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Dans un contexte où la France ne se présente plus comme le bastion des Droits de l’Homme, « P’tit Bellot » incarne une quête lumineuse de liberté, confronté à des épreuves intenses, où la passion demeure son moteur. Grâce à des rencontres inspirantes, "Requiem Sur des Absurdités" tisse habilement un récit mêlant humour et tragi-comédie, interrogeant en profondeur notre capacité à accueillir les âmes sensibles, les rêveurs et les êtres délicats qui peuplent nos sociétés modernes. Ce récit invite ainsi à réfléchir sur notre aptitude à comprendre et embrasser ceux qui osent vivre différemment.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Paul Anski, ancien photoreporter et correspondant de presse jusqu’en 1990, s’est ensuite tourné vers le conseil en entreprise avant de s’établir en Haute-Normandie. Observateur avisé de la société et passionné par la rigueur de la logique « made in USA », il reprend aujourd’hui la plume, renouant avec son rôle d’observateur engagé de terrain.
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Seitenzahl: 146
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Paul Anski
Requiem Sur des Absurdités
© Lys Bleu Éditions – Paul Anski
ISBN :979-10-422-5263-2
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Préface.1
Voilà un récit qui ne laissera personne indifférent. Dès les premières pages le ton est donné. On passe de l'humour au tragi-comique. Certains lecteurs se retrouveront dans ce que donner un sens à sa vie incombe. On suit cet univers en requiem de grandes traversées où la passion l'emporte. Des chemins de rencontres revigoreront les ailes du désir ? Aujourd'hui nos sociétés sont-elles encore capables de comprendre les êtres fragiles, les hypersensibles, les rêveurs ? Dans les actes, la France n'est plus le pays des Droits de l'Homme. Parcours du courage et de la ténacité, P'tit Bellot objectif en main sera-t-il capable de nous éblouir de sa Liberté ?
Annelise Kunzé,
Artiste-plasticienne, poète
Préface.2
Frédéric,
Son enfance décalée, ses démons repoussés,
les routes offertes à son pas inlassable,
le système écrasant, tout cela a construit
cet être de lumière, un de ceux qu’on s’honore de croiser.
Cette lumière qu’il va chercher dans de riches
et épuisants voyages, par ses photos-témoignages,
la magie de l’image. Tiens, les mêmes lettres
forment les deux mots ! Il n’y a pas de hasard.
Paul,
Pourfendeur infatigable de l’ordre établi,
du désordre engendré, à la plume acérée,
il sait que les mots couchés sur le papier
laissent une trace quand les paroles ne sont plus.
Frédéric et Paul,
Non, il n’y a pas de hasard, que des destins.
Le Grand Architecte de l’Univers a fait se
rencontrer leurs routes.
L’un a vécu son aventure, l’autre en a témoigné.
Merci à tous les deux de nous offrir ce cadeau !
Daniel Pierret,
Poèmes, fables et petits délires assumés
Du même auteur
L’accusé de réception, Edilivre, 2009 ;
Un innocent en sursis, Mon Petit Éditeur, 2010 ;
Le Trésor de Barberousse, Mon Petit Éditeur, 2012 ;
Le Carnaval des Corbeaux, Edilivre, 2015.
À Thierry Bellache, Jean-Jacques Hure,
Romain Ternaux, Serge Prévot et Noëlle…
I
Flash-back
Il est indispensable de s’arrêter brièvement sur ce passé pour bien comprendre la force de ce qui arrive dans le présent, comme le font d’ailleurs les personnages/narrateurs eux-mêmes à travers des flash-back généralement concis et bouleversants.
Chetro De Carolis
Donc, j’en profite, je suis né là, en Haute-Normandie. On aurait pu dire « né un beau jour de 1975 », sauf que c’était le 1er novembre. À la Toussaint ! Saint Frédéric ? Hélas, ou heureusement, je n’en ai que le seul prénom. Je suis donc à vingt mille lieues de lui. Utrecht c’est l’opposé d’Yport, mon village natal. Frédéric, c’est donc moi. Certes, catholique je le suis, comme lui, parce que l’on m’a baptisé. Sans me demander mon avis, d’ailleurs ! Je suis loin d’être un évêque même si tout gamin on aurait pu me donner le Bon Dieu sans confession. Si sa modestie le caractérise, c’est au moins le seul point commun que j’en retire. Et pour cause, j’ai toujours été timide et bourré de complexes tant physiques que moraux, et ce, dès mes premiers jours. Je m’efface, je me retire, je me planque, parfois je m’isole du monde. Parce que « Lebel » signe mon patronyme, je ne puis être proche, comme lui, du troisième fils de Charlemagne. Peut-être suis-je le descendant du roi Philippe ou encore du créateur du fusil à répétition « Lebel ». Le pire, c’est que je l’ignore. À l’âge de six ans, mon père s’éteignait dans mon bas monde dès 1981, à l’aube de ses 50 ans. Ainsi « séché » comme les morues dont il traitait, il me laissait seul dans la sciure de l’ignorance tout autant que ma mère, Noëlle. Elle, que j’adorais, me voyait vagabonder dans mes errances identitaires. Jamais, de son vivant, elle ne crut bon me vanter l’existence de mon père, me conter sa vie même les soirs pour m’endormir, comme on raconte une fable sablée pour forcer ses jeunes rejetons à plonger dans la douceur d’une bonne nuit. Trop occupée à subvenir aux besoins quotidiens que la misère rappelle, elle vaquait au petit boulot de « filetière » dans les boucanes de la grand'pêche Yportaise. De ses mains habiles, elle rendait inlassablement fière allure aux maquereaux ou aux harengs péchés tout frais dans la Manche. Elle savait que, d’un revers, des bancs d’estomacs s’en régaleraient en ignorant que ces produits naturels, trempés dans le sel, gerceraient déjà encore plus ses paluches de méticuleuse préparatrice. Du haut de son mètre soixante, comme moi cachée derrière ses lunettes, elle montrait toujours son sourire, car elle aimait beaucoup rire. Dans le village, tous reconnaissaient sa générosité et sa serviabilité.
La mer, l’Atlantique et l’eau du ciel de Seine-Maritime, j’en étais par chance abrité. Ma mère louait, tant bien que mal, une modeste, mais typique maison de pêcheur en silex (autrement dit construite avec les galets de la plage) dans la fameuse rue Metzinger, incrustée dans le quartier du Port Vert d’Yport. J’arpentai mille fois ses pavés dévalant sur la magnifique plage calée entre deux immenses falaises de craies blanches. Là, me posant sur les galets, pendant des années je crus vivre en suivant régulièrement les cours fantastiques de l’école buissonnière. Et pour cause, très tôt pour un jeune enfant comme moi, je fus confié à une nounou. Micheline, se prénommait-elle. Cette dame souriante et toujours pomponnée m’apparut toute charmante et dévouée. Comme beaucoup de femmes de mon village, elle partageait sa condition maritale avec un cadre de la marine marchande et supportait aussi la charge de famille. Malgré cela, elle s’entichait en plus du devoir de m’offrir le dîner et la couche lorsque ma mère rentrait fort tard de son labeur.
Dans ce petit patelin, la solidarité jouait son plein parce que tout le monde se connaissait, forcément. Mais ici, comme dans tous les petits patelins, éloigné des frasques du Casino de Deauville, des folies d’Offenbach ou de Lupin à Etretat, sous cette atmosphère baignée d’iode où la dépressive Impératrice Sissi vint s’époumoner jusqu’aux Petites ou Grandes Dalles, la vie au quotidien se révélait rude dans cet écrin jusqu’alors resté discret de la convoitise des Parisiens. À pareille époque, les moqueries et les jalousies alimentaient les commérages. Elles nourrissaient l’ambiance au milieu des douze bistrots dédiés aux mille trois cents âmes « tout dré » et fières qu’un Maupassant d’autrefois, engoncé dans son « Voltaire » et ancré derrière les vitraux de sa villa Mauresque, en observait dans les tranches d’« Une vie ». Et que dire encore quand, plus tard, Claude, venu se soulager de ses faillites intime et économique s’en fit « Monet » dans une discrétion absolue en profitant des odeurs du terroir. Ces fumets typiques que l’on doit au varech échoué cuit par l’écume et bronzé du soleil. Celles que rehaussent les brumes somnolentes mêlées de pastis et transportant chaque jour les saveurs de nos safates fumées. « Un boucan d’enfer », comme dirait Renaud, éructait ainsi aux oreilles de mon émancipation, si je puis dire.
Moi, en ce temps-là, je jouais au foot, au tennis, voire au basket, le tout improvisé sur le parking de mon immeuble érigé en face de l’usine marée-salaisons « Ph. Lecanu ». Avec les copains, plus ou moins de mon âge, on improvisait vraiment pour s’approprier cet espace en terrain de jeux. Pour jouir des diverses disciplines, que l’on choisissait, nos vêtements servaient de mobilier pour singer les poteaux d’en-but, le filet de court, qu’imaginions encore… Je rêvais déjà, sans le savoir, d’un autre monde. En ce temps-là, je batifolai devant cette usine aux fumées de sciures de hêtre (dit le boucan) vouée spécifiquement à parfumer les poissons pêchés d’à côté, du large de Fécamp, de Boulogne-sur-Mer voire même chalutés des bancs de Terre-Neuve. Ce vaste bâtiment mélangeait le béton, la brique rouge et le silex surmonté d’une demi-douzaine de hautes cheminées, fatales issues des fumoirs. Il ombrageait ma petite enfance qui juponnait l’ancrage de ma mère y souffrant jour et nuit de ses pieds gercés par l’eau et le sel jonchant les fondations de son lieu de travail. Comment se retrouver là-dedans ? Comment y parfaire ma véritable personnalité quand, en fin de parties, je ramassai avec mes coreligionnaires nos frusques embrumées elles aussi des fumets de la poisse qui rapportaient trois francs six sous par mois aux forçats de cette besogne ? Comment m’affirmer quand on récupérait précieusement nos ballons de fortune en plastique léger comme nos volants de badminton en papier d’aluminium habillés de chaussettes usagées, et tout ça pour éviter les coups de semonce des voisins soucieux de préserver leurs capitaux transformés en belle carrosserie ou en bio-potager ?
Si les journées sont longues, après les heures de communales et profitant aussi des congés scolaires, je les comblai parfois de longs instants dans le « petit parc » bordé des cabanes de plage en bois châtaigne jouxtant la mer. Monsieur Dumesnil y veillait de sa garde et remettait aux visiteurs, en culottes courtes, le jus d’orange et le croissant du goûter. Quand ma mère, bien sûr généreusement, m’en offrit quelquefois la petite pièce de deux francs pour que l’accès m’en soit permis, je m’en régalai. Dans ce décor à manèges et vrais jouets je connus mes premiers rêves d’évasion en jouant au pirate dans la pataugeoire et à Tarzan pendu à une tyrolienne. Je m’en évadai cependant de temps à autre pour rapporter directement au poste de travail de ma mère son en-cas fraîchement conçu par ma nounou. Pénétrant dans cette usine, sans avoir cette fois l’obligation de m’acquitter d’un laissez-passer, comme beaucoup de mes copains du village, on apportait, ne serait-ce qu’un court instant, un soupçon de rayon de soleil aux écaillés laborieux suant le court-bouillon dont le seul honneur que d’exister représentait la majorité de la population active d’Yport.
À d’autres moments, je retrouvai mes Tontons ! À défaut de frère ou de sœur illustrant mon cercle familial au milieu duquel ma mère brillait par son absence, tout comme feu mon père depuis mon sixième printemps, mes « Tontons » me firent participer à de drôles de jeux embués dans leurs vapeurs d’alcool récurrentes. Je n’en connus vraiment que trois de cette fratrie de sept. Claude, Yves et Daniel vinrent aider ma mère et moi dans nos innombrables allées et venues pour pousser des brouettes emplies de ce qui allait être désormais mes souvenirs de ma courte vie avec mon père. Obligés de quitter notre maison par futur manque de moyens, mes Tontons nous assistèrent pour ce curieux déménagement d’une rue à l’autre sous les yeux ébahis de nos voisins. Malgré tout, ce trio burlesque tantôt cravaté tantôt « empapillonné » restera, en accepterais-je, auteurs d’une certaine bienveillance même maladroite à mon égard. Ils furent cependant reconnus comme très serviables auprès de mes concitoyens. Leurs participations gratuites pour l’animation du village ou pour leurs différents services rendus aux villageois, bien sûr en échange de quelques levées de coude, nourrirent la réputation de ma « famille ». Réputation d’ailleurs que j’endosserai dans les années à venir, pour le meilleur comme pour le pire. Déjà, j’en portai la croix en tête du cortège haubané lors de la procession traditionnelle du 15 août visant à la bénédiction de la mer. Exhibition que je menai, sans foi particulière, sous les yeux de la population massée depuis le parvis de l’église jusqu’à la plage en passant par les artères du village. Ma mère, très croyante, et mes Tontons, affichaient leur fierté de me voir ainsi échouer en fin d’office sur le podium dressé sur les galets, sur lequel était perché l’abbé Ouen, ceint sous son rabat, pour mimer ses respectueuses simagrées. Profitant de l’aura du public, mes Tontons renouvelèrent leurs multiples attitudes de guingois. Ils furent aussi la risée de la population lorsqu’ils déambulaient dans les rues, grimés de mille apparats attribués normalement au beau sexe ! On se tordait de rigolades ainsi de les voir s’exhiber dans les kermesses, aux fêtes de la mer ou dans les rues de la cité courues par les touristes.
Quand je fis mes premiers pas en école maternelle de la République, je regardai déjà ce monde curieux avec mes yeux flanqués de culs de bouteille. Toujours dans mon patelin et toujours sous l’innocence, l’âge m’atteignit par la force du temps pour me soumettre comme une fleur dans une future peau de vache face à Brassens, Georges de son prénom. Un nom célèbre affiché fièrement au fronton de cette école Primaire dont je subis l’honneur d’y faire entrer mon esprit aussi grand qu’un dé à coudre. J’y pénétrai, sans réelle conviction, d’autant que l’on s’abstint de savoir si j’avais inventé la poudre ! Avec mes blanches sandales de plastique supplantées de fripes rouges telles qu’elles costumeraient à ravir un mendiant pour en interpeller, je sollicitai déjà l’aide d’un Auvergnat. Je me sentis à l’ouest et je sus, sans vraiment le savoir, que ma survie m’embarquait déjà sur un radeau autre que celui de la Méduse où les copains de bord se moqueraient encore longtemps de moi. La jeunesse est cruelle comme chacun le sait pour l’avoir vécue. La mienne souffrit en cet instant du pire. J’en subis et, malgré tout, j’en anticipai déjà, réfugié derrière mes lunettes que je protégeai comme un unique bijou de famille dont j’avais bien du mal à me servir pour percevoir les couleurs, d’abord parce que, comme aujourd’hui encore, je suis gratifié de daltonisme et que, de surcroît, je vois comme une taupe. Dans cette galerie, du haut de ma petite taille supportant quelques frêles muscles, je devinai que jamais mon allure ne battrait la mesure des rois de la gonflette ! Quand un beau jour je regardai avec un exceptionnel plaisir la télé chez les voisins, une véritable révélation vers d’autres univers m’éclaboussa l’esprit. Ébahi, je visionnai un certain Fernandel s’offusquant de son physique. De sa prestation, par devant les caméras de l’ORTF, il m’incita à troquer nécessairement mes frusques contre un costume de clown. « Bellot », je répète « Bellot », voilà en cet instant ma renaissance sous ce surnom que les autres m’affublèrent déjà sans que je n’en connaisse. Ce drôle de second baptême, à consonance péjorative, je le dus spécifiquement au langage cauchois de mon terroir. Afin de paraître sympathique aux yeux de tout le monde, par lâcheté sans doute et pour éviter tout risque d’endosser le rôle de souffre-douleur, je fis foi d’enrôler en son entier cet apparat pour planches aux étoiles alors que jamais, ô grand jamais, je n’eus tutoyé Molière de près comme sur lignes.
II
Le Bon Dieu sans confession
Dès lors, une nouvelle scène s’ouvrit sous les pas de mon existence. Comme un jeune premier, j’en trébuchai sur les galets de la Comedia dell'Arte d’Yport qui jamais ne se risquèrent, contre moi, au jeu du lancer de tomates. Seuls les souffles des forts vents de la mer claquèrent mon visage d’applaudissements certains jours de tempête. Je ne sus trop pourquoi les anges propulsés sur ma plage m’invitèrent à servir la messe du dimanche après ma formation en catéchèse auprès de l’abbé Ouen. Peut-être que l’arrivée de Jean-Paul II au Vatican, cinq ans plus tôt, me motiva à suivre cette nouvelle jamboree.