Ruth et le Roi des Géants - S.E. Smith - E-Book

Ruth et le Roi des Géants E-Book

S.E. Smith

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Beschreibung

Le roi des géants a rencontré son égal…
Lorsque son frère disparaît, Ruth Hallbrook suit la seule piste qu’elle possède : l’histoire que lui a racontée une étrange femme rencontrée en ville. Armée d’un coquillage « magique » censé la guider, tout ce qu’elle a à faire, c’est répéter les mots qu’elle entend quand elle le met à son oreille. Tout aurait été parfait si elle avait pu comprendre ce qu’il disait ! Un mot de travers et elle atterrit dans un royaume peuplé de géants dont l’un, très grand et on ne peut plus exaspérant, pense que sa place se trouve dans sa cage dorée… Il peut toujours rêver !
Une occasion de s’échapper pour trouver un peu de paix et de tranquillité se transforme en désastre lorsque Koorgan, le roi des géants, se retrouve coincé dans un vieux puits. Incapable d’en sortir, il est certain que son salut viendra de l’équipe de recherche, quand elle finira enfin par le trouver. La dernière chose à laquelle il s’attend, c’est que sa sauveuse soit à peine plus grande que sa main.
Craignant qu’il n’arrive quelque chose à cette minuscule créature, il se sent obligé de l’aider à retrouver son frère disparu et à la ramener dans son monde. Le problème, c’est que plus il passe de temps avec elle, moins il veut la laisser partir.
La vie sur l’île des Géants est dangereuse pour la minuscule Ruth. La protéger fera appel à toutes les compétences de ce roi des géants. Guidé par la légende d’une plante mythique qui aurait créé les géants, Koorgan n’aura de cesse de trouver un moyen de garder Ruth à ses côtés. Découvrez si l’amour peut surmonter la barrière dressée par un sort mal prononcé !
Auteur de renommée internationale, S.E. Smith propose une nouvelle histoire d’action pleine de romance et d’aventure. Débordant de l’humour qui la caractérise, de paysages éclatants et de personnages attachants, il est certain que ce livre deviendra un nouveau favori des fans !

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Seitenzahl: 351

Veröffentlichungsjahr: 2020

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Ruth et le Roi des Géants

Un Conte des Sept Royaumes Tome 5

S.E. Smith

Remerciements

Je voudrais remercier mon mari Steve de croire en moi et d'être assez fier de moi pour me donner le courage de suivre mes rêves. J'aimerais également remercier tout particulièrement ma sœur et meilleure amie, Linda, qui non seulement m'a encouragée à écrire mais a également lu le manuscrit. Et également mes autres amis qui croient en moi : Jennifer, Jasmin, Maria, Rebecca, Gaelle, Angelique, Charlotte, Rocío, Aileen, Julie, Jackie, Lisa, Sally, Elizabeth (Beth), Laurelle, et Narelle. Les filles qui m'aident à continuer !

Et un merci tout particulier à Paul Heitsch, David Brenin, Samantha Cook, Suzanne Elise Freeman, Laura Sophie, Vincent Fallow, Amandine Vincent, et PJ Ochlan, les voix fantastiques derrière mes livres audios !

—S.E. Smith

Paranormal Romance

Ruth et le Roi des Géants

Les Sept Royaumes Tome 5

Copyright © 2020 par Susan E. Smith

Publication E-Book en anglais septembre 2019

Publication E-Book en français décembre 2020

Traduit Par : Charlotte Spender

Relu Par : Gaëlle Darde

Couverture par : Melody Simmons et Montana Publishing

TOUS DROITS RÉSERVÉS :

Cette œuvre littéraire ne peut être reproduite ou transmise sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, y compris la reproduction électronique ou photographique, en tout ou en partie, sans l'autorisation écrite expresse de l'auteur.

Tous les personnages et événements de ce livre sont fictifs ou ont été utilisés de façon fictive, et ne doivent pas être interprétés comme étant réels. Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou décédées, des événements réels ou des organisations est strictement fortuite et n'est pas voulue par l'auteur.

Résumé : Ruth est prête à tout pour découvrir ce qui est arrivé à son frère. Les indices sont clairs. Elle les suivra jusqu’au bout du monde et au-delà si nécessaire.

ISBN : 978-1-952021-70-1 (livre de poche)

ISBN : 978-1-952021-69-5 (eBook)

Romance (amour, contenu sexuel explicite) | Fantasy Dragons & Créatures Mythiques | Contemporain | Paranormal | Action / Aventure | Fantasy

Publié par Montana Publishing, LLC

& SE Smith de Florida Inc. www.sesmithfl.com

Sommaire

Prologue

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Chapitre 24

Épilogue

Notes

Plus de livres et d’informations

À propos de l’auteur

Présentation des Sept Royaumes

Île des Éléments — créée en premier.

Roi Ruger et reine Adrina

Les élémentaux peuvent contrôler la terre, le vent, le feu, l’eau et le ciel. Leurs pouvoirs diminuent légèrement lorsqu’ils ne sont pas sur leur île.Don de la déesse : la Gemme de Puissance.

Île du Dragon — créée en deuxième.

Roi Drago

Contrôle les dragons.Don de la déesse : le Cœur du Dragon.

Île du Serpent de Mer — créée en troisième.

Roi Orion

Peut contrôler les océans et les créatures des mers.Don de la déesse : les Yeux du Serpent de Mer.

Île de Magie — créée en quatrième.

Roi Oray et reine Magika

Leur magie est extrêmement puissante, mais diminue légèrement lorsqu’ils ne sont pas sur leur île.Don de la déesse : l’Orbe de la Lumière Éternelle.

Île des Monstres — créée en cinquième pour ceux trop dangereux ou étranges pour rester sur les autres îles.

Impératrice Nali

Elle peut voir le futur.Don de la déesse : le Miroir de la déesse.

Île des Géants — créée en sixième.

Roi Koorgan

Les géants peuvent devenir colossaux quand ils sont menacés, mais seulement lorsqu’ils ne sont pas sur leur île.Don de la déesse : l’Arbre de Vie.

Île des Pirates — créée en dernier pour les parias des autres îles.

Roi Pirate Ashure Waves, Gardien des Âmes Perdues

Collectionnent tout ce qui est beau. Féroces et malins, les pirates parcourent les îles pour faire du commerce, négocier et parfois, mettre la main sur des objets intéressants.Don de la déesse : le Chaudron des Esprits.

Personnages :

Île des Géants

Les géants :

Koorgan : roi des géants

Gant : bras droit du roi des géants

Edmond : vieux garde et lieutenant des gardes du palais des géants

Hermon : cultive les champignons magiques des géants

Madura : mi-sorcière, mi-géante ; ensorceleuse des géants

Les pirates :

Ashure Waves : roi des pirates

Bleu LaBluff : second d’Ashure et capitaine de l’une des flottes des pirates

Dapier : responsable des acquisitions pour le navire d’Ashure

Les humains :

Ruth Hallbrook : expert-comptable judiciaire, sœur de Mike Hallbrook

Mike Hallbrook : inspecteur au département de police de Yachats, frère de Ruth Hallbrook

Tonya Maitland : journaliste d’investigation sous couverture se faisant passer pour un agent du FBI enquêtant sur les disparitions à Yachats, Oregon

Asahi Tanaka : agent de la CIA enquêtant sur les disparitions à Yachats, Oregon

Gabe Lightcloud, marié à Magna: travaille à la collecte de données pour l’United States Fish and Wildlife Service1

Kane Field, marié à Magna : médecin à Yachats, Oregon

Carly Tate, mariée à Drago : directrice adjointe de banque à Yachats, Oregon

Jenny Ackerly, mariée à Orion : institutrice et meilleure amie de Carly

Ross Galloway : pêcheur à Yachats, Oregon

Les personnages des Sept Royaumes :

Magna (sorcière des mers), mariée à Gabe Lightcloud et Kane Field : mi-sorcière, mi-peuple de la mer, cousine éloignée d’Orion du côté de son père

Drago, marié à Carly Tate : roi des dragons

Orion, marié à Jenny Ackerly : roi de l’île du Serpent de Mer (peuple de la mer)

Marina, mariée à Mike Hallbrook : sorcière

Magika : reine de l’île de Magie

Oray : roi de l’île de Magie

Nali : impératrice des monstres

Résumé

Le roi des géants a rencontré son égal…

Lorsque son frère disparaît, Ruth Hallbrook suit la seule piste qu’elle possède : l’histoire que lui a racontée une étrange femme rencontrée en ville. Armée d’un coquillage « magique » censé la guider, tout ce qu’elle a à faire, c’est répéter les mots qu’elle entend quand elle le met à son oreille. Tout aurait été parfait si elle avait pu comprendre ce qu’il disait ! Un mot de travers et elle atterrit dans un royaume peuplé de géants dont l’un, très grand et on ne peut plus exaspérant, pense que sa place se trouve dans sa cage dorée… Il peut toujours rêver !

Une occasion de s’échapper pour trouver un peu de paix et de tranquillité se transforme en désastre lorsque Koorgan, le roi des géants, se retrouve coincé dans un vieux puits. Incapable d’en sortir, il est certain que son salut viendra de l’équipe de recherche, quand elle finira enfin par le trouver. La dernière chose à laquelle il s’attend, c’est que sa sauveuse soit à peine plus grande que sa main.

Craignant qu’il n’arrive quelque chose à cette minuscule créature, il se sent obligé de l’aider à retrouver son frère disparu et à la ramener dans son monde. Le problème, c’est que plus il passe de temps avec elle, moins il veut la laisser partir.

La vie sur l’île des Géants est dangereuse pour la minuscule Ruth. La protéger fera appel à toutes les compétences de ce roi des géants. Guidé par la légende d’une plante mythique qui aurait créé les géants, Koorgan n’aura de cesse de trouver un moyen de garder Ruth à ses côtés. Découvrez si l’amour peut surmonter la barrière dressée par un sort mal prononcé !

Prologue

Six mois plus tôt,

New York, aéroport international JFK :

— Bon sang, sœurette ! Est-ce qu’il t’arrive de répondre au téléphone ? C’est Mike. Je voulais te dire que je vais bien. Écoute, il s’est passé un truc incroyable, mais je voulais te dire que je suis sain et sauf… et heureux. Oh, Charlie est avec moi, alors ne t’inquiète pas pour ce maudit chien. J’ai rencontré la plus incroyable des femmes. Elle vient d’un autre monde, je te le jure. Je sais de quoi ça a l’air, mais je…

Ruth Hallbrook grommela entre ses dents de frustration à mesure que le message de son frère devenait de plus en plus fou. Il dépeignait un conte de fées incroyablement détaillé auquel il semblait croire de tout son cœur, et soudain, le message coupait brusquement au milieu d’une phrase.

Se frayant un chemin à travers la foule au terminal de l’aéroport, elle appuya sur le bouton pour réécouter le message et leva son téléphone à son oreille. La sangle de son sac à main commença à glisser et elle dut lever l’épaule pour l’empêcher, ainsi que la sangle de sa serviette, de tomber, chose peu aisée alors qu’elle tirait son bagage à main derrière elle. Elle serra les dents lorsque deux jeunes filles s’arrêtèrent soudain devant elle et qu’elle faillit leur rentrer dedans. 

— Attention, aboya-t-elle abruptement.

Les filles levèrent les yeux au ciel tandis qu’elle les dépassait. La tension crût en elle quand elle se rendit compte qu’il lui restait encore quatre portes à franchir avant d’atteindre sa destination. La peur, l’adrénaline, la colère et la caféine avaient été ses fidèles compagnons ces douze dernières heures.

Elle avait travaillé à l’étranger en tant que consultante au cours des trois semaines et demie passées et ne s’était pas embarrassée de son téléphone personnel à partir du moment où il n’avait plus eu de batterie. Pensant avoir oublié son chargeur, et Mike et elle ne s’appelant qu’une fois par mois, elle ne s’en était pas inquiétée, car elle savait qu’elle serait rentrée avant leur prochain rendez-vous téléphonique. Si quelque chose de vraiment important se produisait, Mike savait qu’il pouvait la contacter sur son téléphone professionnel.

En découvrant ce matin même qu’elle avait mis le chargeur dans une différente poche zippée de sa valise, elle avait mis son téléphone en charge tandis qu’elle se préparait frénétiquement pour se rendre à l’aéroport.

Son message avait été le dernier sur sa boîte vocale. Tous les autres messages avaient été des publicités à l’exception du rappel de son prochain rendez-vous chez le dentiste et du message d’un homme du nom d’Asahi Tanaka qui prétendait être un agent de la CIA, fait qu’un ami d’un ami avait vérifié pour elle. Malheureusement, cette longue liste de messages avait rempli sa boîte vocale et le plus important de tous avait été coupé.

— Je jure que si je reçois encore un appel pour une nouvelle carte bleue, du fisc qui veut m’enfermer ou pour me dire que la garantie de ma voiture expire bientôt, je vais étrangler les trous du cul à l’autre bout du fil et leur dire de se trouver un vrai boulot ! grogna-t-elle en traversant d’un pas rapide l’aéroport JFK à New York.

Elle devait avoir parlé un peu plus fort qu’elle ne l’avait cru, car plusieurs personnes se tournèrent pour la dévisager. Ils s’empressèrent de regarder ailleurs lorsqu’elle les fusilla du regard. Elle jeta un coup d’œil au billet qu’elle tenait. Elle avait changé sa correspondance entre New York et la Californie pour Portland, dans l’Oregon, afin de pouvoir découvrir elle-même ce qui se passait.

— Tant pis pour lui, je vais déduire le prix de ce billet de son cadeau de Noël, marmonna-t-elle en appuyant sur la touche pour rappeler. Allez, Mike, décroche ! Tu te plains que je ne réponds pas quand tu appelles, grommela-t-elle.

Ruth grimaça en entendant le dernier appel d’embarquement pour son vol, suivi d’une annonce adressée à elle, Ruth Hallbrook, de bien vouloir se présenter à un représentant de la compagnie aérienne à la porte d’embarquement.

— Et vous croyez que j’essaie de faire quoi, putain ? lança-t-elle, tout énervée.

Elle parvint à la porte d’embarquement avant qu’ils finissent de répéter le message pour la seconde fois. Serrant son téléphone jusqu’à en avoir les jointures blanches, elle lança sa carte d’embarquement à l’employée. La femme la regarda, ouvrit la bouche, puis la referma. Ruth savait exactement pourquoi : elle était fichue comme l’as de pique, si ce dernier avait suivi les conseils d’un sac.

Voilà ce qui arrive quand on termine un mois de longues réunions, qu’on apprend que son frère a disparu non pas une, mais deux fois, et qu’on découvre qu’il a laissé un message incompréhensible à propos d’une femme d’un autre monde sur le téléphone qu’on devait éteindre pendant le décollage. Ajoutez ensuite à ça un vol à l’autre bout du monde ou presque. Mike est probablement parti voir E.T. à la Zone 51, à l’heure qu’il est. Il va juste traîner au fond du Meteor Crater1, sauf que, oh attends, il a été déplacé à la Devils Tower2 en purée ! pensa-t-elle avec lassitude, prenant alors conscience du nombre de films bizarres qu’elle avait regardés.

Un rire nasal peu élégant lui échappa à cette idée. Ce rire inattendu fit tourner la tête de l’hôtesse de l’air qui se tenait près de la porte d’embarquement et qui lui adressa un regard interrogateur alors qu’elle montait à bord de l’avion. Ruth passa devant elle en secouant la tête et s’avança dans l’allée jusqu’à son siège. Elle rangea son bagage à main dans le compartiment au-dessus du siège, glissa sa serviette sous celui qui se trouvait devant elle et soupira tandis qu’elle prenait place en première classe.

Elle se débarrassa de ses escarpins, agita les orteils et mit sa ceinture de sécurité. L’homme assis à côté d’elle du côté du hublot lui semblait vaguement familier, mais il se contenta de lui jeter un coup d’œil et de lui sourire avant de reprendre la lecture de son journal. Cela convenait parfaitement à Ruth. Elle n’était pas d’humeur à endurer des interactions sociales polies, trop occupée qu’elle était à réfléchir à un plan pour enterrer le cadavre de son frère.

Un autre soupir las lui échappa tandis que l’hôtesse de l’air commençait les présentations de sécurité. Elle jeta un coup d’œil au gros titre du journal que l’homme tenait. « Une auditrice indépendante révèle des malversations importantes dans la plus grande société de vente au détail en ligne ». Un sourire menaçant se dessina sur ses lèvres, faisant perdre ses moyens à l’hôtesse de l’air à l’instant où elle expliquait la marche à suivre dans le cadre d’un atterrissage d’urgence sur l’eau. Ruth eut pitié de la femme, se laissa aller contre son appui-tête et ferma les yeux.

Et les gens pensent que c’est la police qui s’amuse le plus, pensa-t-elle, fatiguée.

Elle avait été l’auditrice judiciaire principale dans l’affaire présentée par le gouvernement, et les incohérences qu’elle avait découvertes avaient déclenché une tempête sans précédent. L’affaire avait pris fin juste avant son départ pour l’Europe, mais le procès n’avait débuté que la veille. C’était grâce à cette affaire que son plus récent client l’avait embauchée. Elle était une brillante détective quand cela touchait aux chiffres.

Son frère, quant à lui, était un super inspecteur pour le département de police de Yachats, Oregon, raison pour laquelle il était si étrange qu’il quitte tout si brusquement pour s’enfuir avec une femme. Il adorait son travail. Il était doué. Cette ville avait besoin de lui, et il le savait.

Ne parvenant toujours pas à dormir trente minutes plus tard, Ruth rouvrit les yeux, alluma son téléphone et fit défiler l’enregistrement automatique du message que Mike lui avait laissé. J’ai rencontré la plus incroyable des femmes…

Quand son département l’avait informée de sa disparition, tard la veille, Ruth avait exigé qu’ils lui envoient toutes les découvertes de leur enquête et la tiennent au courant. L’un des avantages à avoir des amis haut placés qui espéraient qu’elle n’examinerait jamais en détail leurs finances, c’était que lorsqu’elle demandait de l’aide, on ne la lui refusait jamais.

Les trois heures passées au Business Lounge de Heathrow lui avaient permis d’imprimer et de passer en revue les documents. Tout au long du vol pour New York, elle avait échangé des messages avec le département de police, le FBI et l’agent Asahi Tanaka, qui lui avait également envoyé des e-mails.

Pinçant les lèvres, elle tira sa serviette de sous le siège et en sortit la chemise en papier kraft ainsi qu’un stylo. Elle descendit la tablette fixée au siège devant elle et ouvrit le dossier. Il contenait les relevés bancaires et de carte de crédit de son frère, ainsi que les rapports et photographies de l’enquête à ce jour. Les lettres que Mike avait faxées juste avant le départ de son vol transatlantique constituaient les documents les plus récents.

Son bureau lui avait fait parvenir des copies de sa lettre de démission et un rapport indiquant que les affaires de personnes disparues sur lesquelles il travaillait se finissaient bien. Jenny Ackerly et Carly Tate, les deux femmes disparues, allaient bien. Elles avaient simplement décidé de partir de façon aussi soudaine et inexpliquée que lui et de ne rien dire à personne pendant que leurs proches s’inquiétaient, et ce des années durant dans le cas de Carly Tate. Une photographie d’elles, tout sourire, le prouvait.

La plus récente photographie prise chez Mike laissait penser qu’il était parti volontairement. La serrure n’avait pas été forcée, d’après l’avis des enquêteurs, et des photographies et vêtements avaient à présent disparu. Devait-elle croire que Mike avait pensé ne pas avoir besoin de vêtements lors de sa première disparition, mais qu’il avait maintenant changé d’avis ?

Il s’était passé quelque chose dans le court laps de temps qui s’était écoulé depuis la dernière fois qu’elle lui avait parlé. Le message de Mike lui aurait fait croire qu’il avait rencontré une femme et avait disparu de la surface de la Terre, laissant tout derrière lui, excepté son portefeuille, ses clés, son téléphone et son chien. Ruth était-elle la seule à croire qu’il se passait quelque chose de sacrément bizarre ?

— Rien, absolument rien, marmonna-t-elle entre ses dents en regardant fixement les déclarations. Pas d’achat, pas de retrait, pas d’utilisation de la carte de crédit, fulmina-t-elle, griffonnant sur les documents tout en réfléchissant.

— Que voulez-vous boire, Madame ? interrogea l’hôtesse de l’air.

Ruth leva les yeux vers la femme qui la regardait et attendait sa réponse, et elle se rendit compte que ce devait être la seconde fois qu’elle lui posait la question.

— Un bourbon on the rocks, demanda-t-elle.

— Très bien, Madame. Voulez-vous le dîner au poulet ou au saumon ? continua l’hôtesse de l’air.

— Au poulet, répondit distraitement Ruth en tapant la pointe de son stylo sur le document devant elle.

Elle reporta son attention sur les rapports financiers qu’elle avait sous les yeux. L’hôtesse de l’air lui apporta sa boisson et Ruth la remercia d’un murmure. Elle se carra dans son siège tandis que la femme servait sa boisson à l’homme à côté d’elle.

— Une femme qui aime le bourbon. Cela fait longtemps que je n’en avais pas rencontré, commenta ce dernier d’un ton charmeur.

Soit ce gars est en manque, soit je ne suis pas aussi moche que je le croyais, ce qui est dommage parce que ça lui aurait épargné de se faire arracher les yeux, surtout maintenant que je me souviens pourquoi il me semblait familier, pensa-t-elle, résignée.

— Ça ne me surprend pas, répondit-elle d’un ton méprisant tout en reportant son attention sur le dossier.

— Est-ce que vous avez du mal à faire vos comptes ? Mon ex-femme pensait que s’il y avait des chèques dans le chéquier, c’était qu’il devait y avoir de l’argent à la banque. Ah, les femmes ! Je vous jure que si l’on ne leur donnait pas d’argent de poche, elles ne sauraient pas quoi faire, ricana l’homme.

Ruth fixait le dossier du siège devant elle, ses doigts serrant plus fermement son stylo que nécessaire. Elle baissa les yeux vers le document et sourit en voyant que ses griffonnages avaient produit un cercueil duquel la silhouette simpliste de son frère essayait de sortir.

Ne réponds pas, ma fille, se dit-elle. Le vol va être long. NE RÉPONDS PAS.

Elle savait cependant que c’était un avertissement vain. Elle desserra sa prise sur le stylo, prit son verre et en but une gorgée, sa décision prise. Bien qu’elle connaisse déjà son nom et qu’elle en sache plus sur son activité qu’il ne l’aimerait, il était toujours bon d’avoir plus d’informations.

Ruth l’étudia plus attentivement. Le costume et les chaussures italiennes qu’il portait valaient cher, mais sa Rolex était une fausse. Il s’en serait aperçu s’il avait lu le nom de la marque mal orthographié sous le verre : Rolex ne prenait qu’un « L », pas deux. Son haleine était par ailleurs déjà chargée d’alcool avant qu’il ne prenne une gorgée de sa boisson, ce qui lui apprit qu’il avait bien profité du Lounge de première classe avant le vol.

— Eh bien, que c’est gentil de votre part, Monsieur…, commença Ruth avec un sourire mielleux.

— James Hornet, mais vous pouvez m’appeler Jim, ma belle, répondit-il avec un sourire confiant.

— James Hornet…, Ruth pencha la tête et le regarda avec une expression faussement pensive. Est-ce que vous ne seriez pas LE James Hornet de Hornet Communications ? Votre société n’a-t-elle pas négligé de déclarer un accord d’un milliard de dollars avec une société taïwanaise ayant des liens avec la Chine ? C’était une sacrée erreur de comptabilité ! Ça vous a valu une amende de dix millions de dollars et une enquête du département de la Justice. Je crois avoir lu dans le Financial Times que l’accord en question est finalement tombé à l’eau, mais mon Dieu, Hornet Communications aurait été obligé de payer un total de, laissez-moi deviner…, elle tapota son stylo pendant une seconde, vingt-cinq millions, quatre cent trente-deux dollars, et soixante-quatre cents ? Cela aurait été arrondi au dollar le plus proche, bien sûr. Les amendes, les pénalités et les frais juridiques, ça s’accumule, n’est-ce pas ? Vous n’êtes pas CE James Hornet, si ? demanda-t-elle avec un sourire innocent.

L’homme blêmit et secoua la tête.

— Non… Je… Comment pouvez-vous… ? bafouilla-t-il en regardant le dossier devant elle.

Ruth fit sa meilleure interprétation du requin du film LesDents de la Mer sur le point de dévorer le pauvre nageur qui ne se doutait de rien, dans la première scène.

Ne jamais aller nager la nuit dans des eaux infestées de requins et ne jamais énerver une comptable, pensa-t-elle.

— Je m’appelle Ruth Hallbrook. J’étais l’auditrice judiciaire dans votre affaire pour le département de la Justice l’année dernière, alors je vous remercie pour votre sollicitude, mais j’arrive très bien à faire mes comptes, Monsieur Hornet. En fait, vous pourriez dire « jusqu’au dernier centime », répondit-elle en regardant l’homme blêmir de plus belle.

— Toutes mes excuses, Madame, dit-il avec raideur.

Seigneur, j’espère qu’il ne va pas faire une crise cardiaque. Je ne veux pas avoir à rester assise à côté d’un mort pendant les sept prochaines heures, se dit-elle.

— Veuillez m’excuser, je dois aller aux toilettes, marmonna-t-il avec colère, le visage rouge.

Ruth se leva et s’effaça pour laisser passer Jim, qui quittait maladroitement son siège. Elle se rassit et prit la chemise. Elle ne tarda pas à remarquer que l’homme parlait énergiquement avec une autre hôtesse de l’air. Une vague d’amusement et de soulagement la traversa quand ils jetèrent tous les deux un coup d’œil dans sa direction avant que la femme ne désigne l’arrière de l’avion d’un signe de tête. Jim acquiesça et se hâta de rejoindre la zone séparée par un rideau.

— Votre dîner, lui offrit l’hôtesse de l’air.

— Merci, répondit poliment Ruth, l’ignorant en la voyant essayer discrètement d’en apprendre plus tandis qu’elle se penchait pour déposer le dîner sur la tablette.

— Je suis expert-comptable judiciaire. J’ai mené l’audit de sa société. Vous devinez probablement que ça ne s’est pas bien passé pour lui, murmura-t-elle avec un sourire las.

— Ah, répondit l’hôtesse, l’air contrit.

— Ça marche à tous les coups, dit Ruth à voix basse.

— J’espère que vous apprécierez le reste du vol, Madame, répondit l’hôtesse de l’air, un sourire aux lèvres.

— Je suis sûre que ce sera le cas… maintenant.

L’odeur de poulet et de légumes qui l’envahit fit gronder son estomac. Elle posa le dossier sur le siège à côté d’elle et mangea lentement, profitant de son repas tandis qu’elle passait mentalement en revue tout ce qu’elle savait.

Tout se passera bien, ma fille. Tu ne perdras pas la seule famille qu’il te reste au monde, la seule personne qui peut supporter tes sarcasmes. Il est juste… il est en pleine crise de la trentaine, c’est tout. Mike ouvrira la porte et aura une boîte de sa sauce spaghetti spéciale et de sa sauce ranch maison rien que pour toi.

Plusieurs heures plus tard, elle regardait par le hublot tandis que l’avion atterrissait à l’aéroport international de Portland, dans l’Oregon. Le nœud dans son estomac s’était accentué à mesure qu’elle approchait de la côte ouest.

Dès l’instant où le pilote annonça qu’il était possible d’utiliser les téléphones, elle désactiva le mode avion du sien et attendit impatiemment qu’il se connecte à l’antenne-relais de téléphonie mobile la plus proche. Ses doigts tremblaient quand elle composa le numéro de son frère.

— Vous avez appelé l’inspecteur Mike Hallbrook. Je suis en ligne avec un autre appel ou dans l’incapacité de vous répondre. Veuillez laisser un message et je vous recontacterai.

— La boîte vocale du numéro que vous avez contacté est pleine, répondit la voix automatique après le bip.

Ruth prit une profonde inspiration et regarda par le hublot. Eh bien, Mike disait toujours qu’elle était née avec une triple dose de ténacité. Il allait découvrir qu’elle était née avec bien plus que cela !

— Tu viens juste d’atterrir sur la liste noire de ta grande sœur, petit frère, marmonna-t-elle entre ses dents, remettant ses escarpins et rassemblant ses affaires. Prêt ou pas, me voilà !

Chapitre Un

Dans le présent,

Les Sept Royaumes, Île des Géants :

— Qu’est-ce qui te chiffonne autant ? interrogea Gant avec un grand sourire.

Koorgan secoua la tête et continua de marcher. Son ami le suivait, ses bottes contre le sol en pierre dur donnant l’impression qu’une horde d’hippogriffes de Nali chargeait dans le couloir.

— Est-ce que tu fais toujours autant de bruit quand tu marches ? grogna-t-il.

Gant émit un petit rire.

— Tu refais de la paperasse, je me trompe ?

Koorgan grimaça quand son ami, conseiller principal et capitaine de la garde lui mit une tape sur l’épaule. Il résista à l’impulsion qui lui dictait de jeter Gant par la fenêtre. La seule raison qui le retint, c’était qu’il ne manquerait pas de devoir remplir encore plus de papiers pour gérer le coût du remplacement et de la réparation de la fenêtre, et Gant demanderait probablement quelques jours de congé en compensation.

— Ashure a envoyé un autre de ses contrats et celui-ci était particulièrement… agaçant, répondit-il en soupirant.

Il avait pratiquement jeté dehors le dernier diplomate du pirate et lui avait dit de ne pas revenir. Si Ashure voulait faire affaire avec l’île des Géants, il ferait bien de commencer par proposer de meilleurs accords. À l’heure actuelle, Koorgan était prêt à piétiner l’arrogant pirate.

— Pourquoi est-ce que tu n’embaucherais pas quelqu’un pour s’occuper des trucs sans intérêt ? suggéra Gant.

Koorgan s’arrêta et se tourna pour le regarder.

— Parce que tu crois que je n’ai pas essayé ? Le maudit pirate a séduit toutes les femmes que j’ai embauchées, et avant que tu le demandes, ça ne l’a pas arrêté quand j’ai nommé Agatha responsable ! Cette femme doit avoir dans les cinq cents ans ! C’est une cyclope, bon sang ! Si je mets un homme au poste, soit il est trop intimidé par Ashure, soit il est séduit par le tintement de l’or. Je le bannirais si je n’avais pas autant besoin de ses marchandises. Négocier autant avec lui est un prix excessif à payer pour fermer nos frontières, grommela Koorgan. Je commence à me demander si je n’aurais pas plutôt dû faire face au mal qui s’étend dans les royaumes. Entre cela, la maladie des plantes, la comptabilité, l’inventaire, les contrats, et les relations avec les autres diplomates… J’ai l’impression d’étouffer ici. Je déteste ça, Gant, admit-il.

Il se sentit immédiatement coupable d’avoir déchargé sa bile sur son confident. Conseiller un roi n’était pas chose aisée et Koorgan essayait de ne pas s’imposer de façon inutile à Gant, craignant que leur amitié se brise un jour sous la pression. Il se passa une main sur le visage avant de la laisser retomber le long de son corps.

Gant le regarda avec sérieux.

— Je comprends… et tu sais, tes noces à venir aideront à résoudre au moins un de ces problèmes. Nous devrions peut-être parler de… ? demanda-t-il avec précaution.

Koorgan lui lança un regard hostile.

— Non, grogna-t-il, tournant les talons et reprenant sa progression.

— Tu comprends quand même que ça aide d’avoir une femme — ou un homme si c’est ce que tu veux — qui est déjà choisie avant d’envisager de l’épouser, n’est-ce pas ? lança son ami derrière lui.

— La ferme, Gant ! Tu ne m’aides pas, rétorqua Koorgan.

Il ne s’arrêta pas. Il avait besoin de sortir un moment pour se vider la tête. Les gardes en poste près des portes principales se hâtèrent de les ouvrir en voyant son sombre air renfrogné. Le temps que Gant le rattrape, il avait franchi les portes et dévalé les marches.

— Qu’est-ce qui était si agaçant à propos du contrat d’Ashure ? se renseigna son ami sans se faire distancer.

— Il a offert de me trouver une épouse en échange d’une tonne d’arbres et de trois tonneaux de mon meilleur brandy.

Gant leva des yeux surpris vers lui.

— Cela ne semble pas être une mauvaise offre. Cela remplirait les conditions.

Koorgan fronça les sourcils.

— Je ne désire aucunement laisser quelqu’un, encore moins ce maudit pirate, choisir qui je prendrai pour épouse, lança-t-il sèchement.

Gant le prit par le bras et l’arrêta. Koorgan se tourna à contrecœur pour faire face à son ami. D’un geste impatient, il libéra son bras.

— Tu sais ce qui se passera si tu ne trouves personne, Koorgan, le prévint Gant.

Il sentit le poids de ses responsabilités peser sur ses larges épaules. Oui, il savait. Le royaume des géants ne serait plus.

La Règle, force dirigeante établie par la déesse elle-même, stipulait que pour que les géants trouvent l’harmonie, leurs souverains devaient trouver un compagnon qui les compléterait avant leur deux cent trente-cinquième année. Dans le cas où il ou elle n’y parviendrait pas, les derniers champignons qui leur donnaient leur magie périraient. Les géants seraient réduits à de simples mortels, incapables de se défendre contre les autres royaumes. Déjà, une maladie attaquait les champignons dans tout le royaume.

— Les champignons disparaissent plus vite qu’on ne peut les faire pousser, et ceux que l’on a déjà cueillis ont commencé à tomber en poussière, dit sombrement Koorgan.

Gant opina du chef.

— J’aimerais qu’il en soit autrement, mon ami. Mener les recherches a été… un exercice décourageant.

— Il me reste encore quelques semaines avant de devoir prendre une décision. Je sors un moment, répondit Koorgan.

Gant eut l’air pensif un instant avant de hocher la tête.

— J’ai ordonné aux membres de la garde de me retrouver dans la cour pour un entraînement, mais si tu me laisses quelques minutes pour que je m’arrange avec Edmond pour qu’il prenne la relève, je viendrai avec toi.

Koorgan secoua la tête.

— Non, maintiens ton entraînement. Je ne serai pas parti plus d’une heure. Je sors juste faire un petit tour. J’ai besoin d’être seul pour me vider la tête.

— Si tu en es sûr. Ne t’éloigne pas du palais cette fois, s’il te plaît. Tes petites balades ont tendance à me donner des ulcères. N’oublie pas que je te connais depuis toujours. Tu as le chic pour t’attirer des ennuis, répondit Gant, le front plissé et le sourire tendu.

Cela fit rire Koorgan.

— Inutile de t’inquiéter, mon ami. Nous ne sommes plus des enfants. Je peux prendre soin de moi. Je n’irai pas loin et ne serai pas long. Et puis, Genisus a besoin de se dégourdir les pattes. Le royaume ne compte pas un seul étalon capable de le suivre. Faire quelques tours du champ lui fera du bien, dit-il, posant une main sur l’épaule de Gant et la serrant dans un geste rassurant.

Il savait que son ami s’inquiétait autant pour lui que lui-même ne s’inquiétait pour le royaume. Jamais il ne laisserait tomber son peuple, même si cela nécessitait de conclure un accord avec un pirate.

Le pire, avec la Règle, c’était qu’il devait choisir une épouse qui ne venait pas de l’île des Géants. Cela limitait son choix à une dragonne, une sirène, une sorcière, une élémentale, une pirate ou une monstre, et chacune de ces options comportait quelques petits problèmes. Les relations entre l’île des Géants et les autres royaumes étaient cordiales, mais la confiance manquait quelque peu.

Il s’était résigné au fait que son épouse serait probablement une espionne pour le royaume qu’il choisirait. Il avait cherché quelqu’un avec qui il supporterait de partager sa vie, il avait vraiment cherché, mais... ce n’était pas comme si cette période d’après-guerre était propice à ce genre de choses. L’île de Magie était le dernier royaume à avoir été dévasté par la trahison de la sorcière des mers, mais tous les royaumes étaient affectés, et cela depuis longtemps. Il se sentait las rien qu’en y pensant.

— Votre monture est prête, Votre Majesté, dit le garçon d’écurie en tendant les rênes d’un imposant étalon qui piaffait.

— Merci.

Koorgan passa une main le long du nez de Genisus avant de caresser la mâchoire de l’énorme étalon de bataille. Ses poils épais et rêches scintillèrent à son contact. Il prit les rênes au garçon d’écurie, agrippa la selle et se hissa sur le dos du cheval. Le garçon recula maladroitement lorsque Genisus se cabra, battit l’air de ses pattes et releva brusquement la tête.

— Doucement, mon garçon. Je sais que ça fait un moment que nous n’avons pas fait une bonne balade. Que dirais-tu d’y remédier ? rit Koorgan.

L’étalon acquiesça d’un vigoureux signe de la tête. Les yeux du géant brillèrent d’excitation. Il se pencha en avant et talonna Genisus.

Stimulée par l’énergie contenue dans son imposant corps, la monture partit à toute vitesse dans un tourbillon de poussière. Le rire de Koorgan emplit l’air.

— Dégagez les portes ! cria un garde.

Les gardes en poste aux portes coururent pour aider ceux qui entraient et sortaient du palais à se pousser. Koorgan les remercia en levant une main tandis que Genisus filait comme l’éclair. Les habitants de l’île des Géants se tournèrent en souriant alors qu’il passait devant eux à vive allure.

Le poids de leurs sourires confiants vint peser encore plus sur ses épaules. Lorsque Koorgan dirigea Genisus vers la vaste forêt, l’étalon banda ses muscles et ses sabots s’enfoncèrent plus profondément dans le sol meuble sous l’herbe, comme si les monstres de Nali étaient à ses trousses.

Plusieurs heures plus tard, Koorgan arrêta Genisus. L’étalon caracolait nerveusement et il sentit un frisson de tension parcourir le corps du cheval. Il tapota son encolure tout en scrutant les environs.

Alors qu’il suivait la piste d’un sanglier, il avait emprunté un chemin rarement utilisé qui était devenu de moins en moins large jusqu’à ne plus être qu’un étroit sentier. Koorgan avait décidé que rapporter un sanglier lui remonterait le moral et aiderait peut-être à réduire la contrariété de Gant à propos du fait qu’il était allé un peu plus loin que prévu. À présent, il n’était plus si sûr que chasser seul était une si bonne idée.

Les arbres qui l’entouraient étaient plus épais et plus hauts. Peu de lumière perçait la canopée. De grandes fougères bordaient le sentier boueux. Genisus secoua nerveusement la tête et tenta de reculer. En entendant une branche craquer, Koorgan fit tourner l’étalon afin de faire face à leur compagnon invisible. Genisus émit un puissant hennissement et se cabra légèrement.

— Qu’est-ce qu’il y a, mon garçon ? murmura Koorgan.

Sa main descendit vers l’arbalète accrochée sur le côté de sa selle. Il venait de s’en emparer quand un grand craquement se fit entendre derrière lui, accompagné d’un grognement sauvage.

Genisus bondit et rua contre une créature aux épais muscles et aux longues défenses pointues qui émergea des fougères et les chargea. Les énormes sabots ferrés de l’étalon touchèrent le sanglier sanglant à la tête.

Koorgan jura d’une voix puissante en voyant quatre autres sangliers derrière le premier. Il brandit l’arbalète, encocha un carreau et tira.

Celui-ci frappa le sanglier à l’épaule droite et rebondit dessus. Les bêtes possédaient une peau épaisse. À moins de pouvoir frapper directement un endroit vulnérable, les carreaux n’auraient pour seules conséquences que de les faire enrager encore plus.

Genisus donna une ruade lorsque deux autres arrivèrent par devant. Koorgan talonna l’étalon et lâcha les rênes tandis qu’il tentait d’encocher un autre carreau.

Genisus sauta par-dessus les sangliers qui leur bloquaient le chemin. Koorgan se retourna sur la selle et visa. Derrière lui, il vit que le sanglier que l’étalon avait frappé était mort, son crâne défoncé par le coup puissant qu’il avait reçu. Malheureusement, cela en laissait encore six.

Koorgan tira et regarda son carreau toucher au but, transperçant le crâne du sanglier entre les deux yeux. Il n’attendit pas de le voir chanceler et tomber. Alors qu’il se tournait pour encocher un nouveau carreau, il écarquilla les yeux et se baissa au moment où Genisus passa soudain sous une branche basse.

Dans sa hâte de ne pas tomber, il se pencha en avant et l’arbalète se prit dans une branche morte qui pendait bas. L’arbalète lui fut arrachée des mains. Koorgan pencha la tête pour regarder sous son bras et vit l’arme se balancer. Il serait impossible de la récupérer. L’un des sangliers attaqua la crosse en bois de l’arbalète, la brisant de ses énormes mâchoires.

Reportant son attention sur le chemin devant lui, il sortit son épée de son fourreau et mit un coup derrière lui à l’instant où un sanglier sautait pour lui attraper le bras. La lame le frappa entre les pattes avant et lui ouvrit le poitrail.

Genisus fit une embardée lorsqu’un autre sanglier surgit à sa droite et il le percuta, l’écrasant contre le tronc d’un arbre. Koorgan entendit le bruit satisfaisant d’os se brisant.

Devant eux, le sentier s’incurvait sur la gauche. Sur la droite se trouvait une déclivité rocheuse. Koorgan affirma sa prise sur son épée et se pencha en avant tandis que Genisus commençait à prendre le virage serré.

Un grognement vicieux fendit l’air au moment où ils se rapprochaient des rochers et Koorgan se retourna vivement, levant son épée à l’instant où la bête bondit sur lui.

Genisus poussa un grand hennissement, chancela et donna une ruade à l’un des sangliers sanglants derrière eux, qui tentait de lui mordre les pattes arrière. Cela fit perdre l’équilibre à Koorgan.

Son épée s’enfonça profondément dans le poitrail du sanglier sanglant, mais le poids et l’élan de la bête le renversèrent de la selle. Il atterrit sur le dos dans les fougères, sa longue épée toujours empalée dans l’animal.

Genisus avait disparu le long du chemin, l’un des sangliers sanglants toujours à sa poursuite. Koorgan se remit debout et tira sur son épée, mais elle était fermement enfoncée dans la colonne vertébrale du sanglier. Posant un pied sur le corps pour obtenir un meilleur effet de levier, il entendit une branche craquer à quelques mètres seulement de lui.

Il pivota et se retrouva face au plus grand des sangliers sanglants. Ses yeux croisèrent les petits yeux rouges de la bête, qui tapait le sol de ses pattes et balançait la tête d’un côté à l’autre. Les doigts de Koorgan se resserrèrent sur la poignée de son épée, le pied contre le corps du plus petit sanglier, tandis qu’il retirait lentement sa lame de son échine.

Le sanglier le chargea en poussant un cri strident. Koorgan sauta sur le côté tout en brandissant son épée. La pointe bien aiguisée de la lame toucha la défense de la bête, la coupant net.

Koorgan pivota lorsque le sanglier se tourna dans un accès de rage et attaqua de nouveau. Une fois encore, il brandit son épée, mais n’eut pas assez de place pour frapper franchement. La bête s’écrasa contre ses jambes et le déséquilibra. Ses talons se prirent dans un arbre mort à moitié enterré dans les fougères et il tomba à la renverse.

L’épée vola de sa main et atterrit au pied d’un arbre. Il tourna la tête pour en suivre la trajectoire puis se retourna par-dessus le rondin sur lequel il avait trébuché et le leva pour arrêter la charge du sanglier, qui se retrouva alors entre sa seule arme et lui.

Il jeta le rondin sur la bête et partit en courant, se faufilant entre les troncs fins de deux arbres alors que le sanglier percutait bruyamment quelque chose derrière lui. Il jeta un coup d’œil par-dessus son épaule et émit un grand juron quand le sol céda soudain sous ses pieds et qu’il se retrouva en chute libre l’espace d’un instant avant d’atteindre le fond d’un profond trou.

Atterrissant sur le dos, il regarda les éclats de ciel bleu à travers la canopée des arbres. La tête du sanglier sanglant apparut au bord du trou et il émit un couinement de rage. Koorgan poussa contre le sol et se mit debout. Se rendant compte qu’il serait impossible de l’atteindre sans le rejoindre dans le trou, la bête se tourna et gratta le sol de ses pattes arrière, faisant pleuvoir de l’herbe et de la terre sur lui.

— Hé ! Misérable bête ! C’est moi qui suis dans le trou, pas toi, grogna Koorgan à l’animal.

Il l’écouta grogner et s’éloigner lentement. Examinant le trou dans lequel il était tombé, il s’aperçut rapidement qu’il ne s’agissait pas d’un piège pour un animal, mais d’un vieux puits qui avait été abandonné, probablement des centaines d’années auparavant au vu de la couche d’arbres morts et de débris qui l’avait si bien caché. Après tout ce temps, un tapis de terre, qui ressemblait à s’y méprendre au sol de la forêt, s’y était déposé.