Une boule de tendresse - Gérard Cavanna - E-Book

Une boule de tendresse E-Book

Gérard Cavanna

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Beschreibung

Les émotions éprouvées entre un maître et son animal favori sont au cœur de ce Tour de France des régions. C’est l’amour inconditionnel d’un animal, d’un chien, cet être vivant qui vous jette un regard plein de tendresse malgré tous vos défauts, vos sautes d’humeur, qui fait qu’un jour vous le caressez et une autre fois vous l’envoyez bouler dans un coin. Néanmoins, votre boule de miel revient vers vous, remuant sa petite queue avec des larmes pleins les yeux se demandant ce qui pouvait engendrer cette fureur, et qu’elle pouvait être sa faute ! Mais n’ayez crainte, vous pouvez le martyriser, le cajoler, l’ignorer, c’est votre compagnon, votre ami, il vous pardonnera tout et reviendra vers vous, plein d’amour et de douceur, ne quémandant que des caresses et câlineries.

À PROPOS DE L'AUTEUR

L’auteur a travaillé en société aéronautique durant la première partie de sa vie. Dès ses trente ans, il a été son propre patron et a créé et géré plusieurs entreprises dont une boutique d’informatique et plusieurs restaurants. Actuellement consultant en informatique, il écrit son premier roman Maman s’en est allée en 2017. Son deuxième roman Le Prédateur paraît en 2018. Puis, son troisième opus en début 2019  L’ombre du copy-cat s’inscrit comme la suite du Prédateur. Le quatrième roman,  Insurrection sur le Ve république, voit le jour fin 2019. Une boule de tendresse est son cinquième roman.

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Gerard Cavanna

Une boule de tendresse

Roman

© Lys Bleu Éditions – Gerard Cavanna

ISBN :979-10-377-0572-2

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou des ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Du même auteur

Maman s’en est allée

Un fils face à la maladie Alzheimer

Saint Honoré Éditions – 2018

Le Prédateur

Le périple d’un prédateur, de la Syrie à la France

Saint Honoré Éditions – 2018

Le Prédateur II

L’ombre du copy-cat

Règlements de compte sous la marque du prédateur

Saint Honoré Éditions – 2019

Insurrection sur la Ve république

Révolte des Gilets Bonnets Jaunes

Pamphlet libertaire sur le pouvoir en place

Le Lys Bleu Éditions – 2019

Préface

L’affection, l’allégresse ressenties entre un maître et son animal favori sont au cœur de ce Tour de France des régions.

C’est l’amour inconditionnel d’un animal, cet être vivant qui vous jette un regard plein de tendresse malgré tous vos défauts, vos sautes d’humeur, qui fait qu’un jour vous le caressez et une autre fois vous l’envoyez bouler dans un coin.

Néanmoins, votre boule de miel revient vers vous, remuant sa petite queue avec des larmes plein les yeux se demandant ce qui pouvait engendrer cette fureur, et qu’elle pouvait être sa faute !

Mais n’ayez crainte, vous pouvez le martyriser, le cajoler, l’ignorer, c’est votre compagnon, votre ami, il vous pardonnera tout et reviendra vers vous, plein d’amour et de douceur, ne quémandant que des caresses et câlineries.

Chapitre I

Julius, le Jack Russel

Les studios d’Ushuaïa du Quai du point du Jour à Boulogne, commune des Hauts-de-Seine, bourdonnaient comme une ruche, en ce lundi de janvier 2015. Le journaliste Alex Callagan, spécialisé dans les reportages animaliers était convoqué par le grand chef Christophe.

— Voilà Alex, faites-moi une enquête sur les relations entre un animal domestique et son propriétaire, dans les diverses régions en France. La passion que les Français entretiennent avec leurs chiens et leurs chats mérite que nous nous intéressions à eux.

Donnez-moi du concret, de l’amour, de la fidélité, toutes les sensations que nous pouvons éprouver devant nos amis à quatre pattes.

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Alex râlait dans sa barbe, comme d’habitude il devait d’abord chercher un hôtel pas trop cher dans la région où il avait décidé de démarrer ses investigations. Le forfait journalier qui lui était imparti lui imposait certaines restrictions.

Les Hauts-de-France étaient parfaits pour sa première enquête, l’hospitalité des gens du nord était mondialement reconnue, et Alex, de passage dans les environs de Lille et Béthune, voyait souvent des animaux en liberté sans contrainte qui déambulaient dans les rues. Edmée de Xhavée écrivait « qui aime les bêtes, aime les gens » un vieil adage qui convient idéalement à cette population.

Il décida de poser ses pénates dans le Novotel Lens Noyelles situé à trois kilomètres d’Hénin-Beaumont.

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Une pluie fine de janvier trempait le pavé de cette commune du Pas de Calais dans les Haut-de-France. Hénin-Beaumont se réveillait doucement en cette matinée dominicale. Il fut un temps où les cloches de l’hôtel de ville sonnaient tous les quarts d’heure, rappelant une chanson locale écrite durant la Grande Guerre.

Maintenant les dômes de la mairie sont bien silencieux et surplombent la grande place Jean Jaurès, où quelques quidams déambulent le nez au ras du sol, en pressant le pas.

À quelques rues de là, les Héninois engoncés dans leurs manteaux se hâtent en passant devant l’église Sainte-Marie, ignorant le petit drame se déroulant sur le parvis du bâtiment catholique.

Jean, un SDF connu des habitués de la paroisse et couché sur des cartons à même le sol devant la grande porte en chêne et fer forgé, était en train de mettre bas sa petite chienne Jack Russell.

Luc, le prêtre des lieux s’inquiéta des coups répétés sur la grande porte de l’église. Il finissait d’étudier son prochain sermon dominical qu’il allait prêcher devant ses ouailles et, courroucé, il se demandait quel était l’olibrius qui se permettait de le déranger à cette heure matinale.

— Monseigneur, Monseigneur, vite Marie ma petite chienne vient d’avoir deux chiots adorables et il y a beaucoup de sang. Qu’est-ce que je dois faire ? Que va devenir ma petite Marie ?

— Jean, je vous ai déjà dit que nous ne sommes pas au dix-septième siècle, et que l’église ne recueille plus les indigents. Bon, vous allez rentrer prendre un bol de soupe et nous allons voir ce que nous pouvons faire.

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La Clinique Vétérinaire du boulevard Schweitzer venait d’ouvrir ses portes sur une permanence du week-end. Le docteur Maryse Sembor était plongée dans les factures de la semaine quand le téléphone sonna et lui perturba ses calculs :

— Oui, ici le docteur Sembor, puis-je vous aider ? Ah, c’est vous monsieur le curé. Un de vos paroissiens a des soucis avec son animal favori.

— Oui Maryse, vous êtes une belle personne et vous serez remercié de vos bontés envers mes nécessiteux, soyez-en sûr. Mais là, j’ai un miséreux qui s’appelle Jean et à qui je procure parfois une couche dans mon église. Celui-ci possède une chienne, Jack Russell, qui vient de mettre bas deux chiots, pourriez-vous le prendre lui et sa petite famille sous votre aile.

Maryse en bonne catholique convaincue, lui répondu affirmativement :

— Amenez-les-moi !

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Dans une des rues attenantes à la Clinique Vétérinaire s’élevait une petite bâtisse abritant une famille monoparentale, Sandra Nicoll, une mère courage, et son fils handicapé Enzo, bloqué dans son fauteuil roulant.

Les voisins de la rue Mélusine connaissaient bien le petit bonhomme coincé dans sa chaise et sa maman le poussant hardiment sur les trottoirs défoncés de la vieille ville.

Parce que le petit Enzo était dans sa période de révolte, envers sa maman et la société, parce qu’il n’arrivait pas à exprimer ce qu’il ne ressentait ni par la parole, ni par les gestes, parce que son univers était fragmenté de petits besoins insatisfaits, de crises de colère suivies d’apathie, parce que sa maman du plus lointain qu’elle se souvienne, son amour de gamin était différent des autres enfants. Les médecins après s’être penchés sur son cas, lui assénèrent cette terrible révélation : votre garçon est autiste !

Le mari de Sandra ne supporta pas le handicap de son bébé et s’enfuit à l’autre bout du monde, sans un regret, dans une pitoyable attitude.

Enzo savait marcher mais quelques fois, et surtout aujourd’hui, il avait décidé que ses jambes ne le porteraient pas, à charge pour sa maman de s’en préoccuper. La pluie avait cessé et un pâle soleil essayait de percer la couche de cumulo-nimbus se délitant sur la ville d’Hénin. Enzo fêtait ses dix ans en ce premier jour de janvier.

Dix années de privations et d’abnégations pour Sandra, mais aussi dix années de joies et de bonheur à chaque moment de progrès sur la marche, les gestes d’intelligence, les premiers mots non balbutiés, les premières lueurs sensées de compréhension.

Hier, Simone Delfond l’assistante sociale faisait sa visite hebdomadaire et s’interrogeait sur la régression d’Enzo, qui n’avait pas désiré la rencontrer depuis deux semaines. Ils avaient établi une certaine connivence qui s’était brutalement arrêtée, sans aucune raison.

À l’aube de son anniversaire, Enzo était entré dans une effroyable colère. Sandra en avait longuement conversé avec Simone, ils en étaient arrivés à la conclusion qu’il voulait peut-être partager sa fête avec des amis.

Chose plus facile à dire qu’à faire, Enzo piquait souvent des crises terribles qui intimidaient et avaient fait fuir bon nombre de gamins.

— Pourquoi ne lui trouvez-vous pas un compagnon à quatre pattes ? La thérapie assistée par l’animal ou la zoothérapie désigne l’ensemble des méthodes thérapeutiques non conventionnelles qui utilisent la proximité d’un animal domestique ou de compagnie, auprès d’une personne souffrant de troubles occasionnés par sa maladie et pour réduire son stress, préconise Simone.

— C’est une excellente idée, répondit Sandra, je vais m’enquérir d’un chiot ou d’un chaton dès demain.

Deux semaines étaient passées, Sandra et Enzo avaient écumé les chenils des environs sans trouver la perle qui conviendrait au fiston. Les chats étaient trop indépendants et apparaissaient méfiants devant l’autisme d’Enzo, quant aux chiens ils ne trouvaient pas grâce aux yeux du gamin.

Deux mois s’étaient écoulés, cependant aucun animal n’était entré dans leur vie, et celle-ci avait repris cahin-caha. En bonne catholique, Sandra interrogea Enzo :

— Depuis la messe de minuit le soir de Noël, nous n’avons plus assisté aux sermons du père Luc, nous irons à l’église ce dimanche, mon chéri, j’espère que ça te convient ?

En arrivant sur le parvis de l’église Sainte-Marie, l’éternel trio de bigotes devisait gaiement sur les derniers potins du quartier, Sandra poussant un Enzo bougonnant et de mauvaise humeur. Jean le SDF était assis sur ses cartons et faisait la manche, au bon vouloir des personnes entrantes. Marie, sa petite chienne Russell, jouait avec ses deux chiots, et sur un signe de Jean, elle revint se lover entre les jambes de son maître, suivi par un de ses chiots. Le deuxième fila comme une flèche en zigzaguant parmi les paroissiens et vint lécher la main d’Enzo qui pendait nonchalamment de son fauteuil.

Sandra, qui venait de bloquer les roues du fauteuil roulant dans la place dédiée aux handicapés, fut surprise dans un premier temps et ravie ensuite de voir son Enzo qui venait de trouver son compagnon.

La petite bouille pleine de malice du chiot et sa petite queue tremblant d’excitation, acheva d’émerveiller le gamin. Le chiot sauta sur ses genoux comme s’il avait compris la complicité naissante entre eux deux.

Jean qui venait d’entrer à la recherche du petit chien, eut les larmes aux yeux de voir la félicité qui émanait de ces deux êtres qui semblaient être nés pour se rencontrer.

— Je ne me souviens pas avoir vu ce genre de rencontre dans ma chienne de vie… Excusez-moi mon Dieu d’avoir blasphémé (et il se signe) mais je ne crois pas que mon Julius ; c’est le nom de mon petit chien, pourrait trouver de meilleur maître !

Chapitre II

Fripouille, le berger Australien

Alex venait de quitter le Novotel d’Hénin-Beaumont et se rappelait les différents personnages qui avaient démarré son enquête, le prêtre Luc l’avait bien aidé à dépoussiérer l’histoire du jeune autiste Enzo.

La Bretagne serait son deuxième point d’ancrage. Il posa ses valises dans un hôtel relais, Le Bigouden à Guilvinec.

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À l’autre bout de la France, dans le département des Pyrénées-Orientales un avis de tempête était diffusé sur les radios locales, France Bleu Roussillon sur le 101,6 MHz. « Vigilance rouge – Vent violent »

Avec ses cent trente-six jours de tramontane dans l’année et des pointes de vents à cent cinquante kilomètre-heure, Perpignan connaît les risques inhérents aux brusques déchaînements du dieu Éole, et sait se protéger, en invitant les Perpignanais à se mettre à l’abri.

Dans les locaux du refuge de la SPA, le personnel calmait les animaux les plus sensibles au changement climatique. C’était un jour de visite, aussi quelques familles découvraient les chats et les chiens dans leur univers carcéral. Les cages étaient très aérées et suffisamment spacieuses pour le bien-être des animaux attendant de trouver une place dans leur future famille.

Un couple de Bretons, Erwan et Gwenaëlle Briec, tentaient de faire plaisir à leur fillette Gaëlle, en l’emmenant voir des « peluches à quatre pattes » comme elle les définissait si bien. Originaire de Guilvinec, une petite ville côtière du Finistère, la famille Briec était des Guilvinistes connus et appréciés de tous. Gwenaëlle faisait fonction de professeure dans l’école maternelle de la rue du Château et Erwan vivait de sa musique, animait les soirées dansantes le week-end dans les bals de la région. Ils ne roulaient pas sur l’or, mais un bébé d’amour était entré dans leur foyer, il y avait un peu plus de onze ans, en cette merveilleuse petite fille, Gaëlle.

Erwan adorait sa fille et commençait toujours son répertoire de chansons par un hommage à Gaëlle :

« Quand tu es arrivée

Tous les anges chantaient

C’est moi qui t’ai donné

Ton tout premier baiser

Toi, tu me donneras

Sans doute le dernier »1*

Leur vie à tous les trois était réglée comme du papier à musique, jusqu’à cette période délicate où les nuages noirs ont semblé se concentrer sur leurs têtes.

Cela avait commencé par de la pâleur, de la fatigue, une perte de l’appétit, des douleurs abdominales et des vomissements répétés, jusqu’à ce diagnostic effroyable « votre fille a un cancer ».

*

Quand ils mirent un nom sur ce cancer « leucémie », les médecins expliquèrent que les cellules sanguines normales dans la moelle osseuse de leur fille étaient remplacées par des cellules cancéreuses. L’anémie, la baisse des leucocytes et des plaquettes font partie des symptômes de la maladie.

Les époux Briec écumèrent les hôpitaux de la Bretagne à la recherche des meilleurs praticiens pour juguler la leucémie de leur Gaëlle.

Ils s’arrêtèrent au CHU de Rennes spécialisé dans ce type de cancérologie.

Les premiers six mois de chimiothérapie furent infernaux pour leur fillette. Tel un bon soldat, elle se laissait conduire dans les salles de thérapie, où on l’abreuvait de sérums, de séances de chimio, de conseils inutiles ou utiles suivant ses dires.

Les premières pertes de cheveux furent terribles pour une préadolescente consciente de sa féminité naissante.

Encore une fois elle décida, elle-même de se mettre la boule à zéro « façon Kojak » et de porter un bandana.

Un soir où elle vomissait ses tripes et boyaux, Erwan trouva son journal intime, caché sous son oreiller :

« Je viens de voir mes parents pleurer les larmes de leur corps, et de les entendre hypothéquer leur petite maison pour payer mes soins médicaux, je voudrais mourir et ne plus supporter les souffrances que m’inflige cette maladie »

Erwan reposa doucement le précieux trésor de sa fille à sa place, plus convaincu que jamais à soigner son enfant.

Pendant une période de soins intensifs au CHU de Rennes, Erwan croisa dans les couloirs de l’étage des enfants cancéreux, un garçonnet d’une dizaine d’années la tête lisse sans cheveux, avec un chiot dans les bras. L’enfant ouvrit de grands yeux noisette et entama la conversation :

— Bonjour monsieur, je m’appelle Gaz, diminutif de Gaspard, je vois à votre bracelet de couleur que vous venez voir un enfant malade ?

— Oui, j’accompagne ma fille Gaëlle,

— Ah la petite leucémique, je l’adore, nous devisons souvent de notre avenir un peu sombre, j’ai moi-même ce genre de maladie, et nous nous sommes rapprochés pour comparer nos résultats. Apparemment, sa leucémie est moins agressive que la mienne, d’ailleurs elle ne devrait pas tarder à sortir en permission.

— « En permission » ?

— Oui, quand nous avons une période de rémission, les toubibs nous laissent prendre quelques jours de liberté avec notre famille, c’est un peu comme à l’armée ; si nous sommes gentils sans faire de vagues, nous avons droit à une permission.

— Et dis voir Gaz, quel est ce mignon petit chien ? interrogea Erwan.

— C’est un berger australien, ses yeux sont de couleurs différentes ce qui en fait sa rareté. Mais ne croyez pas que je l’ai choisi, c’est lui qui m’a adopté.

Je me promenais avec mes parents dans un chenil pour animaux abandonnés, quand je me suis arrêté devant une cage où il y avait plusieurs chiots de la même race.

Fripouille, c’est le nom qu’il a agréé, je lui en ai proposé plusieurs et il a sélectionné celui-ci. Donc il était dans son coin et n’en bougeait pas. Mes parents savaient que depuis un certain temps je voulais un chien de cette race, quand la porte de la cage a été ouverte, tous les autres petits bergers australiens ont reflué vers le fond comme s’ils écoutaient un ordre venu d’ailleurs et Fripouille s’est retourné m’a regardé droit dans les yeux et je vous assure, j’ai cru voir un sourire béat sur ses babines.

Il s’est levé maladroitement sur ses pattes, s’est dandiné jusqu’à moi et m’a sauté dans les bras. Enfouissant son mufle dans mon cou il m’a léché comme s’il éprouvait un nirvana suprême.

Depuis c’est mon petit compagnon et il ne me quitte pas d’une semelle.

Gaëlle est trop fragile actuellement, mais vous devriez lui trouver un petit animal pour lui tenir compagnie.

Erwan rejoignit la chambre attribuée à Gaëlle et retrouva sa femme Gwenaëlle qui avait pris une année sabbatique pour prendre soin de leur fillette.

Gaëlle était reliée par des tuyaux à un système de chimiothérapie, c’était sa dernière séance et elle devait sortir de l’hôpital pour une petite semaine de permission parentale.

Erwan prit sa femme à part et s’enquit de la conversation qu’il avait eue avec Gaz. Ils allaient passer cette semaine à rechercher un compagnon pour leur Gaëlle chérie.

Cela faisait une semaine que la famille Briec prospectait les refuges SPA de la côte Atlantique, sans que Gaëlle soit enthousiasmée par un petit animal.

— Maman, papa, quand je vois Gaz et Fripouille, leur complicité, leur amour, j’ai peur de ne jamais acquérir cette merveilleuse symbiose.

— Ne perds pas espoir ma chérie, dit Gwenaëlle, il y a tant d’animaux qui attendent un maître, nous finirons par trouver ton bonheur.

Dehors les éléments se déchaînaient, les vents tourbillonnants faisaient gonfler les manches à air de l’aéroport perpignanais tout proche. Les vitres du chenil vibraient, et les nuages filaient vers l’ouest, comme poussés par une indicible frayeur.

Debout dans une salle d’attente, Gaëlle ressassait des pensées ténébreuses. Elle avait fait deux fois le tour des cages sans déceler le coup de cœur que lui avait suggéré Gaz.

Ils s’étaient rencontrés par hasard et ne s’étaient plus quittés. Les médecins avaient fini par déménager Gaz et l’avaient placé dans la chambre à Gaëlle. Même les assistantes sociales, réticentes au départ, avaient fini par admettre que cette promiscuité pouvait être bénéfique pour les enfants.

Quand Gaëlle avait quitté Gaspard la semaine d’avant, il lui avait promis qu’elle trouverait son futur compagnon plus vite qu’elle ne l’espérait.

Elle était partie le baume au cœur, pleine d’optimisme, et maintenant Gaspard son ami lui manquait.

Elle était perdue dans ses pensées, quand la porte pivotante de la salle s’ouvrit sur ces deux parents en pleurs :

— Ton ami Gaspard vient de mourir, ma chérie, nous devons remonter à Rennes.

— NON, s’écria-t-elle, pas lui !

Le retour dans la voiture louée par ses parents fut très pénible et éprouvant. La joie qu’ils ressentaient au départ de leur quête venait d’être éradiquée par cette terrible nouvelle.

Erwan et Gwenaëlle étaient complètement abattus, et se posaient la question, comment Gaëlle allait réagir devant la dépouille de Gaspard. Les médecins les avaient prévenus, une régression pouvait se produire et anéantir tous les bienfaits de la chimio en cours.

Dans cet état d’esprit, ils entrèrent au CHU de Rennes complètement mortifiés. Les parents de Gaspard les attendaient et ils tombèrent dans leur bras complètement effondré :

— Ma chérie, dit le papa de Gaspard en s’adressant à Gaëlle, notre fils nous avait prévenus de l’imminence de son départ, comme s’il voulait notre acceptation qu’il parte. Notre petit bonhomme avait un courage et un cœur énorme. Il savait bien avant les médecins qu’il allait rejoindre ses grands-parents, et c’est encore lui qui nous a consolés.

Il y a aussi une chose que tu dois savoir Gaëlle, notre fils te lègue son petit ami Fripouille. Gaz m’a dit que c’était Fripouille qui lui avait quémandé cette faveur.

Je ne sais pas si ce chiot va t’accepter, car il était très attaché à Gaz.

Notre fils m’a aussi demandé, que tu pénètres seule dans sa chambre, crois-tu pouvoir le faire ? Elle opina de la tête après avoir regardé ses parents et entra rejoindre son ami.

Gaspard semblait dormir dans son petit lit blanc, de nombreuses fleurs parsemaient et entouraient son cercueil. Posée sur une chaise dans un panier, une petite boule de poil semblait dormir.

Animé par on ne sait quel instinct, Fripouille leva un œil et aperçu Gaëlle, il sauta de son panier sur le corps de Gaz, alla lécher ses lèvres, paraissant lui dire adieu et d’une pirouette se précipita dans les bras de Gaëlle.

Erwan et Gwenaëlle dans le couloir, réconfortaient du mieux qu’ils pouvaient les parents de Gaz.

Ils s’interrogeaient tous les quatre, ce que Gaëlle allait éprouver à la vue de son ami Gaz et sur la suite de sa maladie.

La porte de la chambre funéraire s’ouvrit et Gaëlle vint vers eux, Fripouille dans ses bras :

— C’est extraordinaire, la pièce est emplie de mon ami Gaspard. J’ai ressenti des vibrations qui m’ont fait frissonner, comme s’il me parlait. Il m’a suggéré de ne pas vous inquiéter pour lui, parce qu’il est passé dans un monde paradisiaque sans douleur, qu’il a rejoint son grand-père et bientôt sa grand-mère. Et surtout de projeter dans l’avenir, un petit frère ou une petite sœur que je pourrais contempler de mon nuage, afin de vous envoyer, à tous les trois, tout mon amour.

Chapitre III

Mélodie, la Chatte

Alex finissait d’écrire son voyage breton les larmes aux yeux, il espérait traduire au mieux tout le mélodrame qu’il venait de connaître auprès de Gaëlle.

Son prochain périple devrait le conduire dans l’Est de la France, au Campanile de Bressey-sur-Tille près de Dijon.

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Dans ce mois de janvier particulièrement pluvieux, la commune de Bressey-sur-Tille dans le département de la Côte-d’Or était sous les eaux.

— La ville a été victime du débordement du Gourmerault, un affluent de la Tille qui est surchargé, expliquait Patrick Moineau le maire.

Beaucoup de Bresseyliens se déplaçaient et se rendaient dans leur habitation en barque, escortés par des sapeurs-pompiers. La dernière crue datait de 2013 mais n’avait rien de comparable, les dégâts risquent de se chiffrer en milliers d’euros. Du jamais vu depuis trente ans !

La famille Râteau, le père Yvan, la mère Cyndie et leur fils Sam, avaient déjà regagné leur domicile dans le bas de Bressey emmitouflés dans des gilets de sauvetage et regroupés dans une barque de pêcheur prêtée par la mairie.

— Je me demande dans quel état nous allons aujourd’hui retrouver notre pavillon, s’interrogea Yvan

— C’était une nuit cauchemardesque, souviens-toi le garage était inondé jusqu’à une hauteur d’un mètre cinquante, la voiture était complètement immergée, continua Cyndie.

— Moi, je me souviens d’un ciel noir d’encre zébré d’éclairs, je n’ai jamais eu aussi peur de ma vie, dit Sam

Heureusement que la mairie nous a prêté un gymnase où nous étions au sec, nous avons pu dormir sur des lits de camp et nous avons retrouvé les voisins ainsi que mes copains. C’était chouette, cela m’a rappelé le camping à la Baule !

— Oui, marmonna Yvan, ne crois pas que tu vas être en vacances, si les écoles sont fermées, ta mère va te faire réviser tes devoirs.

— Pffff !

— Heureusement la rivière a commencé à refluer. On arrive, tenez-vous bien nous allons accoster et profiter des dernières heures de clarté pour jeter un coup d’œil sur les dégâts des eaux, s’inquiéta Cyndie. Nous avons emmené des lampes torches car, il n’y a pas d’électricité.

À la queue leu leu, ils ouvrirent la porte d’entrée de leur home qui, gonflée par l’humidité, grinça dans un bruit sinistre.

La surélévation de leur habitation avait évité l’inondation intérieure, et les lieux paraissaient secs. À part une odeur persistante de miasmes et de boue flottant dans l’air, on pouvait penser que leur maison avait échappé au pire.

Un silence de cathédrale régnait dans les lieux vite rompus par la petite voie de Sam :

— Maman, j’ai faim !

— Écoutez, vous deux l’interrompit Yvan, nous devons d’abord vérifier s’il n’y a pas eu de dégradations et de vols par des maraudeurs, comme nous l’a spécifié la mairie !

Toi Sam tu regardes si ta PlayStation est toujours dans ta chambre, ha ha, dit-il en rigolant, Cyndie et moi on va jeter un coup d’œil aux choses importantes.

Sam monta dans sa chambre, où rien n’avait bougé, soudain, il s’arrêta net. Un bruit bizarre lui parvenait du grenier. Il entendait les voix réconfortantes de ses parents qui lui parvenaient du rez-de-chaussée, et surtout au-dessus de sa tête dans les combles, des glissements et des objets paraissaient se déplacer sur le sol.

Il descendit quatre à quatre les marches de l’escalier menant au salon et héla son père :

— Papa, il y a quelqu’un qui fouille dans le grenier, j’ai entendu du bruit !

— Nom de nom, j’avais laissé le vasistas légèrement ouvert pour éliminer les odeurs, avoua Cyndie.

— Bon, je prends ma batte de base-ball et je vais m’occuper de leur sort, écuma Yvan !

Ils descendirent l’escalier escamotable menant sous les toits et Yvan grimpa avec précaution les dernières marches, avant de se rétablir sur les solives du grenier.