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Le cinéaste Volker Schlöndorff a suggéré que l'histoire du cinéma allemand était faite d'une série de ruptures esthétiques mais aussi d'une grande continuité dans le domaine de l'industrie cinématographique.
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Seitenzahl: 47
Veröffentlichungsjahr: 2016
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ISBN : 9782341001861
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Le cinéaste Volker Schlöndorff a suggéré que l’histoire du cinéma allemand était faite d’une série de ruptures esthétiques mais aussi d’une grande continuité dans le domaine de l’industrie cinématographique. L’alternance entre les phases les plus inventives, comme celles des années 1918-1933, voire le renouveau des années 1970, et la médiocrité des périodes de reflux – propagande et conservatisme du cinéma nazi, banalité du cinéma commercial des années 1950 en République fédérale – entretient, à l’évidence, des rapports étroits avec les bouleversements politiques dont l’Allemagne fut le théâtre au XXe siècle. Si la relation entre le cinéma et le pouvoir est bien connue pour ce qui concerne le régime national-socialiste, il faut également souligner la relation qui existe entre les grands films muets et l’effervescence créative des années de crise de la République de Weimar, ou encore l’obstination de la censure dans un pays, la R.D.A., qui est la seule démocratie populaire à ne pas avoir connu de vrai dégel culturel. Malgré la Réunification, le cinéma allemand, trop contrôlé peut-être par l’industrie audiovisuelle, peine longtemps à s’affirmer jusqu’à ce que de nouveaux auteurs puissent se frayer un chemin à partir des années 2000.
Tout au long des années 1890, dans le monde entier, ingénieurs, photographes, bricoleurs cherchent à donner le mouvement aux images. Une compétition a lieu en Europe en vue de la projection sur écran d’« images animées ». Max Skladanowsky et son frère Emil parviennent en 1895 à tourner de brèves lebende Photographien, et constituent un programme présenté dans un cabaret berlinois dès le 1er novembre de la même année. Quelques semaines, donc, avant les fameuses projections Lumière à Paris, dont la date marque officiellement la naissance du cinéma, malgré une polémique aux relents nationalistes qui culminera à l’époque nazie. Le Bioskop des Skladanowsky, peu viable techniquement, devra céder devant le Cinématographe et ses imitateurs.
Les Skladanowsky (auxquels Wim Wenders consacrera un film en 1995) sont de modestes artisans, et l’influence de l’Allemagne sur la nouvelle activité reste réduite malgré les travaux d’Oskar Messter et de Guido Seeber, à Berlin. Le premier, détenteur de nombreux brevets, présente dès 1896 des programmes de dix à quinze minutes et parvient à créer des ateliers de fabrication de matériel. Il conçoit un studio perfectionné dans le quartier de Tempelhof, qui restera un centre de cinéma tout au long du XXe siècle. Seeber, qui a débuté dans la prise de vues d’actualité, y construit un autre studio, tandis que Munich s’équipe à son tour, de même que Francfort, où Paul Davidson crée le premier Konzern du cinéma allemand, associant la production à son réseau de salles. Établi à son tour à Berlin-Tempelhof en 1913, Davidson jouera un rôle important dans la nouvelle industrie, jusqu’à sa mort en 1927.
Malgré le retard pris sur la France, les États-Unis et même le Danemark, l’Allemagne commence à s’affirmer à partir de 1910, avec la croissance du parc de salles, synonyme d’extension du marché, l’avènement des grandes salles (Kinopaläste), et une production qui recourt au star-system : Seeber attire à Berlin la vedette danoise Asta Nielsen, « la Duse du Nord », et son metteur en scène attitré Urban Gad. Messter assure de son coté la popularité d’Henny Porten, dont le caractère ingénu est aux antipodes de l’image nimbée d’érotisme d’Asta Nielsen.
Particularité allemande, artistes et hommes de lettres se passionnent pour cet art nouveau qu’est le cinéma. Ainsi, l’année 1913 marque les débuts dans le septième art d’un écrivain populaire, Hanns Heinz Ewers, et d’un auteur théâtral consacré, Paul Lindau. Ewers est un des initiateurs du cinéma fantastique allemand avec L’Étudiant de Prague (Der Student von Prag, de Stellan Rye), tandis que Lindau écrit deux scénarios de film pour le réalisateur Max Mack et l’acteur Albert Bassermann, dont L’Autre (Der Andere). C’est le début d’un cinéma d’auteur : mais le mot « auteur » se rapporte alors exclusivement au scénariste. Les grands du théâtre se mobilisent. Max Reinhardt réalise avec sa troupe L’Île des bienheureux (Die Insel der Seligen 1913). Ses acteurs s’investissent dans le cinéma, notamment Paul Wegener (rendu célèbre par L’Étudiant de Prague et la première version du Golem, 1915), Albert Bassermann, Eduard von Winterstein, Emil Jannings. Certains, qui ne sont encore que de simples comparses, comme Ernst Lubitsch, seront appelés par la suite à accomplir une brillante carrière.
Affaiblie par la guerre, la production allemande fournit des programmes qui permettent au public d’oublier une situation difficile : drames et mélodrames avec Asta Nielsen et Henny Porten, comédies de Lubitsch, films de détective tournés par Joe May et par Harry Piel, adaptations parfois ambitieuses (de Schiller ou, déjà, de Wedekind), exploitation de la littérature fantastique savante (à travers des adaptations d’Hoffmann, Stevenson) et populaire (Homunculus, d’Otto Rippert, 1916).