisait moins de dix degrés à l’intérieur de la morgue. Le légiste, un type jeune, cheveux longs, lunettes rondes, les accueillit et les dirigea vers le mur du fond d’où il fit sortir un long caisson métallique. Le cadavre de Julien Morel était pas très beau à voir. La chair autour du trou occasionné par le projectile au-dessus du sein gauche avait pris une teinte peu ragoûtante. Mais le plus atroce restait les mutilations.

— Plus de langue, plus de parties génitales !

— J’ai jamais vu ça Luis !

— Moi si.

Le jeune médecin confirma ce que le patron leur avait dit. Ils le saluèrent et furent soulagés de se retrouver hors de cet endroit lugubre et froid.

— Je me demande souvent comment on peut bosser là-dedans, au milieu des cadavres, c’est vraiment spécial.

— Heureusement qu’il y a des mecs comme ça, Carlos, on en a besoin. Ils nous aident beaucoup dans nos enquêtes. Mais t’as raison, c’est un métier pas banal. J’ai un ami légiste à Paris, un type génial, bon vivant. Il me répète tout le temps que pour aimer et apprécier la vie, il ne faut jamais oublier qu’elle est fragile. Et il est bien placé pour le savoir.

La salle de réunion, lumineuse, devait faire une bonne cinquantaine de mètres carrés. De larges baies vitrées procuraient une vue splendide sur Malaga. La magnifique cathédrale dont les tours émergeaient par-dessus les toits se trouvait à moins d’un kilomètre à vol d’oiseau. On apercevait le port et les nombreux paquebots de croisière gigantesques qui déversaient chaque jour des milliers de touristes étrangers dans les rues de la ville. Le tourisme représentait une manne importante dans l’économie de la ville et de la région, alors un meurtre sordide, et qui plus est celui d’un étranger, ça faisait désordre. C’était ce que le patron venait d’expliquer à tous les membres de la brigade présents dans la pièce. Ils étaient neuf, six hommes et trois femmes, entre trente et cinquante ans. Après avoir présenté Luis, Alcazar avait fait un rapide topo du dossier Morel. Très rapide, parce que depuis la découverte macabre, l’enquête piétinait et les journaux en faisaient des tonnes dans le sensationnel, on sentait bien qu’il était agacé.

— Faut se bouger les gars ! Faut vite trouver le malade qui a fait ça !

Un flic était intervenu, un des plus âgés, celui qui avait été présenté comme le numéro deux de la brigade.

— On n’a pas besoin d’un flic étranger chez nous, on est capable de régler cette affaire sans lui !

— Je sais José, Cordoba est là seulement en observateur, il fera équipe avec Carlos et ne restera que quelques jours. Alors au boulot !

Sur ce le patron s’était éclipsé, laissant derrière lui un parfum de malaise que Luis s’empressa de dissiper en prenant la parole.

— Je suis sûr que vous êtes tous et toutes de supers policiers. Je ne suis pas venu pour vous apprendre à bosser, mais ce que je peux vous affirmer, c’est que vous ne trouverez pas ici celui qui a éliminé Morel.

— On peut savoir pourquoi ?

C’était une des trois femmes qui avait posé la question, plutôt mignonne, quarante ans maxi, grande, mince, brune aux yeux noirs.

— Parce qu’il est déjà rentré en France.

— Comment vous savez ça vous ?

— Parce que je le sais !

— Et qu’est-ce que vous faites là alors ?

— Je veux juste parler aux personnes que Morel fréquentait depuis qu’il vivait à Malaga. Elles ont peut-être croisé le mec qui l’a tué et…

— Et vous nous prenez pour des nuls ! Vous croyez qu’on vous a attendu pour faire ça ?

C’était la même nana qui était intervenue. Elle avait légèrement haussé le ton, et l’expression de son visage reflétait parfaitement son indignation quant aux propos de ce commissaire français.

— OK, on se calme, vous êtes ?

— Moreno. Inspecteur Carolina Moreno.

— Je suis absolument certain, inspecteur Moreno, que vous avez déjà interrogé beaucoup de monde, mais je vais recommencer, certaines personnes ont pu omettre de vous parler de certaines personnes !

À son tour, Luis avait haussé le ton. Le silence se fit et il adressa un signe à Carlos pour l’inviter à le suivre en direction de la porte. Au moment où ils quittaient la salle, ils entendirent une voix féminine prononcer avec une pointe d’ironie et en français…

— Bonne chance commissaire !

Ils savaient tous les deux qui avait parlé.

***

Il était un peu plus de dix-huit heures quand ils arrivèrent à Rincon de la Frontera, devant un joli petit immeuble tout blanc, situé de l’autre côté du paseo maritimo, à tout juste une centaine de mètres de la plage où on avait retrouvé le corps. C’était là, au deuxième étage, qu’habitait Julien Morel. Carlos connaissait l’endroit, pour y être déjà venu, et il avait récupéré les clefs dans la loge du gardien-concierge. L’appartement était propre, bien rangé. Pas de vaisselle sale dans l’évier, pas de linge ni de vêtements éparpillés, même la chambre était impeccable et le lit bien fait.

— Soit ce type était un maniaque, soit il ne venait pas souvent. On a pas tous la chance d’avoir une mère comme la mienne !

— T’as raison Luis, ça ressemble pas à un endroit habité. C’est ce que j’ai dit à José quand on est rentré l’autre jour.

— Et il a dit quoi ?

— Rien.

— Vous avez fouillé quand même ?

— Oui, mais on a rien trouvé qui puisse nous aider.

— On va aller parler au gardien.

— Il est pas très bavard je te préviens.

Effectivement, Paco Gomez, le gardien, ne parlait pas beaucoup. Il connaissait à peine le locataire assassiné et n’avait rien remarqué de spécial le concernant.

— Pas de visite ?

— J’ai déjà dit à ce policier, en désignant Montoya, et à son collègue que je ne passe pas mes journées à surveiller les habitants de la résidence, j’ai pas que ça à faire.

— C’est vous qui faites le ménage dans les parties communes ?

— Non, c’est Maria, elle travaille pour une société extérieure. Elle vient le mardi et le jeudi.

— Vous avez l’adresse de cette société ?

— Oui, ils m’ont laissé des cartes de visite pour que je leur fasse de la publicité chez les autres gardiens du coin.

Ils avaient remercié Gomez et regagné la Seat.

— Bravo, Luis, bien joué, tu as un coup d’avance sur nous ! Tu veux aller voir la fameuse Maria ?

— Non, pas ce soir, dépose-moi à l’hôtel, j’ai besoin de me rafraîchir et de me reposer un peu. Je sors ce soir.

— Au Lorca ?

— Oui, et si tu es libre je t’invite.

— OK, on se retrouve chez Ramon, à neuf heures.

***

2

Comme prévu, Montoya était bien là qui l’attendait, debout devant le bar, une bière à la main. Il était à peine neuf heures du soir et presque toutes les tables de la bodega Ramon étaient déjà occupées. Luis rejoignit son coéquipier qui le conduisit dans un renfoncement de la salle, à l’écart de l’effervescence ambiante et du niveau sonore élevé.

— On sera plus tranquilles ici.

— Il marche bien le resto de ton beau-frère.

— Oui, il ne se plaint pas.

— Merci d’être là, t’étais pas obligé.

— J’avais rien de mieux à faire ! Et puis, une invitation au Lorca, ça ne se refuse pas. Bonne musique, belles nanas.

Carmen, la sœur de Carlos s’était occupée d’eux. Mince, belle allure, plus jeune que son frère, elle avait un beau visage, les yeux clairs, et des cheveux noirs emprisonnés dans un chignon parfait. Elle avait échangé quelques phrases en français avec Luis, souvenirs de séjours à Paris, ville qu’elle aimait beaucoup.

— Moi aussi j’aime ma ville. On dit que c’est la ville de l’amour !

— J’ai vécu une belle histoire là-bas quand j’étais plus jeune. Une histoire belle et triste.

Elle avait dit ça d’une voix grave et ses yeux s’étaient voilés. Luis attendait la suite, mais elle avait déposé les plats qu’ils avaient commandés et s’en était retournée en cuisine sans se retourner.

— J’ai comme l’impression d’avoir gaffé Carlos.

— Tu pouvais pas savoir Luis.

— Quelque chose de grave ?

— Désolé, mais je peux seulement te dire que c’est une histoire qui s’est achevée tragiquement. Carmen en a bavé, mais ça va mieux depuis qu’elle est avec Ramon. Si tu restes suffisamment longtemps ici, peut-être qu’elle…

— Tu me dis qu’elle va mieux, alors pas la peine de la replonger dans des moments douloureux.

Ils s’étaient tus. On entendait les sons étouffés qui venaient de la salle à côté, désormais pleine à craquer. Ils avaient bien entamé leur assiette lorsque Carmen ressortit de la cuisine et marcha vers eux, un grand sourire aux lèvres.

— Le passé c’est le passé !

Elle souriait vraiment, mais ses yeux brillaient encore des larmes qu’elle avait dû refouler quelques minutes plus tôt.

***

Il était presque vingt-trois heures quand les deux policiers s’installèrent à une des rares tables du Lorca encore inoccupée. Alcazar, le grand chef, avait parlé d’un bar de nuit branché en citant l’établissement où Julien Morel travaillait, et c’était tout à fait justifié. Les clients, femmes et hommes entre trente et cinquante ans, étaient habillés dans un style recherché, décontracté-élégant. Les serveuses et les serveurs portaient un uniforme, chemise rouge, pantalon et gilet bleu ciel. Sur la gauche, après le vestiaire, le comptoir du bar formait un arc de cercle long d’une bonne dizaine de mètres. Tous les tabourets qui longeaient l’arrondi étaient squattés par les clients et clientes les plus jeunes. Les tables étaient réparties autour de la piste de danse circulaire qui se prolongeait par une scène où trois musiciens, et une chanteuse au physique et à la voix très agréables se produisaient en live.

— T’avais raison, Carlos, belles nanas, bonne musique, chouette endroit.

— Oublie quand même pas qu’on est là pour le boulot !

— Pas de risque que j’oublie, t’inquiète pas.

— Je connais le patron, je vais le chercher.

Une serveuse s’approcha de la table où Luis attendait, le regard fixé sur la chanteuse qui susurrait langoureusement I just call to say I love you…

— Elle est super non ?

Il n’avait pas vu arriver la jeune femme en uniforme, et se retourna. Il découvrit une belle plante, blonde, au regard profond. Un grand sourire éclairait son beau visage dévoilant une dentition parfaite entourée de lèvres bien ourlées qu’un rouge brillant soulignait. Un instant décontenancé, il se reprit aussitôt.

— Oui… vraiment super.

— Tout le monde l’adore, elle a beaucoup de talent et on espère qu’elle fera une belle carrière. Vous attendez quelqu’un ?

— Oui, moi, bonsoir Luisa !

Elle pivota et découvrit Montoya qui revenait.

— Ah, c’est toi ! Bonsoir Carlos, tu es là pour bosser ou…

— Pour bosser Luisa. Je te présente le commissaire Cordoba. Il vient de France et il est ici pour enquêter sur le meurtre de Julien.

— Pourquoi un flic français ?

Ce fut Luis qui intervint.

— Primo parce que la victime est un ressortissant français, deuxio parce que je suis persuadé que celui qui l’a tué est aussi un Français, tertio parce que le mode opératoire de l’assassin correspond à celui utilisé dans trois autres crimes sur lesquels j’enquête depuis plusieurs mois.

— Un tueur en série ?

— Non, un tueur à gages.

— Vous voulez dire que quelqu’un a payé pour faire assassiner Julien ?

— Oui, c’est ce que je crois. Vous le connaissiez bien ?

— Assez bien, et comme je l’ai déjà dit à Carlos et à José, c’était un mec sympa. Il aimait un peu trop les femmes, mais elles l’aimaient aussi beaucoup ! Quelques clientes venaient plus souvent au Lorca depuis qu’il était arrivé.

— Une régulière ?

Luisa se figea. Elle venait d’apercevoir un homme qui approchait de la table, Carlos fit les présentations.

— Luis, je te présente Alvaro Flores, le propriétaire des lieux. Monsieur Flores, voici le commissaire Cordoba.

Le type, la cinquantaine énergique, avait belle allure. Le genre de patron self-made man. Il tendit une main vers Luis qui s’était levé de sa chaise.

— Bienvenue au Lorca commissaire, avant que je vous répète ce que j’ai dit à Carlos et à son chef l’autre jour, permettez-moi de vous offrir à boire. Ça restera entre nous !

— Un Cuba libre pour moi.

Flores interrogea Carlos du regard qui répondit « même chose pour moi », puis en pointant trois doigts confirma la commande à Luisa. Elle s’éloigna en direction du bar et Luis remarqua sa démarche légère, aérienne, gracieuse. Les trois hommes s’installèrent autour de la table, et le français dut réitérer le pourquoi de sa présence en Espagne. Flores parut rassuré par ce qu’il apprenait.

— Donc, ce n’est pas quelqu’un de chez nous qui a assassiné Julien.

— D’après moi non. Mais le tueur a certainement passé plusieurs soirées dans votre bar pour étudier les habitudes de sa future victime. Vous n’avez rien remarqué ?

— Non, Julien faisait bien son boulot, il était apprécié de tous ici. Pour ce qui est de sa vie à l’extérieur, je ne sais pas grand-chose. Ce qui se passe pour mes employés entre trois heures du matin et neuf heures du soir ne me regarde pas. Ça s’appelle la vie privée.

— Ma question portait justement sur ce que vous auriez pu remarquer entre neuf heures du soir et trois heures du matin.

— Désolé, mais pour ça il vaut mieux que vous vous adressiez à ceux qui travaillaient avec lui, en salle et au bar.

Luisa revenait déjà. Un léger picotement traversa Luis quand elle lui rendit le sourire qu’il lui fit en la voyant s’approcher avec son plateau. Elle déposa les trois verres et s’en retourna au bar récupérer d’autres commandes.

— Belle fille cette Luisa n’est-ce pas commissaire ?

— Oui, très.

— Vous devriez l’interroger à la fin de son service, il se peut qu’elle ait remarqué quelque chose ou quelqu’un concernant votre affaire. À propos de l’affaire justement, j’ai parlé avec Marino Miguel Alcazar que vous avez sûrement déjà rencontré, et il est d’accord avec moi sur le fait qu’elle doit être résolue rapidement. Vous comprenez bien qu’un meurtre de cette nature c’est mauvais pour notre ville.

Luis contempla le bar, la salle, la piste de danse, partout le monde grouillait, le Lorca était plein à craquer.

— Quand je vois ce que je vois, il me semble évident que tous ces gens sont morts de trouille ! Je bois à la peur qui leur donne l’envie de s’amuser !

Flores se saisit de son verre et but d’un trait ce qu’il contenait encore. Il le reposa sur la table et se leva brusquement.

— Je crois que vous m’avez compris commissaire, vous n’avez plus besoin de moi. Je vous souhaite une bonne soirée.

Il était déjà une heure du matin. Les musiciens et la chanteuse, après plusieurs passages d’une trentaine de minutes chacun, venaient de saluer une dernière fois avant de se retirer. Un DJ prenait aussitôt le relais, debout devant ses platines, installées en fond de scène. L’ambiance changea radicalement. La musique électro attira sur la piste une clientèle plus jeune que précédemment. Toujours assis à la même table, Carlos et Luis avaient par deux fois renouvelé leurs consommations et Luisa, à l’affût, s’était chargé du service. Les regards appuyés, les sourires mutins, qu’elle et Cordoba échangeaient quand elle déposait les Cuba Libre n’avaient pas échappé à Montoya.

— C’est chaud !

— Oui, mais c’est pas professionnel.

— Tu n’enquêtes pas officiellement d’après le patron, alors tout va bien !

— T’as raison, je ne suis qu’un touriste ! Et il est tard, j’ai envie de rentrer à l’hôtel. Demain on ira interroger Maria, la femme de ménage. Tu me déposes ?

— Oui, mais faut payer les consos avant.

— Je t’invite. Attends-moi là, je vais régler au bar.

Il repéra Luisa et se dirigea vers l’endroit où elle se tenait. Arrivé à sa hauteur, il extirpa quelques billets d’une poche de son jean et les lui tendit. Elle les refusa et dit que c’était offert par Flores.

— Hors de question, je paie ce que je dois !

— OK ! OK !

Elle prit les billets, les compta et lui en rendit deux. Il les fourra dans la poche d’où il les avait sortis, et pris d’une inspiration subite, se pencha en avant.

— Vous connaissez un bon restaurant grec dans cette ville ?

Surprise par la question, elle resta un instant silencieuse, réfléchissant, et…

— Oui, il y en a un dans la calle mayor, c’est derrière la cathédrale. Il paraît qu’il est très bien.

— Au point que vous voudriez m’y accompagner ?

Ça, c’était vraiment pas professionnel, mais comme Carlos avait dit, il était là en observateur. Luisa soupira, mais pour la forme.

— Tu procèdes toujours comme ça monsieur le commissaire ?

Elle était passée au tutoiement, c’était très bon signe. Elle souriait, elle était vraiment jolie.

— Pas toujours, mais souvent !

— Et ça fonctionne ?

— Pas trop !

Elle éclata de rire, regarda Luis, amusée et intriguée, puis :

— Je ne travaille pas demain soir, rendez-vous là-bas à neuf heures.

***

Allongé sur le lit de sa chambre, Luis ne dormait pas. Les images du cadavre de Julien Morel défilaient devant ses yeux, le renvoyant aux trois précédents corps pareillement mutilés. Il était certain désormais que le tueur qu’il traquait n’agissait pas comme un serial killer psychopathe et obsessionnel. Aucun point commun entre les quatre victimes mis à part le sexe et l’âge. En effet, si tous étaient des hommes entre trente-six et trente-neuf ans, ils étaient tous totalement différents physiquement. D’autre part, et même s’ils avaient tous vécu quelque temps en région parisienne, deux des trois types assassinés habitaient depuis des années en province et le meurtrier avait agi sur place. Quant à Morel, il était venu jusqu’à Malaga pour l’éliminer. Oui, il était évident pour Luis que tous ces meurtres étaient l’œuvre d’un professionnel, un tueur à gages lancé sur les traces de personnes désignées par un homme, ou une femme, qui le payait, sûrement très cher, pour les tuer et les mutiler selon ses ordres. La soirée au Lorca, même si elle ne lui avait pas appris grand-chose, lui avait permis de se faire une idée plus précise sur le serveur français. C’était d’après Luisa un mec à nanas. Il fallait creuser de ce côté-là, il avait très bien pu être victime de son penchant pour la gent féminine. La jolie serveuse lui en dirait peut-être un peu plus au cours de leur dîner au resto grec. Pour l’heure, il devait essayer de dormir un peu. Il se focalisa sur le visage de Luisa, elle avait quelque chose de Mathilde.

***

3

Il était huit heures du matin et il attendait Carlos dans la salle du restaurant de l’hôtel. La nuit avait été de courte durée. Réveillé à sept heures par le bruit dans les couloirs et la lumière qui pénétrait dans sa chambre à travers la baie vitrée, qu’il n’avait pas pensé à obturer avec le volet roulant prévu à cet effet. Après s’être rasé, douché, habillé, il était descendu au rez-de-chaussée où il espérait trouver un bon café.

— Bonjour monsieur, installez-vous, je m’en occupe.

Le type qui l’avait accueilli, jeune, sympa, était revenu quelques minutes plus tard en poussant un chariot. Café, jus d’orange, pain grillé, beurre, miel et confiture, tout ce qu’il fallait pour un bon petit déjeuner.

— C’est gentil, mais j’ai juste demandé un café !

— Je sais. Mais vous risquez de ne pas manger avant longtemps, Chez Ramon on ne sert qu’à partir d’une heure et demie.

— Comment tu sais que je mange chez Ramon ?

— Parce que je sais que vous faites équipe avec Carlos, et comme il ne va jamais manger ailleurs.

— Bravo, t’aurais dû être flic !

— Merci, mais j’ai pas du tout envie d’avoir la même vie de merde que mon père ! Bon je vous laisse, j’ai d’autres clients à servir.

Effectivement, des gens étaient entrés entre-temps dans la salle et attendaient qu’on s’occupe d’eux. Luis n’avait pas vraiment d’appétit à cette heure-là, mais suivant les conseils du jeune employé, il s’était forcé à manger. Carlos arriva à huit heures et demie, comme prévu la veille, quand il l’avait déposé devant El Mirador.

— Waouh ! T’avais faim ce matin à ce que je vois !

— Le serveur m’a conseillé de bien me nourrir, tu sais pourquoi ?

— Oui, parce que chez mon beau-frère on sert tard.

— Tu peux m’expliquer comment il sait que je déjeune chez Ramon ?

— Il t’a vu là-bas avec moi hier soir. Il y fait quelques extra pour aider sa tante au service.

— Carmen, ta sœur ?

— Oui, je t’expliquerai.

— OK, tu veux un café avant de partir ?

— Non merci, on peut y aller.

***

L’agence qui employait Maria, la femme qui faisait le ménage des parties communes de la petite résidence où logeait Julien Morel se trouvait à l’entrée de Rincon de la Frontera, au tout début du paseo maritimo. C’était un local modeste, où une femme d’une cinquantaine d’années, bien en chair, au visage poupin, était assise derrière un grand bureau, recouvert de chemises cartonnées de couleurs différentes. Elle leva les yeux sur les deux flics quand ils pénétrèrent par la grande porte vitrée qui donnait sur le trottoir.

— Bonjour Messieurs.

Ils s’avancèrent, Carlos présenta sa carte de Policia à la dame qui se leva précipitamment, en rougissant, le regard inquiet.

— Je…

Luis la rassura et lui expliqua le pourquoi de leur visite. Elle se calma et griffonna sur un bout de papier l’adresse et le numéro de téléphone de Maria. En le donnant, elle ne put s’empêcher de dire tout le bien qu’elle pensait de cette employée honnête, qui n’avait jamais eu de problème dans son travail.

— Merci madame.

Moins d’une heure plus tard, ils se présentaient au domicile de la femme de ménage. Carlos l’avait appelée aussitôt qu’ils étaient sortis de l’agence et coup de bol, elle était chez elle jusqu’à midi. Grande fut la surprise des deux hommes en découvrant la jeune femme qui venait d’ouvrir la porte et se tenait devant eux. Maria avait au maximum vingt-cinq ans, elle était grande, mince, de longs cheveux noirs tombaient sur ses épaules et entouraient son visage de Madone aux yeux clairs. Elle portait un jean qui moulait parfaitement ses formes, et un tee-shirt rouge sang qui recouvrait des seins, que l’on pouvait sans se tromper, imaginer parfaits. La scène dura quelques secondes, un ange passa, puis…

— Bonjour Messieurs, entrez.

La voix grave sonnait triste.

— Bonjour, je suis l’inspecteur Montoya, et voici le commissaire Cordoba, qui vient de France. Vous êtes Maria ?

— Oui… vous ne vous attendiez pas à ce que vous voyez !

— Heu… non.

— Les clichés ont la dent dure.

Elle les fit entrer dans une pièce assez grande qui servait de salon et de coin repas. Dans un renfoncement sur la gauche, séparée par un bar-comptoir, se trouvait une kitchenette. Une porte au fond à droite délimitait certainement la partie jour de la partie nuit. L’appartement était clair, meublé sobrement, des affiches de films, petits formats, encadrées, décoraient les murs blancs. Elle savait pourquoi ils étaient là, Remedios, sa patronne l’avait appelé pour la prévenir que des policiers voulaient lui parler. Elle les pria de s’asseoir en désignant les deux petits fauteuils qui faisaient face à un canapé, et proposa du café qu’ils acceptèrent.

— Je viens de le faire, il est encore chaud.

Elle s’absenta juste le temps de remplir trois tasses qu’elle revint déposer sur la table basse qui se trouvait entre les deux fauteuils et le canapé où elle s’installa. Luis ne la quittait pas des yeux. Elle se mouvait avec une grâce qui lui faisait penser à Luisa, et donc à Mathilde. Il fut le premier à parler.

— Vous connaissiez Julien Morel ?

— Oui. Au début on se croisait dans les parties communes, puis un jour il m’a proposé de faire le ménage chez lui, en me payant évidemment, ça m’arrangeait puisque j’étais sur place et j’ai dit oui. De fil en aiguille, on a pris un verre, puis un resto, il était sympa, mignon, et pour finir nous avons eu une aventure. Ça n’a duré que trois mois, mais je préfère que vous l’appreniez par moi. J’ai encore le double des clés de son appartement, c’est lui qui me les avait données. On s’était quittés en bons termes et je continuais à faire le ménage chez lui quand il n’était pas là.

— Je comprends mieux pourquoi c’était nickel.

— Quand je fais quelque chose, je le fais bien !

— C’était quand la dernière fois ?

— La veille du jour où on a trouvé son cadavre sur la plage, pas très loin d’ici. J’ai lu que c’était horrible.

— Rien d’anormal dans l’appartement ?

— À part qu’il était là non, rien d’anormal.

— Il était là ? Vous lui avez parlé ?

— Oui, mais pas beaucoup, il venait de se lever et il était pressé. Il m’a dit qu’il devait retrouver quelqu’un avant d’aller travailler. Mais je ne sais pas qui. Je penche quand même pour une nana, Julien aimait un peu trop les femmes à mon goût. Je ne suis pas allée souvent au Lorca quand on était ensemble, mais suffisamment pour le voir agir avec les clientes. J’ai même imaginé que c’était une de ces femmes qui l’avait tué, une plus possessive, plus jalouse, qu’il aurait poussée à bout.

Carlos, qui n’avait rien dit jusque là, intervint.

— C’était ce que nous avions envisagé, mais le commissaire Cordoba est arrivé hier de Paris avec la quasi-certitude que Julien Morel a été tué pour le compte de quelqu’un vivant en France. Il ne vous avait pas parlé de sa vie là-bas ? Est-ce que vous savez pourquoi il était venu travailler en Espagne ? Est-ce qu’il fuyait quelque chose ? Quelqu’un ?

— Je sais qu’il était associé avec deux autres personnes dans une boîte de nuit. Il avait vendu ses parts parce qu’il voulait voyager. Il n’avait pas l’air de fuir, mais je peux me tromper. Vous pensez que c’est une vengeance, commissaire ?

— Venue d’ailleurs oui, mais je peux moi aussi me tromper. Voyez, une femme de ménage peut cacher une artiste, une musicienne, une comédienne.

— Bravo, commissaire, oui, comédienne débutante qui court le cachet, et professionnelle du ménage pour payer les cours du conservatoire, le loyer, la bouffe. D’ailleurs, il est presque midi et je dois partir, une cage d’escalier m’attend.

Après avoir salué et remercié Maria, les deux flics avaient regagné la Seat, garée de l’autre côté de l’entrée du petit immeuble, où logeait la superbe femme de ménage. Il était tout juste midi.

— Puisqu’on est là, j’aimerais bien voir de près l’endroit où on a trouvé le corps de Morel. Tu sais où c’est ?

— J’étais avec Carolina et José pour les premières constatations. C’est pas loin de là où il habitait.

— Et c’est pas non plus très loin d’ici donc.

— Tu penses que… non, Luis, pas Maria ! Ça ne colle pas avec ta théorie du tueur français.

— D’accord, mais le tueur s’est peut-être servi d’elle pour attirer Morel dans un piège mortel. On ne lui a même pas demandé où elle était la nuit du meurtre.

— OK, c’est un peu tordu, mais je la rappellerai pour vérifier.

***

Marino Miguel Alcazar, le grand chef de la criminelle était debout devant la baie vitrée qui éclairait son bureau. Il contemplait la ville qui s’étalait à perte de vue. La porte était ouverte, Luis avait toqué, et sans se retourner le patron avait dit « entrez, je vous attendais ». Il était presque seize heures. Après avoir passé un long moment sur la scène de crime, Montoya et Cordoba avaient repris la direction de Malaga. Ils ne s’étaient pas beaucoup parlé sur le chemin du retour, chacun dans ses pensées. À la Bodega Ramon,