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En se réveillant ce matin-là, Anna ne s'attend pas à subir un tel interrogatoire. Pourtant, l'homme installé dans son salon, est bien déterminé à lui faire parler d'elle. Mais qui est-il? Comment est-il entré chez elle? En dévoilant peu à peu son identité, il lui pose des questions parfois brutales, toutes plus intimes les unes que les autres. Anna, sous la contrainte, n'a pas d'autre choix que d'y répondre. Le dialogue qui s'ensuit n'est pas sans conséquences et lève le voile sur ses émotions profondément enfouies.
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Seitenzahl: 73
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Aux courageux qui tendent la main et aux vaillants qui la prennent.
Et à Alexandre
Chapitre I
Chapitre II
Chapitre III
Chapitre IV
Chapitre V
Chapitre VI
Chapitre VII
Chapitre VIII
Chapitre IX
Chapitre X
Epilogue
Il n'y a de réveils habituels que lorsque la vie vous fait prendre le chemin de la routine. Et s'il y a bien une chose qui effraie Anna, c'est de plonger à l'intérieur. Quand elle ouvre les yeux, tous les jours, c'est pour se rappeler que des surprises l'attendent quelque part. Bonnes ou mauvaises, elle s'en moque tant qu'elle a de l'appétit à les découvrir. Parfois ses matinées sont colorées, d'autres fois elles sont grises. Tout dépend du ciel. Quand il pleut dans son cœur, elle rencontre un homme et se laisse porter par un moment d'intimité. Un moyen facile de mettre de côté ses pensées négatives afin de retrouver le sourire.
Dans la routine qu'elle se refuse, Anna a cependant pris l'habitude de petits riens. Elle se réveille toujours très tôt afin de profiter de l'obscurité et depuis quelques années, trois choses sont devenues essentielles à ses yeux : s'observer dans le grand miroir de sa salle de bain, veiller sur l'unique fleur de l'appartement et dire bonjour à son chat. Elle sait que ses journées ne sont jamais rythmées de la même manière. Des fois elles accélèrent, d'autres fois elles traînent.
Elle se lève ce matin de bonne humeur. Elle ne le sait pas encore mais ce jour sera propice à diverses réflexions qui donneront à la nuit suivante un repos souriant. En entrant dans le salon, elle remarque que le même homme est assis sur le fauteuil anthracite. Comme d'habitude il ne parle pas et ne fait que la regarder. Il porte un costume deux pièces noir, légèrement poussiéreux, sous lequel se cache un tee-shirt orné d'un blason avec des fils de fer. Ses chaussures sont tout à fait démodées et ses cheveux sont blonds et ondulés. Elle est désormais habituée à le voir. Sa première apparition eut lieu il y a cinq jours. D'abord choquée d'une telle visite, elle avait hurlé, appelé au secours sans succès puis s'était enfermée dans sa chambre espérant qu'il s'en aille. Paralysée par la peur, elle avait ensuite entendu le bruit de ses chaussures dans le salon. Et d'un coup plus rien. Elle était sortie de la pièce, totalement effrayée, mais l'homme avait tout simplement disparu. Aussi étonnée et terrifiée la seconde fois, elle l'avait approché prête à en découdre en cas d'attaque. Face à aucune réaction supplémentaire de celui-ci, elle l'avait touché pour vérifier la texture de sa peau et son souffle. Il respirait calmement, les yeux fixés sur elle. Son regard, suivant Anna dès qu'elle bougeait, était l'unique expression de son visage. Manquant de tomber dans les pommes d'effroi, elle était sortie de chez elle rapidement, avait couru à l'étage supérieur et frappé à la porte de son voisin. Il n'était pas là ou ne pouvait pas répondre. En retournant chez elle, l'homme était déjà reparti, une fois de plus. Le troisième jour, elle ouvrit les yeux et sentit la colère monter en elle. Elle lui adressa, surprise de son aisance un « bonjour » affirmé qui se solda par un silence. Dix minutes plus tard, le fauteuil était vide. Hier, elle décida donc de l'ignorer considérant qu'il était l'intrus, visiblement peu menaçant et que ce jeu avait assez duré. De toute façon, tous les jours il disparaissait sans bruit, laissant juste de lui la marque de son corps chaud et lourd sur le canapé. Anna vivait seule et ne pouvait même pas vérifier si quelqu'un d'autre le voyait. Elle se disait que beaucoup auraient hurlé et fui de l'appartement, cette situation étant digne d'un film d'horreur. Elle s'est pensé folle. Cependant Anna sentait qu'il attendait quelque chose d'elle et que dans ce cas précis, c'était à lui de parler avant qu'elle ne le mette définitivement hors de son appartement. Elle en avait déjà connu des hommes qui disparaissaient vite. Mais toujours en connaissance de cause. Celui-ci était juste agaçant à ne rien dire et à persister, tous les jours, par sa présence et son regard sur son propre fauteuil.
C'est pour cette raison qu'aujourd'hui, en se levant, elle l'ignore totalement, passe devant lui naturellement en se dirigeant vers la salle de bain. Le reflet dans le miroir ne la contente pas vraiment mais comme elle ne peut pas lutter contre le temps, elle l'accepte. Elle a peur de perdre ses dents très vite, c'est une angoisse qui s'invite souvent puis qui repart. Elle se regarde, critique encore ses jambes difformes à ses yeux et sors en direction de la cuisine. En passant devant son orchidée, elle contemple les pétales bleu et les traits noirs à la base du pistil. Elle voit son chat endormi dans son panier, il va bien. Un soupir de soulagement, tout est normal, elle peut profiter de sa journée avec apaisement. Ce rituel est toujours une heure trente avant le début de la journée, une sorte d'avance sur le réveil officiel qui résonnera plus tard. Ainsi, Anna prend le temps de se rassurer avant de retourner au lit, calmement, pour déguster les derniers rayons de l'entre-deux jours.
Elle sort de la cuisine, repasse devant l'homme toujours présent et ressent une envie folle de lui adresser un doigt d'honneur. Il choisit ce moment pour enfin parler, d'une voix assurée :
— Voyons, ce serait un manque de respect.
— Pardon ?
— J'ai dis que ce serait un manque de respect, là votre doigt d'honneur.
— J'hallucine, vous lisez dans mes pensées ?
— Comme dans un livre ouvert.
C'est trop pour Anna qui, déjà habituée à des histoires complètement folles et résignée d'être elle-même, lui adresse son doigt d'honneur le plus magistral, le majeur bien tendu et une expression d'agacement sur le visage. Les lèvres pincées et les yeux ronds, elle attend une réponse de sa part. Cinq jours à le supporter, c'est déjà beaucoup mais cet affront sur son intimité dépasse ses limites.
— On s'est déjà vu à trois reprises, dit-il. Mais vous ne vous en souvenez pas. Asseyez-vous s'il vous plaît. Je vais vous expliquer.
— Pourquoi devrais-je m'asseoir auprès de vous ? Cela fait presque une semaine que je sens votre présence et vous décidez de parler aujourd'hui, un dimanche, mon unique jour de repos. Vous êtes gonflé !
— Notre discussion ne va pas durer longtemps et vous n'avez pas si peur de moi, n'est-ce pas ? Regardez-vous, faire un geste aussi vilain à un intrus, on peut dire que vous ne manquez pas d'air. Puis vous m'avez déjà approché, je ne vous ai pas violentée à ce que je sache. On doit parler Anna. Et si mes souvenirs sont bons, avec vous on y arrive toujours. Je suis présent en avance pour vous observer et prendre des notes. Mais toutes les bonnes choses ici ont une fin, il est temps d'entrer en scène. Allez, ne faites pas l'idiote, approchezvous.
Elle reste debout sans bouger ni parler, ne lâchant pas son geste grossier.
— Anna, c'est ainsi que démarre le processus, je n'y peux rien, ce sont les ordres. Quand vous êtes prête, je vous parle. Avec ou sans votre votre accord, j'en consens.
Anna replie lentement son doigt pour finalement baisser son bras entièrement. Elle pose son regard sur le canapé, près de l'homme, et estime que le meilleur moyen de le faire partir est sans doute de coopérer. S'il avait voulu l'agresser, il l'aurait fait quand elle s'était approché de lui. Mieux, il l'aurait fait dès le premier jour. Sur ce point il a raison : elle a moins peur. Elle accepte, en comptant sur la rapidité de la discussion pour rejoindre son lit au plus vite. Prudemment, elle s'approche du canapé pour s'asseoir. De son côté, l'homme sait qu'elle peut changer d'avis à tout moment et profite de l'instant pour dire :
— Bien mademoiselle Anna, avant de vous asseoir, veuillez vous présenter pour valider votre identité.
Elle le regarde, d'abord avec un air de défi pour indiquer une fois de plus qu'il la dérange. Mais il lui adresse un petit sourire en retour.
— S'il-vous-plaît, n'angoissez pas, détendez-vous, je ne suis pas méchant. Encore moins ici pour vous agresser, je suis là pour le travail. Ce sont seulement quelques questions auxquelles vous pouvez répondre succinctement. Enfin seulement si vous en êtes capable.