Revue & corrigés - Pierre Zimmer - E-Book

Revue & corrigés E-Book

Pierre Zimmer

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Beschreibung

Deux individus au caractère excentrique et à l’esprit aventureux décident de concrétiser leur rêve en créant une revue de littérature policière. Cependant, leur enthousiasme les conduit à faire affaire avec des investisseurs peu scrupuleux. Cela les entraîne, malgré eux, dans une série d’événements imprévisibles et dangereux qui dépassent largement leurs attentes.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Pierre Zimmer est un professionnel de la communication et du journalisme, avec des expériences à France-Inter, Le Monde et L’Express, suivi d’une carrière d’enseignant. Il a toujours eu une profonde admiration pour la littérature policière américaine, notamment Donald E. Westlake et Elmore Leonard pour l’humour et la dérision.

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Seitenzahl: 113

Veröffentlichungsjahr: 2024

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Pierre Zimmer

Revue & corrigés

Roman

© Lys Bleu Éditions – Pierre Zimmer

ISBN : 979-10-422-1448-7

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Du même auteur

Le Guide du Placard, en collaboration avec Jean-Pierre Lourson, Éditions du Seuil, 1988 ;

Survivre dans ce monde hypocrite, en collaboration avec Jean-Pierre Lourson, Éditions Hors Collection (Presses de la Cité), 1991 ;

La vie est une langue étrangère, Éditions Publibook.com, 2001 ;

Surtout, ne changez rien, en collaboration avec Patrick Krasensky, Éditions d’Organisation (Eyrolles), 2004 ;

Et l’intolérance, bordel !, Éditions du Palio, 2008 ;

Comment rater ses relations avec la presse, en collaboration avec Bernard Giroux, Éditions de l’Archipel, 2011.

Vrais de vrais

Jadis voyous et malfrats, coriaces et indomptables, qui refusaient toute compromission avec la police.

Exemple : Les Vrais de vrais débutent par la zone où ils chouravent trois balles fifty pour survivre. Puis ils montent jusqu’aux guinches de Pigalle où ils maquent des putains pour finir, après quelques casses et braquages, à la terrasse du Fouquet avec havane au bec, chaîne en jonc sur le bidon replet et diam à l’auriculaire. Après, rideau : l’épopée est close. Comme les maisons qu’ils patronnent.

Auguste le Breton, L’argot chez les vrais de vrais, Presses de la Cité, 1975

À ce niveau-là, je ne correctionne plus, je dynamite, façon puzzle !

Michel Audiard, Les Tontons flingueurs

À J.-L. B.

À J.-C. B.

Comme ils ont ma reconnaissance,

ils se reconnaîtront…

Chapitre I

Jamais il n’avait vu une aussi grande main. Une main large et puissante. Un véritable battoir de lavandière. Et un peu rougeaude avec ça. Mais pas calleuse, rugueuse ou usée comme une main de travailleur. Non, une main au rose soutenu parce que son propriétaire devait être de tempérament sanguin. Il valait certainement mieux éviter de se prendre un mauvais coup de la part de ce genre d’individu. La gifle pourrait se révéler fatale. a ne faisait pas le moindre doute.

Au bout de cette main– totalement pacifique, au demeurant – tendue vers lui, la manche d’un blazer bleu marine aux boutons dorés aboutissait au torse d’un colosse. L’homme de haute stature arborait avec naturel un nœud papillon sur une chemise bleu azur au col légèrement empesé.

En broyant, avec application, mais sans la moindre volonté de nuire, tout ce que pouvaient contenir de phalanges les doigts de son interlocuteur, il se présenta. Il articula, d’une voix forte et volontaire :

— Jean-Pierre Quentin… et vous.

— Pas moi, répondit son interlocuteur en grimaçant

de douleur.

— Raoul Froment m’a dit que vous aviez écrit un livre ensemble… continua le colosse, comme s’il n’avait pas entendu la réponse de son vis-à-vis.

— Alain Mendel, dit, à contretemps, l’auteur en question du livre bicéphale, en pratiquant sur son métacarpe droit un massage réparateur.

Autant Jean-Pierre Quentin était de haute taille, d’une stature même qui imposait plutôt respect et crainte, autant Alain Mendel était petit, maigrichon, presque rachitique. L’un à côté de l’autre, ils formaient un de ces couples contrastés à la Laurel et Hardy ou à la Don Quichotte et Sancho Pança, sauf que dans ce dernier cas, le petit était maigre également.

Tout semblait les opposer. Et pourtant, au cours de la conversation qui allait s’instaurer entre les deux hommes, ils allaient s’apercevoir qu’ils possédaient en commun plusieurs traits de caractère. Quentin, fils de militaire, qui avait en fin de carrière commandé la caserne des Célestins, cette grande bâtisse imprenable qui abritait, boulevard Henri IV à Paris, la garde républicaine, avait été élevé par une mère catholique pratiquante. Catéchisme, messe le dimanche matin par toutes saisons, communion en aube et mariage en blanc à l’église. Mis à part l’union, qui ne dura d’ailleurs pas très longtemps, si feue Madame Quentin avait voulu faire de son fils un séminariste, elle ne s’y serait pas prise autrement. Mais les événements de 68 et ses défilés sous les fenêtres de la caserne, ses nombreuses lectures et ses études de sociologie avaient orienté Jean-Pierre vers un autre chemin beaucoup plus séculier : après quelques expériences plus ou moins heureuses en entreprise, il était devenu consultant en management, ce qui ne voulait pas dire grand-chose et ce qui lui laissait pas mal de temps libre entre deux missions. Quoiqu’intéressé par les questions spirituelles de notre époque, il était devenu radicalement anticlérical. Divorcé et sans enfants, ce dont il s’accommodait plutôt bien, d’après lui, il n’aurait pas à faire subir à une quelconque descendance quelque emprise religieuse.

Question religion, Alain Mendel, quant à lui, aurait eu du mal à renier ses origines. Il avait, pour sa part, un aspect de petit juif étriqué. Sous sa tignasse noir corbeau et sa barre de sourcils continue – preuve de détermination ou bien parfois d’entêtement –, les lunettes à la monture de fausse écaille lui donnaient un air sévère et un côté intellectuel, mais il aurait bien pu aussi être tailleur, à la différence près qu’un tailleur aurait certainement porté un costume mieux coupé ; sauf bien sûr, si l’on pense que ce sont les cordonniers les plus mal fagotés.

Né dans une famille ashkénaze quelques années après le second conflit mondial de parents juifs français raflés, déportés, mais revenus de l’enfer, il ne supportait pas les manifestations de la religion ou de la religiosité. Après sa bar-mitsva, il avait bien eu une période mystique qui s’était traduite par une totale abstinence à l’égard de la viande de porc et principalement du jambon durant une année entière. D’ailleurs son rapport à la nourriture –beaucoup d’aliments comme le fromage, les tripes, les huîtres, les endives ou les salsifis, toutes ces denrées ignobles et infâmes qui cuites à l’eau et sans sel sont immanquablement bonnes pour la santé, lui inspiraient un dégoût totalement irrationnel – restait d’une grande complexité. Une mère juive laisse forcément des traces. Forcément.

Après des études à la Sorbonne assez décontractées (quand on lui demandait en quoi il était, il répondait systématiquement : en… dilettante), il était devenu vaguement journaliste, vaguement écrivain et vaguement conseil en communication. Loin de maîtriser son destin, il se laissait porter par LE vague. Alain Mendel s’était marié avec le chef d’une entreprise informatique qui, non seulement gagnait à être connu (le chef pas l’entreprise), mais aussi gagnait pléthore d’argent. Ce qui lui permettait de se considérer comme une sorte d’artiste dandy, totalement éloigné des contingences du quotidien.

Chapitre II

Le chef d’entreprise s’appelait Stéphanie. On ne pouvait pas dire d’elle que c’était une belle fille ou même une jolie fille et encore moins un top model ou un mannequin de magazine, mais elle avait incontestablement du chien. Peut-être parce qu’elle était racée. Elle possédait indéniablement une qualité de charme indéfinissable ; et d’ailleurs, le charme est toujours indéfinissable sinon ce ne serait plus du charme. Il peut être parfois envoûtant, mais ce n’était pas le cas. Non, c’était plutôt de l’attrait, de l’allure, de la classe, du charisme et même une sorte d’autorité naturelle dont elle faisait usage sans en abuser dans la vie comme dans son travail. Elle avait une aura, c’est sûr et son pouvoir de séduction montrait assez qu’elle aimait plaire. Non seulement elle aimait qu’on l’aime, mais elle aimait qu’on lui dise.

Bien que petite, enfin pas très grande, cette brunette aux yeux pers en jetait. Mais elle avait toujours fait un complexe de son nez qu’elle trouvait trop long. Même si tout le monde autour d’elle la rassurait sur ce qu’elle considérait comme une excroissance disgracieuse, elle développait une manière de syndrome cyranesque. En fait, elle aurait bien voulu que son appendice nasal ne se voie pas comme le nez au milieu de la figure. Mais pour elle, rien n’y faisait. Elle ne se rendait pas compte que c’était ce nez qui faisait son charme. Mais, il n’y avait pas que son nez. Il y avait aussi ses seins. Elle avait une superbe poitrine, Stéphanie. D’ailleurs, on avait du mal à la regarder dans les yeux.

Alain et elle s’étaient rencontrés à la bibliothèque Sainte-Geneviève au moment où ils usaient leurs fonds de culotte sur les bancs de la Sorbonne. Leur rencontre fut sanglante : Stéphanie était partie d’un grand fou rire pas très charitable quand Alain, voulant rejoindre la salle des fumeurs un gobelet de café dans la main droite et son paquet de Players dans la main gauche, s’était pris la porte en verre de plein fouet dans la figure. Comment il avait fait son compte ? Peu importait, mais outre le fait que le choc avait dû être violent et douloureux, tout le café s’était répandu sur sa chemise mauve. Assis sur son séant, Alain paraissait assez pitoyable, mais sa vulnérabilité soudaine et son immanente fragilité avaient suscité chez la jeune Stéphanie, en même temps qu’une irrépressible hilarité, un violent désir physique du garçon. Après avoir calmé l’agitation nerveuse de ses zygomatiques, elle accourut et s’approcha du jeune homme avec son mouchoir pour éponger sa chemise.

— Attendez, laissez-moi faire, vous vous êtes fait mal ; mais vous saignez du nez, mettez la tête en arrière, etc., etc.

Pendant que la jeune femme brune aux cheveux courts et aux yeux pers s’affairait à jouer les infirmières de fortune, Alain se disait qu’il aurait pu tomber plus mal. Heureusement, il n’avait rien de cassé.

— Eh bah, vous vous êtes pas raté… dit-elle avec une banalité confondante.

Quelle réponse donner à ce genre de truisme qui n’en attendait aucune d’ailleurs ? Alain préféra rester coi. Stéphanie pensa qu’il était sonné. C’était leur premier malentendu.

Il va falloir que je lui rende son mouchoir, pensa-t-il à ce moment précis. Mais propre, en mains propres. Ça me donnera une occasion de la revoir. Comment se fait-il que je ne l’aie jamais remarquée dans l’amphi ? C’est juste à cet instant-là, perdu dans ses pensées intérieures, ses projets d’avenir mêlés à quelques perspectives salaces dont son interlocutrice était le sujet, ses digressions lui permettant d’entrevoir comment il pourrait meubler sa solitude du moment, qu’Alain s’évanouit.

Comment il se retrouva chez lui et comment il se réveilla dans son lit, cela resta un mystère jusqu’au moment où Alain rendit à la jeune fille, – manifestement sa sauveuse providentielle même dans le retour au bercail–, le mouchoir, lavé, repassé, bichonné. Il croyait que le coup du mouchoir, ça ne marchait plus. En lui rendant le bout de tissu sans valeur, mais créateur de haute valeur ajoutée, il l’invita à prendre un verre, rue des Écoles, au Balzar, le café rempli d’étudiants amateurs, d’intellectuels feuilleteurs d’un grand quotidien du soir, de bourgeoises en attente d’aventures fortuites, d’écrivains ratés et de poètes maudits. On se demandait même parfois où la direction de l’établissement arrivait à faire cohabiter tout ce petit monde en même temps.

Il pleuvait fort sur la vitre de la terrasse quand Stéphanie lui raconta ce qui s’était passé : elle avait appelé à l’aide un appariteur apparu soudainement qui avait appelé les pompiers qui avaient appelé le Samu parce que ce n’était pas de leur ressort territorial qui avait appelé chez lui. Il n’y avait personne évidemment puisque le seul locataire de l’appartement était allongé sur le sol. Alors, Stéphanie, qui n’était pas le genre de personne à se démonter ou à se laisser impressionner ou même à se laisser dépasser par les contingences, regarda dans les poches du gisant s’il y avait une adresse. 25, rue de la Grange-aux-Loups, était indiqué sur une carte d’identité trouvée dans la poche arrière du pantalon de velours à grosses côtes marron. C’était un indice. On peut même dire qu’il y avait de fortes présomptions pour que la victime de la syncope allongée devant elle habitât à cette adresse.

C’est ainsi que, de fil en aiguille, on lui recousit dans l’ambulance, à gros points à cause des secousses, l’arcade sourcilière droite qui n’avait pas résisté au choc frontal avant de le raccompagner chez lui, penaud, dans ses pénates. Depuis le retour du mouchoir à son propriétaire, suivi d’une grande discussion sur leurs goûts respectifs, Stéphanie avait pris un chocolat et Alain un café, pendant que la pluie frappait au carreau de la terrasse, suivie d’une longue promenade sous un unique parapluie, suivie d’une nuit de découvertes réciproques, ils ne s’étaient plus quittés. Sauf qu’à un moment, leur chemin estudiantin respectif avait divergé quand la jeune fille s’était rendu compte qu’elle préférait les petits calculs à la grande Histoire. Elle choisit une école de Commerce plus en rapport avec sa conception du monde. Elle était résolument tournée vers le futur. L’avenir, par définition, n’était pas la préoccupation première des étudiants en Histoire.