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Bienvenue dans la collection Les Fiches de lecture d’UniversalisChoses vues est un volumineux ensemble de textes que Victor Hugo (1802-1885) avait laissés impubliés. Une fiche de lecture spécialement conçue pour le numérique, pour tout savoir sur Choses vues de Victor HugoChaque fiche de lecture présente une œuvre clé de la littérature ou de la pensée. Cette présentation est couplée avec un article de synthèse sur l’auteur de l’œuvre.A propos de l’Encyclopaedia Universalis : Reconnue mondialement pour la qualité et la fiabilité incomparable de ses publications, Encyclopaedia Universalis met la connaissance à la portée de tous. Écrite par plus de 7 200 auteurs spécialistes et riche de près de 30 000 médias (vidéos, photos, cartes, dessins…), l’Encyclopaedia Universalis est la plus fiable collection de référence disponible en français. Elle aborde tous les domaines du savoir.
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Seitenzahl: 73
Veröffentlichungsjahr: 2015
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Cet ouvrage a été réalisé par les services éditoriaux et techniques d’Encyclopædia Universalis
ISBN : 9782852296053
© Encyclopædia Universalis France, 2016
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Couverture : © Monticello/Shutterstock
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Ce volume présente des notices sur des œuvres clés de la littérature ou de la pensée autour d’un thème, ici Choses vues de Victor Hugo.
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Choses vues est un volumineux ensemble de textes que Victor Hugo (1802-1885) avait laissés impubliés. Réunis en volume, ils ont paru pour la première fois deux ans après sa mort, en 1887. Le titre a été donné par les éditeurs de ses écrits posthumes et repris par la tradition. Il s’avère d’ailleurs approximatif, dans la mesure où Hugo n’est pas toujours le témoin oculaire des faits qu’il relate et où les « choses » s’avèrent être aussi bien des événements que des bribes de conversation, des instantanés du quotidien, des descriptions ou des portraits.
Si Choses vues a connu dès sa parution un grand succès, le texte établi était loin d’être définitif. Il n’a cessé durant un siècle de s’enrichir de fragments demeurés inédits qui, très disparates, rendaient toujours plus délicate la mise au point d’une édition logique et ordonnée. Certains éditeurs ont donc tenté de donner une unité à ce qui n’en avait guère, en classant les textes en fonction de la chronologie des faits relatés et non de la rédaction et en les faisant artificiellement apparaître comme les pages d’un journal intime. D’autres se sont tenus aux indications des manuscrits, laissant côte à côte, sans les unifier, les grands blocs auxquels l’auteur avait donné un titre particulier : « Journal de ce que j’apprends chaque jour », « Faits contemporains » et « Le Temps présent ».
Par-delà leur diversité, ces écrits ont en commun d’avoir, pour la plupart, été rédigés entre 1844 et 1851, c’est-à-dire à une période où Hugo délaisse la création littéraire – hormis son grand projet Jean Tréjean, qui deviendra Les Misères puis Les Misérables –, pour se consacrer à la vie publique. Il est entré à l’Académie française en 1841 ; il est fait pair de France en 1845 ; il est élu député de Paris en 1849. Par ailleurs, en 1843, il a perdu sa fille Léopoldine, accidentellement noyée dans la Seine avec son mari. Le fait d’être devenu un observateur privilégié des lieux de pouvoir et de mondanité semble se conjuguer avec le deuil qui est le sien et le désir de ne pas parler de soi, pour donner aux textes qui composent Choses vues un statut particulier. Comme si Hugo, à la manière d’un greffier, s’effaçait de son texte pour faire de celui-ci un compte rendu impersonnel.
S’il n’écrit ni de lui-même, ni pour lui-même, et pas davantage pour ses contemporains, c’est qu’il s’adresse à la postérité. Léguer aux lecteurs du futur le carnet de bord d’un grand témoin du XIXe siècle et sauvegarder ainsi des informations dont il aura été l’un des rares détenteurs, tel est son objectif. Il note ainsi : « Personne n’a donné sur l’exécution de Louis XVI certains détails caractéristiques qu’il importe de recueillir. » À Royer-Collard lui disant : « Au reste, ces détails-là ne seront jamais recueillis et ne seront jamais de l’histoire », il répond : « Peut-être ».
Justement quels détails retenir ? Quels sont ceux auxquels la postérité accordera de l’importance ? Certes, il y a des événements dont on sait qu’ils seront d’emblée mémorables : le retour des cendres de l’Empereur, les derniers instants de Balzac ou de Chateaubriand, la révolution de 1848 ou l’élection de Louis-Napoléon Bonaparte. Là, Hugo fait œuvre de journaliste et relate les faits à l’instant même où ils entrent dans l’Histoire. Ainsi de la fuite de Louis-Philippe : « Chemin faisant, le roi ôta son faux toupet et se coiffa d’un bonnet de soie jusqu’aux yeux. Sa barbe n’était pas faite de la veille. Il n’avait pas dormi. Il était méconnaissable. Il se tourna vers la reine qui lui dit : „Vous avez cent ans“ ». Mais, pour le reste, comment établir des critères de sélection ? Hugo choisit précisément de ne pas choisir. Il engrange les données sans les hiérarchiser. Choses vues est un vaste pêle-mêle d’anecdotes, de bons mots, de confidences recueillies auprès des Grands : « le roi m’a dit... » ; « M. le duc d’Orléans me contait... ». S’y ajoutent des notations brutes : « Février 1848. Des canons et des caissons traversent les rues et se dirigent vers les Champs-Élysées » ; des scènes insolites : Louis-Philippe classant les ossements de ses ancêtres dans le caveau familial ou un domestique jetant aux égouts le cerveau de Talleyrand après l’embaumement de celui-ci ; des historiettes concernant les gens de théâtre ; enfin, une multitude de portraits où Hugo aiguise son trait à la manière d’un Saint-Simon. Ainsi de Thiers : « Spectacle étrange que ce petit homme essayant de passer sa petite main sur le mufle rugissant d’une révolution » ou de Blanqui : « C’était une sorte d’apparition lugubre dans laquelle semblaient s’être incarnées toutes les haines nées de toutes les misères ». Davantage que les menus faits-divers de l’Histoire, ce sont ainsi les petites mythologies de son époque que Hugo semble traquer, c’est-à-dire des données riches de sens, mais dont le sens, encore indécis, attend une définition ultérieure. Exemple frappant de ce travail de sémiologue : la scène où, flânant dans l’hémicycle vide de l’Assemblée, il entreprend de déchiffrer ce que les députés ont griffonné sur leurs pupitres.
Passant du recueil de notes au décryptage de signes, Choses vues perd alors de son objectivité. Si le ton reste impersonnel, l’auteur prend parti. Du règne finissant de Louis-Philippe, il souligne la décadence à travers le compte rendu des nombreux procès de l’époque, comme celui du duc de Praslin, accusé d’avoir sauvagement assassiné sa femme. Des députés de la gauche, il souligne la petitesse et met en exergue les perles de leurs discours. Il cite des extraits de ses propres allocutions, formule des sentences et des aphorismes, mentionne ses engagements et ses visites parlementaires, dans les prisons notamment. Bref, les fragments de Choses vues révèlent peu à peu le spectacle d’une conscience politique qui s’éveille. Lorsque celle-ci s’affirmera, que Hugo sera devenu un opposant politique en exil, ils n’auront plus de raison d’être. De plus en plus critiques et subjectifs, ils iront en se raréfiant pour laisser place aux œuvres littéraires que l’auteur remet en chantier.
Quoi qu’il en soit, Choses vues compose en ensemble sans équivalent dans la littérature française. À la fois chronique, journal de bord, dossier de travail, almanach et essai, il se situe, comme l’a dit Claude Duchet, quelque part entre le Journal des Goncourt et les Cahiers de Paul Valéry. Il reste une des créations les plus étonnantes de Hugo, essentielle pour pénétrer le cœur du XIXe siècle.
Philippe DULAC
Roman, critique, voyages, histoire dialoguent dans l’œuvre de Victor Hugo avec le lyrisme, l’épopée, le théâtre en un ensemble dont le « poète » a souvent proposé des articulations historiques, géographiques ou idéologiques plutôt qu’une périodisation. En règle générale, l’œuvre en prose a pour fonction de recueillir les éléments les plus secrets de l’œuvre poétique, de les composer en architectures prospectives ; plus neuve et plus audacieuse ainsi, elle peut servir de préface à toute la création hugolienne. Elle se distribue pourtant en trois masses : la mort de Léopoldine, en 1843, entre l’Académie (1841) et la Chambre des pairs (1845), marque une première rupture ; vers 1866-1868, c’est le tournant proprement historique et politique. Chacune de ces masses est caractérisée par la présence de romans ou quasi-romans (Han d’Islande, Bug-Jargal, Le Dernier Jour d’un condamné, Notre-Dame de Paris, Claude Gueux, pour la première ; Les Misérables,