Nora - Tome 1 - Thibault Jeanroy - E-Book

Nora - Tome 1 E-Book

Thibault Jeanroy

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Beschreibung

Antoine, jeune homme de vingt ans, quitte brusquement sa vie parisienne pour New York, animé par un besoin urgent d’échapper à son passé et de se reconstruire. Son seul désir est de fuir ses souvenirs et de découvrir un ailleurs prometteur. Pendant le vol, il rencontre une femme dont la bienveillance et l’empathie le marquent. Ce hasard, chargé de mystère et d’émotion, transformera son destin, l’entraînant dans une aventure imprévisible où tout pourrait changer. Une rencontre, un nouveau départ… et si tout ne faisait que commencer ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Thibault Jeanroy considère l’écriture comme son langage privilégié, un refuge et un moyen d’exprimer l’indicible. Durant une période sombre de sa vie, les idées ont jailli, donnant naissance à cet ouvrage.

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Seitenzahl: 181

Veröffentlichungsjahr: 2024

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Thibault Jeanroy

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nora

Tome I

Les amours perdus

Roman

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

© Lys Bleu Éditions – Thibault Jeanroy

ISBN :979-10-422-4726-3

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

 

 

 

 

Ceux sans qui ce roman n’aurait pu exister

 

 

 

Avant toute chose, je tenais absolument à dédier ce premier livre à toutes les personnes qui m’ont permis d’aller mieux, qui m’ont soutenu, aidé, et dont l’amitié ou le lien compte énormément à mes yeux. Cette histoire parle de moi, mais aussi d’eux, d’une certaine manière.

 

Je commence donc par remercier mon plus fidèle ami de longue date qui est un peu comme le grand frère que je n’ai jamais eu, Arthur. Tes conseils ne sont peut-être pas ceux d’une personne expérimentée, mais ceux de mon ami le plus cher, et je ne te remercierai jamais assez pour ta patience et toutes ces heures passées à m’écouter, dans ton salon ou ta cuisine. Notre amitié a débuté il y a 7 ans dans un self près du métro Corvisart, et c’est notre voyage à New York qui m’a en partie inspiré ce roman que je te dédicace affectueusement.

 

Ensuite l’une des personnes les plus talentueuses que je connaisse, Darius. Sans le vouloir, c’est toi qui m’as le plus motivé à écrire. Je connais le jeune cinéaste, mais surtout le jeune homme sensible et drôle que tu es, celui qui sait écouter et qui pendant de longues heures m’a écouté parler des plus grands sentiments amoureux que j’ai pu ressentir au cours de ces dernières années. Notre amitié s’est construite autour du Woody Allen, Kubrick, Scorsese, Balavoine, Aznavour… En bref, autour du cinéma et de la musique, deux des plus belles choses qui existent au monde. Je ne compte plus les choses qui nous lient ni toutes ces heures à parler de nos vies, mais elles ont beaucoup compté pour moi. Merci pour tout, mon frère, je crois en toi.

 

PS : Clint Eastwood, Woody Allen et Xavier Dolan ne font plus de cinéma, je compte sur toi pour prendre leur place.

 

Victoire, je termine ce roman alors que tu es revenue. Tu fais partie des personnes qui ont répondu présentes à un moment de ma vie où j’étais au plus mal, et pour ça je t’en serai à jamais reconnaissant. Tu es une personne formidable et je m’excuse de ne pas avoir été à la hauteur. Je promets de faire de mon mieux désormais.

 

Magdalena, ma plus longue amitié, on se connaît depuis nos 15 ans. J’adore dire que j’ai une amie qui vit aux États-Unis, ça me rend cool. Je garderai toujours en tête nos promenades dans Paris, tous ces fous rires partagés, toutes les choses qu’on s’est racontées. Mais par-dessus tout, j’apprécie le fait que tu sois très présente dans ma vie alors que 7 288 km nous séparent. Tu as toujours été là quand j’avais besoin, et j’ai essayé d’en faire autant. Au moment où j’écris ce livre, on organise notre voyage en Californie. Je sais qu’il va changer nos vies.

 

Mathilde, aujourd’hui je te considère comme une amie et une personne géniale, mais tu es aussi la première personne que j’ai aimée en entrant dans l’âge adulte et cela a beaucoup affecté ma vie, mais rassure-toi, tout cela est derrière nous. On se connaît depuis un bon moment, mais je n’ai encore jamais goûté à tes pâtisseries, je dois absolument remédier à cela. Ne change rien, tu es une personne incroyable. Merci pour tes mots gentils quand l’occasion se présente et que tu débarques dans mon champ de vision.

Matéo, mon cinéphile préféré, le destin nous a éloignés puis réunis et depuis chacune de nos discussions est un réel plaisir. On se connaît depuis les bancs du collège, on en reparle souvent et ça nous amuse. Encore un que je dois remercier de m’avoir accordé du temps à un moment où je voyais la vie en noir.

 

Chloé, je te devais quelques mots. Tu m’as toujours répondu quand ma relation battait de l’aile, et tu étais encore là lorsque tout s’est terminé et que j’ai dû encaisser le choc. Je ne pensais pas que la vie nous rapprocherait à ce point, mais il faut croire qu’on est faits pour bien s’entendre. Merci pour tes messages gentils et tes conseils. Voilà une autre personne de Châteauroux que j’apprécie beaucoup. J’ai une grosse pensée pour la journée où je t’ai servi de guide touristique, ainsi qu’à ta tante et ton cousin. C’était très amusant.

 

Marie, notre amitié remonte à si loin que je n’arrive même plus à poser une date dessus, mais peu importe. Tout ce qu’on s’est dit depuis toutes ces années, je ne l’oublierai jamais. Une de mes amies les plus proches, comme tous ceux de cette liste, a répondu présente quand la tristesse a pris le dessus dans ma vie. On partage un amour commun pour le cinéma de Tim Burton et ce n’est pas la seule chose qui nous lie.

 

Papa, je ne t’oublie pas. Tu n’as jamais eu la chance de rencontrer la fille qui a tant fait battre mon cœur, mais tu sais dans les grandes lignes ce qu’elle représente pour moi. En tant que père, tu as toujours été très présent dans ma vie, même si durant une grande partie de ma jeunesse j’ai omis de te confier beaucoup de choses. Tu es une figure sage et philosophique que j’affectionne énormément. Et je n’oublierai jamais que mon amour pour le cinéma vient en partie de toi. Un amour autour duquel je vais construire ma vie. C’est toi qui m’as fait découvrir L’Empire Contre-Attaque, Kill Bill, Gangs Of New York, et Au Milieu Coule Une Rivière ainsi que Les Evadés quand j’étais adolescent, ceux-là et tellement d’autres qui font que je passe le plus clair de mon temps dans les salles de cinéma aujourd’hui. Merci papa, merci pour tout.

 

***

 

Maman, j’ai beaucoup de choses en tête, mais ce serait trop long à développer, alors je vais simplement te dire merci. Merci d’avoir travaillé d’arrache-pied pour faire de moi l’homme que je suis aujourd’hui et que je vais devenir. Nos caractères et personnalités sont très différents, mais ça n’empêche pas l’amour éternel que j’ai pour toi. Merci pour ce que tu m’as apporté depuis toutes ces années et pour ton message de compassion au moment le plus difficile de ma vie.

 

Lena, Dorianne et Sandrine, je ne pouvais vous oublier. Les rapports que j’ai avec chacune de vous ont été soit amicaux, soit professionnels, soit les deux. J’ai une pensée pour toutes les conversations que j’ai eues avec vous depuis que je vous ai rencontrées. Vous êtes des personnes importantes dans ma vie, sachez-le.

 

Enfin, je dédicace ce roman à l’une des personnes les plus importantes de ma vie. Sans elle, ce roman ne pourrait exister. Elle se reconnaîtra.

 

 

 

 

 

Chapitre 1

Le voyage

 

 

 

Pour une fois qu’il prenait un moyen de transport qui n’aurait pas de retards, il était soulagé. Cela signifiait un voyage sans embûches où il aurait toute la liberté de réfléchir sans être dans un contexte inconfortable. Et sachant qu’il s’apprêtait à faire un voyage d’une dizaine d’heures en laissant tout derrière lui, il avait vraiment besoin de n’avoir rien d’autre à l’esprit que ce qui l’attendait une fois arrivé à destination.

Même s’il ne regrettait pas d’avoir acheté un billet d’avion dans un moment d’impulsion quelques heures auparavant, sans en avoir parlé à qui que ce soit et sans un minimum de réflexion (du moins pas à l’échelle de ce que cela impliquait), il s’inquiétait au fond de lui de la réaction de ses parents quand il leur passerait un coup de téléphone depuis Manhattan pour les avertir qu’il avait décidé de passer quelques semaines à New York.

Lui qui n’avait jamais quitté la France, lui qui n’avait jamais fait de voyage de plus d’une heure ou deux, Paris étant la plus grande ville qu’il connaissait. Pour un jeune de Châteauroux, n’importe qui dirait qu’il prenait le plus gros risque de sa vie ou qu’il était irresponsable.

Mais lui seul savait pourquoi il en était arrivé là. Sa mère allait sans aucun doute lui en vouloir pendant un bon nombre d’années, et son père lui donnerait une gifle si grande que sa joue serait sûrement déboîtée.

Mais pour le moment, il s’apprêtait à embarquer ; son billet à la main, il attendait de monter pour la première fois dans un avion qui lui ferait traverser l’Atlantique. Et pendant qu’il serait au-dessus des nuages, il avait bien l’intention de fermer les yeux avec du Charles Aznavour dans les oreilles, en oubliant qu’il n’avait sur lui que son carnet à dessins, son ordinateur, trois tenues encore humides, un portefeuille moyennement garni, son passeport, et bien sûr, son téléphone.

Voilà qu’il pénétrait pour la première fois dans un avion. Il trouva rapidement sa place, disons qu’il avait fait en sorte d’en prendre une facilement accessible. Il mit d’abord son petit sac de voyage au-dessus de lui dans les rangements prévus à cet effet et s’assit sur son siège qui, Dieu merci, était confortable. Au moment où il s’était assis, une étrange sensation lui traversa l’esprit : celle d’une soudaine liberté. Sa vie allait changer, il le savait. Au fond de la poche de sa veste, son téléphone vibrait, mais ces notifications à répétition ne perturbait nullement son attention.

Certainement que ses parents, qui n’avaient plus de ses nouvelles depuis deux semaines, commençaient à se questionner, mais ça, c’était un problème pour un autre moment.

Une femme était assise à côté de lui, le regard perdu sur son portable. Il la dévisagea rapidement, comme il aimait le faire lorsqu’il se trouvait à côté d’une personne qui lui était étrangère. Après avoir vaguement supposé qu’elle devait être en voyage d’affaires, il sortit un lecteur MP3, spécialement acheté pour ne pas être dérangé par des coupures de réseau au moment où il serait dans l’air, mit un casque, pencha sa tête sur son siège et ferma les yeux en lançant la chanson « Emmenez-moi ».

Quelques heures plus tard, du moins c’est ce qu’il pensa en s’éveillant d’un sommeil profond qui avait dû durer un bon moment, une secousse le réveilla brusquement. Il sursauta et prit peur, regardant rapidement autour de lui pour voir si les autres passagers avaient réagi de la sorte ou si ce n’était que lui, dû au fait que c’était son premier voyage en avion. À première vue, rien à signaler.

Il se détendit à nouveau sur son siège.

— Tout va bien, jeune homme ? demanda une voix étrangère très proche de lui.

Il se retourna en direction de sa voisine, qu’il soupçonnait d’être une femme d’affaires, et répondit un peu sans réfléchir :

— Ce serait compliqué de dire oui.

La femme le regarda et lui sourit.

— C’est ce que je pensais. En t’asseyant, tu paraissais soulagé d’un énorme poids, et tu t’étais endormi avant même qu’on ait décollé.

Il était étonné de voir à quel point elle l’avait observé, il ne s’attendait pas à ce que quelqu’un lui consacre de l’attention et encore moins qu’elle l’analyse.

— Tu sais, c’est pas très compliqué de voir que tu es dans une situation délicate : un jeune d’à peine 20 ans, seul dans un avion qui part pour New York avec un tout petit sac de voyage qui ne contiendrait même pas assez d’affaires pour un week-end, on n’en voit pas tous les jours.

Curieusement, cette femme qui jouait les Sherlock Holmes l’intriguait.

— J’ai décidé de partir quelques jours en vacances, dit-il, à moitié convaincu.

La femme ricana.

— Bien sûr, à ton âge, tu as parfaitement les moyens de te payer ce voyage. Soit tu as volé de l’argent à tes parents, soit tu as braqué un commerce, mais j’espère pour toi que c’est à tes parents. Avoir des problèmes avec la justice à ton âge ruinerait le début de ta vie d’adulte, et pour remonter la pente après, c’est très compliqué.

Il s’absenta un moment de la conversation. Il n’avait volé d’argent à personne et, quand bien même cela aurait été le cas, ses parents lui auraient infligé une sévère correction pour toutes les raisons du monde sauf celle-là. Mais maintenant qu’il y pensait, sa mère verrait rapidement qu’une grosse somme d’argent a disparu de son compte pour payer une compagnie aérienne, et elle le bombardera d’appels et de messages bourrés de points d’interrogation et d’exclamations pour savoir ce qu’il lui avait pris de dépenser subitement 500 euros de sa bourse étudiante, reçue il y a une semaine de cela, pour financer un voyage si cher.

Mais il ne verrait ces messages affolés que dans quelques heures, et il n’avait aucune idée de la réponse qu’il trouverait pour justifier un tel acte. Avec un peu de chance, il était très tard en France et ses parents étaient sûrement endormis depuis longtemps sans se douter le moins du monde que leur fils volait au-dessus de l’Atlantique.

Le réveil serait en revanche brutal.

— Tu es tracassé par tes parents, j’imagine ?

Il avait complètement oublié sa camarade de voyage qui le regardait avec compassion.

— Écoute, je ne te connais pas. Je ne sais pas ce qui t’amène à être dans cet avion, mais tu m’as l’air complètement perdu, et je m’en voudrais de te laisser dans la mouise.

Il ne voulait certainement pas qu’on ait pitié de lui, il avait besoin de tout sauf ça.

Il tenta alors une réponse pour rassurer sa voisine :

— Rassurez-vous, je vais très bien. Mes parents sont déjà sur place. Je ne fais que les rejoindre pour décompresser une semaine de mes études.

Selon lui, il était convaincant et son petit scénario improvisé tenait la route, mais le sourire à moitié moqueur de la femme lui fit comprendre qu’elle n’y avait pas cru une seconde.

— Bien sûr, c’est évident, New York est la ville parfaite pour décompresser quelques jours.

Elle rit un moment. Il se sentit très stupide. Puis elle reprit :

— Ne me prends pas pour une idiote, s’il te plaît. Avoue-moi plutôt que personne, ni ta famille ni tes amis ne sont au courant de ce que tu as fait et que tu as très peur de ce qui t’attend une fois débarqué.

Il se contenta d’acquiescer d’un signe de tête. Elle prit un air beaucoup plus sérieux et s’avança de quelques centimètres vers lui.

— Bon, pour le moment, tu vas te rendormir sans te soucier de rien. Une fois arrivé, on laissera un message vocal à tes parents pour les prévenir et les rassurer à la fois. Il sera quatre heures du matin en France à notre arrivée, ça nous laissera quelques heures avant qu’ils ne se réveillent, apprennent ce que tu as fait et le digèrent. Pendant ce temps, je vais t’emmener chez moi et sitôt que tout le monde aura les idées en place, je te paierai un billet retour, et d’ici quelques jours, tout sera redevenu normal dans ta tête.

Chaque information passait très mal dans sa tête. Il n’avait aucune intention que cela se déroule de la sorte, il voulait rétablir la situation selon ses projets. Il se redressa vers elle avec assurance.

— Vous ne comprenez pas. Je n’ai pas l’intention de retourner en France tout de suite. Je dois quitter la France pour quelque temps au moins, je ne souhaite pas recevoir d’aide de qui que ce soit.

Cette fois, la femme devint très sérieuse.

— Je pense que tu n’as aucunement conscience du pétrin dans lequel tu es : New York est une mégapole immense, parfois inconfortable, hors de prix et terrifiante, même si elle nous est familière. Estime-toi juste heureux, pour le moment, d’être tombé sur quelqu’un qui veuille bien t’aider.

Elle avait dit tout cela assez vite, comme si la situation avait un enjeu capital. Il savait à présent que la situation était sous contrôle, mais aussi qu’il paierait sa bêtise très cher. La jeune femme s’était tournée vers son hublot, et il se pencha lui-même pour admirer les nuages. Il se rappela qu’il prenait l’avion pour la première fois, sans pour autant réaliser l’aventure dans laquelle il s’était lancé.

Mais malgré tout, il était fatigué, moins inquiet, mais pas forcément détendu ; ils volaient à présent depuis cinq heures au-dessus de l’eau, et l’atterrissage aurait lieu dans deux ou trois heures. La suite des événements était désormais entre les mains d’une inconnue. Pensant qu’il vaudrait mieux les affronter avec un esprit reposé, il pencha sa tête sur son siège, ferma les yeux et se rendormit.

Il aurait choisi de rester enfermé dans ce rêve où il longeait une plage sous un grand soleil, libre de tout tracas, s’il avait eu le choix. Au lieu de cela, il descendit de l’avion à la suite de la femme sans savoir vraiment ce qui l’attendait. Une chose était certaine : il était arrivé vivant à l’aéroport.

Toute l’étape de la douane et de la vérification des ESTA se passa rapidement. Il s’étonna qu’on le laisse passer si rapidement, avec un lieu où dormir, déniché à la sauvette sur un site répertoriant les auberges les moins chères de la ville. Sans compter que son ESTA n’était valable que depuis à peine 24 heures.

Mais tout cela ne l’importait plus. Il venait de sortir de l’aéroport. Jeanne ne lui parlait pas, se contentant de signes de tête furtifs pour lui indiquer vers où aller. Ils devraient prendre un car qui les conduirait en plein cœur de New York. C’est elle qui se chargerait de payer les 24 $ que coûteraient les deux billets. Ils s’installèrent au fond du car bondé, et la femme reprit la parole :

— Bon, à partir de maintenant, on ne se quitte plus, c’est compris ?!

Il acquiesça automatiquement, puis une réponse lui vint soudainement en tête :

— Quel est ton nom, au fait ?

Elle se tourna vers lui et éclata de rire.

— C’est maintenant que tu me le demandes ? Après plus de huit heures de vol, c’est très amusant.

Elle marque une pause.

— Je m’appelle Jeanne. Et moi, je peux connaître le tien ?

Tout d’abord, il trouva que Jeanne était un joli prénom. Puis, après s’être fait cette réflexion, il répondit :

— Je m’appelle Antoine.

Son prénom semblait lui évoquer quelque chose. Avant de lui dire quoi que ce soit, Jeanne plongea un moment dans sa mémoire.

— Que cherches-tu dans ta mémoire, exactement ? demanda Antoine.

Jeanne revint au moment présent.

— Rien de spécial. Tu m’as rappelé un jeune auteur de poésie que j’ai lu il y a quelques mois. Ses écrits m’ont énormément touchée. Ils étaient signés par un certain Antoine également.

Antoine ouvrit de grands yeux, stupéfait.

— Pourquoi fais-tu cette tête ? demanda Jeanne.

— C’est bien moi qui ai écrit ces poèmes.

Jeanne haussa les sourcils et exprima toute sa stupéfaction.

— Tu rigoles ? Tes poèmes m’ont fait pleurer comme une madeleine. Celui où tu parles d’une rupture m’a tellement touchée, c’est comme s’il était tiré de ta propre histoire.

Antoine détourna le regard. Si les chances de rencontrer une lectrice de son recueil de poèmes publiés dans un avion pour New York étaient aussi faibles que nulles, évoquer la raison qui le conduisait là où il était actuellement à Jeanne ne faisait aucunement partie de ses envies. Jeanne avait dû comprendre qu’elle venait de toucher un point très sensible et décida de s’abstenir de toute question. Le car, qui avait démarré depuis près de dix minutes, roulait sur le périphérique. Au-dessus des panneaux étaient indiquées diverses directions comme Atlanta, Boston, et bien sûr, New York. Antoine observait le paysage par la fenêtre : des hôtels, des panneaux publicitaires, rien de très inhabituel pour le moment. Jeanne ne regardait pas le paysage, sans doute parce qu’elle le connaissait déjà, mais il était pris d’un élan d’enthousiasme. Il était impatient de découvrir la ville.

C’est alors qu’au loin, il la vit pour la toute première fois : des buildings, tous plus grands les uns que les autres, illuminés dans une belle nuit d’été. Le car prit un tunnel pendant quelques instants. À la sortie, Antoine dut lever la tête pour voir le sommet des gratte-ciel. Ils passèrent devant un panneau où était écrit « Welcome to New York City ».

— Alors, qu’en dis-tu ? demanda Jeanne avec un sourire.

— Ça m’a fait la même chose quand je suis venue pour la première fois il y a cinq ans. Ça fait toujours un certain effet d’ailleurs.

Le car se stoppa. Antoine se précipita pour descendre, bousculant quelques personnes. Ce qui se présenta devant lui lui donna l’impression d’avoir pénétré dans un univers parallèle. Tous ses problèmes faisaient partie d’une autre dimension. Les lumières provenant des nombreux buildings rendaient sa visibilité difficile. Antoine fit trois fois le tour sur lui-même pour admirer toute la grandeur du lieu où il se trouvait. Il était subjugué par tant d’immensité. Un sentiment d’égarement, d’infériorité, commença alors à le remplir.