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Bob, descendant des survivant d'un holocauste nucléaire, doit fuir le bunker qui l'a vu grandir.Sur une Terre ravagée par des combats qui eurent lieu des siècles auparavant, quelques formes de vie subsistent encore. Bob, l'un des descendants des survivants de l'holocauste nucléaire, se trouve contraint de fuir le bunker qui l'avait vu grandir. Il devra se confronter à de nombreuses facettes de la folie humaine, à commencer par des humains génétiquement modifiés connus sous le nom d'Androgynes Parfaits. Découvrant alors rapidement que le monde était bien plus grand que les quelques murs de béton qu'il avait toujours connus, Bob verra ses convictions les plus profondes et les plus sincères s’effondrer face à la réalité.Découvrez sans plus attendre ce roman de science-fiction post-apocalyptique et suivez les aventures de Bob qui découvre une nouvelle réalité, bien éloignée de ce qu'il a toujours connu.EXTRAITLe processus de suppression fut enclenché. Une onde bleutée émana du plafond blanc, se propageant extrêmement vite vers les sélectionnés. Un instant à peine après avoir été frappés, ils se transformèrent en une bouillie de matière organique immonde, qui coula à travers la grille métallique. Seuls les vêtements restèrent, prêts à être réutilisés.Ainsi s’acheva le processus de sélection. A.P 1203481 quitta la pièce, et se dirigea au niveau inférieur de la tour douze, à laquelle il était affecté. C'était à ce niveau que le processus de recyclage des sélectionnés commençait. La bouillie cellulaire y était traitée, de manière à en éliminer toute trace de germes et de toxines, puis était envoyée vers un dispositif de clonage cellulaire. Ce processus ayant un effet néfaste sur l'intégrité des cellules qui étaient clonées, il était nécessaire de les remplacer régulièrement. Le rôle d'A.P 1203481 était de veiller au non-dysfonctionnement de la procédure, à l'issue de laquelle quelques kilos de matière organique en devenaient plusieurs tonnes. A.P 1203481, durant la totalité de l'opération, restait debout face à un moniteur de contrôle. Il ne comprenait rien à la procédure qui se déroulait. Tout ce qu'il savait et avait besoin de savoir, c'était qu'en cas de dysfonctionnement il devait appuyer sur un gros bouton rouge sur le mur, à sa droite. Toutes connaissances additionnelles à celles nécessaires à la tâche qui lui était assignée étaient jugées parasitaires et inutiles, et ne lui étaient donc pas inculquées.À PROPOS DE L'AUTEURMaël Guimet est un jeune auteur né en 1996. Las d’être un simple observateur muet face à l’effondrement d’un monde, il commença à prendre plaisir à dérouler en longs textes ses pensées et réflexions.Constatant l’impact tonitruant que le plus silencieux des mots pouvait avoir, il se lança dans un projet plus complexe : l’écriture d’un premier livre avec l’idée de pousser chaque individu suffisamment curieux pour le lire à se poser des questions dont l’importance capitale n’a d’égal que le désintérêt naturel qu’il y porte.
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Seitenzahl: 269
Veröffentlichungsjahr: 2018
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Maël Guimet
Saint Bob l'incroyant
Roman
© Lys Bleu Éditions—Maël Guimet
ISBN : 978-2-37877-763-0
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
A.P 1203481 était affecté à la production de nourriture. Il travaillait dans l'une des nombreuses usines de production de la Cité d'Argent, seul. Son rôle était simple : Sélectionner parmi les Androgynes Parfaits les spécimens en moins bonne forme, les plus vieux également, et les conduire à l’abattoir.
Il était au repos, dans l'une des chambres sustentatrices de l'usine. Quelques minutes de sommeil suffisaient à n'importe lequel des A.P pour être de nouveau opérationnel, minutes durant lesquelles leur sang était renouvelé par transfusion, remplacé par un sang synthétique contenant tout ce dont leur organisme avait besoin pour une journée de travail. Ainsi traités, les A.P n'avaient besoin ni d'une nuit de sommeil ni d'une pause repas. Ils étaient en mesure de travailler 23 h 50 sur 24 h.
La chambre en elle-même ressemblait à un cocon de verre et d'acier, tout juste assez grande pour contenir un Androgyne. Des bras d'acier mécanisés se plantaient dans les vaisseaux sanguins les plus importants, aspirants tout le sang de la journée précédente, contenant ce que le corps des Androgynes avait rejeté de toxique et injectant un sang neuf, riche en nutriments, remplaçant ainsi le système digestif par un système sanguin amélioré. La place ainsi libérée dans l'organisme avait permis diverses améliorations de la biologie des A.P. Ils possédaient ainsi un second cœur, des poumons bien plus grands, mais également une petite poche ventrale.
Les Androgynes étaient tous conçus à l'identique. Ils n'avaient ni cheveux, ni poils, ni aucune imperfection qui auraient pu servir de signe distinctif, comme un grain de beauté ou une tache de naissance. Ils étaient dotés d'une musculature impressionnante, chacun d'eux était une montagne de deux mètres de muscles et d'os, recouverts d'une peau pâle. Yeux bruns, quatre orteils, quatre doigts, pas de nez, seulement deux orifices respiratoires. Pas non plus d'appareils génitaux. C'était ainsi que leurs créateurs les avaient voulus. Seul un tatouage, sur le front, permettait de les distinguer. Il représentait un code-barres, permettant aux machines de reconnaître les A.P, et un numéro de série, qui leur servaient à s'appeler entre eux. Non pas que cela soit courant, les A.P n'avaient aucune affinité les uns avec les autres. Les conversations étaient courtes et limitées à la communication professionnelle. Ce numéro de série correspondait à l'origine à l'ancienneté de production ; Chaque nouvel individu était numéroté en fonction du dernier numéro plus un. Rapidement au cours des premières années au sein de la Cité d'Argent, l'on décida de réattribuer ces numéros, en fonction des numéros que les A.P morts laissaient disponibles.
Ainsi il était impossible, même si on le souhaitait, de parler d'un mort. Il était même devenu impossible de savoir qu'un Androgyne était mort, car il était aussitôt remplacé par un Androgyne identique portant le même nom. Cela donnait à tous les Androgynes l'illusion qu'ils étaient immortels ; Ils ne savaient absolument rien de la mort.
Son cycle de restauration terminé, A.P 1203481 se réveilla. Il était prêt à aborder une nouvelle journée de travail. Vêtu de l'uniforme blanc cassé des A.P et de l'insigne indiquant sa fonction, il se mit en route vers l'un des blocs sous sa juridiction.
Après chaque cycle de sommeil, tous les A.P se réunissaient au même endroit, dans une grande salle blanche et grise, au centre de laquelle se trouvait un projecteur holographique. C'est là qu'il se rendait.
Dans cette salle, au nom de « Section d'information 12 », un membre de l'élite dirigeante donnait des instructions aux A.P, suite à quoi A.P 1203481 faisait son travail : Sélectionner les individus faibles, malades, fatigués, et les traiter de la manière qui était jugée appropriée.
Lorsqu'il arriva dans la salle, tous les Androgynes ou presque étaient déjà en place, au garde-à-vous. Le projecteur holographique s'alluma, projetant l'image d'un A.P en tous points semblable aux autres, exception faite de son uniforme rouge pourpre et doré, unique témoignage de son rang. Plusieurs centaines d'A.P formaient un grand carré tout autour de l'Élite dans un silence absolu, en rangs bien droits. Ils étaient tous en tous points semblables, à tel point qu'on aurait pu se croire dans un labyrinthe de miroirs. Pourtant, il n'y avait aucun miroir dans la Cité d'Argent. Pourquoi y en aurait-il eu, alors que les Androgynes étaient naturellement tous identiques et qu'aucun d'entre eux ne pouvait ni n'avait le droit d'altérer son apparence.
Le silence était lourd et pesant, mais aucun A.P ne s'en étonnait ; Ils étaient dressés pour être aussi silencieux que possible. Pas un œil ne clignait, pas une mâchoire ne se contractait. Ils étaient prêts à attendre des heures entières qu'on leur donne un ordre.
La projection prit la parole. Le discours fut bref, il tint en un mot :
« Travaillez. »
Les A.P saluèrent militairement l'hologramme avant que celui-ci ne disparaisse. A.P 1203481 fit une inspection des individus, demandant d'un geste de la main à tous ceux présentant des signes distinctifs de le suivre. Des cernes, un signe de vieillesse, une blessure ; Aucun individu différent des autres n'était toléré au sein de la Cité d'Argent, qui prônait l'égalité parfaite entre tous les Androgynes. Les A.P non sélectionnés se mirent en route vers leurs affectations. Obéissants, ceux sélectionnés suivirent A.P 1203481 sans dire un mot. Ils étaient conduits dans une salle du nom de « Suppresseur 12 ».
Sur instruction d'A.P 1203481, les Androgynes qui sortaient du lot se placèrent au centre de la pièce tandis que le responsable du suppresseur, derrière un mur de verre, contrôlait le bon fonctionnement de l'opération. Les huit sélectionnés étaient debout, sur une grille métallique de forme ronde.
Ils ne présentaient aucune émotion particulière, aussi impassibles face à leur mort qu'au long de leurs courtes vies. Les A.P vivaient rarement plus d'une année. Chaque A.P sélectionné était remplacé en quelques heures par l'usine de reproduction et de préparation. On ne leur inculquait aucune notion religieuse. La foi en dieu avait disparu en même temps que l'humanité, et tous les mots qui y étaient liés avaient été retirés du langage courant, bien que dans le cas des A.P ils n'aient de courant que le nom. Il n'était pas rare qu'ils passent une vie entière sans prononcer un seul mot. D'une certaine manière, à travers leur ignorance, les A.P étaient tous athées. Rien d'étonnant donc à ne voir sur le visage des huit A.P ni peur ni appréhension, ni même de la curiosité quant à ce qu'il adviendrait d'eux. Ils étaient conscients qu'ils n'avaient, individuellement, aucune importance d'aucune sorte.
Le processus de suppression fut enclenché. Une onde bleutée émana du plafond blanc, se propageant extrêmement vite vers les sélectionnés. Un instant à peine après avoir été frappés, ils se transformèrent en une bouillie de matière organique immonde, qui coula à travers la grille métallique. Seuls les vêtements restèrent, prêts à être réutilisés.
Ainsi s’acheva le processus de sélection. A.P 1203481 quitta la pièce, et se dirigea au niveau inférieur de la tour douze, à laquelle il était affecté. C'était à ce niveau que le processus de recyclage des sélectionnés commençait. La bouillie cellulaire y était traitée, de manière à en éliminer toute trace de germes et de toxines, puis était envoyée vers un dispositif de clonage cellulaire. Ce processus ayant un effet néfaste sur l'intégrité des cellules qui étaient clonées, il était nécessaire de les remplacer régulièrement. Le rôle d'A.P 1203481 était de veiller au non-dysfonctionnement de la procédure, à l'issue de laquelle quelques kilos de matière organique en devenaient plusieurs tonnes. A.P 1203481, durant la totalité de l'opération, restait debout face à un moniteur de contrôle. Il ne comprenait rien à la procédure qui se déroulait. Tout ce qu'il savait et avait besoin de savoir, c'était qu'en cas de dysfonctionnement il devait appuyer sur un gros bouton rouge sur le mur, à sa droite. Toutes connaissances additionnelles à celles nécessaires à la tâche qui lui était assignée étaient jugées parasitaires et inutiles, et ne lui étaient donc pas inculquées.
Cette masse informe à l'odeur nauséabonde était ensuite séparée en deux. La première partie était traitée une nouvelle fois et mélangée à des produits chimiques, conçus dans d'autres secteurs. Au bout de la ligne de production sortait un liquide bleuté qui servirait à nourrir les A.P durant leur court sommeil. Toute la procédure prenait à peine quelques heures.
L'autre partie servait à concevoir de nouveaux Androgynes. Une petite machine récupérait du matériel génétique sain et le plaçait dans des incubateurs. La masse organique restante servait à alimenter directement les embryons au fil de leur croissance accélérée. Là encore le processus, géré par un autre Androgyne, était automatique et dépassait de beaucoup l'intelligence de l'ouvrier en charge de son bon fonctionnement.
À l'issue de la procédure, A.P 1203481 avait encore le temps de s'occuper de son second travail. Tous les Androgynes, une fois qu'ils en avaient terminé avec leur affectation principale, s'occupaient du divertissement des élites. Certains combattaient dans l'arène, d'autres étaient envoyés dans les salles de tortures où les élites pouvaient assouvir leurs pulsions sadiques et sanguinaires. A.P 1203481 avait une tout autre tâche à accomplir. Il était chargé de la capture de créatures en dehors des murs de la Cité d'Argent. Celles-ci étaient destinées à combattre dans l'arène contre des Androgynes.
La vie était rare à l’extérieur de la Cité d'Argent. Les terres étaient presque lunaires, grises et couvertes de cendres. En hauteur un orage se déchaînait depuis plus de mille ans. Les Androgynes ignoraient tout de la raison de cet état apocalyptique dans lequel le monde se trouvait. Ils n’apprenaient pas l'histoire car cela était jugé inutile par les Élites de la ville.
Les A.P n'avaient de toute manière pas la curiosité de poser la moindre question sur le monde. Les choses étaient comme elles étaient, ils devaient tenir leur rôle au cœur de la Cité d'Argent et rien d'autre ne comptait.
Des cendres tombaient sans discontinuer du ciel colérique qui entourait la Terre. Elles n'étaient pas toxiques pour les quelques animaux encore vivants qui s'y étaient adaptés, mais les Androgynes ne pouvaient les respirer sans détruire leurs poumons. En ville, ils étaient protégés par un colossal dôme de verre, à l'extérieur ils avaient besoin d'un masque.
A.P 1203481 prit l'un des transporteurs automatiques en direction des portes de la Cité. Bien peu d'Androgynes étaient autorisés à pratiquer des expéditions en extérieur. C'était un privilège, d'une certaine manière. Il ne le voyait pas comme ça, car il ignorait jusqu'au mot « privilège ». C'était surtout un véritable danger et nombreux étaient les Androgynes qui ne rentraient jamais de leurs expéditions ou qui décédaient sur le chemin du retour. C'était la seconde expédition de l'A.P 1203481. Il connaissait déjà un peu les environs immédiats de la ville, mais pour espérer capturer quelque chose il allait devoir s'en éloigner bien plus qu'il ne l'avait jamais fait.
Il n'y avait pas de moyen de transport en extérieur. C'était à pied qu'il partait en expédition. Son exceptionnelle condition physique d'Androgyne lui permettait de courir extrêmement vite pendant une très longue durée.
À peine se fut-il équipé de son masque qu'il demanda aux gardes d'ouvrir les grandes portes de la Cité d'Argent. Il marcha quelques mètres sur les terres désolées qui l'entouraient, choisit une direction et commença à courir. Ainsi débuta sa seconde expédition.
A.P 1203481 n'était conçu ni pour aimer ni pour haïr. Quitter la Cité d'Argent pour la terre hostile dont elle protégeait ses habitants ne lui faisait ni chaud ni froid. Il le faisait parce qu'on le lui ordonnait.
Face à lui s'étendait sur des millions de kilomètres un seul et même spectacle désolant. Difficile de concevoir qu'une forme de vie ait pu survivre dans un environnement pareil. Trouver la moindre goutte d'eau tenait déjà du miracle, trouver de la nourriture était encore plus difficile. Pourtant, des créatures avaient survécu au désastre offert par l'humanité.
Le ciel était sombre en permanence, obscurci par des nuages de gaz toxiques. Personne n'avait plus revu le soleil depuis des centaines d'années. L'orage permanent hurlait et frappait le sol régulièrement, laissant des cratères fumants au milieu du chaos ambiant.
Vue de l'extérieur, la Cité d'Argent était impressionnante. C'était la seule source de lumière que connaissaient les A.P. Les remparts de la Cité, noircis par ce monde de cendres, étaient hauts de plusieurs mètres. À l'intérieur de ceux-ci s'élevait le dôme de verre, qui recouvrait les centaines de bâtiments de la ville, réunis autour de la tour occupée par l'élite.
La Cité n'était dirigée que par une dizaine d'anciens, au pouvoir depuis des siècles. A.P 1203481 provenait de la zone Ouest de la ville, dédiée à l'alimentaire. L'Est était dédié à la création d'individus, le Nord à l'exploitation du sous-sol de la ville, et le Sud à la production de produits chimiques nécessaires au bon fonctionnement des installations. Au centre, autour du bâtiment de l'élite, se trouvaient les baraquements des gladiateurs, et une prison où étaient retenues les créatures destinées à finir dans l'arène. Divers moyens de transport traversaient la ville, des téléphériques, des trains et d autres choses plus difficiles à nommer, conçus sur mesure selon les besoins.
Laissant derrière lui un nuage de cendres, A.P 1203481 était inépuisable. Au bout de quelques heures de course, il fit une première découverte intéressante. Cela ressemblait à un énorme rocher, vu de loin. En se rapprochant, il comprit rapidement que c'était un animal mort. La créature était gigantesque. Déjà à demi ensevelie par les cendres, la pauvre bête ressemblait fortement à un ours. Il était difficile d’en être certain, car la plupart des espèces avaient changées faces aux difficultés environnementales et aux radiations.
Cette bête-là avait visiblement combattu une autre créature. Elle présentait de nombreuses blessures, des lacérations et des morsures.
Morte elle ne présentait aucun intérêt pour A.P 1203481. Elle ne pouvait pas se battre dans l'arène. Il reprit donc sa route, quand soudain son regard fût attiré par un mouvement, à sa droite. Réagissant au quart de tour, il traversa les quelques centaines de mètres qui le séparaient de ce qu'il avait aperçu. Il repéra au sol des empreintes de pas, qui n'appartenaient sans doute pas à un fauve. Elles ressemblaient à celles d'un A.P par leur taille, pourtant la semelle n'était pas la même. Pour l'Androgyne, peu importait la nature de la chose qui avait laissé ces traces, sa place était dans l'arène. Sans hésiter, A.P 1203481 se remit à courir, suivant les traces au sol.
Il était confiant en sa capacité à attraper n'importe quoi. La chose qu'il traquait était plus lente que lui, et il put rapidement l'avoir à portée de vue. C'était un humanoïde, vraisemblablement terrifié par son poursuivant.
Pressant encore davantage le pas, l'Androgyne se poussait dans ses propres limites physiques qui, bien que très élevées, n'en étaient pas moins existante. Il fit le pas de trop ; Le sol se déroba sous ses pieds. Ses réflexes inhumains lui sauvèrent sans aucun doute la vie. Il agrippa la première surface dure qu'il eut à portée de main, se retenant comme il pouvait pour ne pas tomber au fond du gouffre qui s'était ouvert sous ses pieds.
A.P 1203481 était blessé, son corps avait violemment heurté le mur auquel il s'accrochait, il s'était brisé plusieurs os et entaillé à plusieurs endroits. Il s'accrochait d'une main à une petite cavité dans la paroi. Son bras s'était brisé sous le choc, mais il tenait encore.
Les automatismes d'expression de la douleur avaient été retirés de la programmation biologique des Androgynes, mais il la ressentait néanmoins. Il n'émit aucun son, ne fit aucune grimace ; Mais il souffrait. Du sang bleuté coulait lentement depuis ses plaies jusqu'au sol, plusieurs dizaines de mètres plus bas.
Il était observé par une créature étrangement semblable à un Androgyne. A.P 1203481 ne se posait aucune question, il en était incapable. La place de cette chose était dans l'arène.
À l'aide de son bras valide et en prenant appui sur ses jambes, il entreprit de remonter à la surface. Il escalada tant bien que mal les mètres qui le séparaient de sa proie.
« Qui es-tu ? » lui demanda la créature d'une voix stressée.
A.P 1203481 ne comprit pas. La langue n’était plus la même chez les Androgynes, elle avait évolué. Plus précisément, elle avait été évoluée ; Très rapidement, les Élites dominantes s'étaient attaquées au langage, dès la création de cet homme nouveau représenté par les Androgynes.
La langue étant l'un des éléments les plus importants au cœur d'une société car elle permettait à chacun d'exprimer ses pensées aux autres ; Au-delà de la simple expression, il fallait des mots pour structurer une pensée. Les Androgynes n'étaient ni hommes ni femmes, ils étaient des choses au service de l'Élite. Pour empêcher toute résurgence d'une pensée différente de celle de l'asexualité et de la servilité qui leur était inculquée, il était nécessaire de supprimer certains mots.
Ainsi il n'y avait plus de je, de tu ou de nous ; Il n'y avait plus de il ou d’elle, il n'y avait plus que « ça », la chose. Privé par le langage de l'idée même de genre et d'individu, il était impossible qu'un Androgyne ait des pensées déviantes de l'idéologie imposée.
A.P 1203481 ne cherchait de toute manière pas à comprendre. Il n'eut guère de mal à maîtriser la chose qui lui faisait face, qui n'eut même pas le réflexe de se défendre.
Transportant sa proie sur son dos, A.P 1203481 se remit à courir, en direction de la Cité d'Argent.
À peine arrivé, il remit aux gardes sa capture avec pour mission de la présenter aux élites. Il était blessé, épuisé ; Il fit donc ce qu'on lui avait appris à faire. Les gardes prirent le relais et A.P 1203481 se rendit au suppresseur 12. Il était de son devoir de supprimer tous ceux qui étaient blessés, qui montraient des signes de fatigue ou de vieillissement ; C'est donc naturellement que, étant lui-même blessé, il mit en œuvre la procédure de suppression contre lui-même. Quelques instants plus tard, A.P 1203481 n'existait plus. Il ne laissa derrière lui qu'un uniforme blanc, sale, troué et taché de sang. Une procédure automatique se mit en œuvre aussitôt, lançant la création et l'éducation d'un nouvel Androgyne répondant au même nom d'A.P 1203481. L'ancien A.P 1203481 ne mesurerait donc jamais l'impact que sa découverte allait avoir.
Les gardes menèrent sa trouvaille auprès d’Élite 6, l'un des dirigeants de la ville. Celui-ci fut pour le moins surpris, et pour cause ; Les humains sexués avaient tous été exterminés des siècles auparavant.
« Quel autre A.P a vu cette chose ? » demanda-t-il calmement.
« A.P 1203481, en cours de suppression Élite 6. » répondirent les deux gardes simultanément.
« Bien. Supprimez ça », Ordonna-t-il en pointant les deux gardes du doigt.
Les gardes quittèrent la pièce, en direction d'un suppresseur. Ils ne s’interrogèrent pas sur la raison pour laquelle ils devaient mourir, c'était un ordre et ils allaient l’exécuter.
Elite 6 resta seul dans la pièce, face au corps inconscient de l'homme trouvé en extérieur. Il lui enleva son masque, pour détailler son visage. Il s'attendait à trouver un être déformé par les radiations que ses ancêtres avaient dû encaisser. Il n'en était rien.
C'était un indicateur important, Elite 6 pouvait en déduire qu'il provenait d'un abri qui n'avait pas subi les explosions nucléaires. Les vêtements de cet homme également soutenaient cette théorie car ils semblaient dater d'avant-guerre.
Au-delà de la simple curiosité que cela éveillait dans l'esprit de l'Élite, il était agacé. Il faisait partie de ceux qui, à l'origine, avaient déclenché la guerre et exterminé la race humaine. Il était persuadé d'en avoir terminé pour de bon avec ces primates.
Visiblement, il avait eu tort. Comme les rats, les êtres humains semblaient presque impossibles à exterminer. Il suffisait que quelques-uns survivent pour que la race se reconstruise, et il était hors de question qu'il laisse cela arriver. Il allait devoir s'occuper des humains survivants. Il interrogerait cet humain dès son réveil.
Il décida de ne pas en parler tout de suite aux autres Élites. Il savait que certaines parmi elles regrettaient leurs actes passés. Toutes ne seraient donc pas en accord avec son choix de poursuivre l'extermination de cette race désuète et primitive.
La haine qu'Elite 6 vouait à l'espèce humaine était profonde et trouvait ses sources des milliers d'années auparavant. Il n’avait aucun regret au sujet de ses actes, même s’il doutait parfois de leur justesse, et pour cause. Lui même était bien incapable de se souvenir pourquoi l'espèce humaine devait disparaître.
Le problème d'une croyance idéologique basée sur rien c'est qu'il était difficile de changer d'avis ou de faire changer d'avis, même avec des arguments solides. La haine qu'il vouait aux hommes ne pouvait s'expliquer, il les haïssait, c'était comme ça. Il était pour lui intolérable d’en garder ne serait-ce qu’un en vie.
Les autres membres de l'Élite ne pensaient plus tout à fait comme cela. Elite 6 en avait personnellement tué plus d'un à l'issue de débats sur le bien-fondé de l'extermination des sexués. Le doute était typiquement humain, il ne pouvait supporter ce genre d'émotions qui lui paraissaient irrationnelles. C'était par sa conviction inébranlable qu'il était devenu la plus haute autorité de l'Élite actuelle.
Sur les quelques centaines de personnes qui avaient entamé le projet Androgyne Parfait et l'extermination qui s'en était suivie, une dizaine seulement vivaient encore. Beaucoup étaient morts avant que l'on ne comprenne comment transférer une conscience dans un nouveau corps, ce qui était la clé de l'immortalité des Élites, mais d'autres s'étaient seulement vu confisquer leurs vies parce qu'ils n'étaient pas assez forts pour aller au bout du projet.
Pour Élite 6, il ne pouvait pas y avoir d'humanisme modéré. Soit ses confrères voulaient en finir avec l'espèce humaine, soit ils devaient mourir. Aujourd'hui il avait peur de provoquer une nouvelle scission au sein du conseil en apportant devant eux un humain vivant. Il ne pouvait pas se permettre de tuer davantage de membres.
Il allait donc devoir, pour le moment du moins, agir seul et dans l'ombre. Il attrapa son prisonnier par un bras et le traîna vers une cage pour animaux, avant de retourner dans la salle du trône réfléchir à ce qu'il allait faire.
Il y a de nombreux siècles, lorsque les bombes commencèrent à pleuvoir sur le monde, de nombreuses personnes aisées se réfugièrent dans des bunkers souterrains. Conçus pour résister aux bombes et aux radiations, ces endroits étaient les seuls endroits sûrs de la planète durant l'holocauste nucléaire. Plusieurs centaines de milliers de tonnes de nourriture et d'eau y étaient stockées, avec divers moyens de recycler les liquides, et de faire pousser des aliments.
Les forces spéciales Androgynes, sous les ordres des Élites mondiales, avaient fait la chasse à ces abris. Il était impossible de dire combien avaient été épargnés par le manque d'informations à disposition des Androgynes. Ceux qui s'avérèrent trop difficiles à détruire par le sol furent détruits par les airs ; Bien que résistants aux bombes, ils n'étaient pas invulnérables. Certains bunkers furent donc les victimes de bombardements nucléaires, jusqu'à en fracturer la croûte terrestre par endroit. À la connaissance des Androgynes, tous les bunkers avaient été détruits. Pourtant il en restait au moins un, portant le nom barbare de bunker 101.
Seules huit personnes avaient pu rejoindre le bunker 101, sur les centaines qui avaient réservé une place à l'intérieur de cet équivalent antinucléaire de l'arche de Noé. Il n'y avait à l'origine aucune famille, ils étaient tous les huit de parfaits inconnus. Au fil des siècles, la population du bunker augmenta, portant le nombre actuel autour de quarante. Le petit nombre de survivants mena de manière inéluctable à la consanguinité pour la survie de l'espèce. Cela ne gênait personne, car cette pratique était déjà tout à fait populaire bien avant la guerre. La destruction des tabous, ce que l'on appelait à l'époque la libération sexuelle, n'avait connu aucune limite.
Trouvant ses origines au cœur même de la Révolution française à travers la philosophie des lumières, puis mis en avant par la révolution étudiante de Mai 68, les tabous disparurent progressivement. Cela se fit en douceur, sur plusieurs siècles, pour que les gens ne se rendent compte de rien. Autour des années 2100 il n'existait plus aucun interdit sexuel au regard de la loi. Un siècle plus tard, les tabous avaient disparu des mentalités également.
Contrairement aux habitants de la Cité d'Argent, les réfugiés du bunker 101 n'avaient pas oublié l'histoire du monde. Les premiers arrivants avaient pris soin d'enseigner ce qu'ils en savaient à leurs descendants. Bien que n'ayant jamais vu de leurs yeux le monde tel qu'il était auparavant, ils en avaient vu des photos, des vidéos, stockées dans la base de données du bunker.
Il n'y avait pas vraiment de chef au sein de la communauté. Chacun apportait sa contribution au groupe, et vivait sa vie de son côté. Deux des réfugiés, répondants au nom de Malcolm et Bob, exploraient régulièrement les environs, à la recherche de quelque chose digne d’intérêt. Lisa, la mère des deux aventuriers improvisés, attendait leur retour, inquiète. Elle se rassurait en se remémorant les centaines de fois ou les expéditions s'étaient très bien passées. Pourtant à chaque fois elle se rappelait aussi de celles qui avaient échoué.
Presque vingt ans auparavant, c'était le père de Bob et de Malcolm, Robert, qui n'était jamais revenu. Tout le monde avait supposé qu'il avait été dévoré par un des rares monstres qui hantaient encore la surface de la Terre. La réalité c'est que personne n'en savait rien.
À quelques centaines de mètres de l'entrée du bunker, Bob attendait son frère au point de rendez-vous qu'ils utilisaient habituellement. Au bout de deux longues heures d'attente, il décida de laisser un signe sur le sol, au cas où, indiquant qu'il partait à la recherche de Malcolm.
Il courut sur plusieurs kilomètres, avant de tomber sur la crevasse où A.P 1203481 avait chuté. Il vit très clairement deux grands indicateurs de ce qui était arrivé à son frère. Il y avait du sang bleu coagulé sur le sol et la paroi de la crevasse, ainsi que des traces de pas laissées par cet être au sang bleu et par Malcolm. Les traces qui s'éloignaient étaient plus profondes, l'être était plus lourd en partant qu'en arrivant, sans doute parce qu'il portait son frère.
Bob était extrêmement inquiet.
La connaissance des résidents du bunker au sujet des A.P était extrêmement limitée. Il s'agissait surtout d'histoires, transmises de génération en génération, au sujet d'humains modifiés, asexués, serviles et au sang bleu foncé. Jusqu'à présent, ils n'avaient jamais rencontré pareille créature. Rien d'étonnant, car personne ne s'était jamais vraiment éloigné du bunker.
La présence d'Androgynes était inquiétante en elle-même, mais savoir son frère prisonnier ou mort de la main de ces aberrations de la nature emplissait Bob autant de colère que de crainte.
Il hésitait entre revenir sur ses pas afin de prévenir tout le monde, et simplement suivre les traces de pas de l’androgyne. Il trancha rapidement et se lança à la recherche de son frère. Il traqua sa proie sur plusieurs kilomètres. Il n'était jamais allé aussi loin du bunker ni n'était parti aussi longtemps. Il était conscient qu'il allait bientôt devoir faire demi-tour.
Quelques instants avant qu'il ne renonce, il aperçut quelque chose d’intrigant au loin, quelque chose qu'il n’était pas habitué à voir en extérieur : de la lumière, vers laquelle il se dirigea.
Il n'en croyait pas ses yeux. Face à lui, à quelques centaines de mètres à peine, se tenait une ville colossale, entourée de hautes murailles et recouverte d'un dôme de verre.
Comment une cité aussi gigantesque pouvait exister au milieu du désert sombre qu'était devenu le monde ?
Si c'était bien là qu'était Malcolm, il ne pourrait sans doute jamais le récupérer. Il était hors de question de risquer d'être capturé à son tour sans avoir prévenu les autres de la menace. Il paraissait évident que si Malcolm avait été fait prisonnier, les Androgynes allaient chercher à savoir d’où il venait. Tôt ou tard, le bunker 101 allait être en danger. Il n'avait pas le choix, il devait rentrer et mettre les autres au fait de la situation.
Lisa, la mère des deux frères, attendait toujours, assise devant l'écran de contrôle de la caméra d'entrée. Elle avait déjà compris que quelque chose n'allait pas, en constatant que Malcolm et Bob tardaient à rentrer. Lorsque Bob se présenta seul devant la caméra du bunker, ses craintes se confirmèrent. Elle déverrouilla la trappe d'accès, et Bob descendit le long de l'échelle, rejoignant l'intérieur du bâtiment.
Quelques minutes plus tard, tout le monde s'était réuni dans une grande salle, aménagée dès le début de la guerre en salle de réunion. Bob expliqua aux autres ce qu'il avait vu : la Cité d'Argent, le sang bleuté, et la capture de Malcolm. Les habitants du bunker paraissaient à la fois étonnés, et effrayés.
Zack, l'un des plus anciens, prit la parole.
« Nous n'avons aucun endroit où aller. S'ils viennent pour nous, nous n'avons qu'à nous cacher derrière nos murs. Si cet endroit a su résister à l'holocauste nucléaire, ils ne pourront peut-être jamais entrer. »
La plupart des habitants acquiescèrent. Bob reprit la parole, et répondit :
« Ils entreront. Dans un jour, un an, un siècle ; Ils entreront. Ils ont une cité immense, et vraisemblablement une technologie avancée au moins autant que la nôtre, sinon plus. Nous avons besoin d'un plan de secours. »
« On ne pourrait pas se battre ? » demanda Fred, l'un des plus jeunes.
« Nous sommes peu nombreux, et peu armés. Les Androgynes sont des armes vivantes, sacrifiables et reproductibles à l'infini. Nous ne pouvons pas gagner », répondit Bob. « Nous ignorions qu'ils avaient survécus, et ils ignoraient que nous aussi. C'est pour cette raison que nous avons traversé les siècles alors que des milliards d'humains sont morts. S'ils nous trouvent, nous sommes finis. Il ne faut plus qu'on mette un pied dehors, laissons la poussière et la cendre recouvrir la trappe d'entrée de notre bunker. Pour le moment, je ne vois pas ce qu'on peut faire de plus. »
Le silence fut la seule réponse à l'affirmation de Bob. Tous étaient inquiets, mais ils n'avaient aucune suggestion à formuler. Ils ne pouvaient qu’espérer que jamais les Androgynes ne parviendraient à les trouver.
Lisa et Bob, de leur côté, étaient surtout inquiets du traitement que Malcolm allait peut-être subir aux mains de ces abominations. Difficile d'imaginer les Androgynes faire preuve du moindre état d'âme pour un être humain, après qu'ils en aient exterminé autant.
« Qu'est-ce que tu ne dis pas ? » demanda Lisa à son fils, à l’abri d'oreilles indiscrètes.
« Je pense que c'est la merde. On en parlera pas en ces termes avec les autres évidemment, on est bien d'accord ? Il ne faut pas qu'ils paniquent. »
« Oui évidemment... Qu'est-ce qu'on fait alors ? »
« Je vais y réfléchir. Si je trouve un moyen d'aller sortir Malcolm de là, je le ferais. Toi et les autres vous devriez vous concentrer sur la survie du groupe. »
« T'es marrant... Je m'inquiète moi aussi ! »
« Je sais, mais il va falloir que tu prennes sur toi. Le groupe passe en priorité, on doit se préparer à fuir si nécessaire. Débrouille-toi comme tu peux, il faut que l'idée vienne d'eux. La pilule sera plus facile à avaler comme ça. »
« Tu crois vraiment que nos murs ne nous protégeront pas ? » demanda Lisa.
« C'est une évidence. Ils peuvent nous protéger pendant des années, des siècles, mais tôt ou tard notre ennemi finira par entrer. Notre seule véritable protection c'est notre anonymat. S'ils nous croient morts, alors nous sommes en sécurité. Tu as vu comme moi la manière dont ils s'en sont pris au reste du monde. Rien ne les