Odyssey - Alain Dudot - E-Book

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Alain Dudot

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Beschreibung

Sur une planète ravagée par le dérèglement climatique, les êtres humains luttent désespérément pour leur survie. Leur dernier espoir réside entre les mains d’érudits chargés de découvrir une terre habitable. Tout est mis en œuvre pour atteindre un nouveau monde et un gigantesque vaisseau spatial est construit. À son bord, l’équipage a tout prévu afin que leur voyage se déroule sans encombre. Cependant, personne n’a anticipé l’inimaginable…

À PROPOS DE L'AUTEUR

Après de nombreuses années de lecture, Alain Dudot développe le désir de plus en plus pressant d’écrire. Il puise son inspiration dans les faits d’actualité pour créer des œuvres qu’il façonne avec son imagination. "Odyssey" illustre parfaitement cette démarche, car elle explore la problématique du réchauffement climatique.

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Veröffentlichungsjahr: 2024

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Alain Dudot

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Odyssey

Roman

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

© Lys Bleu Éditions – Alain Dudot

ISBN : 979-10-422-1838-6

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

 

 

 

 

 

Chapitre

 

1

 

 

 

« Allumage des lasers dans 5… 4… 3… 2… 1… Allumage. »

Quatre mille rayons laser bleu pâle s’allumèrent simultanément à l’arrière du gigantesque vaisseau spatial pour converger vers l’avant de celui-ci, vers la « voile » de 25 km², de forme hélicoïdale. Elle était faite d’un matériau ultrafin aux propriétés photovoltaïques révolutionnaires. L’énorme voilure couleur or était montée sur une structure alvéolaire en matériau composite qui faisait penser à un monumental nid d’abeille.

Sous l’effet des milliers de lasers irradiant la voile de leur faisceau, celle-ci devint scintillante, éblouissante même. Il n’était plus possible de la regarder sans se protéger les yeux. Elle brillait d’un feu éclatant, faisant penser à ces étoiles bleues super massives.

Le vaisseau avait été baptisé Odyssey. Stationné sur une orbite haute autour de la Terre, il commença lentement à s’éloigner de la planète. Vu de loin, le « corps » de l’engin était un cylindre long d’un kilomètre pour un diamètre de 50 mètres, mais à y regarder de plus près, le « cylindre » en question était composé d’une multitude de containers, de réservoirs, de modules, de compartiments divers et d’une foultitude de caissons renfermant des appareillages et des instruments de toutes sortes. Tous ces composants étaient fixés sur une structure carrée de poutrelles et de croisillons.

À bonne distance, l’engin faisait penser à un parasol colossal et totalement disproportionné. Proportionnellement, si la voilure faisait 5 mètres de diamètre, le « corps » d’Odyssey était un cure-dent pour ne pas dire un cheveu.

Le top départ avait été donné en ce 17 avril 2147 à 22 h 32. Le vaisseau était un condensé, l’aboutissement du fruit de deux cents années de travail, de recherches, de découvertes dans tous les domaines en lien direct ou indirect avec la conquête spatiale et les centaines de milliers de femmes et d’hommes qui s’étaient succédé avaient œuvré ensemble, sans le savoir (hormis la génération actuelle) pour aboutir à un engin comme Odyssey qui partait pour un très long périple interstellaire.

La propulsion était assurée par les quatre mille rayons laser à très haut rendement qui produisaient une quantité astronomique de lumière condensée, autant de photons qui bombardaient la voile sans relâche et permettaient à l’engin non seulement de se déplacer, mais d’accélérer fort, très fort.

 

Des ingénieurs et des physiciens avaient imaginé ce système dès le début des années 2000. Peu à peu, l’idée avait fait son chemin. Les simulations informatiques avaient été concluantes, le projet était passé au stade d’expérimentations tout aussi satisfaisantes, mais les savants s’étaient rapidement heurtés au problème de l’alimentation des lasers en électricité.

La première voilure spatiale ayant été déployée sur une orbite basse de la Terre faisait deux cents mètres de diamètre. Elle avait été bombardée depuis un désert péruvien par vingt-huit lasers installés sur des radiotélescopes. La voile s’était mise en mouvement et avait fortement accéléré jusqu’à disparaître rapidement du champ de vision des télescopes braqués sur elle. Les photons composant la lumière « poussaient » la voile en avant comme une main qui vous pousserait dans le dos. Plus elle poussait fort (plus les faisceaux lumineux étaient puissants), plus vous avanciez vite. D’après les calculs qui avaient été faits, la voile avait atteint 2 % de la vitesse de la lumière (6 000 km/seconde). C’était la première fois de l’histoire qu’un objet conçu par l’homme atteignait une telle rapidité. Cela constituait une avancée sans précédent quant à la manière d’appréhender les voyages spatiaux futurs qui se heurtaient jusqu’à lors à la problématique de la propulsion chimique des vaisseaux, trop faible pour envisager des voyages interstellaires au long cours vers d’autres systèmes solaires, sans parler du volume inconcevable de carburant à embarquer, qui atteignait des dizaines, voire des centaines de millions de tonnes.

La voile résolvait beaucoup de problèmes, mais à l’époque, il en restait un d’insoluble : pour alimenter de tels lasers, il fallait une quantité d’énergie phénoménale, de l’ordre de plusieurs mégawatts par seconde.

 

Les chercheurs avaient relevé ce nouveau défi et quelque cent trente années plus tard, Odyssey embarquait une « pile solaire », des générateurs de plasma dans lesquels des atomes de deutérium et d’hélium 3 se télescopaient à des vitesses proches de celle de la lumière. Le choc entre ces particules générait des températures de l’ordre de cent cinquante millions de degrés, équivalentes à celles des étoiles et la bouillie se formant dans ce chaudron infernal était du plasma, du plasma convertit en électricité pour alimenter les lasers. Les quantités d’atomes nécessaires à produire plusieurs gigawatts à la seconde étaient infinitésimales. Odyssey embarquait des réserves de particules suffisantes pour générer une énergie équivalente à celle du Soleil pendant une bonne centaine d’années.

Grâce à cette énergie presque inépuisable, la voile était bombardée en permanence par les photons des lasers, ce qui permettait à l’engin d’accélérer sans cesse puisqu’il ne rencontrait aucune résistance dans le vide intersidéral.

 

Sa destination se trouvait à 4,23 années-lumière de la Terre, soit 39 735 360 000 000 000 000 de kilomètres. Un vaisseau circulant à la vitesse de la lumière (300 000 km/seconde) mettrait quatre ans et trois mois pour atteindre la destination. Odyssey allait accélérer jusqu’à atteindre environ 50 % de cette vitesse puis devrait décélérer. Son périple allait durer environ neuf années.

Seulement neuf années.

 

Le vaisseau spatial fait route vers Proxima du Centaure, l’étoile la plus proche du Soleil et plus exactement vers une planète découverte dans les années 2010, baptisée initialement Centauri A puis Phoenix. L’astre est une planète tellurique située dans la zone habitable de son étoile, c’est-à-dire à bonne distance afin que l’eau puisse s’y trouver à l’état liquide, que la température soit propice pour la vie organique et, si l’on se fie aux observations menées depuis des années, Phoenix serait doté d’une atmosphère contenant de l’oxygène.

La particularité de la mission Odyssey n’était cependant pas exploratoire, du moins pas uniquement. C’était une mission de sauvetage, et pas n’importe lequel. Il s’agissait ni plus ni moins de sauver l’humanité, ou ce qu’il en restait.

 

 

 

 

 

Chapitre 2

 

 

 

Les premières mises en garde des climatologues et autres spécialistes dans le domaine étaient intervenues au cours de la dernière décennie du XXe siècle. Ils commençaient à s’inquiéter de certaines redondances et quelques anomalies météorologiques ayant tendance à se répéter.

Ils furent invités à quelques émissions de télévision, les plus « célèbres » d’entre eux obtinrent des audiences auprès de quelques gouvernements plus soucieux de montrer aux peuples et aux électeurs que les choses étaient soi-disant prises au sérieux, mais il ne s’agissait en réalité que de parfaire des plans de communications exclusivement politiques.

Les partis se réclamant écologistes s’emparèrent du débat selon la formule consacrée, mais perdirent toute crédibilité et énormément d’audience au gré des élections lorsque les luttes intestines de pouvoir et de compromission prenaient l’ascendant sur le débat de fond et l’élaboration de propositions concrètes.

Les choses en restèrent provisoirement là.

Ici et là, des voix alarmantes ne cessaient pourtant de s’élever régulièrement et dénonçaient, preuves à l’appui, que le climat se déréglait dangereusement du fait de l’activité humaine, mais il se trouvait toujours un contre-expert pour dénigrer, preuves à l’appui lui aussi les affirmations de son homologue. Tout était question de sensibilité personnelle et pour qui vous travailliez.

 

Entre 2010 et 2020, les consciences s’éveillèrent plus franchement. La jeune génération avait été élevée et éduquée au sein d’une société prenant la mesure jour après jour que quelque chose ne tournait plus tout à fait rond sur notre bonne vieille Terre. La communauté scientifique produisait maintenant des preuves irréfutables du réchauffement climatique : photos satellites de glaciers et de banquises en 1990, en 2000, en 2010 et en 2020 suffisaient à démontrer les faits. Sous des latitudes du globe réputées tempérées, les épisodes caniculaires en été se succédaient et les hivers étaient de plus en plus doux. Ailleurs, il y avait de plus en plus de phénomènes extrêmes comme des typhons et autres cyclones ayant des intensités jamais observées ou enregistrées.

Le monde était de plus en plus convaincu de la véracité des affirmations des climatologues et le réchauffement climatique avait obtenu une place de plus en plus centrale dans le débat public et politique.

Mais l’économie restait la plus forte et la multitude d’accords ratifiés lors de sommets par les états sur des objectifs de réduction de gaz à effet de serre restaient souvent peu ou prou suivie d’actes concrets, car les priorités industrielles et économiques étaient inversement proportionnelles aux préconisations et autres « urgences » écologiques. Les états, qui ne perdaient jamais le nord, instauraient à tour de bras de nouvelles taxes (biotaxes, écotaxes, taxe carbone, journée de solidarité, taxe sur les ordures, taxe sur le carburant, etc., etc.).

Des énergies alternatives pointaient le bout de leur nez (éoliennes, solaires, voitures électriques, etc.), mais elles restaient confidentielles et extrêmement onéreuses pour le citoyen lambda. Le lobby du pétrole avait encore et toujours la mainmise sur l’économie mondiale et cela n’était pas prêt de cesser, les intérêts en jeu étaient colossaux et les démocraties ainsi que celles et ceux qui parlaient en son nom extrêmement corruptibles. Des lois étaient votées, absurdes pour la plupart (réduction des vitesses sur la route, circulation alternée), inefficaces pour la majorité, n’ayant comme seul but de culpabiliser voire de permettre de verbaliser ce bon vieux citoyen lambda (gare à vous si les éboueurs retrouvaient un trognon de pomme dans la poubelle réservée au carton), l’éternelle vache à lait, grand consommateur et bon payeur devant l’éternel.

Tous les présidents affichaient une conviction sans faille lors des sommets internationaux en jurant qu’ils allaient tout mettre en œuvre pour « sauver la planète » et sitôt de retour dans leur palais républicain bien chauffé en hiver et climatisé en été, ils ordonnaient à leurs conseillers en la matière de rédiger des mémos expliquant pourquoi ils n’avaient pas pu (malgré toute leur bonne volonté) respecter leur signature.

 

Des millions d’hectares de forêts tropicales en Amérique du Sud avaient été déforestés et brûlés. Les dirigeants voulaient en faire des terres fertiles, y planter des céréales de toutes sortes afin de peser dans la balance économique mondiale.

Et pendant ce temps, la situation de la Terre se dégradait de manière exponentielle.

Lors de l’été 2019, les observateurs avaient relevé des températures de 15 à 18 au pôle Nord. L’Europe occidentale avait pulvérisé tous les records de chaleur avec des épisodes caniculaires lourds de conséquences pour la faune, la flore et les hommes que les gouvernements turent aux médias et aux citoyens. Les États-Unis ne furent pas en reste et l’Orient était en proie à des typhons et des intempéries qui faisaient croire à l’existence de dieux quelconques très en colère au plus païen et au plus athée des hommes.

Les discours les plus pessimistes donnaient une marge de manœuvre d’une dizaine d’années à l’humanité pour inverser la tendance en modifiant radicalement ses habitudes de vie (nourriture, déplacements, consommation, etc.). Passé ce délai, le processus de réchauffement serait irréversible. Les plus optimistes tablaient sur une petite centaine d’années, beaucoup s’accordaient sur la date butoir de 2050. Les hommes avaient toujours aimé les chiffres ronds.

 

Après 2020, le climat poursuivit son inexorable et dangereuse évolution. L’hémisphère nord connut des épisodes caniculaires de plus en plus longs et de plus en plus tôt dans l’année. L’hémisphère sud ne fut pas en reste, mais sa population dut affronter, en plus des canicules, des intempéries et des cyclones dont l’échelle allant de 1 à 10 fut réévaluée pour aller jusqu’à 18. Certains de ces maelströms drainaient des vents dépassant les 350 km/h dans les terres. Rien n’y résistait, rien n’y survivait à moins de trouver refuge dans des sous-sols bétonnés de type bouche de métro, mais il n’y avait pas de métros dans les contrées touchées.

Les records de températures tombaient les uns après les autres. L’année 2058 fut dramatiquement exceptionnelle. La température monta jusqu’à 41° au nord de l’Angleterre. Le nord de la France enregistra des températures de 49° et le sud 58,4° à Perpignan le 18 juillet. Plus au sud encore, le Maghreb se calcinait littéralement sous 76° à 80°. Le nombre de glaciers disparaissant en fondant grandissait inéluctablement. Pour certains d’entre eux, le phénomène était presque visible à l’œil nu.

En 2060, le nombre de décès lié directement aux conditions climatiques se chiffrait en dizaines de millions pour les deux décennies écoulées.

Le « stress hydrique » (comme avait « poétiquement » nommé les observateurs la situation des ressources d’eau douce de la planète en 2016) s’était transformé en catastrophe hydrique. L’eau manquait partout, elle était rationnée, elle valait littéralement son pesant d’or. Des gens mourraient de soif dans des pays dits « développés ». Au cours de l’histoire, beaucoup d’hommes étaient morts de faim, rarement de soif.

Au sud d’une ligne imaginaire passant par Bordeaux, Turin, Venise, Zagreb, Belgrade, Bucarest, l’eau ne coulait plus des robinets. De nombreuses régions au nord de cette ligne connaissaient de nombreuses coupures d’eau.

Beaucoup de nappes phréatiques étaient à sec. Plus d’eau pour arroser ou irriguer les plantations et les cultures, plus d’eau pour désaltérer les bêtes et la pénurie de nourriture vint s’ajouter aux fortes chaleurs. Déshydratés, mal-nourris, fiévreux, les organismes s’affaiblissaient inéluctablement et les cerveaux commandaient à leur corps de se mettre en mode élevé d’économie d’énergie. Le résultat était des personnes atones, hagardes, très affaiblies, incapables de faire autre chose que dormir.

La sacro-sainte économie mondiale s’effondrait lentement mais sûrement à mesure que les températures croissaient. Les entreprises étaient contraintes d’arrêter leur production les unes après les autres fautes de ressources premières et faute de main-d’œuvre valide, les salariés ne pouvaient plus travailler.

Il n’était plus rare que les périodes de canicule durent de 8 à 15 semaines d’affilée. La température moyenne des hivers alsaciens ne descendait plus sous les 18° et les sports d’hiver étaient un vieux souvenir.

 

Les températures des mers et des océans avaient augmenté également, occasionnant de graves dérèglements parmi la faune et la flore aquatique. De nombreuses espèces de poissons et de crustacés, encore abondantes cinquante ans auparavant, étaient en voie de disparition ou avaient disparu. Les banquises du pôle Nord et du pôle Sud fondaient dramatiquement. Le niveau des océans avait fortement crû. Partout dans le monde, la majorité des villes côtières faisaient les frais de la montée des eaux. Certaines bourgades avaient tout bonnement et simplement été englouties. D’autres villes avaient perdu nombre de leurs quartiers, obligeant les riverains à trouver refuge ailleurs s’ils en avaient les moyens, mais c’était rarement le cas. Des millions de personnes, hommes, femmes et enfants se retrouvèrent à la rue, privées d’habitation et sans moyens pour en acquérir une nouvelle « ailleurs ».

Dans les terres, énormément d’élevages intensifs d’animaux avaient fermé leurs portes. L’agriculture de masse, qu’elle soit bio ou non, nécessitait de l’eau, beaucoup d’eau, mais vu la raréfaction du précieux liquide, des millions d’hectares de champs n’étaient plus cultivés à travers le monde.

Les greniers, les garde-manger des nations étaient vides. Les épisodies de famines gagnaient du terrain.

L’humanité devait affronter la révolte de la Terre et se trouvait fort démunie face aux forces de la nature. Malgré toute sa science, l’homme ne se battait pas à armes égales. Les recherches technologiques allaient bon train pour tenter de ralentir rapidement la tendance à défaut de pouvoir la stopper, mais les expérimentations restaient vaines et toutes se soldaient par des échecs.

Une nouvelle forme d’immigration était née : les migrants climatiques. Des millions d’êtres humains, habitant sous le quarante-cinquième parallèle Nord, tentaient de rejoindre le nord du globe par tous les moyens et à tout prix. Il y eut des révoltes, des insurrections et des guerres civiles qui firent des millions de victimes, mais ces populations étaient prêtes à tout pour quitter l’enfer, même si le paradis qu’ils espéraient à l’arrivée n’était au mieux qu’un purgatoire climatique. Les gouvernants de leur pays d’origine faisaient tout pour les retenir et s’ils parvenaient à passer à travers les mailles du filet, les gouvernants des pays du nord les refoulaient manu militari.

 

Sous la pression populaire et face à la réalité cuisante de la situation climatique, les gouvernements s’étant succédé depuis 2035 avaient enfin pris des mesures concrètes avec tous leurs effets collatéraux. Toutes les « machines » individuelles fonctionnant avec des énergies dites fossiles avaient été interdites et bannies, mais des millions de salariés s’étaient retrouvés au chômage. Devant le manque à gagner et en guise de représailles, les dirigeants des pays producteurs de pétrole qui ne trouvaient plus preneur avaient financé et organisé des attentats terroristes de grande ampleur. Il y avait eu des ripostes militaires et des embargos massifs décrétés contre les plus récalcitrants. À part du sable et du pétrole, il n’y avait rien « là-bas » alors, les choses finirent par rentrer dans l’ordre après trois, quatre ans. Maintenant qu’ils n’avaient plus rien à vendre, ils n’étaient plus les « maîtres du monde ».

Les états avaient massivement financé le développement des énergies « propres » et alternatives. Les grands groupes et les grosses industries avaient joué le jeu et opéré des virages stratégiques à 180°. L’avenir (économique) et les profits étaient dans le bio et le « régénérable ».

 

Les priorités des chercheurs et des industriels ayant changé, les résultats ne se firent pas attendre. En 2050, 85 % des véhicules terrestres étaient électriques (rollers, skate-board, trottinettes, vélo, tondeuses à gazon, voitures, motos, bus urbain, tracteurs), 10 % étaient des poids lourds et des cars fonctionnant au gaz et les 5 % restants étaient des véhicules militaires et certains services d’urgence continuant à fonctionner à l’essence. Un des effets inattendu et somme toute assez « cocasse » fut le silence qui s’abattit peu à peu dans les capitales, dans les grandes villes et même dans les mégapoles. 99 % des véhicules y circulant étaient silencieux. Il n’y avait que le chuintement des pneus et des roues sur l’asphalte qui faisait écho au brouhaha des piétons et leur conversation.

 

En vingt ans, le trafic aérien avait fait un énorme bond en arrière. Les avions étaient de (trop) gros consommateurs de kérosène et la taxation exponentielle du carburant rendait le prix d’un billet presque inaccessible au commun des mortels.

Le sud du globe n’attirait plus personne, il y faisait trop chaud et la météo y était mortellement capricieuse.

Mais grâce aux subsides des états, la recherche dans le domaine aéronautique n’était pas en reste et les essais d’avions dits « moyen-courriers » à propulsion électrique étaient assez prometteurs.

C’était plus compliqué dans le monde maritime. Malgré tous les efforts déployés par les ingénieurs, ils ne parvenaient pas à mettre au point des moteurs électriques suffisamment puissants et à stocker l’énergie nécessaire pour permettre aux gigantesques bateaux porte-containers et autres navires de la marine marchande de sillonner le globe et livrer les marchandises. Alors, les chercheurs mettaient au point des moteurs de navires hybrides alliant moteur diesel, énergie photovoltaïque et éolienne devant permettre de diviser par deux les émissions de gaz à effet de serre des navires.

 

Le tout électrique avait beaucoup de vertus, mais également quelques défauts.

Les batteries équipant tous ces engins nécessitaient l’emploi de métaux et de matériaux rares, introuvables ailleurs que dans les sous-sols africains et sud-américains. Comme il en allait de la survie de l’humanité, des accords furent conclus entre les pays « propriétaires » et le reste du monde. Quelques mois plus tard, les multinationales avaient investi les territoires et les forages, les excavations de millions de mètres cubes de terre avaient débuté. Les sols étaient littéralement retournés, et ce, dans des proportions continentales.

 

Qui dit tout électrique dit moyen de rechargement des batteries. Les centrales nucléaires et hydro-électriques peinaient à répondre à la demande grandissante. Elles n’étaient plus « saturées » à cause des chauffages hivernaux, les hivers étaient plus que tempérés, doux même. Les climatiseurs qui fleurissaient comme de la mauvaise herbe sur la façade et le toit des maisons et des immeubles n’étaient pas très énergivores, mais des centaines de millions de personnes se raccordant aux prises électriques pour recharger les batteries de leurs « engins », et notamment les « super-chargeurs » pour les voitures « pompaient » beaucoup de courant électrique. Les délestages (coupure de courant volontaire pour soulager le réseau) se multipliaient, mais il n’existait pas de solutions à court terme. Construire de nouvelles centrales nucléaires durait trop longtemps et coûtait trop cher. De plus, en ces temps troubles où la mode était (à raison) au tout-écologie, l’énergie atomique n’avait pas le vent en poupe. Il était hors de question de réactiver les vieilles centrales à charbon et à cause des pénuries en eau, il était inenvisageable d’investir dans l’hydro-électrique.

Les industriels développèrent, autant que faire se peut, des appareillages à très basse consommation, mais ils trouvèrent rapidement leurs limites.

 

De par le monde, des équipes de physiciens travaillaient à mettre au point un générateur de plasma stable, et ce, depuis le début des années 2000.

C’est en 2048 qu’ils purent annoncer au monde qu’ils avaient créé une « pile solaire » stable ne rejetant aucune émission polluante dans l’atmosphère et capable d’alimenter en énergie électrique la totalité de la planète sous réserve d’un déploiement industriel et la création de centrales d’un nouveau type. Il n’y avait qu’une ombre au tableau : pour parvenir à créer du plasma, il fallait du deutérium (présent en quantité quasi inépuisable dans l’eau des océans) et du tritium (un matériau radioactif) qui conférait une aura de dangerosité à la « pile ». Ce composant pouvait cependant être remplacé par de l’hélium 3… Quasi inexistant sur Terre, mais présent en abondance sur la Lune.

Des débats eurent lieu à l’ONU et lorsque les représentants des états furent convaincus de la nécessité de tout investir dans la « pile solaire », ils donnèrent leur feu vert et ouvrirent le porte-monnaie pour financer un vaste programme d’industrie lunaire ayant comme mission de ramener de l’hélium 3 sur Terre.

L’ASM (Agence Spatiale Mondiale) fut créée et, grâce à l’expérience et aux connaissances engrangées par l’Amérique, la Russie, la Chine et l’agence spatiale européenne ces dernières décennies en matière de voyages spatiaux, l’ASM devait synthétiser ces savoirs et mettre rapidement au point un programme fiable pour ramener les précieux isotopes du satellite de la Terre.

 

Début 2051, les premières équipes d’hommes partirent sur la Lune pour construire la base lunaire. À la fin de cette même année, la base était opérationnelle et des navettes spécialement construites pour la circonstance commencèrent à aller et venir entre la Terre et son satellite.

Fin 2054, les premières « piles solaires » furent mises en activité et les ampoules dans les foyers brillèrent un peu plus fort.

 

 

 

 

 

Chapitre 3

 

 

 

En 2040, la population mondiale avoisinait les huit milliards d’êtres humains. C’était en deçà des prévisions ayant été faites vingt années auparavant, mais le réchauffement climatique avait déployé ses ailes de braises plus fortement que prévu et avait laissé beaucoup de victimes dans son sillage.

En 2080, la population n’était plus que de cinq milliards d’hommes et de femmes. Vivre sous la latitude nord 45° était devenu impossible. Les terres étaient brûlées, inhospitalières, hostiles. La flore était rachitique, les contrées étaient désertiques. La faune était composée de reptiles et d’insectes naturellement armés pour résister à des températures extrêmes et quasi permanentes. Des dizaines de millions d’hectares de terre avaient été ensevelies par la montée des eaux. Il ne restait pas grand-chose des banquises des pôles qui continuaient à fondre même si ladite fonte avait tendance à se ralentir. Tous les glaciers situés sous une altitude de cinq mille mètres avaient disparu. Il n’avait plus neigé sur la planète depuis une quinzaine d’années.

Les observations et les mesures montraient que les émissions de gaz à effet de serre avaient été réduites de 80 %, mais l’atmosphère demeurait chaude, trop chaude et malgré la récupération des eaux de pluie partout où il en tombait sur les parties habitées de la planète, les hommes avaient soif et faim. Ils n’en mourraient pas (pas encore), mais les rationnements mis en place n’étaient pas neutres en matière de physiologie et l’espérance de vie commençait à diminuer.