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À la suite de leur rupture amoureuse, Fernand prend la résolution d’oublier Frédérique. Pour cela, il décide de voyager à travers le monde, afin de retrouver les musiciens porteurs de leurs souvenirs et les éliminer. Seulement, dans son périple, il fait la rencontre d’un personnage aussi drôle qu’étrange susceptible de changer le cours de sa vie.
A PROPOS DE L'AUTEUR
Pour
Jean Haquerre, écrire est une façon de prendre le large. Cela lui permet également de rire des situations les plus désespérantes.
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Seitenzahl: 68
Veröffentlichungsjahr: 2022
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Jean Haquerre
Mesures de l’oubli
Nouvelles
© Lys Bleu Éditions – Jean Haquerre
ISBN : 979-10-377-5727-2
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
À ton rire, Sophie
Lui rua dans les brancards, clamant haut et fort qu’il n’était pas coupable, et l’autre hurla à la dérive d’une clef
de sol son ingénuité perdue,
et il sauta par-dessus les trous des montagnes, et ils étaient libres.
Leur rencontre, ce fut un tableau pétant de couleurs style art abstrait doigts d’enfants.
Une explosion de vie sur une toile maculée de bave et de terre. Pas possible que ça ne finisse pas avec quelques gouttes de sang sur les cailloux qui somnolent sur le chemin.
Deus ex machina
20 ans auparavant, Fernand Nestor tomba sur l’homme de sa vie. Jolie créature exhalant un doux parfum de banane écrasée avec du miel et du citron, il s’appelait Fred.
Ils se rencontrèrent sur les chevaux de bois du manège, lui avait perdu un pari, lui voulait tourner, tourner à en oublier sa peur de respirer.
Ils étaient voisins de licornes. Leurs regards se croisèrent et d’un commun accord, ils décidèrent de faire la course.
C’est le petit garçon devant eux, chevauchant un énorme cochon rose, qui remporta la course folle du manège.
Ils allèrent ensuite jeter des cailloux dans la rivière, Fred lui raconta des histoires magiques de petits pains qui prennent vie. Et il en connaissait un rayon, car il travaillait comme décorateur de gâteaux et petits pains à la boulangerie du coin de la rue.
Ils mangèrent une glace de vingt-quatre parfums en jouant à « souviens-toi », jeu dont la règle consiste à associer un parfum à un souvenir. Puis allèrent la vomir en se tenant par la main. Le lendemain, il l’emmena à un petit concert de jardin public. Ils s’effleurèrent à coup de baisers papillon. Et ils tombèrent irrémédiablement amoureux ; Fred, de son sourire, lui, de sa façon de dire « petits pains boules de vie ».
Tournoyer plus vite me bouchant très fort
les oreilles pour entendre la musique
sentir le picotement des étincelles de poussière
vivre sur un nuage couleur embrun et les vagues et le vent sur ma peau et la mer
Ils se marièrent quelque part dans l’année. Par superstition, leur musique préférée passait en boucle chez eux.
Tant et si bien qu’elle servit de colle pour le papier peint, de ciment pour les escaliers du perron et que son odeur parfuma toute la maison.
Vague qui se fracasse,
qui t’envole très haut, très vite, très loin impuissante.
Un beau jour cependant, leur relation se détériora, la maison se fana. Une odeur de rat crevé envahit l’air. Et Fred partit.
Hurle maintenant prends la grotte à deux mains
et hurle
que tes poumons s’en renversent
hurle
seul remède à ton vide
Pour Fernand Nestor, ce fut une catastrophe. Un trou béant dans son âme lui fit attraper un rhume inguérissable. Il devint allergique aux odeurs. Les notes de musique lui filèrent de l’eczéma.
Je voudrais courir plus vite que le rugissement qui pousse le long de mes entrailles
Fernand
« Aujourd’hui, samedi 22 avril, Fred fait sa valise. Ou plutôt ses cartons. Il est gentil, il me laisse tous les souvenirs, et ne repart qu’avec ses petites choses à lui.
Chaque objet est soigneusement arraché à la vie d’avant pour aller reposer dans la malle, enveloppé d’un linceul. De par sa minutie, il me fait savoir qu’il ne fuit pas, il part. »
Envoyer tout valdinguer
ressentir l’immense vide de son absence, tuer
« Et je lui en veux ! Et je maudis ce que nous avons été, je maudis ce que nous n’avons pas fait. Je crache sur le capitaine qui a laissé le navire aller à vau-l’eau, les voiles s’abîmer et se déchirer, la rouille s’installer et l’équipage déserter. »
Et le vent qui hurle dans cette toute petite boîte qui tourne et retourne et mugit de colère exhalant une très forte odeur d’épices et de fruits pourris cherchant à la renverser, à sortir à démolir.
« Je veux fracasser un à un tous ces sentiments qui m’envahissent, me prennent à la gorge et me noient. Les arracher, les piétiner, les mordre, qu’ils disparaissent à jamais. Et plus encore ! Je veux les anéantir et leur faire regretter d’avoir pris vie. Et je veux brûler la maison, emprisonner ces odeurs si familières, les affamer, les torturer et les détruire. Je veux tuer cette maudite chanson qui me trotte dans la tête et qui rythme jusqu’à mes soupirs et éternuements. M’arracher la cervelle, la tremper dans le bain de l’oubli, la récurer avec une brosse à dents pour enlever les dernières notes accrochées. Me laver à l’acide pour perdre ses odeurs et le rythme de la mélodie qui me fait vibrer la peau et les cils.
Remonter mon cœur comme une horloge mécanique, le brancher sur des tambours de rue pour capter un autre rythme, puis le déchirer. » Sur ces élucubrations, Fernand prit son chapeau, son manteau, son vélo et partit voir la mer.
Être montagne et se briser sur du vent
au rythme du pas lourd des éléphants…
Il fallait vraiment avoir l’intérieur sens dessus dessous pour aller à la mer à vélo, car cet après-midi-là, le vent décorna quelques bœufs qui regardaient le paysage d’un air bovin. Les efforts que fit Fernand l’aidèrent à retrouver sa raison, et ses idées devinrent plus claires. Et, tandis qu’il faisait de petits châteaux de sable avec ses pieds et dégustait le gros muffin au citron et à la confiture de framboise acheté sur le chemin, il comprit que se tuer n’était peut-être pas la meilleure solution. Il craignait que, même mort, Fred continue de hanter son âme.
Le fil des pensées du tortionnaire suicidaire, voulant se récurer à l’acide, prit donc une tournure un peu plus facile (et un peu moins douloureuse) à mettre en œuvre.
Il allait commencer par détruire tout ce qui avait un rapport avec Fred. N’ayant pas de bombe H sous la main, il renonça à raser le village et préféra mettre le feu à sa maison puis s’en aller. Il n’osait pas tuer tous leurs amis communs par peur de représailles, Fred étant très rancunier.
Et l’odeur de l’eau sucrée qui tourneboule et le crépitement de la poussière dans l’âtre et la pluie qui hurle qu’elle n’a rien fait.
Puis, un à un, il irait abattre tous les membres de l’orchestre qui avaient composé cette mélopée qui avait été tour à tour le berceau, le jour, la nuit, puis le tombeau de leur amour.
Et le feu qui pétille chantant son odeur de bois qui brûle et le bois qui brûle, qui fredonne ses forêts sur un air de jazz.