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Jeune homme d’une sensibilité à fleur de peau, Léo porte en lui les stigmates d’une enfance marquée par l’indifférence et le rejet. Délaissé par une mère absente, renié par un père implacable, il grandit dans le silence de ses émotions, incapable de mettre des mots sur ce vide qui l’habite. Pourtant, le destin place sur sa route Nadia, une rencontre aussi lumineuse qu’inattendue, qui ébranle ses certitudes et ravive en lui l’espoir d’un amour véritable. Mais peut-on aimer pleinement quand on ignore tout de l’affection ? Léo parviendra-t-il à se libérer du poids du passé pour embrasser l’avenir qu’il n’osait espérer ?
À PROPOS DE L'AUTRICE
Pour
Marie-Claude Bernard, l’arôme délicat du papier, le plaisir de s’immerger dans une histoire et de s’évader des tracas quotidiens sont une source de bonheur. Longtemps retenue par le doute et l’appréhension, elle a laissé son désir d’écriture sommeiller dans le secret de son cœur. Pourtant, en novembre 2021, elle ose enfin franchir le pas et publie son premier roman, "Crime à la croix d’or", aux éditions Maïa, donnant ainsi vie à un rêve trop longtemps muselé.
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Seitenzahl: 236
Veröffentlichungsjahr: 2025
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Marie-Claude Bernard
Une âme à la dérive
Roman
© Lys Bleu Éditions – Marie-Claude Bernard
ISBN : 979-10-422-6403-1
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
La porte de la cellule se referma et Léo assis sur son lit se tenait la tête entre ses mains. Trente ans de réclusion, dont vingt-deux ans de sûreté pour cet homme d’à peine trente-deux ans faisant beaucoup plus jeune que son âge. À peine 1 mètre soixante-dix, soixante-cinq kilos, cheveux roux bouclés, quelques taches de rousseur sur son visage pâle, timide, replié sur lui-même, qu’est ce qui avait pu conduire ce jeune homme à commettre l’irréparable, l’impensable. Léo Marriet né le 30 juillet 1989 à Lyon 7e, troisième garçon d’une famille de quatre enfants, quatre garçons apparemment élevés tous de la même manière, mais les apparences sont souvent trompeuses et les secrets de famille peuvent être à l’origine de bien des choses.
Léo enfant si doux et gentil était né du fruit d’un adultère et l’époux trompé à l’honneur bafoué qui avait pardonné à sa femme, rejetait cet enfant et le maltraitait sans ménagement, sans que sa mère ou que tout autre membre de la famille ne s’en émeut. Un enfant qui déjà tout petit allait vivre de cruelles heures, délaissement, manque d’amour, rejet de son père et indifférence de sa mère face aux maltraitances physiques et morales de son père, Léo grandissait en se construisant une personnalité renfermée, souriant, gentil à l’école ayant des difficultés à apprendre, il subissait en plus moqueries et quolibets de ses petits camarades qui le rabaissaient à plaisir. Ses frères aînés l’ignoraient, seul Aymeric, son petit frère avec qui il n’avait qu’à peine deux ans d’écart s’intéressait à lui et aimait passer son temps à jouer, parler, rire avec lui.
Une vie d’enfant chaotique où il fallait faire bonne figure devant les étrangers, donner le change, subir la violence de son père qui ne l’aimait pas et qui n’avait de cesse de lui dire. Mon nom, tu n’as que mon nom, lui criait-il ! Mais en quoi Léo était responsable, ce n’était pas lui qui avait fauté, ce n’était pas de sa faute si sa mère avait trompé son père, se disait-il souvent, son père avait pardonné à sa mère, gentil et prévenant, jamais un mot plus haut que l’autre, mais avec lui c’était tout autre chose et même si Léo était battu par son père, il l’aimait et aurait fait n’importe quoi pour lui plaire. Une enfance et une adolescence chahutée, un jeune homme taciturne, sans doute une bombe à retardement.
Léo n’avait pas d’amis, deux ou trois copains qui profitaient un peu de sa gentillesse, mais surtout était proche de son petit frère qui à l’âge de quatorze ans fut victime d’un accident, un chauffard en état d’ivresse le renversa quand il sortait de son collège. Aymeric resta un mois dans le coma puis malheureusement décéda, ce qui créa un choc énorme pour Léo et toute sa famille. Sa mère sombra dans une profonde dépression, son père de plus en plus absent finit par quitter le domicile conjugal, ce fut un chaos, un bouleversement. Léo fut placé chez une de ses tantes vivant dans le beaujolais et ses deux frères aînés qui étaient majeurs prirent la direction du sud dans l’espoir de trouver du travail. Une famille éclatée, une maman qui perdit la tête et un jeune homme de seize ans qui avait perdu le seul être qui l’aimait sincèrement et qui tenait à lui.
Sa tante le recueillit et s’il n’y avait plus de violence, cette dernière ne manifestait que peu d’intérêt pour son neveu. Pas de témoignage d’affection, elle parlait peu, lui demandant de bien s’appliquer afin qu’il obtienne son BEP de cuisine puis son BAC pro afin de trouver du travail et de trouver au plus vite un appartement. Léo avait encore une année à faire pour le BEP puis une année avec le BAC pro. Deux ans au minimum il resterait avec sa tante, on fera avec lui, avait-elle répondu d’un ton un peu sec, mais si tu fais des conneries, mineur ou majeur, je te vire ! Léo n’était pas du genre à faire des conneries, il était bien trop timide et renfermé pour se faire remarquer et savait éviter les jeunes à problèmes dans son établissement scolaire. Telle une anguille, il se faufilait pour passer inaperçu et éviter telle ou telle personne qui pourrait avoir l’idée de se servir de lui.
Léo obtint son BEP puis son BAC pro en travaillant dur, puis trouva sans problème un emploi et un petit appartement. Léo pensa que la roue avait tourné et que peut-être il allait enfin goûter un peu au bonheur, mais une rencontre allait bouleverser son fragile équilibre et le perturber plus que jamais. Léo quitta sa tante et emménagea dans son petit appart, son petit cocon comme il aimait à dire. Au travail, cela se passait bien du moins tout au début où il travaillait dur et où il ne comptait pas ses heures. Souvent, il pensait à sa mère qu’il voyait peu et qui se trouvait dans un hôpital psychiatrique vu sa profonde dépression et qui ne s’était jamais remise de la mort de son petit dernier. Pour son père et ses deux grands frères, il n’avait plus de nouvelles depuis des années.
Léo avait eu une seule et unique copine, Emma, aussi timide et réservée que lui, avec qui il était resté deux ans puis ils s’étaient séparés au grand soulagement de la maman d’Emma le trouvant trop mou, trop effacé pour un homme. Emma était fille unique, gâtée et surprotégée par ses parents. Les deux jeunes gens s’étaient rencontrés au lycée suivant le même cursus se destinant tous deux au métier de cuisinier. Petit à petit, leur histoire s’était terminée, sans disputes ni cris, une lassitude s’était installée, une routine comme un vieux couple qui ne pouvait tenir. Léo ne savait pas trop ce qu’il ressentait, certes il avait été amoureux d’Emma, mais ne se sentait ni triste ni amer de sa séparation. Léo était toujours un peu dans sa bulle, concentré dans son travail de cuisinier, mais souvent perdu dans ses pensées. Son patron l’aimait bien, Charles Colimbini, dit Charly, un bon vivant de deux mètres zéro trois, cent dix kilos, un homme énergique et très avenant, restaurateur depuis vingt-cinq ans adorait son métier. Son épouse le menait un peu à la baguette, distillant ici et là des ordres à son mari et aux employés quand elle venait au restaurant. Dans un autre style que son mari, elle n’avait pas le sourire facile et était plutôt du genre autoritaire. Léo travaillait avec un commis de cuisine d’un an son cadet sérieux et sympathique avec qui le courant passait très bien, Antoine qui vivait à deux pas du resto. Puis il y avait Julien à la plonge et là c’était tout autre chose, jeune homme toujours en train de se plaindre, de jurer et d’essayer de semer la zizanie dans l’équipe, Léo ne lui parlait que pour le boulot. Julien avait un problème avec l’alcool, quand il arrivait pour prendre son poste, il avait beau mâchouiller du chewing-gum et s’être mis une tonne de parfum, personne n’était dupe, on sentait bien qu’il avait bu.
De plus, Monsieur Colimbini se demandait si Julien ne fumait pas du cannabis, vu le regard hagard et vitreux qu’il pouvait avoir parfois. Julien venait d’avoir trente ans et s’était remis à vivre chez sa mère, car pourtant étant en ménage il y a peu et ayant un enfant de trois ans, sa copine l’avait viré du domicile, lassée de ses frasques et de son caractère quelque peu colérique. Un jeune homme tout au contraire de Léo. Enfin il y avait Caroline, vingt-cinq ans, serveuse, personnage ambigu, charmante, un brin aguicheuse avec les clients et lunatique avec ses collègues. Comme disait Antoine, un coup je t’aime, un coup je t’aime pas. Un tantinet provocante avec le patron, elle savait jouer de ses charmes et obtenir ce qu’elle voulait. Madame Colimbini la scrutait de son regard froid lorsqu’elle venait dans le restaurant de son mari et Caroline avait beau se la jouer mielleuse, la femme de Charly se méfiait de cette blonde qui jouait les ingénues.
La vie de Léo était rythmée par le travail, car il passait beaucoup de temps au restaurant et ne s’en plaignait pas. Il ne retournait que très rarement voir sa tante qui avait toujours une excuse pour ne pas le recevoir. Il était resté un peu plus de deux ans et demi chez cette dernière et ça s’était relativement bien passé même si souvent on aurait pu entendre une mouche voler. Sa tante, vieille fille sans enfants, ouvrière dans une usine s’intéressait peu à ce que pouvait ressentir Léo et leurs maigres discussions ne concernaient que la scolarité de ce dernier et qu’après il faudrait vite trouver un emploi et partir, ce qu’il avait fait. L’amour d’une tante pour son neveu, l’affection, elle ne connaissait pas, elle avait fait son devoir en le recueillant, mais il ne fallait pas lui en demander plus, éviter que le fils de sa sœur soit pris en charge par les services sociaux était déjà un sacrifice énorme pour elle. Elle avait l’habitude d’être seule et la venue de Léo chamboulait quelque peu son quotidien. Léo avait fait d’innombrables efforts pour plaire à sa tante, essayant de lui montrer son affection, ce qui avait fait l’effet inverse, l’irritant plus qu’autre chose. La seule fois où il vit sa tante réellement sourire c’est lorsqu’il déménagea de chez elle, elle lui dit qu’il ne se sente pas obligé de l’appeler ni encore moins de venir la voir, il devait faire sa vie et penser à lui. Léo aimait sa tante et aurait aimé une relation plus conviviale avec elle, mais il s’était fait une raison, comme elle lui avait dit, elle avait fait ce qu’elle avait à faire. La tante Chantal avait toujours été à part, refusant les contacts avec sa famille, Léo ne savait pas pourquoi, sans doute ne le saurait-il jamais.
Sa vie d’adulte n’était axée que sur le travail et la télé lorsqu’il était en repos, très peu d’interactions avec autrui en dehors de son travail, il pensait souvent à son petit frère décédé qu’il aimait tant. Léo composait avec sa solitude et se demandait si un jour sa mère sortirait de l’hôpital, s’il reverrait ses frères, son père avec qui la relation était si difficile. Beaucoup de questions taraudaient son esprit, beaucoup d’interrogations sur son avenir. Léo s’était demandé pendant longtemps aussi qui était réellement son père biologique, le fameux amant de sa mère. Était-il au courant qu’il était le fruit de cet amour interdit ? Si oui s’en foutait-il, une seule et unique fois à l’âge de treize ans, il avait posé la question à sa mère et cette dernière, le regard noir, s’était levé et avait quitté la pièce sans fournir la moindre réponse.
Chez Charly était le nom du restaurant où travaillait Léo, cuisine traditionnelle, entre quarante et cinquante couverts le midi, environ vingt-cinq le soir. Ce petit resto de cette petite ville du beaujolais donnait satisfaction à son propriétaire. Monsieur Colimbini faisait le service avec Caroline, mais pensait à embaucher une autre serveuse à mi-temps pour le service du midi. Natacha se présenta sur les recommandations d’un habitué du midi, tu verras, avait-il dit au patron, une fille sérieuse, gentille, travailleuse. Oui, elle était pleine de bonne volonté, mais pleine de maladresse, entre une assiette de pâtes à la carbonara renversée sur la robe d’une cliente, un verre de vin sur une autre et une tasse de café sur la femme de Charly, c’était un peu compliqué. De plus un peu lente, elle exaspérait Caroline avec qui elle se disputa devant les clients en plein service, à cause d’une erreur de commande. La semaine d’essai de la jeune femme avait été un fiasco et Natacha quitta l’établissement. Le client fut si gêné d’avoir recommandé Natacha qu’il se confondit en excuses devant Monsieur Colimbini. Ce n’est pas ta faute, lui répondit ce dernier, tu ne pouvais pas savoir que c’était miss maladroite.
C’est ainsi que Nadia se présenta quelques jours plus tard. Dès que Léo l’aperçut, ce dernier eut un véritable coup de foudre pour elle. Grande, cette beauté méditerranéenne aux longs cheveux bruns et aux yeux noisette dégageait une aura incroyable.
Léo était totalement sous le charme de cette jeune femme. Nadia s’entendit tout de suite avec Caroline et avec toute la petite équipe. Ayant de l’expérience, elle était tout à fait à l’aise pour le service, tout le contraire de Natacha gauche et peu à l’aise. Mais si Léo avait eu le coup de foudre pour Nadia, il n’était pas le seul. Julien aussi était sur les rangs la draguant à tout va. Léo observait, rageait de voir Julien faire le beau auprès de la jeune femme, sa timidité était un obstacle et il ne savait pas trop comment s’y prendre avec elle. Certes, il avait déjà eu une copine, une seule d’ailleurs, mais Emma était comme lui timide et réservée, Nadia elle était une personne solaire, un peu exubérante, elle plaisantait avec tout le monde, riait de bon cœur, tout le contraire de Léo qui fondait totalement lorsqu’il croisait son regard et qui perdait ses moyens devant le sourire de la belle. Léo était troublé et ça se voyait. Si Antoine lui faisait remarquer gentiment qu’il avait remarqué son émoi pour Nadia, ce n’était pas du tout pareil pour Julien qui le regardait d’un air narquois, n’hésitant pas à lui envoyer de petites piques bien choisies. Nadia n’en avait apparemment que faire de la drague outrancière de Julien, par contre elle avait l’air attendrie de l’attitude maladroite qu’avait Léo pour elle. Léo n’arrêtait pas de se dire qu’il fallait qu’il prenne son courage à deux mains et qu’il se décide à l’inviter. Nadia et ce dernier se rapprochaient petit à petit, discutant de plus en plus, devenant proches, ils ne sortirent pas ensemble, mais devinrent amis. Nadia devait certainement ressentir que Léo était amoureux d’elle, mais fit comme si de rien était.
— Mais qu’attends-tu ? lui demanda Antoine.
— Comment ça qu’est-ce que j’attends ?
— Tu m’as bien compris mon ami, ça crève les yeux que tu es fou d’elle, qu’attends-tu pour lui déclarer ta flamme ?
Léo resta silencieux quelques minutes puis regardant Antoine lui répondit :
— Tu as raison je vais lui parler, la vie est trop courte.
— Oui, vas-y lance-toi, ça se trouve, elle n’attend que ça !
— Nadia est tellement mon opposé, sûre d’elle, tellement avenante avec les autres, moi je doute tout le temps, me posant toujours des questions…
— Oui je sais Léo, avec le temps j’ai appris à te connaître, mais c’est bien ça le problème, tu te poses trop de questions et c’est ce qui t’empêche d’avancer, je vais te coacher, mon gars ! Cette fille imagine qu’un mec la drague et qu’elle tombe sous son charme ! Alors tu regretteras de ne pas lui avoir dévoilé tes sentiments et tu en souffriras, tu dois y aller et lui parler.
Léo savait très bien qu’Antoine avait raison, il devait prendre sur lui et aller voir la belle Nadia. Elle était peut-être l’amour de sa vie.
Julien arriva et prit place au fond de la pièce pour prendre son poste à la plonge. Léo et Antoine changèrent de sujet. Dehors il faisait beau, en ce début de printemps, le soleil pointait fièrement dans le ciel, les tables du restaurant commençaient à se remplir, l’équipe au complet était de bonne humeur. Léo et Nadia devaient se voir en fin de service durant sa pause. Une petite balade était prévue. Il lui parlerait et advienne que pourra, Léo se sentit pousser des ailes, les paroles d’Antoine étaient tellement justes. Pour le moment, je me concentre sur mon travail, nous verrons tout ça tout à l’heure. Les commandes se succédèrent les unes après les autres avec la voix retentissante de Monsieur Colimbini, heureux de voir que son établissement marchait du feu de Dieu. La femme du patron était là ce jour, surveillant au bon fonctionnement du restaurant, elle aussi avait l’air de bonne humeur, plus souriante qu’à l’accoutumée et plus sympathique que d’habitude avec les employés. Le service terminé, Léo attendait Nadia devant le restaurant, il n’avait qu’une trentaine de minutes à attendre et s’installa en face sur un banc près d’une petite fontaine. Julien passa devant lui et lui lança d’un ton moqueur :
— Alors, alors on attend qui comme ça ?
— Je crois pas que ça te regarde.
— Allons Léo, pourquoi fais-tu des mystères, je me doute bien que c’est Nadia que tu attends comme ça, crois-tu que vous serez un jour autre chose que des amis ? plaisanta-t-il.
Léo ne répondit pas.
— Alors, insista Julien, crois-tu qu’un jour ?
Léo le coupa, le fustigeant du regard :
— Mais t’as rien à faire ou personne à voir ? lui répondit-il d’un ton sec.
Julien ricana :
— Oui, j’ai à faire, puis partit en riant comme un nigaud.
Cinq minutes s’écoulèrent et Nadia sortit de l’établissement et se dirigea vers Léo impatient, mais fébrile à l’idée de déclarer sa flamme. Nadia était un véritable rayon de soleil, vive et énergique, toujours de bonne humeur, tout le monde l’aimait.
— On va se promener au parc ? lui demanda Léo.
— Oui si tu veux.
— Il faudrait que je te parle, Nadia.
— Ça tombe bien moi aussi, j’aimerais te demander ton avis sur quelque chose.
— OK.
Léo fut quelque peu intrigué, le parc n’était qu’à peine dix minutes de là et à peine arrivés, tous deux prirent place sur un banc au soleil.
— Qui commence ? demanda Nadia tout excitée, toi ou moi ?
— Honneur aux dames, répondit en souriant Léo qui ne devait certainement pas s’attendre à ce que Nadia allait lui annoncer.
— Léo, connais-tu Lilian, le jeune maçon qui vient déjeuner avec ses deux collègues et son patron ?
— Non.
— On est potes toi et moi.
— Oui, bien sûr.
— Écoute, j’ai craqué pour ce garçon, son sourire, ses compliments et il est tellement beau, j’espère qu’il est libre, ce mec il me fait trop craquer.
Léo se liquéfia sur le banc, qui était ce Lilian, lui en cuisine, il ne voyait pas les clients ! Sans voix, Léo fixait Nadia, choqué par ce qu’elle venait de lui dire, mais ne voyait-elle pas qu’il était amoureux d’elle ?
— À ton avis, dois-je lui faire comprendre qu’il me plaît ou est-ce que j’attends de voir ce qu’il fait ?
— Écoute Nadia, je ne vois pas qui c’est, je peux pas te dire, ça se trouve il plaisante avec toi comme il peut plaisanter avec Caroline.
Léo essayait de cacher le fait qu’il soit irrité en abordant une attitude détachée, mais Nadia sentit que le jeune était mal à l’aise.
— Qu’as-tu Léo, ça ne va pas ?
— Ce n’est rien, juste un peu de fatigue, écoute ne t’emballe pas et laisse faire le temps, il va falloir que j’aille me reposer un peu chez moi avant que je reprenne tout à l’heure, tu ne m’en veux pas si je te laisse ?
Nadia fut un peu décontenancée, le regarda :
— oui pas de soucis, lui répondit-elle, tu voulais me parler, Léo.
— oui, mais on verra ça plus tard, c’est pas important.
Nadia fit la moue.
— Tu sais ce Lilian, il est différent avec Caroline, c’est pour ça que je me dis que peut-être…
— Tu verras bien Nadia, je te laisse.
Léo partit, faisant un petit signe de main à la jeune femme, se forçant à sourire. Léo s’en voulait, il avait trop attendu, il aurait dû essayer de lui parler plus tôt, mais est-ce que ça aurait changé quelque chose, apparemment elle n’avait pas remarqué le trouble qu’il éprouvait pour elle, elle ne le voyait que comme un pote, Léo était triste, rentra chez lui et s’affala sur son canapé. Perdu dans ses pensées, il se dit qu’il fallait impérativement qu’il sache qui était ce Lilian. Antoine l’aiderait à en savoir plus, pourvu que ce mec ait une nana et qu’il plaisante juste avec Nadia. Après il faudra qu’il se réveille et qu’il parle à Nadia, qu’il la charme, qu’il la séduise, c’était l’amour de sa vie, il le sentait, il le savait, il ne supporterait pas de la voir dans les bras d’un autre homme.
Léo se dit en lui-même qu’il devait s’endurcir, se conduire en vrai homme, se battre contre sa timidité. Il devait changer, son bonheur en dépendait. Oh là ! il était l’heure de partir, il devait repartir pour le restaurant, pour la première fois il n’avait pas envie d’y aller, mais le devoir l’appelait et il devrait montrer bonne figure, heureusement Nadia était à mi-temps et hors extra ne travaillait pas le soir, il n’avait pas envie de faire semblant, de lui sourire, mais en tout cas c’est sûr qu’il y aurait Julien et il n’était pas d’humeur à entendre le moindre quolibet de sa part, la soirée allait être difficile. Léo se sentait comme une cocotte-minute. Pourquoi ai-je ce caractère de faible ? se demanda-t-il sur le chemin du travail, mon vrai père était-il un faible ? Tout à coup, il entendit qu’on l’appelait :
— Léo !
C’était Nadia.
— Ça va, tu t’es reposé un peu ?
— Mais que fais-tu là ?
— Caroline a eu un impératif familial et Monsieur Colimbini m’a appelée pour que je vienne.
Le jeune homme la regardait tristement.
— Qu’as-tu, mon pote ?
— Une migraine juste une migraine, j’y vais, tu commences un peu plus tard, je présume ?
— Oui.
— À toute, Léo pressa le pas et laissa Nadia qui faisait du lèche-vitrine, mais qui dans peu de temps rejoindrait à son tour le restaurant.
Léo raconta tout à Antoine et ce dernier hochant la tête lui assura qu’il essaierait de savoir par Caroline qui était ce fameux Lilian.
— Tout n’est pas perdu Léo, montre que tu es la, sors-lui le grand jeu, tu veux être avec cette fille, essaie de faire ce qui faut pour parvenir à être avec elle. Tu dois t’ouvrir à elle, il faut que tu gagnes en assurance si tu veux la séduire.
Lilian ne faisait pas que faire craquer Nadia, apparemment Caroline aussi était sous son charme, mais lui préférait Nadia à qui ses sourires et ses regards appuyés étaient plus destinés.
— Pourquoi me demandes-tu comment je trouve ce Lilian demanda Caroline à Antoine.
— Comme ça, il a l’air sympa, il doit avoir à peu près notre âge et vient pratiquement tous les jours déjeuner avec son patron et ses deux collègues.
— Oui il est cool, mais préfère avoir à faire avec Nadia, aurait-il le béguin que je ne serais pas étonnée.
Nadia avait remarqué un changement dans le comportement de Léo et interrogea Antoine à ce sujet. Ce dernier aurait voulu lui dire que Léo était fou d’elle et qu’il était triste de la voir s’intéresser à ce beau maçon de Lilian, mais il se contenta de lui répondre que Léo était fatigué et qu’il se souciait de ce que devenait sa mère. La jeune femme semblait un peu peinée de voir Léo triste et un peu froid vis-à-vis d’elle. Elle se décida à lui parler et attendit la fin du service pour aller le voir. Léo se retrouva en face d’elle lorsqu’il sortit du restaurant.
— On peut se parler tous les deux, lui demanda-t-elle timidement.
— Oui bien sûr, lui répondit-il quelque peu gêné, que se passe-t-il ?
— Tu m’évites, tu ne souris plus comme avant et tu parais tellement triste. Antoine m’a dit qu’en ce moment tu étais fatigué et que tu te souciais de ta maman, mais quand même, j’ai l’impression qu’il n’y a qu’avec moi que tu es comme ça. Y a-t-il quelque chose que j’ai dit ou fais qui t’a blessé ?
La jeune femme le regardait de son plus beau regard expressif, attendant une réponse que Léo eut bien du mal à donner.
— Je t’aime beaucoup Léo et tiens énormément à notre amitié, lui prenant la main il lui répondit que lui aussi l’aimait beaucoup, qu’il n’y avait aucun malaise et qu’elle ne s’inquiète pas, il l’aurait voulu la prendre dans ses bras, la serrer tout contre lui et lui déclarer son amour, mais une force invisible d’inertie l’en empêchait. Ils marchèrent tous deux pendant un petit moment en échangeant des banalités sur le temps, le restaurant, les actualités puis se séparèrent non loin du domicile de Nadia. Il était sûr de l’amitié que lui portait Nadia, mais ça ne lui suffisait pas. La côtoyer chaque jour, la voir et croiser son regard lui faisait autant de bien que de mal, ne se doutait-elle pas qu’il ressentait plus que de l’amitié pour elle ! Était-elle aveugle à ce point-là ou ne voulait-elle pas le voir ? Et comment réagirait-elle si réellement il avait le courage de lui déclarer sa flamme ? Léo perturbé espérait qu’il ne se passerait jamais rien entre Lilian et Nadia, comment réagirait-il ? Pourrait-il supporter de voir celle qu’il aime en secret roucouler avec cet homme ? Et si en lui dévoilant tout elle se jette dans ses bras et qu’ils vivent leur histoire, que Lilian soit un lointain souvenir. Léo avait deux options, soit se taire et accepter l’éventuelle liaison de Nadia avec son maçon soit se décider enfin et parler à cette dernière. Antoine avait raison, il se posait trop de questions et ça l’empêchait d’avancer, il devait se lancer, mais il avait tellement peur de la réaction de Nadia. Ses pensées se bousculaient dans sa tête puis se regardant dans une glace pensa : tu es un homme ou pas ! T’es pas trop mal, alors fonce ! Tant de fois, il s’était dit qu’il allait parler à l’élue de son cœur et ça avait failli bien arriver lorsque tous deux s’étaient retrouvés au parc, mais vu ce qu’elle lui avait annoncé, ça l’avait plus que refroidi.
Toutefois, savoir que Nadia pourrait se retrouver dans les bras de son Lilian lui fit dresser les cheveux sur la tête, courage mon gars, tu vas lui parler et tu verras bien, même si n’a pas l’effet escompté tu dois lui ouvrir ton cœur, au moins elle saura. Le lendemain, Léo parlerait à Nadia, plus d’échappatoire.