Autour d'une bouteille avec Denis Dubourdieu - Gilles Berdin - E-Book

Autour d'une bouteille avec Denis Dubourdieu E-Book

Gilles Berdin

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Beschreibung

Passion du vin avec Denis Dubourdieu.

Œnologue, chercheur et professeur d’université, directeur de l’Institut des Sciences de la Vigne et du Vin, consultant, vigneron, Denis Dubourdieu a mis toute sa vie au service de la compréhension des phénomènes qui façonnent les grands vins. Cette quête d’excellence a fait de l’homme un visionnaire exigeant, expert talentueux de l’œnologie contemporaine dont les travaux sont mondialement reconnus. Des racines de la vigne aux lèvres des dégustateurs, il évoque ici, en compagnie de son ancien élève Gilles Berdin, les chemins et les mystères qui mènent aux crus mythiques.

« Cette série d’ouvrages, « autour d’une bouteille avec… » a pour ambition de cueillir les paroles des plus grands viticulteurs, œnologues, dégustateurs, en souhaitant que tous ces passionnés nous fassent partager leur flamme, leur expérience et qu’ils transmettent également aux générations futures un peu de leur mémoire, de leur connaissance, de leur savoir-faire. Comme le charme de la conversation réside aussi en ses imperfections, digressions, silences ou onomatopées… je vous débouche nos propos tels quels, sans décantation, aération ou habillage en carafe. Dégustez-les avant de vous rendre dans les vignes avec ce livre, comme sésame, vous y serez assurément bien reçus… (Gilles Berdin) »

Un livre incontournable pour découvrir les secrets des plus grands œnologues.

EXTRAIT

Pour notre première dégustation, en cette chaude fin d’après-midi d’août 2009, à Arcachon, je vous propose un Clos Floridène blanc 2007. Avant de le savourer, quelques mots de son histoire. Mon épouse Florence et moi-même avons commencé à constituer ce cru au début des années 80. Son nom lui-même est formé de l’association de nos deux prénoms. J’avais repéré ces sols très superficiels de Pujolssur-Ciron, faits de sables rougis d’argile, sur un rocher presque affleurant. Ce terroir est le prolongement du plateau calcaire de Barsac qui donne des vins liquoreux très racés.

CE QU’EN PENSE LA CRITIQUE

- « Voici pour 16 euros le meilleur stage d’œnologie et le livre indispensable sur le vin, pour ceux qui veulent savoir ou ceux qui pensent savoir. Même l’auteur de ces lignes, dont la mise en bouteille ne date pas d’hier, a savouré la magistrale leçon du professeur Denis Dubourdieu. Langage clair et direct, français élégant, culture raffinée. Cet ouvrage est un bonheur durable. » (Jacques Dupont, Le Point)

- « Un livre remarquable. Si vous n’avez pu le lire pendant vos vacances, il est incontournable. Excellent pédagogue, Denis Dubourdieu explique en toute simplicité son savoir-faire et en particulier comment il produit ses fameux vins blancs. » (Louis Havaux,Vino Magazine)

- « Les bons pédagogues vous apprennent toujours quelque chose. Le Bordelais Benis Dubourdieu est de cette veine. A la fois professeur d’œnologie réputé, propriétaires de châteaux reconnus et conseiller écouté d’autres vignerons français et étrangers, il fait l’objet d’un livre, véritables régal pour les neurones. Cette triple trajectoire, à notre connaissance unique, apporte un « assemblage » de pratiques de terrain, de confiance dans la matière grise et d’écoute des clients, digne des plus grands crus ! » (Le Mag Sud Ouest)

A PROPOS DE L’AUTEUR

Denis Dubourdieu est né en 1949 à Barsac. Issu d’une famille de viticulteurs, ingénieur agronome et titulaire d’une maitrise en sciences économiques, il est œnologue, chercheur et enseigne l’œnologie à l’université de Bordeaux. Considéré comme l'un des meilleurs spécialistes de la vinification et de l'élevage des vins blancs, il est également consultant pour de nombreux viticulteurs français et étrangers.

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PREFACE

Ces conversations, qui ne sont pas des biographies, résultent d’un constat : il y a, dans notre paysage viti-vinicole français, des personnalités extraordinaires, aux parcours des plus divers, des plus étonnants, des plus passionnants.

Il me semblait urgent de recueillir leur parole, surtout si, comme le redoutent certains, le vignoble devait de plus en plus passer aux mains de ce que nous appelons les “institutionnels” : banques, assurances, multinationales ou autres fonds de pension. Je souhaitais que tous ces passionnés nous fassent partager leur flamme, leur expérience et qu’ils transmettent également aux générations futures un peu de leur mémoire, de leur connaissance, de leur savoir-faire.

Cependant, comme tout ne peut jamais être dit ou évoqué, la véritable ambition de cette collection ne serait-elle pas, en définitive, de susciter une certaine frustration chez le lecteur ? Frustration qui conduirait à vouloir en savoir plus sur les acteurs de ces livres, en dégustant leurs vins, en se rendant dans leurs propriétés…

Comme le charme de la conversation réside aussi en ses imperfections, digressions, répétitions, silences, contradictions, onomatopées, paradoxes, rires… je vous débouche nos propos tels quels, sans décantation, aération ou habillage en carafe. Aux Châteaux Doisy-Daëne, Reynon ou Floridène, dégustez-les bien et rendez-vous dans les vignes avec ce livre comme sésame, vous y serez assurément bien reçus.

Denis Dubourdieu

Dégustation d’un vin blanc sec du Clos Floridène 2007.

Couleur jaune à reflets verts, nez complexe et puissant, fraîcheur en bouche avec une sucrosité gourmande mais sans sucre.

PREMIERE CONVERSATION

Denis Dubourdieu : pour notre première dégustation, en cette chaude fin d’après-midi d’août 2009, à Arcachon, je vous propose un Clos Floridène blanc 2007. Avant de le savourer, quelques mots de son histoire. Mon épouse Florence et moi-même avons commencé à constituer ce cru au début des années 80. Son nom lui-même est formé de l’association de nos deux prénoms.

J’avais repéré ces sols très superficiels de Pujols-sur-Ciron, faits de sables rougis d’argile, sur un rocher presque affleurant. Ce terroir est le prolongement du plateau calcaire de Barsac qui donne des vins liquoreux très racés. J’ai pensé qu’on pouvait aussi y produire des vins blancs secs remarquables en raison du microclimat étonnamment continental de ce lieu soumis à l’influence de l’air froid nocturne amené par la vallée du Ciron. Pujols-sur-Ciron est certainement l’endroit le plus “bourguignon” de Bordeaux, autant par ce climat aux nuits froides que par le sol calcaire dont la ressemblance avec celui de Chassagne ou Meursault m’a toujours frappé.

Gilles Berdin : les vignes sont-elles situées sur cette commune ?

D.D : oui, majoritairement pour le vignoble blanc de sémillon et de sauvignon.

G.B : il n’y avait donc aucune vigne blanche sur les parcelles que vous avez acquises.

D.D : aucune de sauvignon, en effet, je les ai toutes plantées. En revanche, au fil des années, j’ai acheté ou loué de très vieilles parcelles de sémillon, jadis dévolues à la production de vins liquoreux de pourriture noble d’appellation “Graves Supérieures”, inspirés par la proximité de Barsac. Au moment de la création des appellations d’origine, Pujols-sur-Ciron n’a pu, alors que c’eût été justifié, intégrer l’appellation Barsac ou Sauternes. De ce fait, les prix de la terre et des fermages, y était beaucoup plus bas que dans le Sauternais et j’ai pu constituer en vingt-cinq ans, une propriété de presque quarante hectares : vingt-trois en blanc, quinze en rouge. Mais ma plus grande satisfaction est d’avoir fait de Floridène une marque ; c’est certainement le seul vin blanc de Bordeaux qui ait pu, ex nihilo, en deux décennies, se tailler une réputation suscitant, sur un tel volume, environ 100 000 bouteilles, une vraie demande sur la place de Bordeaux. Ceci dit, nous avons été extrêmement raisonnables dans les prix puisque nous le vendons aujourd’hui 9 euros en primeur au négoce, soit entre 18 et 22 euros pour le consommateur. Mais dégustons-le, avant qu’il ne se réchauffe.

G.B : une dégustation en compagnie de Denis Dubourdieu commentant son propre vin, dans un jardin situé face à la mer… c’est un grand moment.

D.D : lorsque l’on décrit son vin, comme lorsqu’on parle de ses enfants ou des gens que l’on aime, on manque toujours d’objectivité… (silence).

G.B : je vais vous aider. Avons-nous, avec cette bouteille, l’exemple de ce que vous vouliez vraiment faire ?

D.D : oui, à peu près. La couleur, jaune pâle à reflets verts, est celle d’un vin jeune capable de bien vieillir. Au premier nez, sans agitation, l’arôme est à la fois puissant et complexe, minéral et fumé avec des notes citronnées. Cela rappelle la confiture de cédrat sur du pain grillé.

G.B : rien ne domine.

D.D : voilà, tout est fondu dans cet assemblage à parts égales de sauvignon et de sémillon. L’arôme de ce dernier s’exprime, à l’agitation, par ces notes de noisette fraîche, avec des nuances un peu viandées évoquant l’odeur du poulet ou du veau froid qu’on retrouve également dans quelques meursaults. D’ailleurs, l’expression du sémillon sur calcaire à Bordeaux ressemble un peu à celle des grands chardonnays de Bourgogne. Il y a aussi des touches épicées, briochées, un végétal “noble” évoquant la menthe et la fougère, des notes florales, un peu jasmin ; j’aime cette complexité qui dépasse le fruit. En bouche, on est frappé par la fraîcheur, la vivacité de ce vin conjuguées à une véritable “sucrosité”. Certains vins blancs secs ont cette propriété de susciter des sensations suaves, presque moelleuses alors qu’ils sont dépourvus de sucre résiduel.

J’ai une anecdote à ce sujet. Il y a de nombreuses années, Bernard Cordier, alors président de la tonnellerie Seguin Moreau, m’avait proposé, lors d’un déjeuner à Cognac, une dégustation de bourgognes blancs. Je me souviens encore de ses propos : “Savez-vous pourquoi j’adore les bourgognes blancs ? Parce que, quand ils sont réussis, c’est de la confiture sans sucre.” Nous avons exactement cette sensation paradoxale avec ce vin. Ce Floridène 2007 procure aussi une impression de légèreté, presque aérienne, typique des blancs de sols calcaires. “Du jus de caillou !”, dirait mon ami Michel Bettane.

Evidemment Floridène plaît quand il est jeune mais son caractère ne se révèle pleinement qu’après quelques années de bouteille, deux à trois minimum. Celui-ci est encore un peu jeune. Certains amateurs dégustent aujourd’hui avec plaisir des 96 ou 98… donc des vins de plus de dix ans. On peut trouver leurs commentaires sur Internet. D’ailleurs, si un Floridène de quelques années est encore demandé, voire s’il est plus cher qu’un jeune, c’est que le marché considère qu’il vieillit bien.

G.B : est-ce le cas ?

D.D : oui, et il est même dommage que la plupart des bouteilles de ce vin soient bues trop jeunes.

G.B : je trouve qu’à l’apéritif il est parfait, qu’il n’agresse pas par l’acidité.

D.D : en effet, mais il serait plus agréable au cours d’un repas, sur des crustacés, homard ou langoustines grillées, ou même sur certains fromages.

G.B : Floridène n’est donc pas une propriété familiale qui vous aurait été transmise.

D.D : non, nous l’avons créée de toutes pièces et agrandie petit à petit en achetant des parcelles, en prenant des fermages.

G.B : y avait-il du bâti ?

D.D : pas beaucoup ; j’ai “recousu” des petites propriétés aux bâtiments modestes : un petit chai et deux maisons de vigneron qui appartenaient à des familles différentes ; l’une d’elles est maintenant habitée par mon fils Jean-Jacques. C’est une bâtisse girondine à un étage, agréable avec ses grandes pièces en enfilade mais elle n’a rien d’un château viticole. Comme les vieux chais étaient trop petits pour notre usage, nous avons construit une cuverie et un chai à barriques ; c’est mon fils Fabrice, alors fraîchement émoulu de la faculté d’œnologie et de l’ENITA qui supervisa les travaux. Depuis 2005, nous y élaborons le Floridène rouge ; pour pouvoir y vinifier le blanc, encore fait au Château Reynon, nous devons réaliser la dernière tranche de travaux. Bordeaux est plein de projets inachevés et il y a des maisons, dans le Médoc par exemple, qui sont des moitiés de demeure jamais terminées. J’espère que pour Floridène, il n’en sera pas ainsi.

G.B : où habitez-vous ?

D.D : à Reynon, sur les coteaux de Béguey, dominant la Garonne, près de Cadillac. C’est la propriété de mon épouse Florence. Je suis moi-même né à Barsac. Mon grand-père paternel, Georges, y avait acheté un cru classé en 1924, Doisy-Daëne. Mon père, Pierre, lui a succédé en 1947 ; il a considérablement agrandi cette propriété par l’acquisition de parcelles du Château Doisy-Dubroca, réunifiant ainsi en partie le Doisy de 1855. Je lui ai succédé en 2000. Ainsi mon père a eu une très longue carrière professionnelle, plus de 50 ans. Evidemment, j’ai continué comme lui à défendre et illustrer ce cru que j’ai moi-même également un peu agrandi. Mais revenons à mes jeunes années et à mon arrivée à Reynon. En 1976, j’ai épousé Florence David, également issue d’une famille de vignerons de Cadillac, “du mauvais côté de la Garonne !” d’après mon père, tant il lui semblait improbable de réussir dans cette région des Côtes de Bordeaux. Mon beau-père, Jacques David, est décédé très jeune, à 54 ans, quelques mois après notre mariage. Florence voulut poursuivre l’œuvre de son père à Reynon et, en dépit des difficultés, j’ai accepté de l’aider alors que j’étais moi-même déjà fort occupé par la préparation d’une thèse en œnologie. Je reparlerai plus tard de l’aventure que Reynon fut pour nous. Mais cela ne nous suffisait pas, nous voulions faire quelque chose qui soit entièrement notre œuvre, dans une appellation différente. Nous avons donc jeté notre dévolu sur ces terres de Pujols-sur-Ciron, dont j’étais convaincu, comme je vous le disais, qu’elles étaient potentiellement un grand terroir de blanc.

G.B : convoitiez-vous réellement cet endroit ou est-ce que ce fut une simple opportunité ?

D.D : j’avais envie de ce terroir et quand il y eut des parcelles à vendre, j’ai saisi l’occasion.

G.B : donc, si vous aviez un conseil à donner à quelqu’un qui veut s’établir, ce serait d’élire d’abord un terroir et de savoir attendre.

D.D : oui, et… avoir de la chance tant il devient difficile en France, et à Bordeaux en particulier, de créer une nouvelle marque. Si vous ne faites pas partie des “crus classés”, si vous n’êtes pas dans une appellation réputée, c’est très compliqué de se faire une place. Les vins de garage furent à peu près tous créés dans des “communales”.

G.B : ils restent extrêmement confidentiels.

D.D : en effet et leur mode fut éphémère, peu ont perduré. Il faut choisir le sol en sachant qu’il n’a de valeur que par le cépage qui sera cultivé dessus. C’est la bonne combinaison des deux qui compte. Un terroir, ce n’est pas seulement le sol, le climat et les cépages d’un lieu, c’est la capacité de tout cela à donner un vin qui a un goût délectable et particulier, reconnu par le marché qui ne lui trouve pas d’équivalent, de substitut. Sans goût distinct, il n’y a pas de terroir spécifique. Si Floridène était établi sur les communes des alentours, Illats, Landiras, ou Podensac par exemple, dépourvues de ce sous-sol calcaire et de ses nuits froides, il n’aurait pas le goût qui le caractérise. Les générations de mes parents ou grands-parents n’utilisaient pas le mot terroir dans ce sens-là. Bien au contraire, d’un vin commun, rustique, on disait alors qu’il avait “goût de terroir”, c’est-à-dire la saveur grossière d’un lieu inopportun pour faire des vins fins.

G.B : c’était péjoratif.

D.D : complètement ; ce qui était laudatif en revanche c’était la notion de “cru” et surtout de grand cru. Le cru désignait un endroit où le vin possède une finesse particulière qui ne se manifeste que discrètement dans sa jeunesse mais de manière irrépressible au cours de son vieillissement. Emile Peynaud disait : “Un cru, c’est un goût que l’on reconnaît.” Aujourd’hui, nous appelons ça le “terroir”, intraduisible dans les autres langues… autrement que par “terroir” !

Certains considèrent le grand terroir comme un privilège, une sorte de cadeau des dieux. Cette opinion est souvent exprimée par des propriétaires qui n’ont pas connu les difficultés liées à la création et à l’émergence de leur cru. Où que ce soit, les pionniers qui ont révélé un terroir, ne l’ont guère fait facilement mais plutôt en surmontant un ensemble de difficultés. A Pujols, la roche affleure et les vignerons qui ont planté la vigne à une époque où il n’y avait ni pelle mécanique ni brise-roche, ont dû casser le rocher à la masse, le faire exploser à la dynamite ; ils se sont servis des pierres extraites pour bâtir les murs autour des propriétés et empierrer les chemins. Je ne connais pas un seul exemple de grand vin qui ne soit pas né d’un handicap que l’homme s’est acharné à surmonter tant sa conviction était forte qu’en outrepassant les difficultés, il ferait, là, quelque chose d’admirable et d’inimitable. Même chose pour les civilisations ou la destinée de chacun d’entre nous ; pour réussir, il faut avoir des problèmes. La viticulture offre de très nombreux exemples de défis relevés. Le champagne est inimitable parce que sa terre crayeuse est très pauvre et son climat peu propice à la maturité du raisin pour faire des vins blancs tranquilles. Il a fallu inventer la prise de mousse pour pouvoir exprimer ce qui ne l’était pas auparavant et y produire les meilleurs effervescents du monde. Le Médoc était une terre désolée, pauvre, humide et venteuse ; il a fallu des drainages, des marnages et beaucoup de passion, de temps et d’argent pour y obtenir les grands vins que l’on sait. Tout ceci s’est fait, assez récemment, au dix-huitième siècle.

G.B : et la Bourgogne ?

D.D : la Bourgogne a été créée par la passion des moines. Ils n’ont pas cherché les terroirs avec un pendule ou en faisant des prières ; ils ont défriché la Côte, en gagnant sur le rocher. Un peu partout vous avez des carrières de pierre et la vigne pousse ici sur la roche mère ; il a fallu que des hommes se battent pour créer un sol propice à la viticulture. A l’Hermitage, il y a 60 % de pente dans les parcelles du Méal ou de la Chapelle. Il a fallu construire des terrasses et surtout travailler sur ces pentes à la main ou au treuil. Les gravir sans rien faire est déjà exténuant. La révélation des grands terroirs a souvent duré plusieurs siècles et rencontré d’immenses problèmes. “Il n’existe pas de vignobles prédestinés, il n’y a que des entêtements de civilisations”, écrivait, en 1992, le journaliste bordelais Pierre Veilletet, dans un article de L’amateur de Bordeaux, intitulé “Le voyage en Bourgogne”. Voulez-vous un autre exemple ? Parlons du sauternes. Ce vin naît de la pourriture noble qui est la concentration d’un fruit sous l’action d’une moisissure. Dans l’Antiquité, pour faire un vin très riche en sucre, on faisait sécher le raisin au soleil sur pied ou, après sa cueillette, dans la cour de la ferme. C’est le passerillage. On fait, encore aujourd’hui, des vins ainsi en de nombreux lieux autour de la Méditerranée. Le résultat est bon mais pas inimitable car tous les vins élaborés ainsi ont un goût plus ou moins similaire. Une autre technique consiste à concentrer le sucre du raisin, non pas par la chaleur, mais par le froid. Ainsi sont élaborés les grands vins de glace, et les vendanges tardives des régions continentales du nord de l’Europe. Comme il est plus compliqué de sur-mûrir ainsi le raisin, on obtient des vins singuliers bien plus distincts l’un de l’autre que les vins de passerillage et évidemment, beaucoup plus chers. Mais le procédé le plus étonnant, c’est d’utiliser la pluie et le concours d’un champignon pour concentrer les baies. Contrairement à de nombreux autres vins doux produits ailleurs dans le monde, les sauternes ne sont pas obtenus avec des raisins surmûris sous l’action de la chaleur ou du froid. Paradoxalement, c’est l’humidité du climat girondin, a priori peu propice à la concentration des baies par déshydratation, qui, grâce à l’alternance de matinées brumeuses et d’après-midi ensoleillées, permet l’implantation de la pourriture noble et la transformation du raisin qui en résulte. D’ailleurs, les sauternes ne sont que rarement des vins de vendanges tardives ; dans la plupart des grands millésimes, les meilleurs lots sont cueillis précocement grâce à l’intervention rapide de la pourriture noble sur un raisin dans l’éclat de sa maturité aromatique. Pour cette raison, les grands sauternes développent d’inimitables arômes de fruits frais et non pas les arômes oxydatifs, de fruits secs, de noix et de rancio, caractéristiques des vins de raisins passerillés. Leur fruit devient bouquet avec les années et leur aptitude au vieillissement est exceptionnelle. Les recherches récentes de mes élèves, à la faculté d’œnologie de Bordeaux, ont mis en évidence un autre phénomène que je trouve fascinant. Réagissant à Botrytis cinerea – cette moisissure de la pourriture noble – le raisin mûr se met à produire surabondamment des précurseurs d’arôme, ce qui explique la puissance odorante des grands vins de sauternes et barsac.

Voilà quelques exemples parmi des dizaines d’autres. Je reste toujours fasciné de voir combien il a fallu d’efforts et de temps pour créer ces bijoux que sont les très grands vins européens. La viticulture du Nouveau Monde s’est développée au XXe siècle, sur des principes totalement différents. Elle s’est majoritairement basée sur la facilité à cultiver la vigne et non sur la difficulté. Là où il y avait du soleil, de l’eau, la possibilité d’irriguer, des sols fertiles et profonds, on a établi en climat méditerranéen, une viticulture de cépages précoces, bordelais ou bourguignons, qui mûrissent facilement tous les ans. Peu à peu, le Nouveau Monde s’intéresse à la viticulture des climats frais. Fatalement, ses conceptions rejoindront les nôtres.

G.B : pour résumer, c’est du paradoxe, de la frustration, de la difficulté que naissent les grands vins.

D.D : oui, absolument. Je suis convaincu que le grand vin naît de l’implantation de la vigne dans un endroit difficile. Le vin de la liberté, de David Haziot, décrit, sous forme de roman historique, la naissance de Cos d’Estournel. On y voit comment les propriétaires, la noblesse de robe bordelaise essentiellement, ont planté ces terres du Médoc. Auparavant, elles étaient confiées à un fermier qui y pratiquait la polyculture vivrière. Quand ces propriétaires ont voulu reprendre leurs terres pour planter de la vigne destinée à produire des vins de qualité, ce ne fut pas facile. Les paysans avaient des droits très anciens ; il fallut les désintéresser en leur baillant des surfaces plus grandes, d’autres terres moins propices à la viticulture de qualité. Il fallait deviner que ces terrasses caillouteuses hostiles, aménagées, drainées, complantées de cépages fins pourraient produire de grands vins.

G.B : c’est ce qui s’est passé pour vous.

D.D : oui, dans un certain sens, mais plus modestement, car je n’ai tout de même pas créé un premier cru ! Il n’empêche que les vins de Floridène m’ont récompensé de mes efforts. Ainsi, au cours d’une dégustation à l’aveugle de grands bourgognes chez un caviste new yorkais fameux, une bouteille de Floridène avait été malicieusement glissée ; les grands amateurs américains l’ont trouvée excellente sans se douter qu’il ne s’agissait pas d’un grand cru de bourgogne et qu’ils goûtaient un “petit graves” même pas classé.

G.B : vous parlez beaucoup des bourgognes comme s’ils constituaient une référence.

D.D : bien sûr, ce sont les plus grands vins blancs secs du monde. Je les ai rencontrés fortuitement à peu près au moment de la création de Floridène, grâce à des cours d’œnologie que j’ai eus à dispenser à cette époque à la faculté de Dijon, alors dirigée par le Pr. Michel Feuillat, pour qui j’avais beaucoup de sympathie. Florence m’accompagnait et le week-end nous descendions en voiture jusqu’à Beaune en nous arrêtant dans les bons endroits. Je me souviens parfaitement d’une de mes premières visites dans une cave de Bourgogne. C’était au Domaine Prieur à Meursault, un vendredi soir d’hiver, à l’entrée de la nuit ; la dégustation que j’y ai faite m’a profondément marqué. La façon d’élaborer les bourgognes blancs m’avait paru très singulière avec le bâtonnage, l’élevage sur lies, l’absence de débourbage… Toutes ces pratiques étaient empiriques, leur bien-fondé n’avait jamais été expliqué par l’œnologie. Je me suis alors fixé, comme un des objectifs de ma vie de chercheur, de comprendre tous les phénomènes biochimiques associés à l’élevage sur lies des vins blancs. J’ai dirigé plusieurs thèses de doctorat sur ce thème. Plus tard, je voulus aussi savoir les raisons de l’exceptionnelle aptitude au vieillissement des grands bourgognes, mais aussi pourquoi, paradoxalement, certains d’entre eux évoluent au contraire si mal lorsqu’ils sont victimes d’une oxydation prématurée capable de gâcher les meilleurs crus. Le succès des recherches effectuées dans mon laboratoire, sur ce thème, par Valérie Lavigne, nous a valu d’être maintenant consultants pour plusieurs maisons bourguignonnes. A cette occasion, j’ai découvert d’autres aspects très attachants de la Bourgogne. D’abord la multiplicité des goûts que l’on peut trouver dans un domaine. A Bordeaux, le responsable d’un cru défend un seul goût, sur cent mille ou cinq cent mille bouteilles. Il finit par s’identifier à ce goût, de façon sinon obsessionnelle, du moins un peu bornée. Le vigneron bourguignon est relativement plus détaché. Chez lui, vous pouvez déguster du chassagne, du meursault, du puligny… issus de nombreux terroirs ou “climats” aux goûts très différents ; il ne va pas vous imposer de préférer l’un ou l’autre mais au contraire s’enquérir, avec une certaine malice, du vin que vous aimez et c’est au milieu de toutes ces bouteilles que vous allez piocher ce qui convient le mieux à votre palais et à votre bourse. De plus, en Bourgogne, il y a encore des propriétaires vignerons qui cultivent eux-mêmes leur vigne et font leurs vins. J’ai été élevé dans une famille où l’on travaillait ainsi ; j’ai vu mon père tailler, labourer et vinifier lui-même. J’aime aussi beaucoup moi-même faire les gestes de la vigne et de la cave même si je manque de temps pour cela. A Bordeaux, aujourd’hui, les crus classés ont des directeurs, des chefs de cultures, des commerciaux… et celui qui parle du vin n’est plus celui qui le fait avec ses mains. C’est le côté artisan du vigneron de la Côte-d’Or que j’apprécie.

G.B : est-ce à dire que vous cherchez à imiter le style des vins bourguignons quand vous vinifiez à Bordeaux ?

D.D : non, évidemment, mais je voudrais que mes vins blancs aient la profondeur, la vivacité, la délicatesse et la complexité que j’aime dans les bourgognes. Une comparaison musicale pour illustrer mon propos. Certaines musiques sont ainsi à la fois légères et profondes. Celle de Mozart en offre le meilleur exemple… celle de Brahms ou de Rachmaninov aussi, parfois. Et pourtant, ces musiques d’époques différentes ne se ressemblent pas.

G.B : vous voulez dire que dans les grands vins blancs secs il y a des sonorités communes.

D.D : c’est exactement ça. D’ailleurs, mes clients bourguignons apprécient le blanc de Floridène, bien que son goût soit différent de celui de leurs vins ; sans doute parce qu’ils y retrouvent la même quête de finesse.

G.B : ce qui ne signifie pas que vous faites fi du terroir des Graves.

D.D : du tout ; ce serait absurde. Et puis, l’assemblage sémillon-sauvignon offre beaucoup de possibilités pour exprimer toute la personnalité du terroir de Floridène.

La deuxième partie de la conversation se fera à table. Nous continuerons à déguster la bouteille de Floridène 2007 sur l’entrée et Monsieur Dubourdieu présentera pour la suite une bouteille de vin rouge du Château Reynon 2005.

G.B : nous n’allons pas cacher que vous fûtes, en 1991/1992, un de mes enseignants dans le cadre du Diplôme Universitaire d’Aptitude à la Dégustation qui se faisait encore dans ce qui était appelé l’institut d’œnologie. Je dois vous avouer que j’aimerais que nos conversations soient aussi une révision de mon DUAD (rires communs).

D.D : une actualisation plutôt.

G.B : oui, ce sera mieux qu’une simple révision ! Outre deux épreuves écrites pour obtenir le diplôme, il y avait également une épreuve orale et le hasard a voulu que ce soit vous qui m’interrogiez. La question portait sur le débourbage…

D.D : bigre !

G.B : et vous m’aviez mis quatorze sur vingt : moyen.

D.D : ah, c’était pas mal… Quatorze… J’étais assez sévère, c’était une bonne note. Le débourbage, c’est-à-dire la clarification des moûts après le pressurage, est une opération très importante de la vinification des vins blancs secs. Je l’ai rationalisée en contrôlant la turbidité du moût avec un appareil très simple, le néphé lomètre, du grec néphos qui signifie le nuage. Il permet de mesurer l’opacité ou l’épaisseur de ce nuage de bourbes qui reste dans le moût clarifié. La turbidité optimum doit se situer dans une fourchette. La fermentation d’un moût trop clair est languissante et peut même s’interrompre en laissant des sucres résiduels. C’est la porte ouverte à beaucoup de soucis, en particulier l’oxydation et éventuellement, plus tard, un vieillissement prématuré. En revanche, si le moût est trop trouble, le vin sera plus grossier, végétal, plus coloré, tannique, marqué par des défauts de réduction. J’ai certainement été le premier à proposer une fourchette de turbidité optimale pour chaque cépage. Ainsi le chardonnay de la Côte d’Or peut être moins débourbé que le sémillon ou le sauvignon non seulement chez nous mais dans le reste du monde. Pour fixer les idées, quand on fermente un moût de sémillon à 200 unités de trouble, on peut monter jusqu’à 400-500 avec du chardonnay et obtenir des résultats plus intéressants en terme de typicité et d’aptitude au vieillissement. A Chablis, où ce cépage mûrit différemment, il ne faut pas dépasser 300.

G.B : vous commencez fort pour ma mise à niveau !

D.D : c’est très pratique, au contraire. Je ne savais pas cela quand vous suiviez mes cours ; le conseil m’a permis de relativiser les préconisations œnologiques. Quand je suis en Bourgogne ou dans les Côtes du Rhône, je ne “fais” pas du bordeaux. Je dois être un “caméléon” qui s’adapte au terroir pour trouver les clés qui ouvriront la chambre des merveilles, ce goût local inimitable, le modèle du genre et non la copie. C’est aussi pour cette raison que je travaille dans les grandes appellations classiques d’Europe. J’ai cependant fait une exception cette année en Nouvelle Zélande, avec le cépage sauvignon qui offre là un vin tout à fait unique, avec un goût totalement distinct du reste de la planète. Il y a vraisemblablement d’autres endroits au monde où l’on peut trouver des conditions générant des types nouveaux, mais, jusqu’à présent, les vignobles de l’hémisphère Sud se sont orientés vers une viticulture industrielle facile, dont les vins sont bons mais peu distincts les uns des autres.

G.B : au lieu de vous lancer dans une carrière universitaire puis de parcourir le monde, vous auriez pu vous contenter de gérer les propriétés familiales.

D.D : non, car mon père était encore très jeune et souhaitait continuer à piloter Doisy-Daëne. Quant à Reynon, où tout était à faire, nous en aurions difficilement vécu. Je devais donc avoir un métier. Après mon bac math à dix-sept ans, j’aurais pu aussi choisir d’autres voies que l’agronomie. J’étais moyen en maths et physique ; plutôt bon en chimie et j’aimais la biologie. J’étais cavalier et je voulais vivre à la campagne. J’aurais pu être vétérinaire si j’avais habité une région d’élevage ; il m’aurait plu d’être éleveur de pur-sang en Normandie. Il y a des similitudes esthétiques entre les grands vins et les chevaux de race, dans la recherche du modèle parfait, de l’équilibre et de la puissance. La belle équitation ne repose-t-elle pas sur la finesse et la légèreté ? J’ai également été tenté par la médecine. Peut-être aurais-je fait un bon médecin ; les gens se confient volontiers à moi. Finalement, je suis rentré en prépa “agro” qui s’appelait alors biomath-sup. Pourtant la reprise de Doisy ne se posait absolument pas puisque mon père n’avait pas cinquante ans.

G.B : même inconsciemment ?

D.D : en tout cas, je me sentais libre, j’avais la possibilité de faire autre chose que de la viticulture pendant au moins vingt-cinq ans. Et d’ailleurs, dans une certaine mesure, c’est ce qui s’est passé puisque je n’ai succédé à mon père qu’à l’âge de cinquante-deux ans, en ayant terminé mes études à vingt-quatre.

G.B : est-ce à Bordeaux que vous avez fait agro ?

D.D : non, après la prépa, j’ai intégré l’école de Montpellier où j’ai passé trois ans. Mais en même temps, je me suis inscrit à la faculté de sciences économiques et j’ai obtenu une licence.

G.B : solides études.

D.D : j’étais surtout travailleur. J’ai voulu poursuivre en sciences économiques et c’est à Bordeaux que j’ai obtenu la maîtrise. Il a fallu ensuite que j’effectue mon service militaire et, au retour, je ne savais pas si j’allais m’orienter vers l’économie ou l’œnologie car j’ai oublié de vous dire qu’à l’agro, j’avais quand même fait une spécialité “viticulture/œnologie”. J’étais donc ingénieur agronome et œnologue.

G.B : que gardez-vous de ce séjour montpelliérain ?

D.D : j’ai adoré Montpellier, son ambiance méditerranéenne, le bleu du ciel en hiver, la proximité de la mer, les petits villages dans la garrigue de l’arrière-pays. Après les années grises de la prépa à Bordeaux, je savourais ces années bleues.

G.B : loin des parents.

D.D : effectivement, mais j’avais assez peu vécu avec eux auparavant puisque j’étais interne à Grand Lebrun, dès le collège, à l’âge de dix ans. Mais Montpellier reste la ville de mes vingt ans. En 1970, c’était une belle ville, avec un centre historique très préservé et une campagne intacte toute proche ; des jardins du Peyrou, on pouvait voir les vignes et les oliviers, comme à Orvieto aujourd’hui encore. Hélas, je ne peux revivre ces souvenirs en revenant à Montpellier qui fut tellement enlaidie, dans les années 90, autant que Bordeaux embellie.

Au retour de mon service militaire, j’ai présenté ma candidature à un poste de directeur-adjoint du Château Latour mais je n’ai pas été pris ; cet échec a déterminé le reste de ma carrière.

G.B : quelles étaient alors vos compétences réelles ?

D.D : je ne savais à peu près rien faire mais j’avais appris à beaucoup travailler ; c’est ça la formation d’ingénieur. On ne connaît rien sur un sujet précis mais on n’a pas peur d’y passer plusieurs nuits pour tout savoir et être capable d’agir. Ceci dit, j’avais quand même de solides bases de biologie et de chimie, d’agronomie et d’économie ; j’avais surtout reçu une excellente formation en viticulture, donnée par le remarquable professeur Jean Branas, que je respectais énormément. L’œnologie des grands vins, je l’ai apprise plus tard, à Bordeaux. J’étais donc capable de participer à la direction d’un grand cru mais ça ne s’est pas fait et ma carrière a pris une autre voie. J’envisageais alors de faire une thèse mais j’hésitais entre l’économie et l’œnologie. Le choix de l’œnologie tient à ma rencontre avec Pascal Ribéreau-Gayon. Il avait appris de mon père que je cherchais du travail ; il m’a fait venir à la fac pour un entretien et m’a proposé une thèse, financée par une société allemande, Seitz, sur les causes moléculaires des difficultés de filtration des vins. C’était assez bien payé – en tout cas mieux qu’un poste d’assistant à la fac – alors, je me suis dis : “Pourquoi pas ?”

G.B : c’est grâce à Pascal Ribéreau-Gayon que vous commencez votre carrière.

D.D : oui et c’est grâce à lui que je suis rentré à l’institut d’œnologie de l’université de Bordeaux 2 que je n’ai jamais quitté depuis. C’est aussi à ce moment-là, 1976, que je me suis marié et que les choses se compliquèrent brutalement. Juste après notre mariage, le père de Florence décède à cinquante-quatre ans et je me retrouve à vingt-sept ans avec deux challenges à relever : mener à bien une thèse et aider Florence à reprendre Reynon.

G.B : avait-elle des compétences pour s’occuper elle-même d’une propriété ?

D.D