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Dutilleux et Albator VI, cavaliers d’exception déjà sélectionnés pour les prochains Jeux olympiques, participent à un concours international de renom à Saumur. Mais l’inconcevable survient : à l’issue de sa prestation magistrale, alors qu’il s’incline avec grâce devant le jury, Dutilleux s’effondre soudainement. La consternation laisse place à la stupeur : Dutilleux est sans vie. Paul Leroy, capitaine de gendarmerie et ami du défunt, accourt sur les lieux. Son regard acéré et son expérience ne tardent pas à déceler l’anomalie : cette disparition n’a rien de naturel. Une enquête ardue s’engage alors, plongeant dans les méandres d’un univers élitiste, régi par le secret et l’ambiguïté. Chaque vérité dévoilée semble être l’écrin d’un mystère plus insondable encore. Qui aurait intérêt à briser ce duo étincelant et prometteur ? Et, surtout, dans quel but ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Peintre et ancien cavalier,
Alexis Chartraire manie la plume avec autant d’adresse que le pinceau, cultivant un style où l’humour côtoie une subtile profondeur. Par ailleurs, il est auteur de plusieurs ouvrages dont "Peinture mortelle".
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Seitenzahl: 101
Veröffentlichungsjahr: 2025
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Alexis Chartraire
Carrière mortelle
Roman
© Lys Bleu Éditions – Alexis Chartraire
ISBN : 979-10-422-5647-0
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
À mon épouse Geneviève,
Sans qui je serais mort de faim.
À Christian et à Pierre.
Dans la carrière d’Honneur du Cadre Noir à Saumur, le public retenait son souffle. Grégoire Dutilleux était sur Albator VI, un entier à la robe bai brun foncé, presque noire. L’enjeu était important : les Jeux olympiques de Paris dans quelques mois. Grégoire et Albator étaient dans le peloton de tête des présélectionnés pour représenter la France dans cette discipline équestre, le dressage. Dans cet art, il faut associer la puissance et la souplesse, deux valeurs contraires. Les chevaux reproducteurs sont délicats à monter, car ils sont naturellement agressifs et dominants. Mais ils sont plus beaux et plus musclés que leurs congénères castrés, les hongres et aussi les femelles. Être sur de telles montures demande aux cavaliers d’avoir de l’expérience et un moral d’acier. Il ne peut y avoir qu’un chef. Cette drôle de bête, à six jambes et deux têtes, est un cheval à cerveau humain.
Albator en imposait. Son musc, cette odeur particulière aux étalons, envahissait l’atmosphère. C’est assez incommodant pour nous, alors que pour les juments, c’est un parfum de rêve. Les hennissements de ces dames, venant des écuries toutes proches, rompaient le silence monacal exigé par le dressage. Les sabots d’Albator frappaient le sable de la carrière. Grégoire se préparait pour l’étape la plus impressionnante : le piaffer. C’est l’exercice le plus difficile pour un cheval, seuls certains y arrivent, pendant que les autres lèvent les pieds en cadence, sans élégance. Albator était de la race des seigneurs, il piaffait avec aisance, sans effort apparent, sans gémir. Ici, on note tout, jusqu’au salut du cavalier à la fin de l’épreuve, alors que le cheval reste immobile. À la fin de la prestation, la pression est grande et il n’a qu’une envie, celle de rentrer au paddock. Les chevaux sont conscients des enjeux et ils travaillent en équipe. Les cavaliers doivent agir en douceur et avec discrétion. Le dressage est un sport de gentlemen et le règlement ne plaisante pas avec la bienséance.
Albator s’était arrêté dans un nuage de poussière. On entendait son souffle fort. Il transpirait, alors que son cavalier, pourtant habillé d’un frac, ne semblait pas souffrir de la chaleur ni des conséquences de l’effort qu’il venait de fournir. Monter un cheval d’un mètre quatre-vingt-huit au garrot et de près de huit cents kilos est éprouvant.
Mais Grégoire était pâle. Il leva son chapeau, le président fit de même. Il resta un moment, figé.
— Qu’est-ce qu’il fout ? demanda le président.
S’adressant au cavalier via le micro de service, il le somma de sortir, c’était un ultime avertissement avant une mauvaise note, du jamais vu à ce niveau de compétition !
Grégoire avait les yeux dans le vide. Il commença à glisser le long du cheval qui s’écarta. Il faisait un malaise. Les secouristes se précipitèrent sur lui, tandis qu’une jeune femme qui était restée à la porte accourut pour attraper les rênes. Les rumeurs montaient des tribunes remplies. Grégoire allait-il perdre la sélection aux Jeux olympiques pour si peu ? Un médecin présent dans le public examinait le cavalier, toujours inconscient. Les secours avaient été prévenus. Il convulsait. La panique se lisait sur les visages. Le président du jury, qui s’était approché, cherchait du regard des informations réconfortantes. Le médecin, qui avait ordonné de cesser les massages cardiaques, leva les yeux en direction du président, il n’y avait aucun doute.
Il l’avait dit suffisamment fort pour que tous l’entendent. Une femme cria. Le SAMU arrivait.
Un attroupement s’était formé. Les secouristes tentaient d’écarter les curieux. Un spectateur se penchait sur la victime.
À genoux, il observait le visage de Grégoire. Les cavaliers et les chevaux subissent de nombreux contrôles de santé. Il semblait peu probable que Grégoire, son ami, ait fait un malaise. Le capitaine remarqua la couleur bleutée des lèvres. Suspectant un empoisonnement, il sentit son haleine. Se relevant d’un bon, il saisit son téléphone.
Le suicide était exclu. Ces cavaliers ont un mental d’acier. Un dépressif ne pourrait pas monter sur un entier.
Les badauds l’empêchaient de l’apercevoir. Une femme lui répondit :
Albator, qui valait au moins un million d’euros, ne devait pas disparaître. Il connaissait Élodie, la nièce de Grégoire, de vue. Personne ne risquait d’approcher son protégé.
Le lieutenant Lenoir, l’adjointe de Leroy qui venait d’arriver, se frayait un passage jusqu’à la victime. Elle donnait des ordres pour faire repousser les curieux de la scène de crime.
Le capitaine avait cédé la place à la scientifique. Debout, il regardait autour de lui. Le criminel aurait pu être là pour savourer son acte.
Catherine Lenoir, brune, était divorcée. Depuis qu’elle avait été promue lieutenant, elle passait la plupart de son temps à la brigade. Leroy et elle avaient une vie de couple professionnelle.
L’enquête allait être compliquée, les cavaliers n’étant pas d’un naturel causant. Le Cadre Noir se vidait peu à peu. Tous ceux qui n’avaient pas de raison de rester étaient invités à partir. Les tribunes étaient désertes. Les fourmis bleues s’activaient de toute part. Devant le box d’Albator, les affaires de Grégoire étaient posées : sa selle et son filet allaient se retrouver sur l’autel du souvenir. Leroy, revenu dans la carrière d’honneur, contemplait le sable blanc.
Lenoir s’étonna de cette « belle fin », même s’ils étaient habitués à côtoyer la mort. Le capitaine reprit ses esprits et son enquête. La fraîcheur de cette fin de journée d’automne lui glaçait le sang.
Il aperçut le colonel Lapointe, le commandant du Cadre Noir. Président du jury, il avait assisté en direct au décès de son ami Grégoire. Cintré dans son uniforme noir, il se tenait droit. En bon militaire, il attendait les ordres. Leroy était étonné : il était impeccable, du képi aux bottes, tout était propre. Il avait l’impression que la poussière et la saleté n’avaient aucune prise sur lui.
Le bureau donnait sur la carrière d’Honneur. De là, il pouvait voir tout ce qui se passait. Tout était parfaitement rangé, pas un grain de sable n’aurait osé se poser sur les meubles.
Pour la première fois dans l’histoire, et sous son commandement, le concours international allait être reporté. Le colonel Lapointe n’était pas homme à aimer les surprises. Il était sombre. Il avait le regard lointain, en direction de la carrière.
Le capitaine prit la direction des paddocks. Ce quinquagénaire avait l’air ordinaire. Une enquête sur un homicide ne s’effectue pas devant un ordinateur, ou en observant des preuves avec un microscope. Ce n’est pas une science exacte. Les humains sont suffisamment imprévisibles pour échapper à toute logique. Leroy était de la vieille école, il se fiait à son instinct. Deux femmes parlaient sans avoir remarqué sa présence.
En le voyant, elles s’étaient tues. La première, une blonde, la cinquantaine, était visiblement une cavalière. L’autre devait être sa fille. Elle avait la trentaine et les traits de celle qui a été obligée de se lever à quatre heures du matin pour nourrir les chevaux. Dans ce milieu, les femmes se maquillent avec le temps qui passe et se parfument au contact des équidés. Leur 4X4 indiquait le département de la Haute-Vienne.
La réponse était facile à deviner : oui. Les champions, dans ce monde, sont simples. Il n’y a pas de star chez les dresseurs, ce sont les chevaux qui sont les vedettes.
La deuxième femme avait parlé à son tour. Elle était plus sèche que sa fille. Grégoire Dutilleux avait eu un bel article de trois pages dans l’Éperon du mois de juillet.
Le capitaine avait pris congé. Ces remarques désobligeantes étaient sans importance. Les cavaliers sont connus pour leur mauvais caractère. C’est un métier ingrat. Ils sont dehors, quelle que soit la météo. C’est peu rentable et les chevaux sont fragiles.
Les derniers convois partaient.
Le colonel Lapointe avait pris la décision la plus difficile de sa carrière. Le concours était reporté au lendemain.
Les commentateurs allaient commenter.
La compagnie de Saumur en était encore, dans sa décoration, aux années quatre-vingt. Les bureaux en métal gris côtoyaient des armoires en tôle. Les murs, qui avaient été peints en blanc, étaient maintenant d’une couleur indéfinissable. Seuls quelques ordinateurs donnaient une impression de modernité.
Le capitaine Leroy, veuf, était célibataire. En dehors de sa passion pour l’équitation, lorsqu’il n’était pas sur le terrain pour ses investigations, il passait la plupart de son temps dans son bureau. Du coup, il l’avait personnalisé : des photos de chevaux et quelques objets lui rappelant son amour pour cet animal. Une caricature, dessinée par un jeune collègue, le représentait en selle et équipé d’un gyrophare.
Depuis la veille, il n’avait pas réussi à penser à autre chose. Le procureur lui avait confié l’enquête et avait exigé des résultats rapides. Il y avait un problème de proximité entre le capitaine et son ami Grégoire. Mais d’un autre côté, sa parfaite connaissance du milieu équestre le désignait d’office comme responsable des investigations. La presse nationale et les journaux télévisés avaient relayé l’affaire.