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Le premier trait qui distingue la représentation animalière des représentations végétales ou humaines est son ancienneté et la précocité surprenante de son apparition. Le répertoire de l'art préhistorique est en effet tout entier constitué d'animaux.
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Seitenzahl: 51
Veröffentlichungsjahr: 2016
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ISBN : 9782341002950
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Le premier trait qui distingue la représentation animalière des représentations végétales ou humaines est son ancienneté et la précocité surprenante de son apparition. Le répertoire de l’art préhistorique est en effet tout entier constitué d’animaux. Mais le thème apparaît dans le vocabulaire décoratif de tous les arts. Il convient de distinguer « l’art animalier » représenté dans presque toutes les écoles, et le « bestiaire » proprement dit, terme par quoi s’exprime l’idée d’un groupe structuré de thèmes animaux, à valeur significative autonome : ni inventaire catalogué des espèces, ni simple répertoire d’éléments dispersé au fil des œuvres. L’art animalier au sens large peut être réaliste, de même que l’art du « bestiaire ». Mais, comme l’a souligné Jurgis Baltrušaitis, la présence du fantastique signale à coup sûr la cohérence d’un réseau de relations significatives qui préside à la formation du « bestiaire ».
En littérature, les bestiaires sont des ouvrages où sont catalogués des animaux, réels ou imaginaires, dont les propriétés, généralement merveilleuses, sont présentées comme symboles moraux ou religieux. Ainsi, dans le Physiologus, au XIIe siècle, les bestiaires, rédigés en latin ou en français, constituent des documents précieux pour l’étude de la mentalité médiévale. Ils apportent un commentaire explicite peint ou sculpté. Ils nous donnent un exemple patent des procédés littéraires qui tendent à l’allégorie. Mais, surtout ils nous montrent comment les hommes, prisonniers de leurs mythes, peuvent préférer une image poétique du monde à l’observation objective de la nature.
L’aire de diffusion de l’art préhistorique est vaste et connaît peu de variations. Citons, en Europe, les sculptures pariétales des Eyzies, les peintures des grottes de Lascaux, des Combarelles, d’Altamira, les bisons d’argile du Tuc d’Audubert ; en Afrique, les fresques du Hoggar et du Fezzan, de Nubie, de Rhodésie et du Transvaal. Tous ces lieux offrent l’énigme d’un art absolument originel et parfait, vestiges plastiquement admirables d’une toute première création artistique dont les intentions subjectives nous échappent. Ni simple décor de la vie de tous les jours – d’accès difficile, les cavernes où se trouvent les peintures, ne servaient point à l’habitation – ni mémorial funéraire pour la vie de l’au-delà – elles n’étaient pas non plus utilisées pour l’inhumation – cet art a été le plus souvent assimilé par les historiens à une sorte de rituel magique permanent, ensemble de cérémonies propitiatoires une fois pour toutes composées, fixées et efficaces, destinées à permettre la poursuite de l’activité essentielle à la survie de l’homme : la chasse. Par le truchement du pouvoir mimétique de l’image, l’animal serait invité, voire aidé, à se reproduire (représentations de femelles de bisons gravides), ou incité à se laisser capturer. Il n’est pas question, en effet, à ces époques lointaines, d’élevage ou de domestication. La chasse apparaîtrait comme l’unique et brutale relation de l’homme à l’animal si l’art n’y venait ajouter sa secrète médiation dans le silence et l’obscurité des grottes.
Paléontologues et historiens d’art se sont plu en général à souligner la sûreté sans retouches des contours, le réalisme et l’exactitude du trait, la justesse des représentations anatomiques et de la saisie des attitudes et du mouvement. L’animal est peint le plus souvent dans sa course, de profil – seule la tête des fauves est représentée de face – sans être inséré dans un environnement naturel ou technique, à l’exception parfois des flèches, dont l’efficacité est garantie par la qualité envoûtante de l’œuvre ; il est posé dans son individualité. L’appréciation esthétique portée sur ces premières manifestations du talent des hommes reflète, par-delà la rigueur et l’impartialité des chercheurs, la nostalgie d’une intimité chaleureuse, d’une fusion originaire et vitale entre l’homme et l’animal – nostalgie analogue à celle qui préside à la genèse des mythes de l’âge d’or. L’œuvre d’art, par la connaissance et la compréhension de l’animal qu’elle implique, apparaît comme l’hommage admiratif et le gage de la réconciliation par-delà le meurtre. Exorciser la peur de la vengeance des animaux, telle est peut-être la dernière vocation de l’art animalier, par où nous sommes introduits à la dimension proprement religieuse – et non plus magique – telle qu’à pu la décrire Freud, d’une activité symbolique qui prend en charge l’au-delà des enjeux de vie et de mort. Que le dogme s’empare de la pratique, et l’animal divinisé sera le destinataire d’un discours de repentir, de reconnaissance et de vénération ; immortalisée en son essence, la mort d’un représentant de l’espèce ne l’atteint plus ; il devient soit la divinité bienveillante et nourricière qui consent à se laisser immoler, soit le noble et courageux adversaire, vaincu en un combat dont les ruses ne sauraient altérer la fondamentale loyauté, ou parfois le coupable qui transgresse quelque pacte conclu avec l’homme et qui en reçoit un légitime châtiment. Il n’est pas sans intérêt d’opposer à l’illusion archaïque des coïncidences heureuses le récit déguisé de la peur de l’homme : dangers réels que comporte une chasse, ou inquiétude ressentie devant sa propre maîtrise dans l’art de tuer, devant la vengeance possible de l’animal dans l’au-delà. Point de « revenant » animal, mais le sort de l’animal subi à son tour par l’homme ; l’on tient probablement là l’une des sources de la doctrine de la