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Le mot « contemporain » revêt deux sens. De manière courante, il signifie « ce qui est de notre temps », sans autre valeur que celle de la coexistence avec le présent : le monde contemporain est, par définition, celui où nous vivons. Avec une valeur polémique visant à marquer une différence non seulement chronologique mais aussi de forme et ...
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Seitenzahl: 54
Veröffentlichungsjahr: 2015
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ISBN : 9782341002653
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Le mot « contemporain » revêt deux sens. De manière courante, il signifie « ce qui est de notre temps », sans autre valeur que celle de la coexistence avec le présent : le monde contemporain est, par définition, celui où nous vivons. Avec une valeur polémique visant à marquer une différence non seulement chronologique mais aussi de forme et de nature, le « contemporain » véhicule par ailleurs l’idée d’une acuité et d’une pertinence particulières par opposition à ce qui est banal ou, pire, dépassé. En ce sens polémique, la notion d’art contemporain remonte aux années 1980. Elle s’applique plus particulièrement aux arts visuels, à la musique et aux domaines où certaines formes semblent avoir une actualité remarquable.
Il est difficile de dater précisément l’apparition de l’expression. Si elle se diffuse à partir des années 1980 aussi bien au niveau des publications que des institutions consacrées à l’art contemporain (l’ouverture à Los Angeles du L.A. Temporary Contemporary Museum date de 1983), les changements dans les arts visuels au cours des années 1960 amorcent une crise du « moderne » par rapport à laquelle va se définir le contemporain.
Durant ces années 1960 apparaissent le pop art et le nouveau réalisme qui font entrer dans l’art les objets et les images de la vie quotidienne. D’autres mouvements, comme l’art cinétique, cherchent à esthétiser la vie quotidienne en produisant des « multiples » ou de l’art urbain. Surtout, au tournant des années 1960-1970, apparaissent des productions artistiques, minimalistes, conceptuelles, corporelles qui, tout en se réclamant des pratiques d’avant-gardes, bousculent ou remettent en cause les catégories modernes, notamment la distinction encore solide entre peinture et sculpture, la notion d’œuvre elle-même et celle d’artiste. Quand l’Américain Robert Morris réalise en 1961 une boîte contenant un magnétophone faisant entendre le bruit de la construction de la boîte et qu’en 1963 il dénie par certificat notarié la qualité esthétique d’une autre boîte, sa démarche résume parfaitement tous ces défis.
Il s’opère ainsi un changement de représentation. En Europe et aux États-Unis, pourtant en pleine période d’essor des musées d’art moderne, l’art moderne en tant que tel apparaît en crise, voire promis à une mort prochaine. Ce tournant, cette crise ou cette phase de transition (selon l’interprétation qui sera finalement retenue) furent sur le moment définis comme « postmodernes » dans l’incertitude où l’on était de l’importance et du caractère durable du changement – le mot « postmoderne » apparaît, lui, dans les années 1974-1977.
C’est donc le couple moderne-contemporain qui doit structurer la réflexion : le contemporain se définit polémiquement contre le moderne. On peut en donner pour confirmation un épisode bref et isolé mais symptomatique des années d’après la Seconde Guerre mondiale, lorsque l’institut d’Art moderne de Boston, initialement lié au musée d’Art moderne de New York comme une sorte d’antenne ou de succursale de la modernité militante, tenta en 1948 de conquérir son autonomie en se rebaptisant institut d’Art contemporain au nom d’une rupture politique avec l’art moderne, récusé pour son excès d’avant-gardisme. Si dans ce premier épisode, l’art contemporain prenait une valeur polémique antimoderne de « retour à l’ordre », à partir des années 1980 il marque un renouvellement des formes et des pratiques allant au-delà du moderne.
Ce fonctionnement par couple des notions de contemporain et de moderne conduit à inscrire la réflexion dans la problématique plus large du moderne et de la modernité. On rencontre alors une constellation de concepts qui possède une histoire longue et compliquée mais qui permet de mieux comprendre comment on en est arrivé à l’idée de contemporain.
Il faut remonter aussi loin que l’Antiquité tardive (Ve siècle après J.-C.) pour voir apparaître le terme de moderne. Il sert d’abord à marquer la frontière de l’actualité par rapport à l’antiquitas des pères ou des Anciens. C’est à partir du moment où on conçoit la culture romano-hellénistique comme « du passé » que l’on s’en sépare en se considérant comme « moderne ». Le moderne, ce sera donc, pendant plusieurs siècles, le temps des auteurs chrétiens par opposition à celui des auteurs gréco-romains. L’Antiquité est admirée, mais elle est aussi vue comme « dépassée ». Il se met corrélativement en place une nouvelle conscience du temps, soucieuse de périodisation mais aussi de progrès et d’enrichissement : le moderne va plus loin que l’antique.
Le couple conceptuel que forment le moderne et l’antique n’est cependant pas stable puisque à partir du XIVe siècle le retour à l’héritage antique apparaît effectivement comme une « renaissance » après la « barbarie » du Moyen Âge (âge moyen entre le moderne et l’antique) et que le moderne va trouver sa valeur précisément dans la réactivation du passé. Un tel « retour » introduit une conception cyclique du temps au sein même de la périodisation : il peut y avoir des retours qui ne sont pas des régressions mais, précisément, des renaissances.
Les choses se renversent à nouveau à la fin du XVIIe siècle avec la querelle des Anciens et des Modernes. Ceux-ci se voient crédités d’une supériorité tenant au fait qu’ils ont pu connaître les Anciens, et donc progresser par rapport à eux. La notion de progrès s’installe. Elle va commander toute la conception du « moderne », et notamment une conception de l’histoire excluant la répétition : même si les accomplissements de l’art antique sont remarquables, il n’y aurait aucun sens à les reproduire dans la mesure où chaque œuvre comporte une partie intemporelle par quoi nous avons accès à elle, et une autre tenant aux circonstances du temps et des mœurs. Si l’histoire exclut la répétition, elle exclut aussi la comparaison. Du coup, le couple ancien-moderne n’a plus vraiment de pertinence, de même que n’ont plus de sens les « parallèles » tellement appréciés jusque-là.
Dès lors, le XIXe