Anthropologie - Encyclopaedia Universalis - E-Book

Anthropologie E-Book

Encyclopaedia Universalis

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La relative jeunesse d'une discipline qui ne se comprend qu'au travers des conditions de son avènement, de ses hésitations, de ses multiples cheminements rend malaisé de définir en quelques lignes l'anthropologie, son objet, ses méthodes et son histoire...

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Seitenzahl: 70

Veröffentlichungsjahr: 2015

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ISBN : 9782341002592

© Encyclopædia Universalis France, 2019. Tous droits réservés.

Photo de couverture : © Karavai/Shutterstock

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Anthropologie

Introduction

La relative jeunesse d’une discipline qui ne se comprend qu’au travers des conditions de son avènement, de ses hésitations, de ses multiples cheminements rend malaisé de définir en quelques lignes l’anthropologie, son objet, ses méthodes et son histoire. Par ailleurs, le succès que connaît cette science – et que marque à l’évidence la dimension anthropologique dont sont affectées toute recherche actuelle dans les sciences humaines, toute réflexion sur les phénomènes sociaux, historiques, éducatifs, voire touristiques – entretient un rapport paradoxal avec le désarroi qu’elle éprouve devant la difficulté à définir son objet, à fixer ses limites. Il est d’usage d’opposer ses deux approches principales, l’anthropologie physique et l’ethnologie, l’une préoccupée de l’homme dans ses caractères physiques, l’autre de l’homme en société. Mais l’ambition de l’anthropologie, prise au sens le plus large, serait de rassembler dans une perspective globalisante toutes les disciplines étudiant l’homme. En attendant une telle réunification, on ne peut confondre, malgré leurs zones de recouvrement, cette anthropologie avec son actuel épicentre, l’anthropologie sociale.

L’objet de l’anthropologie sociale, née de l’étude des sociétés dites primitives, a grandi au point de s’étendre à l’ensemble des sociétés traditionnelles, y compris celles du monde industriel ; et l’étude de la vie contemporaine dans la ville ou dans l’entreprise constitue l’un de ses nouveaux axes de recherche. De ce point de vue, elle ne se distingue guère de sciences de la société telles que la sociologie ; certains veulent même la confondre avec elles en raison de l’identité de leur objet. Or ce qui fonde la spécificité de l’anthropologie, c’est une façon particulière d’appréhender une même réalité. Son approche « holiste », qui cherche à saisir la totalité d’une société, est donc par définition monographique ; elle contraint l’anthropologue à une analyse qualitative et exhaustive d’unités sociales nécessairement restreintes – village, tribu ou quartier –, accessibles au regard d’un seul et même observateur. Ce serait donc sa méthode qui la distinguerait de sa voisine, la sociologie. L’une procéderait plutôt par questionnaires et statistiques ; dans l’autre, l’observateur, « immergé » dans la société qu’il étudie, travaillerait sur son propre vécu. Toutefois, l’une et l’autre s’empruntent de plus en plus souvent leurs méthodes. Le paradoxe de la démarche anthropologique réside donc, comme le souligne Claude Lévi-Strauss, dans le fait que l’on y « cherche à faire de la subjectivité la plus intime un moyen de démonstration objective ».

L’expérience ethnologique est unique, en ce qu’elle oblige l’observateur à mettre en question ses propres catégories, à s’ouvrir au raisonnement des autres, à les analyser et à les restituer à la compréhension de sa propre société. Par son approche monographique et par cette remise en question, à quoi elle tend et à laquelle elle contraint le spécialiste, l’anthropologie a élaboré de nouveaux concepts, qui ont défini ses divers domaines : religieux, politique, juridique, économique, etc. Mais la critique de l’ethnocentrisme dont sont marquées ces catégories issues de la culture occidentale a conduit à les élargir, à les remodeler. Parfois, il a été nécessaire de fonder de nouveaux domaines tels que l’anthropologie de la parenté, qui a constitué longtemps l’un des champs privilégiés de la discipline.

Il est douteux, toutefois, que l’on puisse définir une science uniquement par sa méthode ; c’est le cas tout particulièrement de l’anthropologie, dans un moment où la sienne est exportée dans d’autres disciplines et où, donc, expulsée du lieu même où certains veulent fonder sa spécificité, elle risquerait d’être vouée à sa propre dissolution, ne pouvant prétendre par ailleurs à l’exclusivité de son objet empirique. Ce statut équivoque jette le trouble dans l’esprit de qui ne considère pas que, au-delà de l’objet empirique, se situe un objet intellectuel ; que, au-delà de la méthode, s’affirme une volonté de découvrir – par la comparaison et la synthèse des normes, des discours et des pratiques – d’autres niveaux de réalité, la logique de leurs interrelations et de leurs transformations, à partir desquels l’homme peut modifier son rapport à lui-même et – qui sait ? – élargir le champ de sa liberté. La méthode et l’histoire de l’anthropologie se confondent quant à leur rapport à l’objectivité. Ses objets, ses concepts et ses théories ne sont pas nés d’un seul mouvement. L’anthropologie a dû sans cesse les critiquer, les remanier face à sa propre histoire et à l’histoire, au sein d’une communauté scientifique internationale qui ne suivait pas nécessairement un chemin unilinéaire. Les débats qui se sont déroulés entre les chercheurs des deux côtés de l’Atlantique ou de la Manche furent nombreux, mais ils ont fait apparaître des idées nouvelles, qui, au fil du temps, ont conduit l’homme à se considérer lui-même, en tous lieux, en tous temps, comme l’objet de sa propre étude. La recherche de l’objectivité n’est pas une affaire de méthode, c’est aussi l’histoire même de l’anthropologie, de ce mouvement qui a fait passer l’ethnologue de la reconnaissance des autres au refus de soi, et qui lui permet maintenant d’étudier le monde le plus proche comme les mondes lointains. C’est une parabole précisément géométrique, définie comme « le lieu des points équidistants d’une droite et d’un point fixes » ; selon laquelle les enseignements du discours sur les autres conduisent au discours sur soi, dans une disposition où le discours qu’on tient sur soi se situe dans une différence et à une distance égales à celles où se déploie le discours qu’on tient sur les autres. Montrer comment un tel discours sur soi a progressivement abandonné droite et point fixes pour se placer sur la courbe avec les « autres », c’est expliquer toute la construction de l’anthropologie jusqu’à nos jours.

1. Nommer, classer

Que veut-on différencier lorsqu’on parle d’anthropologie sociale, d’anthropologie culturelle, d’anthropologie physique, d’ethnologie ? Ces divers vocables engendrent la confusion, car ils reflètent une discrimination entre les domaines géographique, historique, problématique. Dans le monde anglo-saxon, l’anthropologie rassemble sous son titre à la fois l’anthropologie physique – l’étude comparée des variations anatomiques et physiologiques de l’espèce humaine –, l’anthropologie sociale et culturelle – l’étude des institutions, des productions culturelles et des relations que celles-là entretiennent les unes avec les autres –, mais aussi l’archéologie, la préhistoire, la technologie et une partie de la linguistique. L’ethnologie y est réservée au seul classement des populations et tend à disparaître comme discipline propre.

En Europe, le terme « anthropologie » désigna longtemps l’anthropologie physique, ce qui explique l’usage général du mot « ethnologie » pour les études s’appliquant à l’aspect social et culturel des populations, tandis que la préhistoire, l’archéologie et la linguistique constituaient des domaines séparés. À l’ethnologie pratiquée en Europe, on pouvait faire correspondre l’anthropologie sociale et culturelle anglo-saxonne. En outre, les développements théoriques portant sur les notions de culture et de société ont conduit l’anthropologie américaine à privilégier la culture et l’anthropologie britannique, la société. L’usage tend à adopter un seul qualificatif : l’anthropologie est sociale ou bien culturelle.

Un tel clivage n’eut pas lieu en France, du moins sous cet aspect, mais les choses s’y compliquèrent avec l’apparition de nouvelles dénominations : il fut proposé de remplacer « ethnologie » par « anthropologie sociale », cette expression ne s’opposant plus alors à « anthropologie culturelle » (les deux étant supposées réunies) mais à « anthropologie physique ». Que devient, dans ces conditions, l’ethnologie ? Elle ne subit pas le même sort qu’outre-Manche et ne sera pas une sous-discipline : à l’instigation de Claude Lévi-Strauss, elle constituera un moment de la démarche anthropologique, laquelle comporterait trois étapes, sous le double rapport d’une méthodologie et d’une problématique, allant de l’étude de cas à la mise en évidence de lois générales. Le premier moment est celui de l’