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Jeune retraité de la gendarmerie, Paul Leroy rêvait d’une existence paisible partagée entre ses chevaux et sa passion pour l’art. Mais son univers bascule lors d’une exposition au Grand Palais où, accompagné de sa compagne la capitaine Lenoir, il assiste à un meurtre d’une froideur saisissante. Malgré lui, Paul est plongé dans une traque effrénée, affrontant des criminels impitoyables aux ramifications internationales. Entre le poids de son passé, l’urgence d’une enquête aux multiples zones d’ombre et des ennemis prêts à tout, il devra mobiliser toute sa détermination pour stopper une menace grandissante. Quels secrets ce réseau tentaculaire dissimule-t-il, et jusqu’où cette quête le poussera-t-elle ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Peintre et ancien cavalier,
Alexis Chartraire manie la plume avec autant d’adresse que le pinceau, cultivant un style où l’humour côtoie une subtile profondeur. Avec "Peinture mortelle", son sixième roman, il prolonge l’univers captivant initié par "Arrêt, immobilité, salut" publié en 2021 aux éditions Le Lys Bleu.
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Seitenzahl: 146
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Alexis Chartraire
Peinture mortelle
Roman
© Lys Bleu Éditions – Alexis Chartraire
ISBN : 979-10-422-5327-1
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Paris, le Grand Palais
Cette année, le peintre Théodore Géricault est à l’honneur dans le cadre d’une grande exposition rétrospective regroupant les œuvres connues, ainsi que des pièces provenant de collections privées, en particulier d’Angleterre où il vécut une année en 1821.
Cette mise en bouche, que Paul avait lue quelques semaines plus tôt dans un magazine spécialisé, avait attisé sa curiosité. Jeune retraité de la gendarmerie, il avait été capitaine et commandant de la compagnie de Saumur, et il possédait une jument nommée Victoire avec laquelle il passait beaucoup de temps.
Amateur d’art, il n’ignorait rien de la vie de ce grand peintre et, en particulier, de sa passion pour les équidés. En effet, Géricault nous a légué de multiples représentations de cet animal fascinant, allant du plus majestueux au plus simple d’entre eux, un servant de ferme par exemple.
Paul, qui était accompagné de Catherine, de repos, avait laissé Victoire aux bons soins de Louise, une jeune cavalière expérimentée. Ils avaient pris le train pour Paris tôt ce jour-là en direction de la capitale.
Depuis « l’affaire Dutilleux1 », il avait préféré ranger son badge dans un tiroir et rendre son arme de service afin de se consacrer à ses deux passions, l’équitation et l’histoire de l’art. Il avait tourné la page et les meurtres n’étaient plus qu’un souvenir. Désormais, il ambitionnait une petite carrière en tant que cavalier de dressage, en amateur. Avant d’intégrer l’école de sous-officier, il peignait et il avait eu envie de postuler à l’école de Beaux-arts de Paris. Il n’avait pas oublié ses premiers amours et il avait lu tout ce qui avait été écrit sur Théodore Géricault. Il lui était impossible de manquer une telle occasion, les expositions consacrées à ce grand artiste sont rares.
Catherine, qui était plus jeune, étrennait ses nouveaux galons de capitaine. Elle avait été nommée commandant de compagnie en remplacement de Paul qui avait désormais le grade de commandant.
Pendant les dernières semaines de cette étonnante « affaire Dutilleux » dans laquelle la fille cachée de son ami Grégoire avait tué son père et son amant, ils avaient été obligés de vivre sous le même toit, car Paul était menacé. Et, ce qui devait arriver s’était produit… Paul et Catherine formaient depuis un couple. Comme Catherine était son second, ça faisait plus de dix ans qu’ils passaient plus de 18 heures par jour ensemble, la transition avait été facile. Paul était satisfait de la situation, tous les soirs, elle lui racontait des histoires de gendarme. Il avait l’impression d’y être encore. Mais dorénavant, il avait décidé de ne plus jamais côtoyer de cadavres de son vivant. Il faut savoir s’arrêter… avait-il dit.
Ce matin-là, Catherine étant de repos, ils étaient partis par le premier train en direction de la capitale. C’est sûr, ils allaient passer une agréable journée en amoureux, loin de toutes ces histoires de meurtre…
Après avoir fait un peu de tourisme et déjeuné sur le pouce, ils se présentèrent à 14 heures au guichet du Grand-Palais. Vu la fréquentation de ce genre d’exposition, ils avaient acheté leurs billets à l’avance. Ils ne patientèrent pas longtemps et, enfin, ils purent contempler les œuvres tant attendues.
Presque, car ce qui agaçait Paul au plus haut point, c’était cette foule qui s’agglutinait dans le seul but de faire des selfies ! Il pensait que se prendre en photo devant le Radeau de la Méduse n’avait pas de sens. S’ils avaient su que les survivants avaient cannibalisés leurs camarades, ils auraient moins fait les malins devant cette immense toile. Il n’en pouvait plus, un groupe de Chinois, une sorte de grappe humaine, traversaient l’exposition au pas de course, poursuivant un conférencier muni d’un drapeau dans le dos. Que pouvait donc faire, ces gens venus du bout du monde, de l’histoire de la marine royale au XIXe ? Et en plus, ils lui bouchaient la vue !
Ce genre de troupeau de touristes, très bruyant, ne s’arrêtait que le temps de prendre une photo, pour ne pas avoir à se souvenir. Demain, ils seront à Londres et après ils partiront à Anvers pour apercevoir les toiles de Van Gogh. Revenus chez eux, ils auront « fait » la France, l’Angleterre, la Hollande… en trois jours ! Il n’est pas question de parler avec les autochtones, de toute façon, la barrière de la langue est infranchissable. Au fond, ça ne doit pas les intéresser, sinon, ils voyageraient autrement. Plus tard dans la matinée, ils iraient visiter le Louvre en 15 minutes, et enfin ils iraient au restaurant, sans oublier la pause pipi et retour dans le bus en direction du tunnel sous la Manche. Il était difficile d’imaginer ce qu’ils retiendraient de cette journée folle. Pour Paul, c’était du fast-food culturel, rien d’autre. Dans ces conditions, l’art et la civilisation européenne doivent être bien indigestes !
Paul, qui était assis devant ce Radeau si contemporain, déplacé à l’occasion de cette exposition, attendait l’instant de tranquillité, avec une vue dégagée. Ce n’est pas tous les jours qu’on peut avoir un moment d’intimité artistique avec Géricault !
Cette journée de vacances en couple était un vrai bonheur. Il ne rêvait plus d’enquêtes, d’ailleurs, il passait la plupart de son temps libre au centre équestre pendant que Catherine avait pris la place du vizir, pardon du commandant de compagnie. Assis l’un à côté de l’autre, ils attendaient que la énième vague de touristes reparte vers la sortie.
Des Chinois s’étaient rassemblés autour de leur guide qui leur racontait quelque chose en mandarin, incompréhensibles pour nos deux Saumurois. Elle leur désigna la salle suivante du doigt et ils filèrent d’un homme comme s’il y avait un trésor à découvrir…
Le moment seul, devant cette peinture, était comme magique.
Un cri les ramena à la réalité.
Le corps d’une femme gisait à l’endroit où se trouvait le groupe quelques instants plus tôt…
Une heure après
Les surveillants avaient immédiatement donné l’alerte. Toutes les issues étaient fermées, dans le protocole de sécurité, seuls les secours et la police avaient le droit d’entrer. Toutes les personnes présentes s’étaient retrouvées confinées à l’endroit où elles se trouvaient au moment du drame.
Le médecin du SAMU qui venait d’arriver ne put que constater le décès de cette femme. Une curieuse blessure dans son abdomen ne laissait aucun doute sur l’origine criminelle de sa mort.
Les policiers remplacèrent les pompiers. Paul, toujours assis avec Catherine, ironisa :
Le capitaine Pierre Lavaud, du SRPJ, fut envoyé pour faire les premières constatations et récolter les dépositions. L’équipe scientifique était en action. Le tour de nos deux saumurois de raconter leur histoire arriva, et Catherine fut obligée de lui communiquer son grade et sa fonction. C’était un témoin de première importance. Mais, alors que la scène s’était déroulée sous ses yeux, elle n’avait rien vu…
Paul, qui n’avait jamais bien apprécié les policiers, dans une sorte de racisme primaire de vieux militaire, n’était pas très aimable.
Il montrait du doigt l’immense peinture.
Pierre Lavaud avait à sa disposition deux officiers de gendarmerie qui ne lui servaient à rien. Il les relâcha tout en leur faisant remarquer qu’ils faisaient partie des suspects…
Il était temps, le train pour Saumur partait dans trois quarts d’heure.
Un peu plus tard, la discussion revint tout naturellement sur ce qui s’était passé. Paul avait le sentiment que cette histoire n’était pas ordinaire. Son fameux flair ne l’avait pas quitté. Parfois, il regrettait d’avoir pris sa retraite. S’il l’avait désiré, il aurait pu prolonger sa carrière encore quelques années. Mais, « l’affaire Dutilleux » l’avait étrillé, il était raisonnable de s’arrêter. Désormais, la page était tournée, c’était bien mieux ainsi.
Catherine sentait bien que son « vieux » compagnon se serait bien occupé de ce meurtre. On ne quitte pas la gendarmerie après tant d’années comme ça…
Saumur, centre équestre du Haras de Villeneuve, le lendemain
Ses sensations s’amélioraient de jour en jour, alors que, curieusement, pendant des années, sous la gouverne de feu son ami Grégoire, son équitation n’avait pas progressé. Comme tous les jours depuis qu’il a pris sa retraite, il se trouvait au Haras de Villeneuve. Après la conclusion de la sordide affaire, Dutilleux, le nom de famille de Grégoire, sa nièce Élodie Lachaud avait hérité de tous ses biens.
C’est elle qui assurait les cours dorénavant. Et, il était bien obligé d’admettre que son sourire, sa voix douce et ses yeux bleus étaient bien plus agréables que le regard noir, la voix rauque du gros fumeur et le ton agacé que Grégoire lui faisait subir à chaque séance d’entraînement, sans parler des réprimandes. Il n’avait rien perdu au change. Pardonne-moi, mon ami… pensait-il de temps à autre.
En tout cas, les résultats étaient là. Paul et Victoire avaient bien progressé, et ils pouvaient maintenant prétendre à des compétitions pour amateurs sans avoir honte de dérouler des reprises maladroitement. Leurs notes, en concours, étaient désormais honorables. Pour la première fois, Paul pouvait même espérer une sélection pour le Championnat de France. Il avait fallu que la mort sépare ces deux amis de trente ans pour qu’il réalise qu’il aurait dû depuis longtemps changer de maître…
Il avait néanmoins repris ses habitudes et presque chaque jour, après le cours, il déjeunait en compagnie d’Élodie à la grande joie d’Amélie Pugeol, qui était toujours fidèle à son poste. C’était cette qualité, celle d’être une excellente cuisinière, qui lui avait permis de rester devant les fourneaux malgré les vexations du procès de sa fille, dans lequel elle avait comparu au titre de complicité passive. Le juge, après avoir entendu Paul, le capitaine Leroy comme témoin de moralité, avait été indulgent. En revanche, Hélène, sa fille, avait été placée dans une institution spécialisée d’où elle ne risquait pas de sortir. Il était prudent de ne pas la relâcher !
Catherine, lorsque c’était possible, les rejoignait. La « cantine » du haras de Villeneuve était réputée bien au-delà des frontières de la ville…
Ici, rien n’avait changé. Dans le bureau de Grégoire qu’Élodie occupait, la poussière était d’époque. Seul un portrait en pied, à côté de celle de son cheval fétiche, Albator IV, trônait au mur. Dans le grand manège en bois qui portait désormais son nom, les jeunes élèves apprenaient l’équitation sous le regard froid de l’ancien maître des lieux. Après de longues recherches dans les archives, sa nièce avait renoncé à trouver une photo sur laquelle il souriait… de toute évidence, ce n’était pas son genre !
Paul, qui, pourtant, par déformation professionnelle n’était pas croyant, se demandait ce que Grégoire pensait de tout ça. Pour ceux qui l’avaient connu, il était omniprésent.
Vers la fin du repas, Catherine qui n’avait pas rejoint Paul appela. Curieusement, elle était restée au bureau, alors qu’en apparence rien ne justifiait cette absence. Elle avait prétexté devoir finir du travail en avalant un mauvais sandwich industriel.
Paul était étonné, il savait que Catherine appréciait ses petits plats. Elle reprochait souvent à Amélie de vouloir lui faire prendre du poids avec ses desserts maison.
D’habitude, elle trouvait tout un tas de prétextes pour être là. Alors qu’elle n’était pas de ce milieu, elle s’était habituée aux odeurs, car, ici, ça sentait le cheval et le vieux cuir humide du sol au plafond… il n’y avait pas un coin sans une bride, une paire de bottes crottée ou une selle qui devait d’être graissée. Bref, on était dans un environnement de cavaliers et les visiteurs devaient s’accoutumer ou partir !
La cuisinière, très maniaque, était également une experte dans l’entretien des cuirs.
Paul, piqué par la curiosité, finit rapidement son déjeuner et alla rejoindre son ancienne unité dans laquelle, visiblement, il était attendu.
Saumur, compagnie de gendarmerie, l’après-midi
Paul était chez lui dans la compagnie de Saumur qu’il avait commandée pendant 20 ans. À son arrivée, il monta directement à l’étage, comme d’habitude, dans le service de recherches criminelles. Il lui sembla que ses anciens collègues étaient tendus. De toute évidence, il se passait quelque chose d’inhabituel. On lui proposa un café et, curieusement, il dut attendre dans la zone réservée au public, comme n’importe quel civil convoqué. Il se demandait pourquoi Catherine lui faisait tant de mystères ? La seule explication qu’on daigna lui communiquer était que le capitaine Lenoir était en réunion. Il trouvait tout ça bien étrange…
En observant les allées et venues de son ancienne équipe, il se dit : Ça sent l’officier supérieur à plein nez ici ! Son instinct de limier le trompait rarement.
Dix minutes après, un gendarme le conduisit dans le saint des saints, ce qui fut son bureau.
Et, sans surprise, il fut accueilli par le lieutenant-colonel Lennui, fraîchement nommé, qui étrennait ses nouveaux galons. Il arrivait de Nouméa. Il avait certainement dû entendre parler du profond différend entre Paul et son prédécesseur, le colonel Lapointe, qui ne rêvait que de Légion d’honneur et qui s’était retrouvé à la retraite d’office après que la direction de la gendarmerie avait eu un rapport fumant à son propos de la part de Paul.
Au grand étonnement de Catherine, qui était debout derrière son bureau, Paul salua celui qu’il considérait encore comme son supérieur hiérarchique, par habitude.
Paul constata, à la poignée de main, qu’il n’était pas sûr de lui. Catherine, qui observait cette scène avec amusement, les pria de s’asseoir. Paul se demandait ce que ce « colonel en uniforme » lui voulait. L’équipe de Saumur était habituée à évoluer en civil, ce qui est bien plus pratique pour se fondre dans le paysage. Les tenues militaires restaient l’apanage de ceux qui sont le « cul dans leur fauteuil », et qui commandent du fond de leur bureau sans prendre le moindre risque. Il était à la retraite depuis plus de six mois et, de fait, il faisait partie de la réserve active. Paul qui n’était pas fan des bureaucrates comme Lapointe, qui, après être sortis avec des notes médiocres des écoles d’officier, avaient toujours tenté de lui imposer leurs vues sur son métier, qu’il avait appris tout seul au contact des tueurs. Un océan séparait Paul de ses anciens supérieurs.
Les deux hommes se toisaient, tels deux étalons devant une jument en chaleur. Catherine rigolait au fond d’elle-même.
Lennui savait à qui il avait affaire ! il avait été briffé par son entourage dès sa prise de fonction. Paul veillait attentivement à ce que Catherine, devenue capitaine et commandant de la compagnie de Saumur, ne soit pas importunée… Le colonel marchait sur des œufs… Mais, tant que Catherine ne se plaignait pas de lui, tout irait bien. Privilège du grade, le bureau était un peu plus grand et mieux meublé que ceux des subalternes. Rien n’avait changé depuis le départ de Paul. Dans cette institution, les objets restent en place, immuablement.
Le colonel prit la parole. Il commença par flatter Paul au sujet des états de services, manœuvre prudente. Paul lui répondit, d’un ton sec, qu’il n’avait que faire de ces compliments, car il était à la retraite !
Paul avait le nez qui le démangeait. Il était comme l’allergique qui sent le printemps arriver aux premiers pollens. Les emmerdes n’étaient pas loin…
À peine avait-il pensé à ça qu’il apprit qu’il avait été nommé d’office à la tête de cette enquête et pire encore, qu’il allait devoir collaborer avec la police judiciaire de Paris. Sachant qu’en général ces deux institutions ne s’aiment pas, il allait au-devant de grandes difficultés.